les limites des voies d'exécution eu égard à la protection des données personnelles( Télécharger le fichier original )par Cécile BARRA Faculté de Droit et Science politique Aix Marseille III - Master II 2008 |
II La question de la réelle réglementationIl existe différentes dispositions et réglementations concernant la profession de détective et enquêteur privé. Encore faut-il que les dirigeants et employés de ces sociétés soient soumis à celles-ci et contrôlés comme tels par les autorités et institutions publiques, la CNIL par exemple. Un décret du Ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire réglementant en outre les activités privées de renseignements en date du 6 septembre 2005 a été pris en la matière32(*). Il a été modifié par le décret du 7 août 200733(*), Son chapitre premier concerne les dispositions communes relatives à la qualification professionnelle des dirigeants et à l'aptitude professionnelle des salariés des agences de recherches privées. En son article 1er, ce décret dispose que « les dirigeants et les salariés d'entreprises exerçant l'une des activités mentionnées à l'article 1er de la loi du 12 juillet 1983 susvisée justifient de leur aptitude professionnelle par la détention : soit d'une certification professionnelle, enregistrée au répertoire national des certifications professionnelles, se rapportant à l'activité exercée ; soit d'un certificat de qualification professionnelle élaboré par la branche professionnelle de l'activité concernée, agréé par arrêté du Ministre de l'intérieur ou, s'agissant des activités visant à assurer préventivement la sûreté des vols mentionnées à l'article L. 282-8 du code de l'aviation civile, par arrêté conjoint du Ministre de l'intérieur et du Ministre chargé des transports ; soit d'un titre reconnu par un Etat membre de l'Union européenne ou par un des Etats ayant pris part à l'accord sur l'Espace économique européen, se rapportant à l'activité exercée ». Les professionnels sont donc habilités et peuvent en fournir une preuve si besoin, c'est un point positif, il faut avoir des qualifications particulières et donc n'importe qui ne peut pas ouvrir ce genre d'agences. En son article 2, le décret précise que « la certification professionnelle et le certificat de qualification professionnelle attestent notamment des connaissances et savoir faire relatifs (...) aux dispositions du code pénal relatives (...) à l'atteinte au secret des correspondances et aux systèmes de traitement automatisé de données, à l'usurpation de titres ou fonctions, aux faux et usage de faux, à l'appropriation frauduleuse (...) » Le noeud du problème est le fait qu'aucune disposition ou stipulation ne précise réellement quelles sont les informations pouvant être obtenues. Il est fait état de la notion de respect de la vie privée, des techniques d'enquête, d'investigation...mais rien sur la nature des renseignements pouvant être obtenus et sur la motivation des enquêtes. La loi du 12 juillet 1983 réglementant et autorisant les activités privées de sécurité34(*) dans son article 20 issu de la loi du 18 mars 200335(*) « Est soumise aux dispositions du présent titre la profession libérale qui consiste, pour une personne, à recueillir (...) des informations ou renseignements destinés à des tiers, en vue de la défense de leurs intérêts ». Ces sociétés ont une autorisation d'exercer mais la nature des renseignements qu'elles peuvent obtenir n'est pas mentionnée. En revanche, ce manque de réglementation ne peut en aucun cas être considéré comme un vide juridique, bien au contraire car la nature des renseignements litigieux est connue, ils sont et restent d'ordre privé et sont soumis par conséquent aux dispositions de la loi informatique et libertés de 1978. Les sociétés concernées violent donc de façon caractérisée le droit au respect de la vie privée tel qu'énoncé par la Convention européenne des droits de l'homme. Cependant un problème demeure. Ces sociétés de recherche sont visibles et connues de tous, leurs procédés ne font aucun doute, pourtant elles ne semblent avoir été sanctionnées que par la CNIL, malgré la violation de dispositions législatives et réglementaires autres que la loi Informatique et libertés de 1978. Par ailleurs, seulement un petit nombre de sociétés a été contrôlé. Les autres continuent à exercer leur activité et à proposer l'obtention d'informations concernant le domaine privé en toute impunité. En effet, la CNIL au sein de sa formation restreinte, lors de sa séance du 27 avril 2006, a prononcé plusieurs mises en demeure à la suite de contrôles. Sur la base de ces observations, la CNIL a mis les sociétés contrôlées en demeure de « procéder à la déclaration des traitements de gestion des enquêtes , d'apporter à la CNIL toute garantie permettant de considérer que, pour l'avenir, les modalités mises en oeuvre pour la recherche des débiteurs seront conformes aux dispositions de l'article 6-1 de la loi du 9 janvier 1978 modifiée le 6 août 2004 et que, notamment il ne sera plus procédé à l'usurpation de titres ou de fonctions ainsi qu'à appels téléphoniques à des personnes soumises au secret professionnel afin d'obtenir des informations à caractère confidentiel ; de prendre toutes mesures nécessaires pour que, dans l'ensemble des traitements, les mentions manifestement contraires à la loi du 6 janvier 1978 modifiée (numéro de sécurité sociale, données relative à la santé des personnes ou à leur passé judiciaire) soient supprimées (...) de procéder à la purge de l'ensemble des informations relatives à des enquêtes clôturées, d'apporter à la CNIL toute garantie permettant de considérer que la sécurité et la confidentialité sont assurées sur les données conservées dans les traitements mis en oeuvre ». Ces mises en demeure ne sont sûrement pas restées sans effet pour les sociétés contrôlées puisque, dans le cas inverse, des sanctions comme une injonction de cesser la mise en oeuvre ou des sanctions financières auraient pu être prononcées si aucune régularisation n'avait été faite dans les délais impartis par la CNIL. Ce marché parallèle permettant un accès presque direct à l'information a certes des avantages pour les créanciers qui souhaiteraient obtenir rapidement des renseignements et ne pas subir la lenteur des procédures mises à ce titre à la disposition des huissiers de justice. Cependant dans ce système en plein essor, il est possible de voir d'importantes conséquences négatives touchant aux titres exécutoires et par procuration à la profession d'huissier de justice. * 32 Décret n° 2005-1123 JO 9 septembre 2005 * 33 JOFR n°181 Page 13202 * 34 Loi n°83-629 * 35 Loi n°2003-239 du 18 mars 2003 - art. 102 () JORF 19 mars 2003 |
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