PRESENTATION ET
ANALYSE DES
RESULTATS
4 -1 Présentation des résultats
Les données recueillies auprès des
différentes composantes de notre échantillon après
dépouillement et transcription sont présentées dans un
tableau (voir annexe) construit selon notre modèle de traitement des
données. Ce tableau met en relation les thèmes et les sous-
thèmes avec les hypothèses et la problématique de notre
recherche. Il présente en trois colonnes les thèmes, les
sous-thèmes et les unités de signification que sont les
données recueillies et présentant un intérêt
particulier pour le thème de recherche. Nous présentons ici une
synthèse de ce tableau.
Au sujet de la mission des différentes structures
enquêtées on peut retenir que la Direction Générale
de l'Administration Territoriale (DGAT) est chargée de coordonner, de
suivre et d'encadrer les activités des circonscriptions administratives,
de suivre la tutelle administrative des collectivités locales,
d'élaborer les textes relatifs au fonctionnement des circonscriptions
administratives et des collectivités locales etc. La Mission de
Décentralisation (MD) s'occupe entre autre de l'élaboration du
cadre législatif et réglementaire de la décentralisation
afin d'aboutir à un code administratif des collectivités locales,
de proposer au gouvernement les mesures d'accompagnement de la
décentralisation administrative et de réaliser toutes
études sectorielles nécessaires à la gestion efficiente
des affaires locales etc.
La mission de la Maison des Collectivités Locales
(MCL) est relative à l'accompagnement des communes dans tous les
domaines de compétences en matière de maîtrise d'ouvrage
public. Elle concerne également le développement des outils
d'aide à la décision, le renforcement des communes dans toutes
leurs compétences etc.
S'agissant du préfet il est, en vertu de la loi, le
représentant de l'Etat central qui à côté des
collectivités locales assure la régularité de l'exercice
du pouvoir. Il contrôle dans certains cas à priori et pour une
grande partie à posteriori ce qui est transféré. C'est le
préfet qui veille à ce que ce soit utilisé dans le sens
des textes de la République.
En ce qui concerne les communes, les enquêtes ont
révélé que les compétences existent. Mais, elles ne
sont pas accompagnées de ressources financières suffisantes.
Quant à L'Association Nationale des Communes du
Bénin (ANCB), elle a pour mission de contribuer au renforcer de la
décentralisation, d'accompagner les communes dans l'animation de la vie
locale et de favoriser la participation de tous les acteurs au
développement des communes. Aussi, cette association sert d'interface
entre les communes et l'Etat et entre les communes et les partenaires au
développement etc.
Au niveau des stratégies, les personnes
interviewées dans les structures étatiques nous ont confié
que l'Etat a fait l'option de transfert par bloc aménagé de
compétences. Les stratégies concernent les transferts
immédiats et les transferts différés. Selon ces personnes,
le transfert ne peut être effectif que si les problèmes des
ressources financières sont réglés et la richesse
créée au niveau local.
Dans les communes, les Maires, adjoints au Maire et
Secrétaires Généraux interrogés nous ont fait
savoir que les Collectivités Locales sont entrain de faire de l'ANCB une
forme de lobbying pour amener l'Etat à faire face à ces
responsabilités et apporter aux communes les ressources
nécessaires. Ces autorités ont fait remarquer que cette
association ne peut pas entrer en guerre contre le pouvoir central. Il faut
qu'il y ait des négociations. Elles ont reconnu que les
stratégies n'ont pas permis le transfert de compétences car elles
n'ont rien reçu dans la réalité.
Dans le même cadre, l'ANCB a opté pour un
partenariat fait de discussions avec l'Etat. Depuis 2004, elle a
rédigé un mémorandum qu'elle a soumis au gouvernement. Ce
qui a abouti à la mise en place du comité paritaire
Etat-Communes. Pour ces personnes ciblées, les stratégies n'ont
pas permis de transférer les compétences parce que jusque
là rien n'a encore abouti concrètement en dehors de quelques
domaines. Le gros lot des compétences à transférer demeure
exercé par les ministères sectoriels.
S'agissant des obstacles majeurs au transfert de
compétences, nous avons identifié au niveau des structures
étatiques que l'environnement communal n'est pas bien
préparé pour gérer certaines compétences. Quand on
prend par exemple le problème de l'énergie, l'eau, les
forêts communales. Les ressources humaines, matérielles et
financières ne suffisent pas. De plus, les projets et programmes qui
font l'objet de convention avec les partenaires au
développement ne sont pas transférés
parce qu'ils sont en cours d'exécution. En outre, le retard de la
déconcentration sur la décentralisation est perçu comme un
obstacle au transfert de compétences. En dehors de cela, il y a le fait
que les ministères sectoriels ne sont pas préparés
à la décentralisation. D'après eux, les obstacles ne sont
pas d'ordre juridique puisque les textes de lois sont clairs. Au niveau du
transfert des compétences il n'y a pas de problème. C'est au
niveau des ressources que se situe la question. Ainsi par exemple, Il y a la
taxe de développement local dont l'assiette n'est pas
déterminée. De plus, il est à retenir également les
pesanteurs politiques. Sur le plan administratif, on note la lenteur des cadres
de l'administration centrale.
Au niveau des communes, les obstacles identifiés ont
pour noms la préparation insuffisante à la
décentralisation, le manque de sensibilisation des populations. Par
ailleurs, il y a les questions d'intérêt et la non prise des
décrets d'application. Sur le plan politique, certaines communes sont
marginalisées à cause de leur appartenance politique. Les
autorités locales nous ont enfin confié que les ministères
ont du mal à se préparer au transfert parce qu'ils savent que si
le transfert des compétences est fait comme c'est exigé par la
loi ils n'auront plus les mêmes pouvoirs.
En ce qui concerne l'ANCB, les obstacles ne sont pas au
niveau du cadre juridique. C'est Peut être financier si on estime que
l'Etat n'a pas suffisamment de moyens à la hauteur des
compétences à transférer. Mais le grand problème
selon les personnes interrogées est le manque de volonté
politique.
Au niveau des solutions préconisées nous avons
identifié au niveau des structures étatiques qu'il faut
compléter le corpus juridique de la décentralisation, prendre les
décrets d'application ainsi que de la loi sur l'intercommunalité,
dynamiser le Comité National des Finances Locales (CONAFIL), former les
cadres des ministères sectoriels à la décentralisation,
accélérer les ressources financières vers les communes,
combattre la corruption, et renforcer la déconcentration.
Dans les communes parcourues, les personnes
interviewées préconisent comme solutions : le dialogue avec
l'Etat, une augmentation de la part du budget national réservée
aux communes, la volonté politique et surtout une bonne
négociation entre l'ANCB et le pouvoir central.
A l'ANCB, les solutions sont entre autres de continuer les
discussions avec l'Etat dans le cadre de ces transferts, rester en
collaboration avec le ministère de la décentralisation pour des
négociations annuelles sur l'élaboration du budget de l'Etat avec
son collègue des finances pour qu'il y ait l'inscription au budget
général de l'Etat des différents transferts de
ressources à opérer. Aussi, il faut que les
communes soient écoutées par l'Assemblée Nationale afin
que leurs observations sur le budget général de l'Etat soient
prises en compte. Ces personnes interrogées formulent aussi le voeu que
la constitution soit révisée car disent- elles au niveau de la
constitution du Ghana par exemple le pourcentage du budget qui va vers les
communes est déterminé : C'est entre 10 et 15%.
4-2 Analyse et interprétation des
résultats
L'objectif de cette recherche comme cela a été
défini, c'est de comprendre dans un premier temps les stratégies
que les acteurs locaux et étatiques ont développées en vue
de la résolution du problème de transfert de compétences,
ensuite d'identifier les obstacles majeurs au transfert et d'esquisser quelques
approches de solutions.
Les données recueillies sur le terrain amènent
à remarquer en amont que c'est l'actuel ministère en charge de la
décentralisation qui coordonne pour le compte de l'Etat béninois
la réforme de l'administration territoriale. Pour réussir cette
mission le ministère s'appuie sur d'autres organes comme la Direction
Générale de l'Administration Territoriale (DGAT), la Maison des
Collectivités locales (MCL), la Mission de Décentralisation (MD)
et les Préfectures situées à l'intérieur du pays.
En aval, il y a les communes qui pour faire mieux entendre leurs
préoccupations se sont organisées à travers l'Association
Nationale des Communes du Bénin (ANCB). Il nous faut donc partir
premièrement de leurs missions précises pour situer les
responsabilités et remonter à la source du problème.
Ainsi, cette partie se présente en trois axes prioritaires à
savoir :
· missions des structures impliquées dans la
décentralisation (compétences reçues pour le cas des
communes pris individuellement)
· les différentes stratégies
développées par chacun des acteurs ;
· les obstacles majeurs rencontrés et quelques
approches de solutions préconisées.
|
Mission des structures impliquées dans la
décentralisation
|
- Structures étatiques
D'après les données recueillies, il ressort que
la Direction Générale de l'Administration Territoriale outre ces
autres missions se charge, de l'élaboration des textes relatifs au
fonctionnement des circonscriptions administratives et des collectivités
locales. La Maison des Collectivités Locales s'occupe entre autre de
l'accompagnement des communes
dans leurs domaines de compétences. La Mission de
Décentralisation pour ce qui nous concerne, a en charge
l'élaboration du cadre juridique et réglementaire de la
décentralisation. Quant au Préfet, il est l'autorité de
tutelle dont la mission se résume à un contrôle de
légalité des actes pris par les élus locaux (Maires) et
à l'appui-conseil aux communes. Selon ces résultats les
structures étatiques que nous venons de citer ne sont pas responsables
du non transfert des compétences des ministères sectoriels. Leur
responsabilité peut se situer dans l'insuffisance des principaux outils
pouvant favoriser ce transfert. Elles sont des structures dont les tâches
principales se résument à l'appui technique à la
décentralisation dans tous les domaines. Il ne dispose pas de pouvoir
capable d'obliger les ministères sectoriels à amorcer le
transfert de compétences.
Cependant, posons-nous la question de savoir si ces structures
ont eu les ressources suffisantes pour mieux accomplir leurs missions.
Demandons-nous si l'approche de la coopération interministérielle
a été un succès. Selon nos investigations elles souffrent
d'un manque de ressources. Aussi les ministères sectoriels ne sont pas
le plus souvent présents lors des prises de décisions comme
prévu dans les textes régissant certaines de ces structures (cas
de la Mission de Décentralisation). Ce qui n'est pas de nature à
permettre le transfert des compétences des ministères sectoriels
car de la réussite de leur mission sortiront les outils qui serviront au
transfert de ce second volet des compétences de l'Etat aux communes.
- Les communes
En ce qui concerne les communes, les compétences
existent mais l'absence de ressources pour l'exercer est remarquable à
en croire les sujets enquêtés. Toutes les compétences sont
donc transférées par les textes de la décentralisation
dans la théorie. Dans les faits, seulement une partie de ces
compétences est transférée. Il s'agit des
compétences transférées lors des cérémonies
de passation de pouvoir entre les sous- préfectures ou les chefs de
circonscriptions urbaines et les maires. Mais, les communes exercent la
plénitude de leur pouvoir le plus souvent avec l'aide des partenaires au
développement dans le cadre de l'appui financier à la
décentralisation et la coopération
décentralisée.
- L'Association Nationale des Communes du Bénin
Outre ces missions générales, L'ANCB sert
d'interface entre les communes et l'Etat. De ce fait, il est à retenir
alors que dans la résolution du problème de transfert de
compétences, les communes ont pris l'option d'aller en rang serré
et non individuellement. L'ANCB est donc l'intermédiaire
privilégié de l'Etat.
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Les différentes stratégies
développées par les acteurs
- L'Etat
Les structures étatiques enquêtées n'ont
pas pour responsabilité le transfert des compétences. Elles ne
jouent qu'un rôle d'accompagnateur du processus de
décentralisation. Les informations recueillies présentent la
stratégie utilisée par l'Etat suivant une double approche : Les
transferts immédiats et les transferts différés dont
l'effectivité pose problème depuis 2003. Selon les personnes
interrogées, les communes n'ont pas encore la capacité suffisante
pour gérer certaines compétences.
Mais, nous nous posons la question de savoir si l'insuffisance
des ressources peut expliquer par exemple le non transfert de la construction
et de l'équipement des écoles maternelles et primaires pour les
communes ordinaires, secondaires et professionnelles en plus pour les communes
à statut particulier.
A travers cette stratégie, l'on peut comprendre que
l'Etat cherche à gagner du temps. Il exploite à son compte les
règles existantes. Sa stratégie sert plus ses
intérêts que ceux des communes parce qu'il dispose de plus de
marge de manoeuvre. Son jeu semble satisfaire aussi ses intérêts,
confirmant ainsi la théorie de Crozier et Friedberg selon laquelle
l'utilisation qui est faite des règles fait partie de l'ensemble des
stratégies que les différents acteurs développent pour
atteindre leurs finalités. Nous sommes dans un système de pouvoir
où l'acteur principal (l'Etat) essaye de structurer les processus
d'échanges plus ou moins durables en sa faveur en exploitant les
contraintes et opportunités de la situation pour imposer les termes de
l'échange favorable à ses intérêts. Comment
comprendre la non réalisation des préalables au niveau des
ministères sectoriels à savoir leur restructuration et la
révision des stratégies sectorielles pour une nouvelle
répartition des tâches entre les communes et l'Etat pour ne citer
que ceux-là. Le manque des ressources des collectivités locales
justifie t-il l'ajournement des compétences sectorielles ? A cette
question que l'on se pose, il est possible de répondre que même si
le manque de capacité est évident, la stratégie actuelle
de l'Etat ne pourra permettre le transfert que si un accent particulier est mis
sur les préalables.
- Communes
Les données recueillies auprès des communes du
Zou énoncent que les communes font de l'ANCB une sorte de lobbying pour
négocier et amener l'Etat à faire face à ses
responsabilités. Même si les autorités locales nous ont
confié que les stratégies développées
n'ont pas permis le transfert des compétences des
ministères sectoriels conformément à la loi, nos
investigations ont révélé que leurs stratégies ont
plutôt trait à la mobilisation des ressources extérieures
par le biais du partenariat avec la DANIDA ou avec des communes
étrangères. Cela se justifie amplement, car les communes par
rapport à l'Etat représentent des entités
particulières. Elles disposent de marge de manoeuvre très
réduite. Elles ne peuvent pas faire des grèves pour obliger
l'Etat puisque l'Etat n'est que l'ensemble des collectivités locales
réunies. La stratégie des communes est visiblement divergente de
celle de l'Etat. Pour mieux la comprendre, il faut faire recours à celle
développée par l'ANCB.
- L'Association Nationale des Communes du Bénin (ANCB)
Nos investigations au niveau de l'ANCB révèlent
qu'elle a fait l'option d'un partenariat fait de discussions avec l'Etat. Elle
a soumis un mémorandum au gouvernement. Ce qui a abouti à la mise
en place du comité paritaire Etat-Communes. Ce partenariat n'a pas
encore porté ses fruits puisqu'on nous a confié au siège
de l'association que le gros lot des domaines à transférer
demeure exercé par les ministères sectoriels. L'ANCB a-t-elle
fait vraiment sont travail ? Existe-t-il des obstacles au niveau des
stratégies de l'ANCB ?
D'après les informations tirées d'une
communication au premier congrès ordinaire de cette association faite
par M. Issa Démolé MOKO sur le thème : « La
problématique du transfert des compétences et des ressources aux
communes », la stratégie de l'ANCB n'a pas bien payé pour
plusieurs raisons. Les causes de cette situation réside dans la faible
capacité de l'ANCB à analyser la problématique du
transfert des compétences et des ressources, évaluer par
elle-même les besoins essentiels des communes en la matière et
à soutenir le débat y relatif avec l'Etat. En outre, l'ANCB a
fait montre d'une faible capacité de lobbying, voire d'un certain
attentisme inopérant.
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Les obstacles rencontrés par le transfert de
compétences
Les obstacles majeurs au transfert de compétences ont
été identifiés acteur par acteur et de façon
générale. Au niveau des acteurs étatiques on peut retenir
que l'environnement communal n'est pas propice pour l'exercice de certaines
compétences sectorielles telles que la fourniture et la distribution de
l'eau potable aux populations, la réalisation et la gestion de
réseaux d'éclairage public, la construction de lignes de
télécommunications locales etc.
En outre, il y a l'insuffisance de ressources humaines,
matérielles et financières, le non transfert des projets et
programmes au niveau des ministères, le retard de la
déconcentration sur la décentralisation, la non
préparation des ministères sectoriels, la non
détermination de l'assiette de la taxe de développement locale,
les pesanteurs politiques, la réticence des cadres de l'administration
centrale.
Ainsi, à travers ces obstacles identifiés il est
à comprendre que la capacité locale est inexistante pour
certaines compétences. A ce sujet, l'Etat doit faire confiance aux
élus locaux et appliquer la loi. Il peut également créer
des conditions qui renforcent la capacité locale comme le
développement de l'intercommunalité, la mise en place des
pôles de développement au niveau régional, l'encouragement
du partenariat commune-secteur privé etc.
L'insuffisance de ressources peut être
compréhensible, mais on peut le contourner à travers le transfert
des ressources des ministères au niveau des circonscriptions
administratives (les départements). Cela passe par le renforcement de la
déconcentration car l'un des principes de la décentralisation
béninoise c'est bien le couplage de la décentralisation avec la
déconcentration. Ce qui n'est pas impossible à l'heure actuelle.
Le non transfert des projets et programmes des ministères est bien la
preuve de la non préparation de ces derniers à la
décentralisation. La décentralisation béninoise doit
impérativement atteindre les ministères sectoriels.
De même, les pesanteurs politiques dénotent bien
de la situation politique du pays marquée par l'absence d'idéaux
devant orienter la gestion de la cité. Ce qui a pour conséquence
le manque de visibilité des jeux politiques puisqu' ils se
déroulent très souvent sur la base des ressources
financières plutôt que sur un rapprochement du point de vue de la
vision de développement du pays. On a du mal à classer les partis
politiques par rapport à l'idéal qu'ils proposent aux
populations. Cela occasionne le manque de solidarité politique. Or, la
décentralisation fait aussi ressortir des relations de pouvoirs. L'Etat
central qui transfère les compétences est incarné par des
hommes qui ont leurs sensibilités politiques peut-être
différentes de celles des autorités locales. Ces hommes ont aussi
des intérêts à défendre au niveau local. Dans ces
conditions, « qui va aider qui » au risque de perdre son pouvoir,
voire son influence. Cette situation exige alors une clarification des
positions. L'Etat est garant des intérêts nationaux tandis que les
communes veillent sur les intérêts locaux. Ces
intérêts ne sont pas antagonistes mais complémentaires.
Donc, il faut bien préciser les choses c'est- à- dire savoir qui
est qui, qui fait quoi et comment.
En outre, les cadres sont réticents au niveau des
administrations centrales pour leur intérêt justifié parce
qu'on a décentralisé, selon notre constat, sans clairement
définir leur devenir dans le nouveau système de
développement national mis en place. Toutefois, faisons remarquer que
les fonctionnaires ne sont pas responsables de ce qui se passe. Ils ne sont pas
les chefs des ministères. De même, ce ne sont pas les ministres
mais il s'agit de l'Etat.
Au niveau des acteurs locaux (communes, ANCB), les obstacles
rencontrés sont l'insuffisance de la préparation des communes
à la décentralisation, l'insuffisance de la
sensibilisation des populations, les questions
d'intérêt, la non prise de tous les décrets d'application,
la réticence des ministères sectoriels, le manque de
volonté politique. Hormis les obstacles qui sont déjà
identifiés par les structures étatiques, l'insuffisance de la
préparation des communes, la sensibilisation des populations
insuffisante et le manque de volonté politique nous semblent être
des obstacles primordiaux qu'il faille contourner très rapidement.
Analysons-les point par point.
ü Préparation insuffisante des communes et
sensibilisation insuffisante des populations à la
décentralisation : comment est-on venu à ce point ?
Le Bénin a mis plus de dix années à
préparer la réforme de l'Administration Territoriale. Selon nous,
la responsabilité est bien partagée par les deux acteurs
principaux de la réforme. Les élus locaux devraient mobiliser
leurs administrés par rapport à l'alternative de
développement qu'ils leur proposent, susciter et encourager leur
participation aux défis qui attendent la commune. Ce qui n'est pas
encore le cas.
Selon notre constat, l'intérêt de leur formation
politique prend le pas sur celui de leurs administrés. La remarque que
nous avons faite est que certaines autorités locales des communes
enquêtées n'ont pas l'adhésion importante de leur
communauté dans les projets de développement d'envergure locale.
On a tendance à croire que les vieilles habitudes de l'époque des
circonscriptions urbaines ou des sous-préfectures suivent toujours leurs
cours. On attend que tout descende du niveau central. Les citoyens n'aiment pas
se libérer de l'impôt comme cela se doit pour soutenir la Mairie
dans sa mission de développement local. Or, la réforme
décentralisatrice sonne le glas de l'Etat providence. Avec la
décentralisation, c'est un nouvel ordre politique qui gouverne
l'Etat.
Ainsi, l'Etat central partage donc les responsabilités
et les ressources avec les entités décentralisées. De
plus, il y a la gouvernance locale qui n'est pas en bon état. Ce sont
là autant de facteurs qui peuvent expliquer la situation des communes
depuis plus de quatre ans. Pour passer ces obstacles, l'engagement manifeste
des autorités locales est d'autant plus important qu'un grand
accompagnement des communes par l'Etat est nécessaire.
ü Le manque de volonté politique
Lorsqu'on identifie le manque de volonté politique de
la part de l'Etat comme un obstacle au transfert des compétences
sectorielles on est tenté de se demander si l'Etat voulait de la
décentralisation ou il a été contraint. Ce qui est certain
c'est que l'option de la réforme
de l'Administration Territoriale est une exigence
constitutionnelle vieille de plus de dix ans (Cf article 150 à 153 de la
constitution du 11 décembre 1990).
C'est l'Etat lui-même qui a organisé les Etats
généraux de l'Administration Territoriale en janvier 1993 et en
décembre 2002 les premières élections communales et
municipales de l'ère du renouveau démocratique. Et depuis
l'installation des communes en février- mars 2003, il ne cesse de les
accompagner à travers les subventions voire d'autres sources de
financement comme par exemple le Projet National de Développement
Conduit par les Communautés (PNDCC) et le Projet de Gestion Urbaine
Décentralisée (PGUD II) tous gérés aujourd'hui par
de nombreuses communes du Bénin. De plus avec l'accord de l'Etat
(à travers le Ministère des Affaires Etrangères) les
partenaires au développement appuient directement les communes. Avec
toutes ces preuves peut-on continuer à parler de manque de
volonté politique.
Selon nous, il serait difficile de répondre à
cette question par l'affirmative eu égard à plusieurs
considérations. Premièrement, la rédaction des avants
projets de loi s'était achevée en août 1993 au
séminaire de Lokossa alors que le vote des lois sur la
décentralisation n'était intervenu qu'en 1997 soit quatre ans
après. La promulgation de ces lois n'avait eu lieu qu'en 1999 deux ans
après leur vote par l'assemblée Nationale. Quand on observe tout
ces faits on remarque que l'Etat béninois n'a pas fait la
décentralisation de gaieté de coeur. Il serait contraint par
certains partenaires au développement. Selon les lois de
décentralisation, l'Etat transfère aux communes les
compétences et les ressources. La volonté politique signifie que
l'Etat n'a pas le choix dans le respect des dispositions des lois. Il doit
simplement appliquer la loi. Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
Dans les pays africains, les conceptions de l'Etat sont trop
centrales. Cela influe sur les relations entre l'Etat et les
collectivités locales. La création d'un ministère
entièrement dédié à la décentralisation peut
être perçue comme un signal fort de la volonté politique de
la part de l'Etat Béninois. Mais, La création du ministère
de la décentralisation en elle seule n'est pas suffisante pour amorcer
le transfert de compétences et des ressources aux communes. L'Etat
à l'heure actuelle doit tirer toutes les conclusions qu'impose la
situation des communes pour une bonne résolution du problème de
transfert des compétences des ministères sectoriels.
Face à ses obstacles les acteurs proposent comme
solutions :
- compléter le corpus juridique de la
décentralisation ;
- dynamiser le Comité National des Finances Locales
(CONAFIL) ;
- former les cadres des ministères sectoriels à la
décentralisation ;
- accélérer les ressources financières
vers les communes ;
- combattre la corruption ;
- renforcer la déconcentration ;
- dialoguer avec l'Etat ;
- revoir la part du Budget National réservé aux
communes (au moins 10 à 15%) ; - etc.
La mise en oeuvre de ces solutions proposées
nécessite l'engagement concerté de tous les acteurs de la
décentralisation au Bénin. Les solutions
préconisées par les acteurs sont réalistes pour notre
part.
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