Faculté de Droit et de
Science Politique - AIX-MARSEILLE III
MASTER II « CONTENTIEUX ET VOIES
D'EXECUTION »
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Les limites des procédures d'exécution
. eu égard à la protection des données
. personnelles
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Année : 2007-2008
Liste des abréviations
BICC Bulletin d'information de la Cour de cassation
CA Cour d'appel
CCass Cour de cassation
Civ Civile
CNIL Commission Nationale Informatique et
Libertés
Ed Edition
IR Informations Rapides
JCP Juris-Classeur Périodique
JO Journal Officiel
Op cit Opere citato
P Page
RTD civ Revue trimestrielle de droit civil
UIHJ Union Internationale des Huissiers de Justice
VTM Véhicule Terrestre à Moteur
Sommaire
Introduction
TITRE I
La recherche d'informations pour l'huissier
de justice
Chapitre I Les moyens accessibles
à tous
Chapitre II : Les rapports avec les
autorités
Chapitre III : La place des tiers dans
les procédures
d'exécution
Chapitre III : Le régime
d'utilisation des données obtenues
et ses conséquences
TITRE II
Existence d'un marché
parallèle
Chapitre I : Le marché
parallèle de l'information
Chapitre II : La dévalorisation du
titre exécutoire
TITRE III
Une réforme
nécessaire
Chapitre I : La recherche d'informations
dans d'autres Etats
européens
Chapitre II Les perspectives
envisageables
Conclusion
Introduction
Comme l'écrivait le philosophe Alain, au début
du XXème siècle, « il n'y a que les huissiers de
justice qui savent quelque chose et peut-être aussi les vieux juges de la
paix qui approchent les réalités de la vie ». Cette
citation n'est plus en adéquation avec la situation actuelle.
Les huissiers de justice rencontrent des difficultés
dans la recherche d'informations, indispensables pour mettre en application les
titres exécutoires.
En matière d'exécution, la réforme issue
de la loi du 9 juillet 1991 et son décret d'application du 31 juillet
1992 était attendue et a été appréciée.
Cependant, la mise en oeuvre de la justice française
rencontre des problèmes et les critiques des justiciables sont
nombreuses. Ces difficultés ont-elles toujours existé ?
La profession de ce qui s'apparente aujourd'hui à celle
des huissiers de justice se retrouve dès l'Antiquité. A cette
époque, sous la Pax Romana, nos ancêtres avaient recours à
ce qu'ils appelaient des « officiales » afin de faire
appliquer les décisions des juges. Suivant leurs fonctions, les
« officiales » avaient des titres différents. Parmi
eux, on retiendra les « apparitores » et les
« executores ». Les premiers avaient pour mission de
rassembler le peuple lors des jugements, d'introduire les justiciables et
d'assurer la police des audiences. Les seconds procédaient aux saisies
des biens des débiteurs ou à des "contraintes par corps" par
lesquelles le créancier se faisait payer en emprisonnant son
débiteur.
Les invasions barbares mirent fin à la Pax Romana et la
justice privée réapparut.
C'est au Moyen Age que les différentes juridictions qui
émergèrent, qu'elles soient seigneuriales, ecclésiastiques
ou royales, eurent besoin d'une diversité d'agents assermentés
ayant une autorité suffisante pour faire exécuter leurs
décisions. C'est ainsi que les « officiales »
romains devinrent sergents et huissiers. Par ailleurs, c'est à cette
période, que le droit coutumier qui auparavant se transmettait
oralement, a été écrit et rassemblé par les gens
d'église. Au XIVème siècle, l'huissier est celui qui est
préposé au service de certaines assemblées comme
l'huissier du Parlement (1320) et, dès 1538, il est un Officier
ministériel chargé de signifier les actes de
procédures.
Progressivement, les huissiers devinrent les officiers des
juridictions importantes. Leurs compétences
s'élargirent En 1705, un édit donna le titre commun d'
« huissier ».
L'invention de l'imprimerie, au XVème siècle,
permit une évolution du droit et de la législation. Les
informations auxquelles pouvait avoir accès l'huissier de justice
étaient ensuite retranscrites.
Le statut actuel des huissiers de justice résulte d'une
ordonnance du 2 novembre 1945 et d'un décret d'application du 29
février 1956, plusieurs fois modifiés : ces textes fixent les
limites de leur monopole, les conditions de leur responsabilité
professionnelle, précisent leur statut et autorisent leur groupement ou
leur association.
Différents articles du Code pénal renforcent les
sanctions applicables à certaines infractions lorsqu'elles sont commises
sur la personne d'un huissier dans l'exercice de ses fonctions.
Dès le XVIIIème siècle, il était
déjà devenu nécessaire de prendre en compte les
réalités économiques et sociales de la
société. Les évolutions n'ont pas cessé jusqu'au
XXème siècle et le législateur de 1991 a dû assurer
l'effectivité du droit de créance du créancier saisissant.
Ce droit à l'exécution forcée est énoncé
dans l'article 1 de la loi du 9 juillet 1991 : « Tout
créancier peut, dans les conditions prévues par la loi,
contraindre son débiteur défaillant à exécuter ses
obligations à son égard ».
Les huissiers de justice se sont vu offrir un panel de mesures
en adéquation avec la situation de l'époque. Le
législateur leur a donné toute latitude afin qu'ils choisissent
parmi toutes les possibilités le moyen le plus adapté aux
situations.
Selon les articles 2092 et 2093 du code civil, le patrimoine
entier d'un débiteur est le gage de ses créanciers. Cependant,
compte tenu de la dématérialisation du patrimoine, de la
multiplication des achats à crédit avec clause de réserve
de propriété, celui-ci est de plus en plus difficile à
appréhender.
Le problème majeur reste cependant les questions de
localisation du débiteur et de détermination de son patrimoine.
Certains débiteurs organisent leur insolvabilité et fuient leurs
responsabilités. A l'époque de la réforme, le
législateur n'avait pas forcément pris en compte cette
difficulté.
Avec l'article 3 de la loi du 9 juillet 1991, le
législateur a tenté de valoriser des différents titres
exécutoires servant de base aux procédures d'exécution.
Ces titres proviennent de professionnels de la justice ou de personnes
publiques. Il est donc important de leur conférer une certaine valeur,
à l'inverse, ne pas mettre à exécution ces actes
conduirait à un désaveu du pouvoir de ces
représentants.
Il est nécessaire que l'exécution soit efficace,
sachant qu'elle fait partie intégrante du droit au procès
équitable issu des dispositions de l'article 6-1 de la Convention
européenne des droits de l'homme, entrée en vigueur en 1953. A
l'inverse, si l'exécution échoue, le procès serait
vidé de sa substance.
L'article 9 du code civil énonce que « chacun
a droit au respect de sa vie privée. Les juges peuvent, sans
préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes
mesures (...) propres à empêcher ou faire cesser une atteinte
à l'intimité de la vie privée ». S'agissant des
officiers publics et ministériels, selon la Cour de cassation1(*), la discipline professionnelle
n'exclut pas la prise en considération d'éléments de vie
privée, eu égard à la portée sociale et
d'intérêt public des fonctions qu'ils exercent. La CNIL,
Commission nationale de l'informatique et des libertés, a
confirmé ce principe, lors de la séance du 28 juin 2006, en
prononçant une amende de 5.000 euros à l'encontre d'une
étude d'huissiers de justice pour violation de l'intimité de la
vie privée et pour entrave à l'action de la Commission. Les
huissiers de justice sont, de par leur mission, proches des problèmes
des débiteurs et donc souvent à la frontière de leur vie
privée.
Le législateur de 1991 a cherché à aider
les huissiers de justice en leur facilitant l'accès à
l'information. Il a également voulu renforcer les obligations des tiers
en matière de recherche de renseignements. Le procureur de la
République, s'est donc vu ajouter une fonction d'aide envers les
huissiers de justice issue des articles 39 et suivants. C'est un point
important de la réforme.
Au côté du procureur de la République, les
tiers ont aussi un devoir de collaboration. Dans le cadre de chaque saisie, des
dispositions ont été mises en place déterminant ainsi le
rôle des tiers. L'article 24 de la loi du 9 juillet 1991
généralise cette obligation sous peine de sanctions :
« Les tiers ne peuvent faire obstacle aux procédures
engagées en vue de l'exécution ou de la conservation des
créances. Ils doivent y apporter leur concours lorsqu'ils en sont
légalement requis.
Celui qui, sans motif légitime, se soustrait à
ses obligations peut être contraint d'y satisfaire, au besoin à
peine d'astreinte, sans préjudice de dommages-intérêts.
Dans les mêmes conditions, le tiers entre les mains
duquel est pratiquée une saisie peut être condamné au
paiement des causes de la saisie, sauf recours contre le
débiteur. »
Les obligations énoncées montrent la
nécessité du respect de la justice sous peine de sanctions,
responsabilisant ainsi les tiers.
Ce cadre législatif était une aubaine pour les
huissiers de justice qui ont vu là, les mesures adaptées au
recouvrement.
La satisfaction des créanciers est un des objectifs des
procédures d'exécution forcée, il ne faut néanmoins
pas négliger la protection des débiteurs. Le législateur a
souhaité humaniser les voies d'exécution. En parallèle,
naît un paradoxe : les huissiers de justice doivent écouter
et conseiller les débiteurs mais ces derniers en revanche, n'ont que peu
d'obligations envers ces professionnels de la justice.
La protection des débiteurs est croissante avec
l'augmentation du patrimoine insaisissable, de la protection des personnes
surendettées... Le droit civil permet par ailleurs un
échelonnement de la dette sur un délai maximum de deux ans,
dès lors qu'elle n'est pas alimentaire. Les articles 1244-1 à
1244-3 n'envisagent que le cas des délais de paiement de sommes
d'argent. La Cour d'appel de Paris, dans une jurisprudence isolée avait
retenu, en 1991, que « ces textes de droit commun sont de
portée générale qui s'applique non seulement au
débiteur d'une somme d'argent mais encore à tous ceux qui sont
tenus d'une obligation quelconque ». Dans ces deux hypothèses,
les délais de grâce contribuent à protéger le
débiteur et lui donne des moyens de défense.
Le législateur a souhaité éviter des
mesures pouvant être vécues comme traumatisantes pour le
débiteur, ainsi en matière de créance d'un petit montant,
seront privilégiées la saisie-rémunération ou la
saisie-attribution de comptes bancaires.
M. Gérard CORNU rappelle que
« l'insaisissabilité est une protection spéciale
découlant de la loi qui met tout ou partie de certains biens d'une
personne hors d'atteinte de ses créanciers, en interdisant que ces biens
soient l'objet d'une saisie, dans les limites et sous les exceptions
déterminées par la loi »2(*). En ce sens, les dispositions du code civil ont
été reprises au sein de l'article 14 de la loi du 9 juillet 1991
et son décret d'application. Certains biens de la vie courante ne
peuvent pas être saisis, eu égard au respect de la dignité
de la personne saisie. La loi exige que le créancier laisse un minimum
indispensable aux besoins quotidiens de son débiteur. Ces dispositions
législatives et décrétales contiennent une
énumération des objets insaisissables, notamment les
vêtements et la literie, les objets nécessaires à la
préparation et à la conservation des aliments, les appareils de
chauffage, une machine à laver (...). Toutefois, la loi prévoit
des exceptions en raison de l'importance des biens
énumérés ou de leur valeur.
Le législateur vise également la protection des
créances alimentaires. Dans le cadre d'une saisie-attribution, selon les
dispositions de l'article 46 du décret du 31 juillet 1992, un
débiteur peut demander la mise à disposition d'une somme à
caractère alimentaire d'un montant au plus égal à celui du
revenu minimum d'insertion pour un allocataire. Toute cette série de
dispositions protège le débiteur mais en contrepartie
réduit la marge de manoeuvre des huissiers de justice.
La démarche des huissiers de justice, dans le but d'une
recherche rapide et performante de renseignements, est entravée par la
Commission Nationale Informatique et Libertés. La protection des
données personnelles va de pair avec la CNIL, autorité
administrative indépendante, créée par la Loi
informatiques et libertés du 6 janvier 1978, ayant pour objectif de
contrôler les transferts et les utilisations de renseignements d'ordre
privé. Cet organisme veille au respect de la vie privée, au
secret professionnel. La Commission est attentive à l'égard des
particuliers et n'a pas pour objet de faciliter le travail de recherches des
huissiers de justice. Par son action, la CNIL pose des obstacles à
l'exécution de la justice française, et a contribué
à alimenter l'existence d'un marché parallèle de
l'information. A l'heure actuelle, pour obtenir des renseignements, certains
créanciers n'hésitent plus à avancer des fonds et payer
des sociétés spécialisées au détriment de la
profession de l'huissier de justice.
Les huissiers de justice ont, selon les textes officiels, le
monopole du recouvrement sur le territoire français. Cependant, de nos
jours, ils ne l'ont plus en ce qui concerne la phase amiable. Ils n'ont plus
à leur disposition les moyens de conserver ce monopole d'où
l'existence des sociétés spécialisées. Ces
dernières ont, pour la plupart, mis en place un recouvrement
parallèle peu réglementé. Outre la question
financière entraînant une discrimination dans l'efficacité
du recouvrement, on doit également s'interroger sur les pratiques de ces
sociétés.
La mise en place en France de la réforme de 1991 et de
son décret d'application de 1992 a montré en son temps
l'efficacité du système de la requête au procureur de la
République, cependant il convient désormais de trouver d'autres
moyens de recherche pour rendre l'exécution plus efficace. D'autres
Etats européens peuvent présenter des similitudes avec le
système français ou servir de modèles pour faire
évoluer le Droit positif.
La recherche d'information par l'huissier de justice en France
suscite de nombreuses questions ; cependant le problème central
reste le même : comment les huissiers de justice peuvent-ils obtenir
des renseignements permettant de localiser un débiteur, de
déterminer le contenu de son patrimoine, données
nécessaires à la mise en place des procédures
d'exécution ?
Par conséquent, il convient d'étudier ce sujet
selon trois axes. Le premier concerne la recherche en Droit positif (Titre I),
dans laquelle il faudra détailler les moyens accessibles à tous
(Chapitre I) puis ceux spécifiques à la profession d'huissier de
justice (Chapitre II). Ensuite, il conviendra de réfléchir sur
l'existence d'un marché parallèle de l'information et ses
conséquences néfastes (Titre II) avec l'étude de ces
sociétés (Chapitre I) et de la dévalorisation du titre
exécutoire (Chapitre II). Il faudra prendre en compte la
nécessité d'une nouvelle réforme (Titre III) avec, comme
source d'inspiration, d'autres Etats européens (Chapitre I) et les
perspectives envisageables en France (Chapitre II).
TITRE I
La recherche d'informations pour
l'huissier de justice
La recherche de renseignements occupe une place importante
dans le quotidien des huissiers de justice et de leurs clercs.
Le Droit positif français met à la disposition
des huissiers de justice différents accès aux renseignements. Ces
informations vont permettre de localiser un débiteur, déterminer
le contenu de son patrimoine et par conséquent connaître sa
solvabilité.
Les huissiers de justice peuvent utiliser des moyens
accessibles à tous (Chapitre I) et ceux spécifiques à leur
profession (Chapitre II).
Chapitre I Les moyens
accessibles à tous
Dans le cadre de ces moyens de recherche d'informations, les
parties à l'exécution forcée (débiteur,
créancier, tiers) jouent un rôle prépondérant
(Section I). Cependant l'huissier de justice doit rester vigilant dans
l'exercice de sa mission notamment à l'étude mais surtout sur le
terrain (Section II).
Section
I : Les acteurs principaux de cette
recherche d'informations
La mise à exécution d'un jugement, le
recouvrement d'une créance nécessitent un minimum d'informations
d'ordre formel.
Le premier pas vers l'information se fait par l'aide du
créancier, puis du débiteur. Le créancier, en transmettant
son dossier à un huissier de justice, montre sa volonté de voir
sa créance recouvrée ou encore son acte signifié.
Théoriquement, dans les jugements, sont
précisés les nom, prénoms, date et lieu de naissance,
adresse des parties. La signification d'un acte est une manière de
collecter des renseignements.
Dans certains litiges, il est possible de penser que les
parties se connaissent bien voire très bien. Le créancier
possède certainement des informations concernant son débiteur, ne
serait-ce que son état civil ou simplement son numéro de
téléphone, sa profession... Ces données obtenues
permettent de constituer la base de l'identification du débiteur
à moindre frais. Cette coopération mandant/mandataire a
été placée au rang d'obligation par la Cour de Cassation
dans un arrêt du 28 Septembre 2000. Cette dernière avait retenu le
manque de diligence de l'huissier de justice dans un litige opposant le mandant
à son ex-femme destinataire de l'acte. En effet, l'huissier de justice
avait omis de demander si son mandant connaissait l'adresse de son ex-femme.
La Cour de cassation
a considéré comme un
défaut de diligence de la part de l'huissier de justice mandaté
le fait de n'avoir pas
interrogé le mandant
sur l'adresse de
son ex-femme; lequel aurait pu
lui-même communiquer spontanément cette information dans son
propre intérêt. Dans le cas de recouvrement de cotisations
sociales, il est fréquent que l'organisme communique dès
l'ouverture du dossier le numéro de compte bancaire de son
débiteur. Il en va de même pour le recouvrement de créances
pour le compte d'opérateurs téléphoniques dans
l'hypothèse où les clients auraient opté pour le
prélèvement automatique. Tout créancier disposant de
données inhérentes au dossier se doit de les communiquer à
l'huissier de justice. Autant d'hypothèses dans lesquelles les
informations données par le mandant peuvent faciliter et éviter
les retards dus à ces recherches.
Une fois le débiteur identifié, celui-ci se
devrait d'être loyal envers l'huissier de justice, il en va de son propre
intérêt. Certes, il ne souhaite peut-être pas qu'une
procédure soit engagée mais il se doit malgré tout de
communiquer certains renseignements comme le nom de son employeur, voire son
lieu de travail. D'autre part, le débiteur peut éclairer
l'huissier sur sa solvabilité ou son endettement. Il se
trouve donc en première ligne pour informer l'huissier de justice en
charge de son dossier. Ainsi le code de procédure civile prévoit
que, pour certaines créances, l'huissier de justice peut enjoindre au
débiteur de lui communiquer des informations le concernant. Dans le
cadre d'une procédure de saisie-vente, les articles 82 et 83 du
décret du 31 juillet 1992 disposent que « lorsqu'il s'agit
d'une créance, autre qu'alimentaire, dont le montant n'excède pas
la somme de 535 euros en principal (...) » l'acte d'huissier de
justice contient entre autres la «mention du titre exécutoire (...)
commandement d'avoir à payer dans un délai de huit jours
(...) injonction de communiquer à l'huissier de justice du
poursuivant dans un délai de huit jours, les nom et adresse de son
employeur ainsi que les références de ses comptes bancaires ou
l'un de ces deux éléments seulement (...) »
En l'état des renseignements
possédés, les huissiers
de justice constatent, par expérience, que très peu de
réponses sont données par le biais de ces dispositions.
Il convient donc de rechercher des informations quant à la
solvabilité du débiteur dans le but de connaître la
constitution du patrimoine de celui-ci et par conséquent de
déterminer la procédure adéquate à engager. Les
renseignements sont le préalable à une procédure efficace
et ce dans l'intérêt des débiteurs, en évitant des
procédures basées sur des incertitudes. La multiplication des
frais est ainsi évitée, il n'y aura pas de frais frustratoires.
L'attitude du débiteur est importante. L'analyse des
renseignements déjà obtenus permet à l'huissier de justice
d'adapter la procédure. Il y a trois sortes de débiteurs :
ceux qui acceptent de payer, ceux qui refusent et ceux qui ne peuvent pas.
Certains vont donc coopérer, d'autres non.
De nos jours, une grande partie des dossiers des grands
donneurs d'ordre transitent au préalable par un service de recouvrement
amiable avant d'être transmis à un huissier de justice pour le
recouvrement judiciaire de la créance.
Il existe des sociétés
spécialisées en recouvrement amiable ayant pignon sur rue et
d'autres moins fiables qui n'hésitent pas à employer des moyens
parfois à la limite de la légalité :
harcèlement, menaces, pression, abus de faiblesse... Ces
sociétés, pour travailler, ont besoin de renseignements qu'elles
ne peuvent obtenir que par des moyens illégaux tout du moins pour ce qui
relève de la vie privée. Il y a donc deux systèmes, l'un
encadré et légal, l'autre sans contrôle.
Dans le cadre d'une procédure judiciaire, le
rôle des avocats est important. Cependant, ils sont assujettis au secret
professionnel. Il y donc là une incohérence. Un avocat doit agir
dans l'intérêt de son client et c'est à ce titre qu'il
devrait être autorisé, sans violer les règles
déontologiques, à communiquer des renseignements à
l'huissier de justice qui en ferait la demande. La réponse
éventuelle de l'avocat serait un témoignage. Dans cette
hypothèse et comme le souligne M. R. MARTIN, le défenseur requis
« peut refuser de témoigner ou encore, acceptant de
témoigner, il peut ne révéler que les faits favorables
à son client, ce qui enlève à son témoignage
à l'égard de l'accusation beaucoup de son
efficacité »3(*). Par ailleurs, la Cour de cassation dans un
arrêt de sa chambre criminelle en date du 24 mai 1862, précise que
l'avocat a toujours été tenu de garder un secret inviolable sur
tout ce qu'il apprend à ce titre ; que cette obligation est d'ordre
public ; que l'avocat appelé en témoignage n'a donc, dans sa
déposition, d'autre règle que sa conscience et qu'il doit
s'abstenir des réponses qu'elle lui interdit ».
Dans la plupart des dossiers, les données personnelles
obtenues grâce à ces trois acteurs : créancier,
débiteur, avocat des parties, ne suffisent pas pour connaître la
solvabilité du débiteur.
L'huissier de justice en charge du dossier se doit donc
d'entreprendre de sa propre initiative des recherches pour mener à bien
l'exécution confiée par son mandant.
Section
II La recherche d'informations à l'initiative
de l'huissier de
justice
L'huissier de justice et ses clercs ont accès, à
l'étude, à différents moyens de recherche (I), cependant,
en tournée sur le terrain, et notamment lorsqu'ils sont en visite chez
des débiteurs, ils se doivent de rester attentifs (II).
I A l'étude
Internet est le premier moyen qui s'impose. Ce recueil moderne
d'information peut permettre de retrouver les coordonnées d'une
personne.
Les pages jaunes et blanches permettent de recueillir des
données visant à localiser le débiteur. Les pages jaunes
concernent les professionnels, les sociétés, les associations...
et les pages blanches, les particuliers. En effet, avec les nom et
prénoms du débiteur et la localité, il est possible
d'obtenir son adresse complète ainsi que ses coordonnées
téléphoniques. Cependant rien ne garantit l'exactitude des
renseignements compte tenu de la mise à jour annuelle et du fait que le
débiteur peut avoir choisi de ne pas figurer sur ces annuaires et
d'être en liste rouge.
La Cour d'appel de Grenoble en date du 15 mai 2006 4(*) a considéré comme
un manque de diligence de la part de l'huissier de justice concerné, le
fait d'avoir consulté en vain l'annuaire de France Télécom
afin d'y trouver les coordonnées de la personne à laquelle il
était chargé de signifier un jugement et d'avoir dressé un
procès verbal de recherches infructueuses alors que
l'intéressé figurait bien sur les listes d'abonnés
téléphoniques. L'interprétation de cet arrêt permet
de mettre en avant le fait que la consultation des annuaires
téléphoniques fait partie intégrante des diligences devant
être effectuées par l'huissier de justice et ses clercs afin de
retrouver un débiteur.
Toujours en ce qui concerne les sociétés
débitrices, le site Internet du greffe du tribunal de commerce5(*) est un outil intéressant
bien que payant. Sur les extraits K.bis, entre autres, seront
indiqués : la dénomination sociale, le numéro
d'identification au Registre du commerce et des sociétés (RCS),
l'adresse du siège social, le nom du gérant. Il est possible
d'obtenir moyennant également paiement : l'historique des
modifications au RCS, l'état d'endettement ou encore un état en
matière de procédure collective... De plus, différentes
façons de chercher sont prévues : par le nom, la
dénomination sociale de la société ou le numéro
d'identification RCS, ensuite par le nom du dirigeant. Les informations doivent
être inscrites de façon précise sur le site, avec
ponctuation si nécessaire compte tenu de l'importance des renseignements
qui vont être obtenues, aucune erreur n'est permise.
Cette méthode permet de savoir si l'entreprise est en
exercice, radiée ou encore en procédure de redressement
judiciaire..., informations importantes. Dans l'hypothèse où la
société aurait été radiée, elle n'aurait
évidemment plus son siège social à l'adresse
indiquée.
En ce qui concerne les questions cadastrales et
hypothécaires, il est possible également d'obtenir des
réponses à partir d'Internet6(*). Ce service est payant, mais il faut connaître
les noms, prénoms, date et ville de naissance de la personne
recherchée, ensuite rentrer le code postal de la ville où elle
est présumée être propriétaire... Les données
à renseigner sur le site sont parfois également celles
recherchées, dans cette hypothèse, la recherche ne pourra pas se
faire sur le site Internet, elle sera faite directement au service cadastre de
la ville à partir des noms et prénoms principalement.
Il est possible sans avoir à se déplacer
d'envoyer au bureau des hypothèques une fiche préétablie
dénommée « renseignements sommaires
urgents »7(*).
Deux hypothèses sont prévues, la demande est faite soit sous une
entrée «immeuble» : recherche du (ou des)
propriétaire(s) d'un immeuble repéré, ce dernier
désigné par la commune sur laquelle il est situé et ses
références cadastrales, soit par une entrée
«propriétaire» si l'on souhaite connaître les biens
immobiliers d'une personne, situées dans le ressort géographique
de la conservation des hypothèques. L'informatisation du fichier
immobilier (Fichier Informatisé de la Documentation Juridique sur les
Immeubles : FIDJI) débutée en 1998 a été
achevée en 2003. En conséquence, les renseignements figurent soit
sur des fiches scannées pour la période antérieure
à FIDJI soit dans des bases informatisées. Aussi, à la
demande de l'huissier de justice, le conservateur des hypothèques pourra
envoyer une fiche d'immeuble, une fiche personnelle.
Les renseignements sont délivrés sous la forme
d'un état réponse et peuvent être obtenus suite au
dépôt d'une des trois sortes de demandes :
- celle de renseignements réels ayant pour
finalité d'obtenir l'ensemble des renseignements publiés sous
FIDJI concernant un immeuble,
- celle de renseignements personnels afin de recevoir
l'ensemble des renseignements publiés sous FIDJI concernant une personne
- celle de renseignements réels personnalisés
pour connaitre l'ensemble des renseignements du chef d'une personne portant sur
un immeuble déterminé.
Au-delà de ces investigations réalisées
au sein de l'étude, certaines recherches doivent êtres faites sur
le terrain dans le but de recueillir d'autres informations utiles.
II L'huissier de justice en
tournée
L'huissier de justice ou ses clercs, lorsqu'ils sont en
tournée de signification peuvent commencer par se rendre à
l'adresse indiquée. A partir de là, différentes options
s'offrent à eux : regarder les différentes sonnettes, les
boites aux lettres, interroger des voisins ou encore le facteur...Tout ceci en
respectant la vie privée de la personne recherchée
conformément au Droit positif.
La toute première étape des recherches à
l'extérieur consiste à chercher si, à l'adresse
indiquée, une sonnette porte le nom du débiteur recherché.
A ce moment là, il suffira de sonner et d'attendre que quelqu'un vienne
répondre pour confirmer si le débiteur habite bien là.
Cependant, si personne ne répond pour quelles que raisons que ce soit,
l'huissier de justice ou son clerc à la recherche d'informations ne
pourra pas se contenter d'une inscription peut-être désuète
sur une sonnette, en parallèle, il faudra donc essayer de trouver la
boite aux lettres correspondante, afin d'y laisser un avis de passage.
Sur le terrain, la principale personne pouvant apporter des
renseignements se trouve être le facteur : personnage clé
surtout dans les petits villages ou les quartiers. En effet, il côtoie
tous les jours ou presque les habitants. En distribuant le courrier, il
connaît les boites aux lettres même celles sans nom car il a
dû rechercher à qui elles appartenaient. En évitant une
double enquête, il fait gagner du temps dans cette quête de
l'information.
Par ailleurs, certaines personnes peuvent connaître
leurs différents voisins. Cette hypothèse est surtout valable
dans les villages ou les lotissements. Dans notre société que
l'on dit assez individualiste, il est plus rare qu'en ville les voisins se
connaissent réellement, surtout s'il s'agit de locataires et non de
propriétaires.
L'huissier de justice est tenu de procéder à des
recherches élémentaires imposées par le bon sens. Ainsi,
la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 9 mars 1994, a retenu
qu'il incombe à l'huissier de justice de recueillir auprès de la
fille du destinataire d'un acte, dont il lui a été indiqué
par un locataire qu'elle demeure dans l'immeuble, tous renseignements
utiles.
Dans deux autres de ses arrêts, respectivement en date
du 7 décembre 20068(*) et du 25 janvier 20079(*), la Cour de cassation considère l'interrogation
du voisinage comme faisant partie des diligences à suivre dans le cadre
de la recherche du destinataire d'un acte. Au travers de ces deux
décisions, l'idée se dessine que cette interrogation ne suffit
pas à caractériser des investigations complètes de la part
d'un huissier de justice.
Dans un tout autre registre, la mairie est également un
point de centralisation de données potentielles. Le service des
élections conserve toutes les inscriptions sur les listes
électorales, ces dernières peuvent être consultées
par tous. Elles comportent entre autres les nom, prénoms, date et lieu
de naissance de la personne inscrite ainsi que l'adresse qu'elle a
donnée lors de son inscription. Cependant, chaque mairie possède
son propre service électoral, ce qui ne facilitera pas les recherches.
Le personnel municipal, surtout celui des villages voire des petites
agglomérations ou encore des mairies annexes, peuvent fournir des
renseignements utiles car il est au coeur des formalités administratives
et donc au contact des habitants.
Les visites de l'huissier de justice expérimenté
et avisé au domicile du débiteur peuvent permettre de noter
certaines informations essentielles pour la suite. Par exemple, le calendrier
d'une banque accroché au mur peut indiquer que la personne a ouvert un
compte dans cet établissement bancaire. La lettre d'une banque
également, posée sur le coin d'une table peut être un
indice. L'huissier de justice doit être très observateur.
Dans les hypothèses où un contact
téléphonique a déjà été établi
avec le débiteur, ce dernier peut indiquer son adresse par exemple. Dans
le même cas, l'huissier de justice amené à rencontrer en
personne le débiteur, pourrait voir le porte clés d'un garage
automobile qui laisserait penser que ce dernier possède un
véhicule de cette marque.
Interroger les employeurs même sans titre
exécutoire peut se révéler parfois très porteur.
Par exemple, dans l'armée, lorsque l'on demande si une personne fait
partie des troupes, soit l'armée répond qu'elle ne communique
aucun renseignement sans titre exécutoire, soit elle répond tout
simplement que la personne ne fait pas partie de celles-ci. L'huissier de
justice aura donc sa réponse.
Dans certains cas, ces moyens de recherches ne suffisent pas
pour obtenir les données nécessaires à l'engagement de
voies d'exécution, il faut donc avoir recours à d'autres
méthodes, aux autorités comme le préfet ou le
Ministère Public. Ces dispositions sont prévues essentiellement
pour l'huissier de justice.
Chapitre II : Les rapports
avec les autorités
Le
législateur de 1991 a donné à certaines autorités
l'obligation de coopérer avec l'huissier de justice qui en ferait la
demande. Ainsi, par une requête de l'huissier, peuvent être saisis
le procureur de la République (Section I), le préfet (Section
II). Depuis 2003, les huissiers de justice peuvent plus facilement obtenir des
informations concernant les comptes bancaires d'un débiteur (Section
III).
Section I La recherche d'informations avec
l'aide
du Parquet
Il peut arriver que le créancier qui entend pratiquer
une saisie à l'encontre de son débiteur ne soit pas en mesure de
fournir à l'huissier de justice mandaté des renseignements
indispensables et que ce dernier ne puisse pas les obtenir par
lui-même.
Le recours au Ministère public est soumis à des
conditions de forme (I), des conditions de fond (II) dans le dessein unique
d'obtenir des informations concernant le débiteur. Cette requête
sera reçue par le procureur de la République (III). Les
informations visées sont détenues le plus souvent par des
organismes publics.
I Les
conditions de fond
Les articles 39 à 41 de la loi du 9 juillet 1991
organisent la mission de service public du procureur de la République.
Il est investi d'une obligation légale, mission d'assistance aux
créanciers.
Selon les dispositions de l'article 39 de la loi du 9 juillet
1991, le « titre exécutoire » est l'élément
fondamental conditionnant la recherche d'informations.
L'article 3 de la loi du 9 juillet 1991 donne la liste des
différents titres exécutoires pouvant remplir cette fonction.
Le titre exécutoire peut être par exemple une
injonction de payer revêtue de la formule exécutoire. La
procédure d'injonction de payer a pour objectif de permettre au
créancier d'obtenir un titre exécutoire sans débat
contradictoire. Une copie du titre exécutoire doit être jointe
à la requête faite au procureur de la République.
A un moment de la procédure il n'est pas rare que
le créancier ou l'huissier de justice en charge du dossier perdent la
trace du débiteur. Ils sont dans l'impossibilité de le localiser
et ne possèdent pas d'informations le concernant : son
activité professionnelle, son numéro de compte bancaire...
L'huissier de justice doit avoir fait toute diligence pour
rechercher le débiteur par rapport à sa dernière adresse
connue. Cependant, dans l'hypothèse où il ne parviendrait pas
à remplir cet objectif, il devra rédiger un relevé
sincère de recherches infructueuses. Dans cette conjoncture, la seconde
condition est remplie.
En effet, pour pouvoir faire appel au procureur de la
République, l'huissier de justice doit donc être en possession
d'un titre exécutoire dont il joint la copie et avoir été
dans l'obligation de rédiger un tel procès-verbal.
Après avoir rempli toutes les conditions de fond
énumérées ci-dessus, la dite requête adressée
au procureur de la République se doit de répondre aux exigences
de forme.
II Les
Conditions de forme
Tout d'abord la procédure est non contradictoire. S'il
était informé d'une telle action, le débiteur pourrait
chercher à dissimuler des éléments de son patrimoine.
Chaque étude a créé un modèle de
requête type. L'acte doit permettre une identification précise des
deux parties tant du créancier que du débiteur.
En ce qui concerne le créancier pour le compte duquel
intervient l'huissier de justice, il s'agit de celui indiqué sur le
titre exécutoire.
Pour le débiteur, les informations données
doivent permettre de l'identifier sans aucune erreur possible car c'est le
centre d'intérêt de la requête. L'état civil si
possible complet du débiteur doit y figurer : nom, prénoms,
date et lieu de naissance ainsi que tout autre renseignement possible apportant
des précisions.
Cette requête aux fins de recherche des informations
participe aux opérations d'exécution forcée, son
coût relève donc du domaine des frais d'exécution. En tant
que tel, cet acte doit donc être à la charge du débiteur
poursuivi dans les conditions et limites de l'article 32 de la loi du 9 juillet
1991.
Ensuite vient la gestion par le procureur de la
République, phase hors de la compétence des huissiers de justice.
Il est cependant nécessaire de la traiter pour assurer une
continuité.
III La gestion de la
demande par le procureur de la République
Dès que le Parquet reçoit la requête aux
fins de recherches des informations établies par l'huissier de justice,
il devra la traiter dans un délai de trois mois, à défaut
elle sera réputée infructueuse.
Une fois la requête entre les mains du procureur de la
République, un contrôle a lieu même si la confiance existe
entre les magistrats du Parquet et les Officiers Publics et
Ministériels.
Le procureur de la République vérifie le contenu
et la validité du titre exécutoire au vu de la copie jointe
à la requête. Cependant sa responsabilité ne saurait
être engagée s'il permet l'accomplissement d'une mesure
d'exécution en vertu d'un titre non exécutoire.
En ce qui concerne les recherches infructueuses
effectuées par l'huissier de justice au préalable de toute
saisine du procureur de la République, comment s'effectue le
contrôle adéquat?
Selon l'adage « à l'impossible nul n'est
tenu », l'huissier de justice dans sa mission peut connaître
des limites en matière de recherche d'informations. Il ne doit pas
outrepasser ses droits. Ce n'est donc en aucun cas qu'il se dérobe
devant ses obligations mais simplement qu'il n'a pas pu légalement aller
plus loin dans ses investigations car il serait entré dans la
sphère privée du débiteur.
Le procureur de la République est tenu de
vérifier que la requête qui lui est adressée est
nécessaire à la continuité de la procédure.
Après ce contrôle objectif et a minima, le
Ministère Public va effectuer un contrôle de l'objet des
recherches. En effet, ce dernier est limité selon les dispositions de
l'article 39 de la loi du 9 juillet 1991, le requête doit avoir pour
objet la domiciliation connue du débiteur ou encore le nom de son
employeur.
Le ou les tiers désignés dans la requête
peuvent être des tiers institutionnels ou tiers particuliers.
A la lecture des textes, plus précisément
l'alinéa 3 de l'article 54 du décret du 31 juillet 1992, une
requête peut être rejetée : « Au vu des
documents produits, le procureur peut aussi ne pas donner suite à la
requête et enjoindre à l'huissier de justice de procéder
aux recherches complémentaires ou constatations matérielles qui
lui paraîtraient nécessaires ».
Il existe deux types de rejets possibles : objectif ou
subjectif. Pour ce qui est du rejet objectif, il concerne l'hypothèse
où la requête est matériellement incomplète
c'est-à-dire qu'elle ne comporte pas toutes les pièces
nécessaires telle que la copie du titre exécutoire par exemple ou
encore si les éléments fournis ne permettent pas une
identification sans erreur du débiteur. Pour ce qui est du rejet
subjectif de la requête : ce sera la conséquence de
l'appréciation du Ministère Public.
Une fois la requête acceptée : le procureur
de la République devra, en théorie, « entreprendre les
diligences nécessaires » et « aura la
possibilité d'interroger tous les organismes détenteurs de ces
renseignements sur l'ensemble du territoire national ». En
pratique, les Parquets
débordés refusent
souvent de faire ce
travail. D'autre part,
certains Parquets encore
aujourd'hui refusent de
signer les
réquisitions (faute
de personnel et
de temps).
IV Les
différents organismes interrogés
Les organismes seront avisés par voie postale de la
réquisition du procureur de la République. Le secret
professionnel est levé par cette réquisition.
Les tiers institutionnels détenteurs potentiels
d'informations sont tenus d'y répondre. La requête concerne tous
les renseignements possédés par les organismes
interrogés.
Il arrivera que les organismes saisis ne possèdent
aucune information concernant le débiteur, ils devront alors informer
l'huissier de justice du fait qu'ils ne peuvent pas lui fournir d'informations
susceptibles de l'intéresser.
Le contenu de la requête par laquelle l'huissier de
justice saisit le procureur va déterminer le résultat de
celle-ci. En effet, l'huissier de justice aura tout intérêt
à demander au procureur de la République de consulter le maximum
d'organismes susceptibles de fournir des renseignements. Les organismes
interrogés sont souvent La Poste, EDF et GDF, la Caisse Primaire
d'Assurance Maladie (CPAM), les Assedic, la Caisse d'Allocations Familiales
(CAF), et même les centres des Impôts qui possèdent les
numéros des comptes bancaires et coordonnées des employeurs des
salariés.
Anciennement, l'article L 147 B du Livre des procédures
fiscales permettait au procureur de la République saisi sur
requête, d'obtenir des renseignements concernant l'adresse des organismes
auprès desquels un compte était ouvert. Cette faculté a
été supprimée par l'article 62 de la loi du 11
février 200410(*)
afin d'éviter un doublon avec l'accès au Fichier Informatique des
Comptes Bancaires (FICOBA) dont disposent désormais les huissiers de
justice.
Pour ce qui est de l'interrogation de la Poste : service
public, elle est tout aussi importante. En effet la Poste enregistre les
changements d'adresse définitifs ou temporaires selon les cas.
EDF et GDF sont des organismes interrogés
systématiquement, De nos jours, il est rare qu'un foyer n'utilise pas
le gaz et /ou l'électricité. Ces organismes pourront donc
communiquer l'adresse du domicile de leur client. De plus, si ce client a
choisi le règlement par prélèvement automatique, ils
pourront transmettre la domiciliation bancaire de celui-ci à l'huissier
de justice.
La CAF et la CPAM, deux organismes sociaux, doivent être
interrogés pour deux raisons. D'une part, dans l'hypothèse du
versement des allocations logement ou des allocations familiales, l'organisme
social connaît la domiciliation de son
« créancier » (nommé débiteur dans la
requête) il pourra donc communiquer l'adresse connue de ses services.
D'autre part, les allocations sont habituellement versées sur un compte
bancaire donc l'organisme social pourra fournir la domiciliation bancaire. La
CPAM connaît parfois également les coordonnées des
employeurs des salariés, notamment grâce aux arrêts de
travail qu'elle reçoit.
Pour ce qui est d'interroger les ASSEDIC, une réponse
positive de leur part sous- entendrait que le débiteur touche des
allocations chômage. Dans le cas contraire, une réponse
négative amènerait à penser que celui-ci a peut-être
un travail et touche une rémunération mensuelle.
Outre les informations pouvant être obtenues à
l'issue de cette procédure de requête au procureur de la
République, d'autres autorités comme le préfet peuvent
communiquer à l'huissier de justice des informations importantes qui
permettraient de connaître certains éléments patrimoniaux
du débiteur.
Section II : Le préfet en possession de
données
importantes.
Le préfet possède des données importantes
concernant les véhicules terrestres à moteur (VTM) puisque
certaines formalités administratives, par exemple l'établissement
des certificats d'immatriculation, se font à la préfecture. Ces
véhicules terrestres à moteurs sont de nos jours, des
éléments importants du patrimoine des particuliers.
Selon une jurisprudence du tribunal des conflits11(*), un véhicule à
moteur est défini comme « tout objet susceptible de se mouvoir
au moyen d'un dispositif propre ».
Le préfet a, en effet, accès au fichier national
des immatriculations (FNI) qui recense tous les véhicules en circulation
et pour lesquels une immatriculation est nécessaire12(*). Il a pour objet
l'enregistrement des demandes d'immatriculation et des caractéristiques
des véhicules, la gestion et la délivrance des certificats
d'immatriculation (cartes grises), la gestion et la délivrance d'une
nouvelle carte grise en cas de perte, de vol ou de modifications concernant le
véhicule ou son propriétaire, le contrôle des
véhicules immatriculés, la collecte des informations concernant
les véhicules volés ou placés sous surveillance.
D'une manière générale, le FNI permet de
connaître à tout moment la situation administrative et juridique
d'un véhicule et d'identifier son propriétaire. Le fichier
national contient par exemple l'identification du titulaire du certificat
d'immatriculation (nom, prénoms, date de naissance, commune de domicile
et son code I.N.S.E.E) et l'identification du véhicule. Il
est, par exemple, intéressant de connaître la date de
mise en circulation du véhicule car elle permet de décider si une
procédure est opportune ou pas. Si le véhicule a plus de dix ans,
il ne sera pas utile d'engager des frais de saisie. Les fichiers
départementaux contiennent l'état civil du titulaire
de la carte grise, son adresse, la disponibilité du véhicule
(inscription de gage, radiation d'inscription de gage, déclaration de
vol, prescription d'immobilisation, prononcé d'une saisie,
déclaration de destruction et date de chacun de ces
événements). Sont inscrits tous les véhicules pour
lesquels une demande de certificat d'immatriculation a été
effectuée.
Ce fichier sera remplacé au 1er juin 2009
par le Système d'Immatriculation des Véhicules
dénommé SIV. Les nouveaux véhicules terrestres à
moteur seront dotés à vie d'un numéro quel qu'en soit le
propriétaire. A priori, et en théorie, ceci ne changera pas
l'accès aux informations par l'huissier de justice ainsi que
l'exactitude des informations obtenues, cependant tout ceci restera à
vérifier en pratique.
La loi du 19 Décembre 199013(*), relative à
« l'enregistrement et à la communication des informations se
rapportant à la documentation exigée pour la conduite et la
circulation des véhicule » dispose que peuvent être
destinataires de ces informations : les préfets ou encore les
agents de préfecture et sous-préfectures14(*) ainsi que les agents
chargés de l'exécution dans le cadre de l'exercice de leur
mission. En ce qui concerne cette dernière disposition, l'article L330-4
du Code de la route dispose que ces derniers auront seulement accès aux
« informations relatives à l'état civil du titulaire du
certificat d'immatriculation, au numéro d'immatriculation et aux
caractéristiques du véhicule ainsi qu'aux gages
constituées et aux oppositions » à l'exclusion de tout
autre renseignement.
Cependant les informations quant à l'identité
concernent le titulaire de la carte grise qui n'est pas, dans tous les cas, le
réel propriétaire. Il y a donc là une présomption
simple de propriété. Par ailleurs, se pose la question de la
clause de réserve de propriété, opposable si elle a date
certaine.
L'huissier de justice adresse sa demande à la
préfecture ou à la sous-préfecture du département
avec une copie du titre exécutoire en sa possession. Cette requête
peut être faite dans deux cas :
- Hypothèse de recherche : le débiteur est
déjà identifié par son état civil et l'huissier de
justice en charge du dossier le concernant souhaite savoir si ce dernier est
propriétaire d'un VTM.
- Hypothèse de confirmation : l'huissier de
justice pense que le débiteur également déjà
identifié est propriétaire d'un VTM dont il connaît
l'immatriculation et souhaite le vérifier.
Une fois ces informations obtenues, si elles s'avèrent
positives et que le débiteur possède un VTM, l'huissier de
justice se trouve devant deux possibilités. Soit, selon les dispositions
de l'article 57 de la loi 9 juillet 1991, il peut « faire une
déclaration, dont la notification au débiteur produit tous les
effets d'une saisie, auprès des services de la préfecture
où est immatriculé le véhicule du
débiteur ». Soit, selon les dispositions de l'article 58 de la
même loi, il peut saisir le véhicule du débiteur en
l'immobilisant, en quelque lieu qu'il se trouve, par tout moyen
n'entraînant aucune détérioration du
véhicule ». Dans cette dernière hypothèse, le
moyen utilisé se trouve être un sabot.
Plusieurs ombres restent dans cette recherche d'informations
par l'huissier de justice. D'une part, les cyclomoteurs non immatriculés
ne sont pas inscrits dans ce fichier, cependant leur prix peut être
supérieur au montant de la dette. D'autre part, le concours du
préfet peut poser certains problèmes quant au délai
d'obtention des informations.
La domiciliation bancaire d'un débiteur est
actuellement une information capitale dans le cadre du recouvrement. Le
législateur a donné aux huissiers de justice la
possibilité d'accéder plus facilement à ces
informations.
Section II : Accès au fichier des comptes
bancaires
La loi du 11 février 200415(*) en son titre IX a notamment
réformé le statut de certaines professions judiciaires ou
juridiques, dont la profession d'huissier de justice, leur permettant en outre
un accès au fichier des comptes bancaires (FICOBA), apport très
utile pour la profession. Ce fichier a été créé en
1971. Son fondement juridique se trouve être l'article 1649 A du code
général des impôts, qui fait obligations aux
administrations, aux établissements ou aux organismes soumis au
contrôle de l'autorité administrative ou de toute personne qui
reçoit habituellement en dépôt des valeurs
mobilières, titres ou espèces, de déclarer à
l'administration des impôts l'ouverture et la clôture des comptes.
Il contient des informations sur les titulaires des comptes ainsi que les
références des comptes (n°, date d'ouverture, localisation
de l'établissement) à l'exclusion par contre de toutes
informations concernant les mouvements de valeurs.
Le dispositif antérieur était régi
principalement selon les dispositions de l'article 39 de la loi du 9 juillet
1991, l'huissier de justice n'avait donc pas cet accès direct
« Sous réserve des dispositions de l'article 51, à la
demande de l'huissier de justice chargé de l'exécution, porteur
d'un titre exécutoire et au vu d'un relevé certifié
sincère des recherches infructueuses qu'il a tentées pour
l'exécution, le procureur de la République entreprend les
diligences nécessaires pour connaître l'adresse des organismes
auprès desquels un compte est ouvert au nom du débiteur
(...)». L'huissier de justice devait passer par le biais de la
requête au procureur de la République.
Désormais, selon les nouvelles dispositions de cet
article 39 de la loi du 9 juillet 1991 ainsi que modifiées par cette loi
du 11 février 2004, en son premier alinéa, « l'huissier
de justice chargé de l'exécution, porteur d'un titre
exécutoire, peut obtenir directement de l'administration fiscale :
l'adresse des organismes auprès desquels un compte est ouvert au nom du
débiteur. » En revanche, si cette demande n'aboutit pas et que
l'administration ne dispose pas de cette information, l'huissier de justice
pourra demander au procureur de la République « d'entreprendre
les diligences nécessaires pour connaître l'adresse de ces
organismes ». Le système de requête au procureur de la
République pour obtenir ce genre d'informations est donc
relégué au second rang. C'est une importante et nouvelle
disposition pour la profession car elle permet d'obtenir ces renseignements un
peu plus rapidement (quatre mois aujourd'hui). L'ancienne procédure
était à la fois lente et peu efficace.
L'article du décret du 31 juillet 1992 en ses nouvelles
dispositions précise qu'en vue d'obtenir les informations
mentionnées au premier alinéa de la loi du 9 juillet 1991,
« l'huissier de justice saisit le service central gestionnaire du
fichier des comptes bancaires et assimilés relevant du ministère
chargé des finances. La requête contient l'énonciation du
titre exécutoire dont est porteur l'huissier de justice ». Une
fois la demande traitée, « le service central gestionnaire du
fichier des comptes bancaires et assimilés transmet les informations
requises au vu des seuls éléments figurant dans la
requête ».
Cependant ces nouvelles dispositions ne modifient pas les
conditions de cette recherche : l'huissier de justice doit être
porteur d'un titre exécutoire et certifier que ses propres recherches
sont restées vaines.
La Commission Nationale Informatiques et Libertés
(CNIL) chargée de veiller à la protection des données
personnelles, a donné un avis favorable à cette
réforme16(*) en
précisant en outre qu'un contrôle rigoureux devrait avoir lieu
quant à la vérification de l'auteur de la demande, de la
validité du titre exécutoire, de la présence d'un
relevé certifié sincère de recherches infructueuses, ainsi
que la conformité de la demande aux conditions légales de
transmission des renseignements. Par ailleurs, la Commission considère
que la centralisation des demandes des huissiers de justice et leur traitement
par le service central du fichier FICOBA constitueraient des garanties
supplémentaires.
Cette mesure est destinée à faciliter le
recouvrement par les huissiers de justice des créances constatées
par le titre exécutoire et in fine à privilégier la saisie
de comptes bancaires par rapport aux autres mesures d'exécution plus
onéreuses et traumatisantes pour le débiteur. Les chances de
recouvrement de créance qu'elles soient civiles ou commerciales sont
considérablement augmentées et le gain de temps n'est pas
négligeable. Bien évidemment ce processus ne fonctionne que
lorsque le ou les comptes du débiteur sont provisionnés.
En dehors des différentes autorités pouvant
être interrogées, lors des procédures d'exécution,
les tiers saisis peuvent être de réelles sources
d'informations.
Chapitre III : La place des
tiers dans les procédures
d'exécution
Dans l'ensemble, les obligations des tiers dans les
différentes procédures d'exécution se ressemblent mais il
convient de les étudier de façon générale (Section
I) puis séparément dans les procédures dans lesquelles
les tiers jouent un rôle important, dans la saisie attribution (Section
II), dans le cadre de la procédure de paiement direct d'une
créance alimentaire (Section III). L'ordonnateur et le comptable public
peuvent être également requis dans le cadre du recouvrement d'une
créance (Section IV). Par ailleurs, les tiers, dans le cadre d'autres
mesures comme la saisie-rémunération, saisie-vente ou encore
saisie-conservatoire peuvent avoir à communiquer les renseignements
qu'ils possèdent (Section V).
Section I Les obligations des tiers
En raison du titre exécutoire et de sa mise en oeuvre,
les parties à la procédure présentent un lien de droit.
Les tiers parties sont les personnes non concernées par celui-ci. Les
tiers saisis sont ceux qui détiennent un ou plusieurs
éléments issus du patrimoine du débiteur. Leurs principaux
devoirs sont de s'abstenir d'entraver les procédures d'exécution
(I) et de collaborer (II).
I Devoir d'abstention
Ce devoir d'abstention est énoncé par l'article
24 de la loi du 9 juillet 1991 qui dispose en son alinéa 1 que :
« Les tiers ne peuvent faire obstacle aux procédures
engagées en vue de l'exécution ou de la conservation de la
créance ». Que leur concours soit requis ou non, ils doivent
s'abstenir de tout type de comportement pouvant ralentir l'exécution de
la saisie.
Aucun tiers n'a le droit de s'opposer physiquement à
une procédure d'exécution.
Certes, pour pouvoir opposer ce devoir à tous tiers,
encore faut-il que la procédure engagée soit légale et
respecte les prescriptions de la loi du 9 juillet 1991 et du décret du
31 juillet 1992.
De tels comportements gestes, mots
déplacés, violence envers l'huissier de justice instrumentaire,
peuvent empêcher celui-ci d'obtenir les renseignements nécessaires
à la poursuite de sa mission.
La Cour de cassation, dans un arrêt en date du 21 mai
1997, rappelle que l'huissier de justice est dépositaire de
l'autorité publique au sens de l'article 433-5 du code
pénal.17(*)
C'est donc ce code pénal qui servira pour
sanctionner toute résistance violente à ce dépositaire de
l'autorité publique dans l'exercice de sa mission. Il en va de
même pour les paroles et les gestes déplacés qui seront
constitutifs d'un outrage.
Au-delà de ce devoir d'abstention, les tiers ont un
devoir de collaboration par rapport à l'huissier de justice en charge du
dossier les concernant.
II Devoir de
collaboration
In fine, l'article 24 de la loi du 9 juillet 1991 dispose que
les tiers « doivent apporter leur concours » aux
procédures d'exécution « lorsqu'ils en sont
également requis ».
Les tiers sont, dans un dossier de recouvrement de
créance, tenus de communiquer les informations qu'ils détiennent
concernant le débiteur. Il peut s'agir de renseignements par rapport
à des sommes dont ils restent redevables envers le débiteur ou
encore d'informations qui pourraient permettre de déterminer si certains
biens sont saisissables ou pas. Ce devoir d'information incombe
également à toute personne qui serait en possession de biens du
débiteur, comme ce peut être le cas d'un établissement
bancaire qui est tenu de communiquer, lorsqu'elle est requise à cet
effet, tout renseignement pouvant aider à connaître les avoirs
bancaires, les coffres et biens du débiteur.
Ce devoir général de collaboration à
l'exécution auquel sont tenus les tiers, est sanctionné par le
prononcé d'astreintes ou de dommages et intérêts lorsqu'un
préjudice résultant du défaut de collaboration est
prouvé. En effet, sans motif légitime, il est impossible de
refuser cette collaboration avec l'huissier de justice concerné.
Par ailleurs, ce concours du tiers à la mise en oeuvre
de l'exécution vise en premier les tiers saisis qui doivent informer le
saisissant sur sa demande des biens meubles, créances qu'ils
détiennent pour le compte du saisi. Ces obligations résultent des
dispositions des articles tant de la loi du 9 juillet 1991 que du décret
du 31 juillet 1992.
Il est donc utile d'étudier ces obligations faites au
tiers dans les différentes procédures d'exécution :
saisie-attribution, procédure de paiement direct d'une pension
alimentaire
Section II Les tiers et la saisie-attribution
Le tiers saisi est tenu d'obligations : celle de
renseigner l'huissier de justice chargé de la mesure d'exécution,
obligation à exécuter « sur le champ », au
moment de l'acte de saisie. Il est nécessaire de faire la
différence entre contenu de la déclaration et conséquences
d'un retard ou éventuellement d'un refus.
I Obligations du tiers
saisi
1) L'obligation de déclaration du
tiers saisi
Selon les dispositions de l'article 44 de la loi du 9 juillet
1991, le tiers saisi, grâce à cette déclaration, permet de
faire connaître au créancier « l'étendue de ses
obligations à l'égard du débiteur ainsi que des
modalités qui pourraient les affecter et, s'il y a lieu, les cessions de
créances, délégations ou saisies
antérieures ». L'article 59 du décret du 31 juillet
1992 ajoute que « le tiers saisi est tenu de fournir sur le champ
à l'huissier de justice les
renseignements » prévus à l'article susvisé
« et de lui communiquer les pièces justificatives ».
La jurisprudence est très abondante en la
matière compte tenu de la rigueur des obligations du tiers dans le cadre
de cette procédure.
L'expression « sur le champ » engendre
certains problèmes. En effet, le système bancaire est
informatisé mais parfois certains renseignements ne peuvent être
obtenus qu'après interrogation d'un autre service. Cependant, un
arrêt de la Cour de cassation, en date du 2 avril 199718(*) précise qu'un retard
d'un jour suffit à caractériser le refus de fournir les
renseignements prévus par les dispositions du décret de 1992. Le
tiers saisi est tenu de satisfaire spontanément à son obligation
de renseignement au même moment que la signification du procès
verbal de saisie-attribution.
Le destinataire de cet acte de saisie doit être bien
identifié. En effet, dans un jugement du 28 septembre 2000, le tribunal
rappelle que « le banquier n'est constitué tiers saisi et donc
tenu à l'obligation de renseignements prévue par les articles 44
de la loi du 9 juillet 1991 et 59 du décret du 31 juillet 1992
qu'à compter de la signification du procès verbal de saisie
attribution, matérialisé par la remise dudit procès verbal
à une personne habilitée à le recevoir ».
La notion de temps insérée dans ces articles
permet de faire face à une éventuelle entente entre le tiers
saisi et le débiteur qui permettrait à ce dernier, une fois
informé, de vider les comptes qu'il détient au sein de
l'établissement bancaire.
Par ailleurs, si l'établissement bancaire n'est
finalement pas débiteur du saisi dans l'affaire concernée,
l'huissier de justice peut, compte tenu de la déclaration du tiers
saisi, s'en rendre compte « sur le champ ».
La déclaration du tiers saisi concerne bien
évidemment les comptes bancaires du débiteur cependant, il
convient d'en étudier de façon précise son contenu.
2) Le contenu de la déclaration du
tiers saisi
L'article 47 de la loi du 9 juillet 1991 fait obligation
à l'établissement bancaire « de déclarer le
solde du ou des comptes du débiteur au jour de la saisie ».
L'article 74 du décret du 31 juillet 1992, quant à lui,
évoque l'ensemble des comptes du débiteur. La formulation est
générale, la banque tiers saisi est tenue d'indiquer à
l'huissier de justice les comptes de dépôt, ordinaires ou joints,
comptes courants, mais également tous les comptes et livrets
d'épargne « ouverts au jour de la saisie » dont le
solde représente une valeur patrimoniale, en l'espèce une somme
d'argent. Le banquier doit en dresser une liste complète.
La Cour d'appel de Paris, dans un arrêt en date du 27
juin 1996, précise que l'obligation de renseignement qui pèse sur
le tiers saisi « porte non sur les seuls comptes enregistrant des
créances de sommes d'argent mais sur tout compte au sens
générique du terme dont le débiteur est titulaire au jour
de la saisie qu'il s'agisse de comptes d'espèce (...) tels des comptes
courants ou de dépôt, rémunérés ou non,
à terme ou à vue, individuels ou collectifs, des comptes de
provision ou de gages d'espèces ou de compte de titres portant placement
de trésorerie tels des warrants financiers, bon de caisse et titres de
créances négociables ».
Une déclaration complète permet au
créancier d'appliquer le principe de proportionnalité et de
pratiquer une saisie attribution adaptée.
Dans le cas où le tiers saisi manquerait à ses
obligations, cas de refus de répondre, renseignements inexacts ou encore
retard dans la réponse, il encourt des sanctions.
3) L'assouplissement de la notion de
délai
La sévérité de la jurisprudence encourage
les tiers saisis à remplir leur obligation de déclaration.
Malgré tout, les juridictions font preuve d'une certaine souplesse en
prenant en compte les possibles motifs légitimes.
L'expression qui pose le plus de difficulté est
évidemment « sur le champ ». En effet, comme
énoncé précédemment, cela peut poser certains
problèmes compte tenu des nombreuses agences que peut avoir un
établissement bancaire et des mouvements des comptes au jour de la
saisie.
En pratique, l'application de cette disposition est donc
soumise à un certain assouplissement. En effet, la réponse du
tiers n'est que rarement voire jamais complète et donnée
« sur le champ ». Elle peut être incomplète,
partielle « sur le champ » et complétée par
la suite et ce rapidement malgré tout, elle peut aussi être
absente et donnée par la suite, mais cette dernière
hypothèse reste rare.
Ces cas peuvent s'expliquer par différents motifs. Par
exemple, si la signification a été faite à une personne
non habilitée à recevoir l'acte, sans pouvoir, l'acte va devoir
être transmis par voie interne voire re-signifié à une
personne habilitée. Ces hypothèses peuvent trouver
également leur origine dans le fait que l'acte a été
signifié au siège social. Le retard ou le manque d'information
peuvent être dus à la nécessité de recherches
complémentaires pour connaître avec précision
l'étendue des obligations du tiers saisi envers le saisi.
La Banque Postale et la CEP bénéficient
légalement d'un délai de vingt quatre heures pour
répondre.
L'expression « sur le champ » permet
à l'huissier de justice pratiquant la saisie attribution d'obtenir
rapidement des renseignements sur les comptes bancaires du saisi.
Ce retard dans la déclaration peut être
sanctionné sur la base des dispositions du décret du 31 juillet
1992, mais en exposant un motif légitime le tiers saisi peut être
exonéré de ces sanctions.
II Les sanctions encourues
par le tiers saisi
1) Les différentes sanctions
envisagées
L'article 60 du décret du 31 juillet 1992
dispose que « le tiers saisi qui, sans motif légitime, ne
fournit pas les renseignements prévus est condamné, à la
demande du créancier, à payer les sommes dues par ce dernier,
sans préjudice de son recours contre le débiteur ».
« Il peut aussi être condamné à
des dommages et intérêts en cas de négligence fautive ou de
déclaration inexacte ou mensongère ».
Le tiers saisi ne peut encourir de sanctions que lorsque
l'acte de saisie est valable et que le tiers saisi est bien à juste
titre tiers saisi.
Dans un arrêt du 5 juillet 2000 la Cour de cassation
rappelle le fait que le tiers saisi ne peut être condamné aux
causes de la saisie pour manquement à son obligation légale de
renseignement lorsqu'il n'est tenu à aucune obligation envers le
débiteur.
Les arrêts de l'Assemblée plénière
de la Cour de cassation en date du 5 juillet 2000 ont permis une jurisprudence
claire. Le tiers saisi sera condamné au paiement des causes de la saisie
dans deux cas lorsqu'il effectue une déclaration incomplète ou
mensongère. En cas de négligence fautive, il sera condamné
à payer des dommages et intérêts calculés en
fonction du préjudice subi par le créancier encore faudra-t-il
une faute, un dommage et un lien de causalité.
A la lecture des dispositions de l'article 60 du décret
énoncé ci-dessus, l'adverbe « aussi » aurait
pu sous-entendre un cumul de ces sanctions. La Cour de cassation a, au
contraire, voulu poser une séparation entre ces sanctions et
éviter leur cumul.
Cette jurisprudence a été confirmée dans
un arrêt de la Cour de cassation, le 5 juillet 2001 : le tiers saisi
qui, sans motif légitime, ne déclare pas sur le champ
l'étendue de ses obligations à l'égard du débiteur,
peut être condamné à garantir le paiement des causes de la
saisie.19(*)
Ces dispositions évoquent les sanctions pouvant
être encourues par les tiers mais cependant n'indiquent pas des causes et
motifs légitimes pouvant les exonérer.
2) Les cas d'exonération pour le
tiers saisi
La notion de motif légitime est subjective et le
contenu, prétorien. La jurisprudence a, au fil du temps, affiné
cette notion et son contenu pour permettre une sécurité
juridique.
La nécessité de récapituler les comptes
pour connaître exactement ce dont le tiers saisi est redevable envers le
débiteur peut constituer ce motif légitime par exemple20(*).
Le motif légitime soulevé par le tiers saisi
pour expliquer le retard, l'inexactitude de sa déclaration peut trouver
sa cause dans les modalités de signification. Il est vrai que la
signification par exemple à une hôtesse d'accueil non
habilitée à recevoir l'acte comme vu précédemment,
peut entraîner un retard dans la transmission de la
déclaration.
La Cour de cassation a soulevé que l'exigence de
réponse « sur le champ » peut s'avérer
« irréaliste si la signification de l'acte n'a pas
été faite entre les mains du destinataire de l'acte ou du
possesseur de renseignements »21(*).
En revanche, n'est pas considéré comme un motif
légitime un dysfonctionnement informatique allégué par la
banque22(*) ou encore la
nécessité de procéder à des recherches à
l'étranger, le Tribunal rappelant que, de nos jours, les systèmes
sont informatisés.23(*)
Il convient de rappeler que cette liste de motifs
légitimes est loin d'être exhaustive compte tenu des nouvelles
jurisprudences quasi quotidiennes.
Au-delà de la procédure de saisie-attribution et
de la place des tiers dans celle-ci, ces derniers ont des obligations
semblables de déclaration dans d'autres mesures d'exécution.
Section III Le rôle du tiers dans la procédure de
paiement direct
La procédure de paiement direct est la plus simple et
la plus rapide en matière de recouvrement alimentaire. Elle permet
d'obtenir le paiement de la pension par des tiers (employeurs, organismes
bancaires ou de versement des prestations) disposant de sommes dues au
débiteur.
Le recours par le bénéficiaire d'une pension
alimentaire à cette procédure peut se faire dans trois cas :
s'il ne parvient pas à se faire verser la pension alimentaire, si
celle-ci est versée irrégulièrement ou
incomplètement, il doit pouvoir justifier d'une décision de
justice définitive ou immédiatement exécutoire. Le recours
à ce type de procédure peut également se faire dans le
cadre d'un accord entre créancier et débiteur.
Il suffit qu'une seule échéance de la pension
alimentaire soit impayée pour pouvoir entamer cette procédure. Le
créancier doit dès lors s'adresser à un huissier de
justice de son lieu de résidence et lui fournir le jugement relatif
à la pension alimentaire, le décompte des sommes dues ainsi que
tous les renseignements en sa possession concernant le débiteur.
Certains organismes sont tenus de communiquer à
l'huissier de justice en charge du dossier l'adresse du débiteur ou
de son employeur, si le bénéficiaire ne les connaît pas. Ce
sont : l'administration fiscale, la sécurité sociale, le
service des recherches dans l'intérêt des familles, le Fichier
National des Chèques Irréguliers (FNCI) ainsi que les fichiers
départementaux des cartes grises des préfectures.
En matière de recouvrement de la pension alimentaire,
l'huissier de justice va donc pouvoir requérir de la part du tiers saisi
les mêmes renseignements qu'une réquisition faite au
ministère public. L'article 7 de la loi du 2 janvier 1973 prévoit
que les tiers saisis faisant l'objet d'une demande de paiement direct
« sont tenus de réunir et de communiquer, en faisant toutes
les diligences nécessaires, à l'huissier de justice chargé
par le créancier de former la demande de paiement direct, tous
renseignements dont ils disposent ou peuvent disposer permettant de
déterminer l'adresse du débiteur de la pension alimentaire,
l'identité et l'adresse de son employeur ou de tout tiers
débiteur ou dépositaire de sommes liquides ou
exigibles ».
Par cette réquisition, l'huissier de justice pourra
obtenir directement ces informations, ce qui permet un réel gain de
temps et une correspondance avec le souci de rapidité présent
dans les procédures d'exécution.
Cet accès direct aux informations nécessaires
reste pourtant, à l'heure actuelle, une exception dans le système
actuel de réglementation et d'accès aux informations touchant
à la vie privée. Pourtant il est nécessaire pour la
conduite des procédures d'exécution de les mener a bien
rapidement.
Section IV : L'ordonnateur et le comptable public
Les personnes publiques tiers saisis sont soumises aux
règles générales des procédures d'exécution
(loi 9 juillet 1991 et décret du 31 juillet 1992) ou à des
règles spécifiques lorsqu'elles sont dotées d'un comptable
public (décret 31 juillet 1993, textes anciens non abrogés ou
encore partiellement en vigueur).
Selon les dispositions de l'article 3 du décret du 29
décembre 1962, un des principes fondamentaux de la comptabilité
publique est celui de la séparation des ordonnateurs et des comptables
publics.
I Interrogation de
l'ordonnateur
Le principe d'insaisissabilité des biens d'une personne
morale de droit public n'est pas un obstacle à ce qu'une
saisie-attribution soit pratiquée sur des sommes dues par celle-ci
à une personne privée.
Selon les dispositions de l'article 25 de la loi du 9 juillet
1991 « Lorsque la mesure doit être faite entre les mains du
comptable public, tout créancier porteur d'un titre exécutoire ou
d'une autorisation de mesure conservatoire peut requérir de
l'ordonnateur qu'il lui indique le comptable public assignataire de la
dépense ainsi que tous les renseignements nécessaires à la
mise en oeuvre de la mesure ».
Ces dispositions vont donner à l'huissier de justice
les moyens d'interroger directement la personne susceptible de l'orienter dans
le labyrinthe de l'administration, permettant un réel gain de temps.
L'ordonnateur a en charge de liquider et d'ordonnancer les
dépenses, de constater les droits des organismes publics et de liquider
les recettes. Contrairement au comptable public, il ne peut manipuler aucune
somme d'argent.
Au terme de l'article 4 du décret du 31 juillet 1993,
l'acte de saisie doit, sous peine de nullité, être signifié
au comptable public assignataire de la dépense, autrement dit
auprès duquel l'ordonnateur est accrédité. En revanche, la
signification d'un tel acte à un ordonnateur ne peut pas être
couverte par une transmission au comptable assignataire. La Cour de cassation
précise, dans un arrêt de 1920, que cette opération
intérieure de trésorerie ne peut pas suppléer les
formalités essentielles édictées par la loi aux
intéressés24(*).
L'acte de saisie doit contenir les mentions issues des
dispositions de l'article 3 du décret du 31 juillet 1993 : mentions
de l'article 56 du décret du 31 juillet 1992 telle que
l'identification du débiteur, l'énonciation du titre, le
décompte des sommes réclamées... Il est nécessaire
d'éviter toute homonymie et les conséquences qui en
découleraient.
II Les obligations
incombant au comptable public
Le comptable public est considéré comme tous les
autres tiers saisis. Son rang de personne morale de Droit public ne le
soustrait pas aux obligations incombant à ces derniers aux termes de
l'article 24 de la loi du 9 juillet 1991 disposant que tout tiers saisi est
tenu d'apporter son concours aux procédures d'exécution.
Les articles 44 de la loi du 9 juillet 1991 et l'article 59 du
décret du 31 juillet 1992 imposent au tiers saisi de déclarer
« sur le champ » l'étendue de ses obligations envers
le saisi ainsi que les modalités pouvant les affecter. Le décret
du 31 juillet 1993 pose un tempérament et n'impose pas au comptable
public de donner sa réponse « sur le champ ». Il
dispose de vingt quatre heures pour répondre. Ce délai peut
s'expliquer par le fait que le comptable public doive interroger, se concerter
avec d'autres personnes ou encore par le souci du respect de l'organisation de
l'administration.
Aux termes de l'article 5 du décret du 31 juillet 1993,
le comptable public est tenu de fournir à l'huissier de justice les
renseignements prévus par l'article 44 de la loi du 9 juillet
1991 : « étendue de ses obligations à
l'égard du débiteur ainsi que les modalités qui pourraient
les affecter et, s'il y a lieu, les cessions de créances,
délégations et saisies antérieures ». Il doit,
de plus, lui communiquer les pièces justificatives.
Le secret professionnel ne peut pas constituer un obstacle
à cette déclaration.
Tout manquement par le tiers saisi à ses
obligations : toute déclaration inexacte ou mensongère
sera sanctionnée qu'il s'agisse d'un refus de répondre sans motif
légitime ou d'une négligence fautive. Dans le premier cas, la
sanction sera de payer les sommes dues au créancier sans
préjudice de son recours contre le débiteur. Dans l'autre cas, le
tiers saisi pourra par exemple être contraint à effectuer sa
déclaration par astreinte sous peine de dommages et
intérêts par exemple.
Section V La place des tiers dans les autres
mesures
I
Saisie-rémunérations
La base de cette procédure est une conciliation entre
un créancier et son débiteur. Si celle-ci échoue, le
greffier procède dans les huit jours à l'établissement
d'un procès verbal de non-conciliation. L'acte de saisi établi
par ce dernier devra être porté à connaissance du
débiteur et du tiers saisi qui sera, en la matière, l'employeur
de ce dernier.
La notification faite à l'employeur engendre certaines
conséquences : il devient tenu d'obligations dont la principale est
une obligation de déclaration.
L'acte de saisie lui enjoint de faire une déclaration
dans les quinze jours au plus tard suivant la notification. L'employeur requis
doit, selon les dispositions de l'article L.145-8 du Code du travail :
« faire connaître la situation de droit existant entre
lui-même et le débiteur saisi ainsi que les cessions, saisies,
avis à tiers détenteur ou paiement direct de créances
alimentaires en cours d'exécution ».
Cette obligation incombant au tiers saisi est, pour être
remplie, soumise à sanctions. Selon le Code du travail en son article L
145-8 et R 145-21, l'employeur qui, sans motif légitime,
n'exécute pas ou mal son obligation, pourra être condamné
au paiement d'une amende civile, sans préjudice des dommages et
intérêts qui pourront lui être réclamés.
Le rôle du tiers saisi est aussi relatif à ce
devoir de collaboration dans la procédure de saisie-conservatoire,
saisie-vente.
II Le rôle des tiers
en matière de saisie- conservatoire, saisie-vente
En matière de saisie-conservatoire, quand celle-ci
nécessite l'intervention d'un tiers, selon les dispositions des articles
237 du décret du 31 juillet 1992 « Le tiers saisi est tenu de
fournir les renseignements prévus à l'article 44 de la loi du 9
juillet 1991 » et de remettre à l'huissier de justice
« toutes pièces justificatives ». Les renseignements
sont mentionnés sur l'acte de saisie ». Celui ci est donc
tenu de « déclarer à l'huissier de justice
l'étendue de ses obligations à l'égard du débiteur
ainsi que les modalités qui pourraient les affecter et s'il y a lieu les
cessions de créances, délégations ou saisies
antérieures ».
L'article 238 du même décret prévoit que
« le tiers qui, sans motif légitime, ne fournit pas les
renseignements prévus s'expose à devoir payer les sommes pour
lesquelles la saisie a été pratiquée si le débiteur
est condamné et sauf son recours contre ce dernier. Il peut aussi
être condamné à des dommages et intérêts en
cas de négligence fautive ou de déclaration inexacte ou
mensongère ».
En matière de saisie-vente, le tiers détenteur
de biens pour le compte du saisi doit les déclarer à l'huissier
de justice qui opère une saisie entre ses mains. De plus, il devra
déclarer ceux qui font l'objet d'une saisie antérieure selon les
dispositions de l'article 99 du décret du 31 juillet 1992 en son
alinéa 2. En ce qui concerne les sanctions auxquelles il s'expose s'il
ne fournit pas ces renseignements, elles sont identiques à celle vues
ci-dessus en matière de saisie-conservatoire.
Certes, ces renseignements ne servent pas à identifier
la personne du débiteur ou sa domiciliation bancaire, cependant, ils
servent à identifier les biens que le tiers saisi possède pour
son compte. Ils permettent donc à l'huissier de justice de diligenter
à bien la procédure et de parvenir au recouvrement de la dette
du saisi. Ces informations sont donc tout aussi importantes.
Ces chapitre I et II ont permis une étude des
différentes méthodes de recherche d'informations.
Désormais, il convient d'étudier ce que deviennent les
informations à l'issue de cette procédure une fois
collectées et rassemblées par l'huissier de justice ?
Chapitre III : Le
régime d'utilisation des données
obtenues et ses
conséquences
Les huissiers collectent des informations nécessaires
à la poursuite de mesures d'exécution adaptées. Comme cela
a été vu précédemment, la CNIL joue un rôle
prépondérant en matière de protection des données
à caractère personnel (I). La loi Informatique et Libertés
réglemente la conservation de ces informations (II)
I Le rôle de la CNIL
La Commission Nationale de l'Informatique et des
Libertés (CNIL) a été instituée par la loi du 6
janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux
libertés qui la qualifie d'autorité administrative
indépendante. Faisant partie du corpus législatif français
depuis près de trente ans, l'objectif de cette loi, tel
qu'énoncé par son article 1 est de protéger les citoyens
contre d'éventuelles atteintes à leur identité ou encore
leur vie privée face au traitement automatisé ou non des
données à caractère personnel.
La CNIL a été mise en place afin de limiter
l'accès à l'information en tenant compte des libertés
individuelles et des droits de la personne.
La nécessité d'information quant à la
poursuite d'une procédure civile d'exécution se heurte au
principe de protection de la vie privée. Les informations auxquelles il
est possible d'avoir librement accès ne font certes pas l'objet d'une
réglementation mais à l'inverse celles plus personnelles,
nécessitant des recherches plus pointues sont soumises à une
réglementation.
Selon les dispositions de l'article 2 de la loi Informatique
et Libertés citée précédemment, «
constitue une donnée personnelle toute information relative
à une personne physique identifiée ou qui peut être
identifiée, directement ou indirectement, par référence
à un numéro d'identification ou à un ou plusieurs
éléments qui lui sont propres. Pour déterminer si une
personne est identifiable, il convient de considérer l'ensemble des
moyens en vue de permettre son identification dont dispose ou auxquels peut
avoir accès le responsable du traitement ou tout autre
personne »
La CNIL vérifie que la loi est respectée en
contrôlant les applications informatiques, elle surveille par ailleurs la
sécurité des systèmes d'information en s'assurant que
toutes les précautions sont prises pour empêcher que les
données ne soient déformées ou communiquées
à des personnes non autorisées. La CNIL peut prononcer diverses
sanctions graduées : avertissement, mise en demeure, sanctions
pécuniaires...
Les utilisateurs de renseignements personnels ont des
obligations à respecter. En effet, les données concernant des
parcelles de vie privée, une potentielle diffusion pourrait alors porter
atteinte aux libertés des intéressés. La loi Informatique
et Libertés encadre l'utilisation des données de cette nature.
Parmi les droits reconnus aux débiteurs, à
l'article 39 de la loi susvisée figure, le droit d'accès au
traitement.
Ces données concernées doivent être
exactes, complètes et mises à jour. Selon l'article 40 de la loi
précitée, les intéressés ont un droit de
rectification, encore faut-il que le débiteur soit de bonne foi. Un
fichier doit avoir un objectif précis. Les informations
exploitées dans un fichier doivent être cohérentes par
rapport à son objectif. De plus, les informations ne peuvent être
réutilisées de manière incompatible avec la
finalité pour laquelle elles ont été collectées.
Tout détournement de finalité est passible de 5
ans d'emprisonnement et de 300 000 euros d'amende selon les dispositions
de l'article 226-21 du Code Pénal
Compte tenu des règles de la CNIL, qu'en est-il de la
conservation par les huissiers de justice des données ainsi
obtenues ?
II La conservation des
données obtenues
En ce qui concerne la durée de conservation des
informations, ces dernières ont une date de péremption
fixée par le responsable d'un fichier. Elles doivent être
conservées sur une durée raisonnable et proportionnelle à
l'objectif poursuivi par le dit fichier. Le fichier regroupant les
données personnelles doit être protégé.
Une étude d'huissier est dans l'obligation de
déclarer ses fichiers regroupant l'ensemble des données
collectées concernant les débiteurs. Elle doit donc respecter les
dispositions relatives au traitement et durée de conservation des
données eu égard au principe de proportionnalité quant
à leur finalité. La CNIL peut ainsi remplir ses fonctions et
contrôler les professions utilisant des fichiers regroupant des
données à caractère personnel.
« L'huissier de justice ne devra en aucun cas
communiquer des informations à un tiers ni les employer à la
constitution d'un fichier. De plus, il ne pourra les communiquer au
créancier lui-même que dans la seule mesure nécessaire
à l'exécution du titre, c'est-à-dire dans les seuls cas
où l'information doit figurer dans les actes de procédure. En
outre, pour éviter que des renseignements ne soient utilisés pour
d'autres procédures que celle pour laquelle ils ont été
sollicités » ce texte législatif, lorsqu'il
était encore à l'état de projet, contenait une autre
disposition : « l'huissier de justice devra à l'occasion
de toute mesure d'exécution pouvoir justifier de l'origine des
informations dont il s'est servi ». Le texte a donc été
adopté de façon plus restrictive et se trouve être contenu
dans les dispositions de l'article 41 de la loi du 9 juillet 1991.
Selon les dispositions de ce dernier en
vigueur, « les renseignements obtenus ne peuvent être
utilisés que dans la seule mesure nécessaire à
l'exécution du ou des titres pour lesquels ils ont été
demandés. Ils ne peuvent, en aucun cas êtres communiqués
à des tiers ni faire l'objet d'un fichier d'informations
nominatives ».
L'article 226-21 du Code Pénal prévoit des
sanctions pour les huissiers de justice qui, en violant la disposition selon
laquelle aucune information ne doit être transmise à des tiers ou
faire l'objet d'un fichier d'informations nominatives, ceux-ci porteraient
ainsi atteinte aux droits de la personne résultant des fichiers ou des
traitements informatiques.
Par ailleurs, l'officier ministériel pourrait faire
l'objet de sanctions disciplinaires et être condamné à des
dommages et intérêts.
La possibilité d'enregistrer des informations dans le
fichier de gestion des procédures est donnée au cas par cas. Des
données telles que celle d'identification (nom, prénom, sexe,
date et lieu de naissance), sont indispensables pour l'huissier de justice
instrumentaire pour des raisons de sécurité juridique. La Cour
d'appel de Paris a jugé qu'un acte d'huissier de justice était
nul pour avoir été délivré en mairie au nom de
« Mademoiselle » au lieu de « Madame »,
alors que, par la suite de cette mention erronée, la lettre avait
été refusée par la destinataire25(*). La situation familiale et le
régime matrimonial sont des informations relativement importantes pour
l'huissier de justice afin de connaître les biens propres ou communs des
époux, l'adresse et les caractéristiques du logement, ces
données seront utiles notamment en matière d'expulsion. Tant pour
la signification que pour l'exécution forcée, il est
indispensable pour l'huissier de justice de collecter des informations
concernant la vie professionnelle d'un débiteur. Pour les données
concernant la situation économique et financière d'un
débiteur ou encore ses moyens de déplacement, elles sont
collectées pour les stricts besoins des procédures
d'exécution qu'ils sont amenés à conduire.
En revanche, les informations relatives à la
santé, le numéro de sécurité sociale ou encore
l'appartenance religieuse, les origines raciales ne peuvent pas faire l'objet
d'un traitement de la part des huissiers de justice.
Ces données pourront être conservées dans
la base active avant d'être archivées pour un délai de cinq
ans. De cette obligation découle l'évidence selon laquelle
l'huissier de justice ne pourra pas utiliser les informations obtenues deux
fois pour le même débiteur au-delà de ce délai. Dans
l'hypothèse d'un nouveau titre exécutoire rendu contre le
même débiteur passé ces cinq ans, l'huissier de justice
devra donc déposer une nouvelle requête auprès du procureur
de la République, faire de nouvelles recherches, interroger de nouveau
le fichier FICOBA et bien entendu des frais supplémentaires seront
engendrés, à charge au débiteur de les payer
ultérieurement.
Comment, avec la protection actuelle des consommateurs et des
débiteurs, le législateur peut-il être d'accord sur le fait
qu'un d'entre eux paye à nouveau des frais pour permettre à
l'huissier de justice d'obtenir des informations déjà
collectées dans le cadre d'un précédent dossier ?
La CNIL confirme le fait que les huissiers de justice ne
peuvent pas utiliser plusieurs fois les informations obtenues. Sachant que
celles-ci le sont en vertu d'un titre exécutoire précis, elles ne
pourront pas être réutilisées dans le cadre d'une nouvelle
procédure engagée contre le même débiteur.
Il conviendrait d'être réaliste, le rôle
des huissiers de justice n'est pas d'être en perpétuelle recherche
des débiteurs mais principalement de parvenir au recouvrement de
créances et de procéder à la signification d'actes
détachés. Les renseignements ainsi obtenus devraient pouvoir
être légalement réutilisables compte tenu de leur
importance et des difficultés pour les obtenir.
Par ailleurs, obligation est faite aux officiers
ministériels de conserver en minutes à l'étude l'ensemble
des actes signifiés par les clercs. Selon les dispositions du
décret du 29 février 1956, en son article 29-1, « les
actes, exploits et procès verbaux sont conservés en minutes
pendant la durée fixée par l'article 17 du décret
n°79-1037 du 3 décembre 1979 relatif à la compétence
des services d'archives publics et à la coopération entre les
administrations pour la collecte, la conservation et la communication des
archives publiques ».
La durée de conservation des archives et actes
d'huissier de justice est fixée par le décret du 29
février 1956, modifié par la loi du 3 janvier 1979 et le
décret du 3 décembre 1979, qui indique que les actes, exploits et
procès-verbaux établis en double original, doivent être
conservés par l'huissier de justice pour une durée d'au moins 30
années.
L'article 29-5 du même décret dispose que
« les opérations successives justifiées par sa
conservation, notamment les migrations dont il peut faire l'objet ne retirent
pas à l'acte sa nature original ». Cette disposition
sous-entend que les minutes doivent être conservées pendant un
temps certain, assez long pour être susceptibles d'être
« déménagées ».
L'article 29-6 du décret susvisé dispose que
« les huissiers de justice peuvent délivrer des
expéditions des actes ou procès verbaux qu'ils détiennent
en minute à toutes personnes intéressées qui, lors de
l'établissement du procès verbal ou de la signification de l'acte
auront déjà soit reçu le second original, soit une
copie ».
En effet, outre les nom, prénoms, date de naissance,
adresse, éventuellement profession du débiteur, sont notés
sur les procès verbaux de saisie-attribution les numéros de
compte bancaire du saisi et donc la domiciliation de ce dernier puisque dans
cette hypothèse l'acte est signifié au tiers saisi : la
banque du débiteur. Il en va de même pour la signification de
certificat de non paiement de chèques. En effet, une copie de chacun
d'eux comportant tous les renseignements relatifs à la domiciliation
bancaire du débiteur est jointe à l'acte de signification.
Il y a donc bien deux obligations qu'un officier public et
ministériel est tenu de respecter : d'une part, celle de conserver
les actes signifiés par l'étude en minutes autrement dit de
conserver des archives, d'autre part, obligation leur est faite de ne pas
conserver les données personnelles obtenues sur un débiteur suite
à une procédure de requête au procureur de la
République. Comment peut-il être envisageable de respecter deux
obligations à première vue contradictoires ?
Au-delà de cette législation quelque peu
désuète eu égard aux nouvelles technologies, Internet
véhicule un réel marché parallèle de l'information
(Titre II), qui promet à ses clients potentiels d'obtenir des
renseignements d'ordre privé sur un particulier (Section I). Ces
sociétés sont-elles soumises à une quelconque
réglementation? (Section II). Par ailleurs, les huissiers de justice
peuvent-ils « rivaliser » avec un marché
spécialisé dans cette quête de l'information ?
(Section III)
TITRE II
Existence d'un marché
parallèle
La lenteur des processus étudiés dans le titre I
a des conséquences pour le créancier. Un débiteur, durant
les trois mois d'attente d'une éventuelle réponse de la part du
procureur de la République, peut par exemple avoir organisé son
insolvabilité si c'est un particulier et avoir été mise en
liquidation si c'est une société commerciale.
Certaines personnes ont profité de cette brèche
pour s'y engouffrer et créer un véritable marché de
l'information (Chapitre I). Quel est donc le but de ces sociétés
qui ne semblent pas soumises à une réglementation ? Par
ailleurs, les conséquences sont néfastes pour la
société mais surtout pour la profession
d'huissier de justice (Chapitre II).
Chapitre I : Le marché
parallèle de l'information
Ce marché parallèle de l'information est
alimenté par des sociétés spécialisées en la
matière (SectionI). Il convient de savoir à quelle
réglementation elles sont soumises (SectionII).
Section I : Des sociétés
spécialisées
Les sites Internet de ces sociétés permettent
à de nombreux clients potentiels d'y avoir accès (I). Cependant
quelle est réellement la nature des renseignements qu'elles
obtiennent ?(II)
I Les potentiels clients de
ces sites Internet
Internet, avancée technologique, véhicule de
nombreux sites proposant toutes sortes de services. De nos jours, au minimum un
quart de la population française a déjà effectué un
ou plusieurs achats sur Internet. Les enquêtes peuvent faire partie de
ces achats.
Il convient de faire la différence entre les
détectives et enquêteurs privés qui respectent le droit
positif et les autres. Les premiers n'usurpent aucun titre, aucune
identité afin d'obtenir des renseignements d'ordre privé et les
autres n'ayant aucun scrupule et se cachent parfois derrière des
sociétés au nom à consonance juridique tel
« juridis » par exemple. La CNIL26(*) fait bien la distinction entre
les professionnels qui prennent en compte les dispositions de la loi
Informatiques et Libertés dans le traitement des données
concernant leurs clients et les autres qui n'ont manifestement pas connaissance
des règles à respecter ou qui n'en tiennent volontairement pas
compte.
Il suffit de passer par un moteur de recherche, d'inscrire des
mots clés, par exemple : recherche, débiteur,
enquête... et certains de ces sites apparaissent27(*). Leurs enquêtes sont de
simples produits à vendre. Des renseignements touchant à la vie
privée des particuliers s'achètent comme un livre ou une place de
théâtre en quelques clics.
Les services proposés à tout créancier
désireux de retrouver son débiteur sont divers. Les
créanciers intéressés peuvent obtenir la localisation de
leur débiteur, les coordonnées de compte bancaire, le solde de
celui-ci ou encore un inventaire de son patrimoine. Leurs formules sont
attractives, elles promettent rapidité et résultats. En moyenne
les résultats escomptés sont là au bout d'un délai
de trois semaines. Pour tout créancier qui souhaite obtenir gain de
cause, c'est une réelle aubaine.
Ces sites sont donc à la portée de tout
particulier ou toute société intéressée qui veut
faire exécuter un titre exécutoire. En revanche, les cas de
figure peuvent être différents, soit les clients de ces sites
Internet veulent éviter d'avoir recours aux exploits d'un huissier de
justice, soit au contraire ils recherchent des renseignements avant d'y avoir
recours. En effet, seuls, ils ne pourraient pas les obtenir eu égard
à leur nature d'ordre privé.
Les sociétés commerciales et leur service
contentieux sont d'importants clients potentiels. En effet, avant de conclure
un contrat, ils peuvent être tentés d'enquêter sur la
solvabilité de leur futur cocontractant, la méfiance est de
rigueur en la matière eu égard à la protection actuelle et
à la rapidité avec laquelle des particuliers peuvent être
déclarés en faillite personnelle et des sociétés
mises en liquidation judiciaire.
Les services contentieux, sans recours à un huissier de
justice, n'ont en effet pas accès à la procédure de
requête au procureur de la République, ils doivent donc trouver
les mêmes renseignements par leurs propres moyens. Ce marché
parallèle est donc une solution facile pour ces sociétés
qui ne seront pas très regardantes par rapport à la
légalité avec laquelle ces renseignements sont obtenus tant que
le résultat escompté est présent.
Les cabinets de recherche sont donc
généralement mandatés par un créancier notamment
établissement de crédit ou par un cabinet de recouvrement de
créances pour procéder à certaines diligences. Parfois les
cabinets de recherches procèdent eux-mêmes à la
sous-traitance de certaines recherches auprès d'autres
sociétés.
Le « plus » de la majorité de ces sites
est même de proposer le paiement au prorata du résultat.
« Nos recherches sont facturées exclusivement
au résultat ! »28(*) Sous toute logique, il est possible de penser que ces
derniers sont obtenus dans la majorité des cas. Ces
sociétés ne peuvent donc pas être considérées
comme des leurres compte tenu de ces propositions en matière de
règlement. « Juridis.org s'engage à rembourser le
souscripteur en cas de recherche négative ».
Malgré tout, si le paiement était
effectué sans tenir compte du fait que les résultats soient
obtenus ou non, il aurait été possible de penser que ces
sociétés n'offraient aucune garantie en matière de
résultats, qu'elles n'obtenaient pas à chaque fois les dits
renseignements et qu'en conséquence, celles-ci pouvaient être en
quelque sorte des leurres. Cependant, elles présentent ces garanties en
proposant le remboursement hors frais de dossier retenus si le but
recherché n'est pas atteint, elles reflètent donc
réellement l'existence de ce véritable marché
parallèle.
Après avoir étudié le fonctionnement de
ses sociétés, il est utile de comprendre quels sont
réellement les renseignements obtenus et leur nature ?
II La nature des
renseignements obtenus
Les renseignements sont divers, ils peuvent toucher au
patrimoine immobilier ou mobilier, concerner la domiciliation bancaire et le
solde des comptes voire les revenus, l'adresse de l'employeur... En effet,
selon les sites, en l'espèce
www.juridis.org/recherches,
comme la plupart des autres sociétés spécialisées,
propose d'obtenir « les coordonnées bancaires d'une
personne physique ou morale », de « localiser les biens
immobiliers d'une personne physique ou morale », de
« déterminer la nature des revenus d'une personne
physique », ou encore de se « renseigner sur la
solvabilité d'une personne physique ou morale». « Nos
enquêtes de solvabilité prévoient l'identification et
l'analyse : des revenus, des comptes bancaires, du patrimoine immobilier, du
patrimoine mobilier et roulant ».
Sur la base des premières informations données
par leurs clients, les enquêteurs privés procèdent aux
recherches demandées.
Le problème majeur est que ces sites ne font en aucun
cas allusion au recours d'un huissier de justice pour obtenir ce genre de
renseignements. Par ailleurs, dans un entretien téléphonique en
date du mercredi 14 mai 2008, la société
« Juridis » a déclaré que ses services
ne faisaient en aucun cas appel à un huissier de justice et que son
personnel était là au contraire pour pallier à la lenteur
des procédures de requêtes au procureur.
Certes, les huissiers de justice, comme cela a
été souligné précédemment, ne sont pas des
détectives privés mais ce sont malgré tout les garde-fous
de l'exécution, dont ils ont le monopole.
Certains renseignements peuvent être obtenus
après interrogation de tierces personnes : anciens voisins,
concierge, membres de la famille... Il en va ainsi en ce qui concerne par
exemple la localisation du débiteur à partir de sa
dernière adresse connue. Même si en pratique, les cas restent
rares, un débiteur peut avoir laissé en partant une adresse
à un tiers. Obtenir l'adresse d'une résidence principale peut
donc potentiellement rester dans le cadre légal.
Pour ce qui est des renseignements concernant la domiciliation
bancaire et le solde du ou des comptes du débiteur, ces derniers ne sont
probablement pas donnés par des membres de la famille ou des tiers
même s'ils sont interrogés, alors comment sont ils obtenus ?
Probablement frauduleusement eu égard aux informations qui suivent et
comme vu précédemment29(*).
Selon toutes dispositions légales et plus
précisément celles contenues dans la loi Informatique et
Libertés de 1971 visant à protéger tous les fichiers de
renseignements d'ordre privé, c'est le fichier FICOBA qui sert à
recenser les comptes de toute nature (bancaires, postaux, d'épargne...)
et à fournir aux personnes habilitées des informations sur les
comptes détenus par une personne ou une société.
Pour ce qui est de la liste des personnes
habilitées : autorités judiciaires, Banque de France,
huissier de justice... De telles informations ne sont donc pas données
à tout demandeur, alors sachant qu'elles sont obtenues, comment le
sont-elles puisque aucun site ne laisse penser qu'il y a ne serait-ce qu'un
recours à une personne habilitée à pouvoir obtenir de
telles informations ?
Quelle peut être l'éthique de ces sites qui
vendent des données touchant à la vie privée de
personnes ? Le fait d'être cité comme étant
débiteur dans une procédure ne permet pas pour autant une
violation des droits de la personne par des tiers non habilités.
De plus, comment ces sites peuvent-ils obtenir un inventaire
détaillé du patrimoine d'un tiers sachant que de nos jours la
tendance est à la dématérialisation du patrimoine ?
Ils peuvent sans doute interroger le cadastre, le bureau des
hypothèques. Certes, ce moyen reste ouvert à tous mais comment
interroger l'ensemble des bureaux existants dans la France
entière ?
Quant aux données portant sur l'employeur, le salaire
mensuel versé à l'employé
« débiteur » qui touche selon la position de la
jurisprudence actuelle à la vie privée, comment les
obtiennent-ils ? Il est possible de rester dans le cadre du voisinage
voire de l'entourage proche. Cependant, il faut être
réaliste : quel pourcentage de la population française
indique son salaire à ses voisins ? Cela doit approcher du taux
zéro, quant au fait de le donner à sa famille et ses amis, certes
le pourcentage peut être un plus élevé mais ces derniers ne
le divulgueront certainement pas au premier venu. Les résultats ne
peuvent donc pas être obtenus au moyen d'enquête auprès de
tiers. Ces sociétés ne seraient donc pas si florissantes si elles
n'avaient à leur portée que de tels moyens.
Ce marché parallèle de l'information est une
question tout à fait d'actualité. Au mois de mai 2008, une
affaire politique a éclaté, la personne visée étant
M. Olivier BESANCENOT. Pendant plusieurs mois, d'octobre 2007 à janvier
2008 au moins, la vie de celui-ci a été épiée et
mises en fiches de renseignements par une officine de renseignement
privé. Différents documents de cette dernière recensent
par exemple les numéros de compte bancaire de l'intéressé
et de sa compagne ainsi que les sommes au centime près ou encore
l'emplacement exact de son appartement avec sa fiche cadastrale, des
informations quant à son véhicule... Ce dernier a
déposé plainte pour violation du secret professionnel visant
d'éventuels complices dans les administrations dont auraient pu
bénéficier les commanditaires de cet espionnage. Il a
également soulevé le chef d'atteinte aux droits des personnes
pouvant résulter des fichiers et traitements informatiques. Cette
affaire remet une fois de plus en question le problème des
renseignements pouvant être obtenus et leur utilisation.
Ces enquêteurs arrivent à leurs fins mais comment
peuvent-t-ils y parvenir sans avoir la possibilité de passer par la
procédure de requête au procureur alors que les renseignements
obtenus sont de même nature ? Le législateur se voilerait-il
la face ? Sous toute logique, comment penser que ces
sociétés ne se jouent pas de la légalité ?
A la suite de plaintes concernant les méthodes
utilisées par des détectives privés pour retrouver les
coordonnées d'un débiteur, la CNIL a réalisé cinq
missions de contrôle afin de s'informer sur les pratiques et les
traitements de données mis en oeuvre par ces professionnels. Elle a pu
observer l'activité de ces sociétés et donc
répondre à toutes les interrogations précédentes.
Les recherches de débiteur ne se font pas dans le respect de l'article
6-1 de la loi du 6 janvier 1978.
Les investigations s'effectuent depuis les bureaux de la
société en consultant des bases de données publiques ou
par des appels téléphoniques auprès de tiers susceptibles
de communiquer des renseignements sur les personnes concernées. Par
ailleurs, les contrôles diligentés par la CNIL ont permis
d'identifier des pratiques d'accès indirect à ces fichiers. Des
copies de notes ont ainsi permis de révéler l'identité de
certains fonctionnaires manifestement disposés à livrer des
informations. De plus, des copies de scripts téléphoniques, dont
l'utilisation était manifestement de permettre de procéder
à des appels téléphoniques auprès d'administrations
en usurpant des titres ou fonctions afin d'obtenir de façon
détournée des informations sur des personnes
recherchées.
Il a fallu attendre que des personnes abusées par les
pratiques de ce genre de société portent plainte pour que la CNIL
procède à des enquêtes et entre dans le quotidien de ces
sociétés, quotidien qui se déroule en majeure partie dans
l'illégalité.
Un autre problème tout aussi important que l'existence
même de ces sociétés se trouve être que certains
fonctionnaires soumis au respect du secret professionnel sont tout à
fait disposés à donner des renseignements confidentiels en
échange d'une contrepartie financière ou autre. Ces comportements
illégaux sont certes sanctionnés lorsqu'ils sont
avérés mais ils devraient être inexistants.
Mais ce système parallèle d'obtention de
renseignements touchant à la vie privée est-il soumis à
des règles déjà existantes ?
Section II : La réglementation
Au même titre que les huissiers de justice, les
enquêteurs et détectives privés touchent de près ce
qui a trait à la notion de vie privée, mais s'ils doivent
également respecter le secret professionnel (I), ils ne sont pas pour
autant soumis à la même réglementation (II).
I Le secret
professionnel
Le secret professionnel doit être une règle de
base de la déontologie inhérente à toute profession ayant
accès, dans le cadre de son exercice, à des renseignements
d'ordre privé et confidentiels. C'est pourquoi la moindre des choses
pour les personnes qu'elles soient dirigeantes ou employés des
sociétés constituant et permettant l'existence du marché
parallèle susvisé, est d'être soumises au respect de la
règle du secret professionnel. Mais le sont-elles vraiment ?
François Eugène VIDOCQ, considéré
comme étant à l'origine de la profession d'enquêteur,
imposait déjà des règles de stricte confidentialité
à ses collaborateurs, dans le règlement intérieur de son
agence, qui prescrivait, en 1838, en son article 14 : « La
discrétion étant l'âme d'une bonne administration, il est
défendu aux commis et employés de toute classe de se communiquer
réciproquement les notes, soit de surveillance ou de recherches, ni de
parler des affaires dont ils sont chargés ; aucun d'eux ne doit se
permettre d'ouvrir ou d'examiner un dossier dont le travail ne lui est pas
confié ; à cet égard, les pièces et notes
devront toujours être retournées dans les bureaux de façon
à ce que les curieux ne puissent les lire. Celui des employés
intérieurs ou extérieurs qui prouvera avoir obtenu de son
camarade une récompense de cette nature sera récompensé
d'un montant d'une journée de travail retenue à l'indiscret qui
lui aura fait cette confidence ».
Dans cet article, les enquêteurs sont encouragés
par une « prime » à la délation, ceci dans le
seul but de faire respecter la règle du secret professionnel.
Sur le plan déontologique, moral et juridique, les
enquêteurs de droit privé sont bien tenus au secret professionnel,
quelle que soit leur spécialité, la question ne fait plus aucun
doute. Les informations qu'i1s détiennent dans le cadre de l'exercice de
leur fonction sont strictement confidentielles.
En avril 1977, aucune réglementation n'était
encore applicable aux enquêteurs et détectives privés,
comme l'a rappelé M. INCHAUSPE dans le cadre d'une question à
l'Assemblée Nationale30(*). Le 13 août 1977, par une publication au
Journal Officiel, une réponse est apportée bien
qu'imprécise. Elle laisse le soin à la jurisprudence de
déterminer si les enquêteurs et détectives privés
répondent ou non aux exigences globalement définies par les
dispositions du Code pénal qui sanctionnent toutes violations du secret
professionnel.
Les sanctions encourues en l'espèce sont issues des
dispositions de l'article 226-13 du code pénal : « la
révélation d'une information à caractère secret par
une personne qui en est dépositaire soit par état ou par
profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est
punie d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende ».
La Cour d'appel de Paris, dans un arrêt en date du 9
juillet 1980, retient que les enquêteurs ont trahi le secret
professionnel de leurs missions. Dans un autre arrêt, la même Cour
retient également que le détective est tenu à une
obligation de secret professionnel. Ainsi la jurisprudence est venu confirmer
ce qui semblait une évidence : les enquêteurs et
détectives privés sont bien soumis au respect du secret
professionnel eu égard aux renseignements obtenus dans le cadre de
l'exercice de leur mission. Toute violation de ce secret entraînerait
donc une condamnation pénale.
La loi du 18 mars 200331(*) en son article 102, a permis au législateur de
réglementer la profession. « Est donc soumise aux dispositions
du présent titre la profession libérale qui consiste, pour une
personne, à recueillir, même sans faire état de sa
qualité ni révéler l'objet de sa mission, des informations
ou renseignements destinés à des tiers, en vue de la
défense de leurs intérêts ». Ce texte renforce le
secret professionnel de l'enquêteur en l'autorisant à agir en
toute confidentialité.
Les sociétés contribuant à l'existence de
ce marché parallèle de l'information respectent-elles ces
dispositions ? Certes, peut-être qu'une fois les renseignements
obtenus, le secret professionnel est respecté mais avant, les moyens
utilisés sortent du cadre des moyens légaux et autorisés.
Cependant existe-t-il au-delà de la règle du
secret professionnel une législation précise aux fins de
réglementer la profession ?
II La question de la
réelle réglementation
Il existe différentes dispositions et
réglementations concernant la profession de détective et
enquêteur privé. Encore faut-il que les dirigeants et
employés de ces sociétés soient soumis à celles-ci
et contrôlés comme tels par les autorités et institutions
publiques, la CNIL par exemple.
Un décret du Ministre de l'intérieur et de
l'aménagement du territoire réglementant en outre les
activités privées de renseignements en date du 6 septembre 2005 a
été pris en la matière32(*). Il a été modifié par le
décret du 7 août 200733(*),
Son chapitre premier concerne les dispositions communes
relatives à la qualification professionnelle des dirigeants et à
l'aptitude professionnelle des salariés des agences de recherches
privées. En son article 1er, ce décret dispose
que « les dirigeants et les salariés d'entreprises
exerçant l'une des activités mentionnées à
l'article 1er de la loi du 12 juillet 1983 susvisée justifient de leur
aptitude professionnelle par la détention : soit d'une certification
professionnelle, enregistrée au répertoire national des
certifications professionnelles, se rapportant à l'activité
exercée ; soit d'un certificat de qualification professionnelle
élaboré par la branche professionnelle de l'activité
concernée, agréé par arrêté du Ministre de
l'intérieur ou, s'agissant des activités visant à assurer
préventivement la sûreté des vols mentionnées
à l'article L. 282-8 du code de l'aviation civile, par
arrêté conjoint du Ministre de l'intérieur et du Ministre
chargé des transports ; soit d'un titre reconnu par un Etat membre de
l'Union européenne ou par un des Etats ayant pris part à l'accord
sur l'Espace économique européen, se rapportant à
l'activité exercée ».
Les professionnels sont donc habilités et peuvent en
fournir une preuve si besoin, c'est un point positif, il faut avoir des
qualifications particulières et donc n'importe qui ne peut pas ouvrir ce
genre d'agences.
En son article 2, le décret précise que
« la certification professionnelle et le certificat de qualification
professionnelle attestent notamment des connaissances et savoir faire
relatifs (...) aux dispositions du code pénal relatives (...)
à l'atteinte au secret des correspondances et aux systèmes de
traitement automatisé de données, à l'usurpation de titres
ou fonctions, aux faux et usage de faux, à l'appropriation frauduleuse
(...) »
Le noeud du problème est le fait qu'aucune disposition
ou stipulation ne précise réellement quelles sont les
informations pouvant être obtenues. Il est fait état de la notion
de respect de la vie privée, des techniques d'enquête,
d'investigation...mais rien sur la nature des renseignements pouvant être
obtenus et sur la motivation des enquêtes.
La loi du 12 juillet 1983 réglementant et autorisant
les activités privées de sécurité34(*) dans
son article 20 issu de la loi du 18 mars 200335(*) « Est soumise aux dispositions du
présent titre la profession libérale qui consiste, pour une
personne, à recueillir (...) des informations ou renseignements
destinés à des tiers, en vue de la défense de leurs
intérêts ».
Ces sociétés ont une autorisation d'exercer mais
la nature des renseignements qu'elles peuvent obtenir n'est pas
mentionnée. En revanche, ce manque de réglementation ne peut en
aucun cas être considéré comme un vide juridique, bien au
contraire car la nature des renseignements litigieux est connue, ils sont et
restent d'ordre privé et sont soumis par conséquent aux
dispositions de la loi informatique et libertés de 1978. Les
sociétés concernées violent donc de façon
caractérisée le droit au respect de la vie privée tel
qu'énoncé par la Convention européenne des droits de
l'homme.
Cependant un problème demeure. Ces
sociétés de recherche sont visibles et connues de tous, leurs
procédés ne font aucun doute, pourtant elles ne semblent avoir
été sanctionnées que par la CNIL, malgré la
violation de dispositions législatives et réglementaires autres
que la loi Informatique et libertés de 1978. Par ailleurs, seulement un
petit nombre de sociétés a été
contrôlé. Les autres continuent à exercer leur
activité et à proposer l'obtention d'informations concernant le
domaine privé en toute impunité.
En effet, la CNIL au sein de sa formation restreinte, lors de
sa séance du 27 avril 2006, a prononcé plusieurs mises en demeure
à la suite de contrôles. Sur la base de ces observations, la CNIL
a mis les sociétés contrôlées en demeure de
« procéder à la déclaration des traitements de
gestion des enquêtes , d'apporter à la CNIL toute garantie
permettant de considérer que, pour l'avenir, les modalités mises
en oeuvre pour la recherche des débiteurs seront conformes aux
dispositions de l'article 6-1 de la loi du 9 janvier 1978 modifiée le 6
août 2004 et que, notamment il ne sera plus procédé
à l'usurpation de titres ou de fonctions ainsi qu'à appels
téléphoniques à des personnes soumises au secret
professionnel afin d'obtenir des informations à caractère
confidentiel ; de prendre toutes mesures nécessaires pour que, dans
l'ensemble des traitements, les mentions manifestement contraires à la
loi du 6 janvier 1978 modifiée (numéro de sécurité
sociale, données relative à la santé des personnes ou
à leur passé judiciaire) soient supprimées (...) de
procéder à la purge de l'ensemble des informations relatives
à des enquêtes clôturées, d'apporter à la CNIL
toute garantie permettant de considérer que la sécurité et
la confidentialité sont assurées sur les données
conservées dans les traitements mis en oeuvre ». Ces mises en
demeure ne sont sûrement pas restées sans effet pour les
sociétés contrôlées puisque, dans le cas inverse,
des sanctions comme une injonction de cesser la mise en oeuvre ou des sanctions
financières auraient pu être prononcées si aucune
régularisation n'avait été faite dans les délais
impartis par la CNIL.
Ce marché parallèle
permettant un accès presque direct à l'information a certes des
avantages pour les créanciers qui souhaiteraient obtenir rapidement des
renseignements et ne pas subir la lenteur des procédures mises à
ce titre à la disposition des huissiers de justice. Cependant dans ce
système en plein essor, il est possible de voir d'importantes
conséquences négatives touchant aux titres exécutoires et
par procuration à la profession d'huissier de justice.
Chapitre II : La
dévalorisation du titre exécutoire
L'existence de ce marché parallèle
d'accès à l'information a deux conséquences
principales : la première étant la dévalorisation des
titres exécutoires servant de base à l'exécution (Section
I) et plus généralement de la profession d'huissier de justice
(Section II).
Section I : La dévalorisation du titre
exécutoire
La notion de titre exécutoire sert de base aux
procédures civiles d'exécution. Un titre exécutoire est un
titre revêtu de la formule exécutoire et constatant une
créance liquide, exigible. Ce titre permet au créancier d'en
poursuivre l'exécution forcée sur les biens de son
débiteur dans les conditions propres à chaque mesure
d'exécution.
La loi du 9 juillet 1991 portant réforme des
procédures civiles d'exécution indique dans son article 3 quels
sont les titres exécutoires. Parmi eux se trouvent : les
décisions des juridictions de l'ordre judiciaire ou de l'ordre
administratif, les extraits de procès verbaux de conciliation
signés par le juge et les parties, le titre délivré par
l'huissier de justice en cas de non paiement d'un chèque ou encore les
titres délivrés par les personnes morales de droit public
qualifiées comme telles par la loi, ou les décisions auxquelles
la loi attache les effets d'un jugement. Cette liste peut être
considérée comme non exhaustive avec l'emploi par le
législateur de 1991 du mot « seuls » au début
de l'alinéa 1 de l'article susvisé.
La formule exécutoire est la suivante :
« En conséquence, la République Française mande
et ordonne à tous huissiers sur ce requis de mettre la dite
décision à exécution, aux Procureurs
Généraux et aux Procureurs de la République près
les Tribunaux de Grande Instance d'y tenir la main à tous commandants et
Officiers de la Force Publique de prêter main-forte lorsqu'ils en seront
légalement requis. En fois de quoi, la présente décision a
été signée par le Président et le
Greffier »
Cette formule exécutoire « mande et ordonne
à tous huissiers (...) de mettre la dite décision à
exécution » et uniquement ces derniers. L'huissier de justice
porteur de l'original du titre exécutoire pourra procéder
à toutes les mesures d'exécution mises à sa disposition
par la loi.
En Droit positif, un officier ministériel est tenu de
respecter les diverses procédures visant à obtenir des
informations personnelles sur un débiteur, mises à sa disposition
dans le cadre de son mandat. Parmi ces dites procédures se trouve le
système de requête au procureur, l'accès direct au fichier
FICOBA.36(*) Une copie du
titre exécutoire doit être annexée à ces
requêtes, ceci étant une condition de recevabilité de
celles-ci.
Le cas le plus désastreux en matière de
résultats se trouve être celui de la requête au procureur de
la République. En effet, cette démarche procédurale est
longue et sans garantie de résultats. Dans le cadre de ce processus, la
requête est reçue, il est imparti au procureur de la
République de l'analyser, de l'accepter ou de la rejeter selon les cas.
De nos jours, compte tenu de l'engorgement de la justice et de l'importante
mission attribuée aux magistrats du Parquet, ces requêtes ne sont
pas ou peu examinées ni encore moins acceptées rapidement. Le
délai de trois mois donné au procureur de la République
pour traiter et répondre à la requête est dans la grande
majorité des cas, dépassé. Dans le reste des cas, elle
n'est pas du tout traitée ce qui retarde encore un peu plus la
procédure de recherche du débiteur concerné et par
conséquent de la procédure d'exécution en cours contre ce
requis. Par ailleurs, une fois saisis dans le cadre de cette procédure,
les organismes ne répondent pas non plus très rapidement
malgré le caractère judiciaire de la demande.
Alors comment expliquer qu'à l'heure d'Internet un
huissier de justice, sur la base d'un titre exécutoire, mandaté
par la République Française, soit cantonné à avoir
recours à des procédures complexes et excessivement longues.
A côté de cela, les créanciers peuvent
obtenir par des sites Internet et ce, moyennant finances, des renseignements en
un délai battant tout record : de quinze à parfois trente
jours dans certains cas. En parallèle, rappelons-le, au-delà de
trois mois, une requête au procureur de la République
restée sans réponse sera qualifiée d'infructueuse. Par des
procédures légales avec copie d'un titre exécutoire et
selon la pratique, il faut de deux à trois mois minimum pour obtenir
éventuellement des renseignements concernant le requis. Alors que sans
titre exécutoire, il en faut au minimum quinze jours pour obtenir des
renseignements de même nature.
Avec la naissance et l'existence de ce marché
parallèle d'obtention de renseignements d'ordre privé, il y a une
véritable dévalorisation du titre exécutoire et des
procédures civiles d'exécution. Qu'un titre exécutoire
serve ou non de base à cette quête d'informations, autrement dit
effectuée respectivement par un huissier de justice ou par des
sociétés spécialisées, les renseignements obtenus
peuvent être en tous points identiques. Par ailleurs, dans
l'hypothèse d'absence de titre exécutoire et par la corruption,
les renseignements sont même parfois plus précis et plus abondants
qu'avec la présentation d'un titre exécutoire.
La lenteur des procédures prévues par les
dispositions législatives et décrétales ne peut en aucun
cas rivaliser avec la rapidité avec laquelle les sites Internet
concernés obtiennent des informations d'ordre privé.
Au-delà de cette dévalorisation du titre
exécutoire, par procuration est engendrée une atteinte à
la profession d'huissier de justice en général.
Section II : Atteinte à la profession d'huissier
de
justice
M. Gérard CORNU rappelle qu'un huissier de justice est
« un auxiliaire de justice ayant qualité d'officier
ministériel seul habilité à signifier les actes de
procédures dans la circonscription où il a le pouvoir
d'instrumenter et à mettre à exécution les
décisions de justice et autres actes exécutoires, qui peut
être chargé de diverses autres opérations
(...) » 37(*).
Par ailleurs, « un officier ministériel est titulaire d'un
office rattaché à l'administration de la
justice ».38(*)
L'huissier de justice reçoit une habilitation afin de pouvoir exercer,
il a le monopole de l'exécution dans le cadre de la justice
française. En France, il se trouve donc être un membre actif dans
le cadre du fonctionnement de la justice et de son exécution. Rachida
DATI, Ministre de la Justice, Garde des Sceaux, au 23ème
Forum de la Chambre nationale des huissiers de Justice, présentant une
réforme à venir, a souligné le rôle capital des
huissiers dans le fonctionnement de la Justice. "Vous faîtes vivre la
décision de Justice, sans vous la Justice reste inachevée"
a-t-elle déclaré. Cependant les huissiers de justice n'ont pas
pour autant les moyens de conserver ce monopole et de mener à bien les
mandats qui lui sont confiés.
Les créanciers ayant recours à un huissier de
justice espèrent que la procédure de recouvrement de leur
créance sera la plus rapide possible, alors comment justifier que ces
recours ne donnent pas les résultats escomptés ?
Le souci de sécurité juridique et
d'impartialité entraîne un cloisonnement des différentes
professions et de leurs fonctions. L'huissier de justice, quant à lui,
s'occupe de la mise à exécution des titres exécutoires en
général. Il est donc nécessaire de lui donner toute
latitude afin qu'il puisse remplir sa mission dans les meilleures conditions
possibles.
De nos jours, l'assiette patrimoniale se modifie. Le
patrimoine se définit comme étant l'ensemble des biens et des
obligations d'une personne, appréciables en argent. Les comptes
bancaires représentent désormais la plus grande partie du
patrimoine d'un individu. Il est vrai qu'aujourd'hui un certain nombre de
ménages n'arrivent pas à accéder à la
propriété immobilière eu égard à leur
revenu. Par ailleurs, le mobilier garnissant les habitations n'a souvent que
peu de valeur. La procédure de saisie vente est donc en train de tomber
en désuétude. Cependant, de nos jours, aucun moyen ou presque
n'est donné à l'huissier de justice en adéquation avec
cette modification patrimoniale et ce dans le but de faciliter par exemple la
saisie-attribution. Ceci dévalue le titre exécutoire et, plus
généralement, la profession d'huissier de justice.
En matière de renseignements personnels, entre en jeu
la CNIL, organe indépendant créé pour veiller à la
protection des particuliers. Le législateur, en 1971, a mis en place
différentes autorisations pour accéder aux fichiers de
renseignements personnels : FICOBA, FNI... ceci afin d'éviter toute
dispersion de ces renseignements et faciliter les contrôles. Avec ce
système d'accès sécurisé, finalement le
résultat escompté n'est pas là. En effet, toute personne
même sans preuve de ses fonctions ou munis de faux titres
exécutoires peut y accéder, la vérification n'est donc pas
fiable.
La question des données personnelles nécessite
bien évidemment une protection. Cependant trop de protection, trop de
sécurité en l'espèce a incité certaines personnes
à créer des sociétés de recherche afin de pallier
à la lenteur des procédures en vigueur. Les huissiers de justice
s'en trouvent donc lésés puisqu'ils ne peuvent pas utiliser ces
systèmes illégaux. Ils doivent s'en tenir aux procédures
prévues et subir l'engorgement des Parquets.
En l'espèce, la CNIL a mis en place tout ce dispositif
de sécurité en matière de données personnelles afin
de faciliter ses contrôles, cibler les autorisations d'accès aux
fichiers en fonction des professions et de l'utilité des renseignements
pour l'exercice de celles-ci. Cependant, malgré ce système de
protection, des brèches sont ouvertes mais elles ne le sont pas en
faveur de la justice mais bien de sociétés privées. Ce
cadre juridique n'est donc pas fiable en tout point.
Par ailleurs, il est nécessaire de rappeler que
l'huissier de justice est un auxiliaire de justice, il se doit d'être
irréprochable. De plus, l'huissier de justice est responsable devant les
juridictions civiles, pénales, et disciplinaires.
L'article 2 de l'ordonnance du 28 juin 194539(*) dispose que « toute
contravention aux lois et règlements, toute infraction aux règles
professionnelles, tout fait contraire à la probité, à
l'honneur ou à la délicatesse commis par un officier public ou
ministériel, même se rapportant à des faits
extraprofessionnels, donne lieu à des sanctions
disciplinaires ».
L'article 3 précise la hiérarchie des peines
disciplinaires. Celles-ci vont du rappel à l'ordre à la
destitution, en passant par la défense de récidiver ou encore la
censure simple.
Le titre II de ladite ordonnance prévoit le
fonctionnement des juridictions disciplinaires, quant au titre III, celui-ci
évoque l'effet de ces peines disciplinaires.
L'huissier de justice est donc soumis à une
déontologie adaptée à sa profession, au respect de
règles sous peine de sanctions disciplinaires pouvant être lourdes
de conséquences lorsqu'il s'agit de l'interdiction temporaire d'exercer
voire même la destitution.
Par ailleurs, en ce qui concerne les conditions
générales d'aptitude aux fonctions d'huissier de justice, elles
résultent du décret du 14 août 197540(*) et sont importantes en
matière de garantie que peuvent apporter les huissiers de justice
à la CNIL.
Selon l'article 1er dudit décret :
« Nul ne peut être huissier de justice, s'il ne remplit les
conditions suivantes : 1° Etre français ; 2° N'avoir
pas été l'auteur de faits contraires à l'honneur, à
la probité ou aux bonnes moeurs ; 3° N'avoir pas
été l'auteur de faits de même nature ayant donné
lieu à une sanction disciplinaire ou administrative de destitution,
radiation, révocation, mise à la retraite d'office, de retrait
d'agrément ou d'autorisation (...) ». Ces trois conditions
sont celles qui garantissent principalement que l'accès à la
profession d'huissier de justice est strictement réglementé et
encadré. Ces dispositions montrent qu'un huissier de justice doit avoir
des valeurs telle le respect par exemple et doit avoir une conduite
irréprochable qu'il soit en exercice ou non.
Ces garanties malgré tout ne suffisent pas apparemment
à rassurer la CNIL qui reste méfiante vis-à-vis de ces
auxiliaires de justice. En effet, eu égard aux barrages qu'elle a
disposés afin de priver l'huissier de justice d'accès direct
à des informations capitales pour la poursuite de l'exécution de
ses mandats, la CNIL montre son souhait de préserver des données
d'ordre personnel de ce type d'accès.
En revanche, les administrations ne subissent pas toutes ces
restrictions, alors que pourtant l'ensemble du personnel de certaines
administrations peut avoir accès à toutes sortes d'informations
touchant à la vie privée des Français. Tous ces individus
n'offrent certainement pas les mêmes garanties qu'un huissier en
exercice. La preuve étant que certains des membres du personnel
n'hésitent pas à divulguer des informations d'ordre privé
alors que les huissiers respectent tous le secret professionnel. La CNIL
souhaite, d'un côté, éviter une dispersion et un trop grand
accès aux fichiers regroupant des données d'ordre privé
mais par ailleurs elle autorise la plupart des administrations et leur
personnel à y accéder tout en refusant d`autoriser un membre de
la justice à y accéder en fonction de ses besoins. Cette
contradiction montre que ces systèmes de contrôle et restriction
d'accès restent un leurre.
Les dispositions permettant l'accès à
l'information pour l'huissier de justice sont donc désuètes et
contribuent à la dévalorisation de la profession d'huissier de
justice. Une réforme est donc nécessaire pour éviter une
trop grande dévalorisation du titre exécutoire et par procuration
de la profession. Certains Etats européens sont déjà
très en avance. En France, il reste beaucoup de points à reformer
tout en gardant à l'esprit le souci de sécurité juridique
français.
TITRE III
Une réforme
nécessaire
Lorsque la loi du 9 juillet 1991 puis le décret du 31
juillet 1992 ont été publiés, les huissiers de justice ont
vu le panel important de mesures leur étant proposé. La loi de
2003 a réformé les professions judiciaires et notamment celles
des Officiers Publics et Ministériels. Cependant il ne faudrait pas que
le législateur en reste là, d'autres réformes sont
nécessaires (Chapitre II). Certains Etats européens comme
l'Italie, l'Allemagne ou encore la Suède peuvent servir d'exemples
(Chapitre I)
Chapitre I : La recherche
d'informations dans d'autres
Etats européens
Les Etats européens comme l'Italie (Section I),
l'Allemagne (II) ou la Suède (III) peuvent être source
d'innovation pour le législateur français. Ce dernier doit en
effet prendre en compte la nécessité de faire une nouvelle
réforme générale (Section II)
Section I Le cas de l'Italie
Même si la France n'a pas beaucoup à envier
à ses voisins italiens en matière d'exécution
forcée et de collecte de renseignements, à part certains de leurs
registres publics, il est nécessaire d'étudier le cas italien en
matière d'identification du débiteur (I) et de transparence du
patrimoine (II) afin de le démontrer.
I Identification du
débiteur
L'identification d'une personne physique par le registre
public de l'état civil ou « anagrafe » en droit
italien, est possible seulement si l'on connaît la ville où la
personne a sa résidence. En effet, le registre public de l'état
civil est organisé en Italie sur une base locale autrement dit sur base
municipale. Le service de « l'anagrafe » local peut
être organisé de façon conjointe par plusieurs mairies mais
cette solution reste à leur initiative propre. Toute personne peut, sans
conditions, accéder au registre de l'état civil local et
vérifier les informations qui y sont contenues. Il existe un registre
organisé sur une base nationale pour les personnes physiques, c'est
celui de l'état fiscal, disponible uniquement dans le cadre de buts
privés.
En dehors de ces hypothèses, si un créancier
connaît le code fiscal de son débiteur, c'est-à-dire le
numéro qui identifie fiscalement toutes les personnes physiques, il lui
est possible de découvrir le lieu de naissance du débiteur. Avec
ce dernier élément, un créancier peut espérer que
son débiteur réside toujours dans sa ville natale.
En ce qui concerne les personnes physiques exerçant en
tant qu'entrepreneur, artisan ou profession libérale, sur les
pièces fiscales ou lettres à en-tête est indiqué un
numéro « partita IVA », identifiant fiscalement
l'individu. Avec ce numéro, un créancier peut s'adresser au
bureau IVA et demander à obtenir des informations sur le sujet et sur
son domicile fiscal.
En matière de personnes morales, le siège social
est le lieu dans lequel la société pose formellement le centre de
ses affaires et de ses intérêts autrement dit le lieu depuis
lequel l'activité est dirigée et les services administratifs
accomplis.
En Italie, il n'y a pas un seul et même registre valide
pour toutes les personnes morales. Pour chaque sorte de société
ou association, les formalités sont différentes. Dans le cas
d'une association qui s'occupe en matière de compétence
régionale, on doit faire l'inscription sur le registre qu'il y a dans la
même région. En revanche si une association n'a pas de
personnalité juridique, elle ne doit s'inscrire sur aucun registre. En
ce qui concerne les sociétés : SNC, SA, SARL... elles
doivent être inscrites sur le registre des entreprises même si
elles n'exercent aucune activité de commerce.
Tous ces différents registres énoncés
précédemment sont dits publics et en conséquence peuvent
être consultés par tous, créanciers, tiers, avocats...Il
n'y a aucune condition particulière d'accès à ces
registres. Les informations sont données par voie écrite.
II Détermination du
patrimoine
En matière de contenu du patrimoine, le système
italien ne prévoit aucune voie effective pour permettre au
créancier d'obtenir des informations complètes sur celui-ci.
Seuls certains registres sont accessibles mais cet
accès n'est pas dû à la possession d'un titre
exécutoire. Il n'y a pas de différence entre le fait que le
créancier possède ou non un titre exécutoire. Cependant,
dans certaines hypothèses, le système italien dispose de
règles plus complètes.
En matière de procès de la famille, il y a des
règles particulières afin de pouvoir vérifier le
patrimoine du sujet obligé à l'entretien de la famille. Les
époux doivent par exemple déposer dans le dossier du litige leurs
déclarations fiscales respectives et chaque pièce relative
à leurs revenus et à leur patrimoine personnel et commun. A
défaut d'y procéder, le juge peut ordonner à la partie
défaillante voire aux deux ou à des tiers, la production de
pièces fiscales ou bancaires. Ce pouvoir exercé par le juge est
cependant plus un pouvoir d'instruction mais il n'est pas exercé dans le
cadre d'une exécution forcée. En cas de contestation de la
décision du juge ou des pièces fournies par l'autre époux
ou un tiers, le juge peut ordonner une enquête sur les revenus, le
patrimoine ou le train de vie effectif. Il peut également s'adresser
à la police ayant accès au fichier des impôts ou
« anagrafe tributaria ».
En matière de créances publiques, en majeure
partie, c'est aux « concessionari », personnes
privées, qu'est déléguée une partie très
importante de la procédure d'exécution. Ces derniers peuvent
avoir accès à tous les bureaux publics administrant les registres
non accessibles au public ainsi qu'au système informatique tenu par le
Ministère des finances à fin d'obtenir toute information utile
sur le patrimoine du débiteur. Les « concessionari »
peuvent en outre obtenir un tableau complet de la situation patrimoniale du
débiteur.
Certains registres, comme étudiés
précédemment, sont publics. Dans cette hypothèse, un titre
exécutoire ne confère aucun pouvoir particulier pour
accéder à ceux-ci. En parallèle, il existe des registres
non publics, par exemple les registres fiscaux ou bancaires. Dans ce cas, les
huissiers de justice ou les avocats n'ont pas d'accès
privilégié à ces fichiers.
En droit italien, le procureur de la République peut
demander des renseignements uniquement dans le cadre d'une affaire
pénale. Par ailleurs, le débiteur ne peut pas être
contraint, comme en France dans certains cas, à donner des
renseignements sur ses biens dans une déclaration de patrimoine.
Il existe en Italie toutes sortes de registres publics. Il
est important de citer les principaux :
- Le registre foncier ou cadastre. Il faut
distinguer le cadastre et le registre immobilier. Le premier a une fonction de
description des immeubles. Le second organisé sur base locale ou
nationale peut donner toutes sortes d'informations à partir des nom,
prénoms d'une personne.
- Le registre des saisies effectuées sur des
débiteurs. Est tenu un registre se référant aux
exécutions civiles et un autre relatif à l'exécution sur
des biens immeubles.
- Le registre des débiteurs défaillants.
Dans chaque tribunal, certains registres doivent être
tenus : celui des faillites qui ont été
déclarées, celui des mises en faillite, ceux se
référant aux différentes procédures que la loi
prévoit pour le redressement ou la liquidation judiciaires.
- Le registre d'immatriculation d'automobile, navires,
aéronefs. Près de chaque siège provincial de
l'Automobile Club Italien, il y a un registre public des automobiles sur lequel
on doit inscrire chaque véhicule automobile ayant obtenu dans la
province la licence lui permettant de circuler. Les motos, scooters et
tracteurs agricoles sont inscrits sur des registres différents. Toute
personne peut obtenir copie des inscriptions faites sur le registre.
Dans ce système italien, seuls les
« concessionari » peuvent obtenir un tableau
récapitulatif du patrimoine d'un débiteur, les huissiers de
justice n'ont quant à eux que peu d'accès direct aux
informations. A l'image du Droit positif français, la recherche de
renseignements peut être un parcours difficile pour ces derniers.
Cependant, l'idée de rendre publics certains fichiers comme celui des
saisies effectuées sur les débiteurs ou encore le registre
d'immatriculation d'automobile est une avancée notable.
Outre le cas italien, d'autres Etats européens comme
l'Allemagne ou la Suède, peuvent également être source
d'inspiration pour le législateur français.
Section II Le cas de l'Allemagne
L'exécution en droit allemand se base sur trois
conditions spécifiques : un titre, une formule exécutoire et
une notification dudit titre revêtu de la formule exécutoire. Les
principaux titres sont les jugements définitifs
(« Endurteile ») émanant des tribunaux allemands. Le
jugement doit avoir un contenu exécutoire et être lui-même
exécutoire.
La réforme française de 1991 a contribué
à rapprocher un certain nombre de règles françaises du
droit allemand, cependant il reste à ce jour de nombreuses
divergences.
Le droit allemand se caractérise par certaines
spécificités par rapport à ses voisins européens.
En matière d'exécution forcée et plus
précisément de renseignements, le droit allemand prévoit
l'obligation pour le débiteur de déclarer sous serment relative
à la teneur de son patrimoine (I) et la tenue d'un registre des
différents débiteurs auprès de chaque tribunal cantonal
(II).
I La déclaration
sous serment
1) Le contenu de cette
déclaration
L'article 807 du Code allemand de procédure civile
(« ZivilprozeBordnung » ou ZPO) dispose que lorsque le
créancier n'a pas été entièrement
désintéressé par la saisie ou lorsqu'il démontre de
façon plausible qu'il ne pourra pas être entièrement
satisfait par le produit de la saisie, le débiteur peut être
obligé par le tribunal, sur demande du créancier, à
produire un état de ses biens, à indiquer les causes et les
moyens de preuve de ses créances. Il prête serment dans lequel il
indique sa fortune en toute conscience et aussi complètement et
précisément qu'il est en état de la faire.
Cette déclaration présente un avantage pour le
créancier mais aussi pour le débiteur. Le premier pourra à
l'avance connaître l'ensemble du patrimoine de son débiteur et
donc savoir sur quels biens il pourra poursuivre l'exécution
forcée. Pour le second, grâce à cette déclaration
sous serment, si son patrimoine est insignifiant, il pourra être à
l'abri d'une exécution forcée.
En outre, l'état des biens doit préciser :
- les cessions à titre onéreux
réalisées par le débiteur dans l'année
précédant la date de la prestation de serment, qu'elles aient
été faites à son conjoint avant ou pendant le mariage,
à des parents, à ses frères et soeurs ou ceux de son
conjoint,
- les dispositions à titre gratuit accomplies par le
débiteur pendant cette même période, sauf cadeaux
d'usage,
- les dispositions à titre gratuit au profit de son
conjoint réalisées dans les deux dernières années
précédant la date fixée par la déclaration sous
serment.
Le débiteur peut aussi être contraint de faire
cette déclaration sous serment dans d'autres situations. En effet,
celui-ci y est obligé dans les hypothèses où le bien
meuble qu'il est tenu de délivrer ou restituer n'est pas retrouvé
chez lui ou encore si le débiteur a refusé l'accès
à son domicile et enfin si le débiteur n'était pas
présent le jour de la venue de l'huissier de justice sans pouvoir
justifier cette absence par des motifs sérieux et légitimes.
2) Modalités de la prestation sous
serment
La réforme allemande du 28 décembre 1997
prévoit que l'huissier de justice reçoit et enregistre cette
prestation de serment. Le dispositif antérieur confiait cette
compétence au tribunal cantonal dans le ressort duquel le
débiteur avait son domicile ou sa résidence, c'est le
« Rechtspfleger » qui enregistrait la
déclaration.
Le créancier lance la procédure par une
requête en fixation d'une date pour la déclaration sous serment.
Cette requête est accompagnée du titre exécutoire et des
documents montrant l'obligation pour le débiteur de se soumettre
à la prestation de serment.
La date fixée pour la déclaration sur l'honneur
est signifiée au débiteur et communiquée au
créancier, la présence de ce dernier n'est pas requise. Si le
débiteur affirme qu'il va payer sa dette dans les trois mois à
venir, l'huissier de justice peut décider de repousser la date
prévue pour la déclaration sous serment et si le débiteur
démontre qu'il a entre-temps payé au moins le 2/3 de la dette,
l'huissier pourra encore repousser de six semaines.
En vertu de l'article 901 du ZPO, le tribunal doit ordonner
dans un cas précis : défaut de comparution du
débiteur au jour fixé sans motif légitime, la contrainte
par corps pour obliger le débiteur à respecter son obligation de
déclaration. Le débiteur emprisonné peut alors demander
à tout moment au tribunal d'enregistrer sa prestation de serment.
Dès que cela est fait, le débiteur est libéré.
Cette méthode de contrainte par corps ne peut en aucun cas
excéder six mois. En cas de faux serment, le droit allemand
prévoit aussi des sanctions.
Cette disposition du ZPO montre que le droit allemand
mêle droit pénal et exécution forcée,
hypothèse très rare en France. En effet le législateur
français refuse d'intégrer des sanctions pénales en
matière de procédures d'exécution forcée, hormis
les cas de dettes fiscales. Le droit français se contente dans la
majorité des cas de poser des sanctions pécuniaires.
En l'état, la CNIL refuserait en France de permettre la
tenue d'un registre des débiteurs ainsi qu'un tel mode de conservation
des données d'ordre personnel. A côté de la rigueur
française, le droit allemand le permet.
II Le registre des
débiteurs
L'article 915 du ZPO instaure le registre des débiteurs
pouvant être consulté par tout intéressé. Le
Tribunal de l'exécution tient un registre des personnes ayant fait une
déclaration sous serment sur le teneur de leur patrimoine ou contre
lesquelles la contrainte par corps a été déclenchée
parce qu'elles se sont refusées à ladite déclaration.
Les informations personnelles sur ces différents
débiteurs ne peuvent être utilisées qu'à des fins
d'exécution forcée ou pour permettre un contrôle de la
fiabilité économique, pour contrôler les conditions
d'attribution d'aides publiques, pour écarter les dommages
économiques résultant de l'inexécution.
Les renseignements contenus dans le registre à propos
d'un individu déterminé peuvent être communiqués sur
demande par le greffier du tribunal, à condition que le requérant
démontre qu'il agit dans le cadre d'une des hypothèses de
l'article 915 du ZPO. Le greffier peut également délivrer des
extraits du registre. Ces dits extraits ne peuvent pas être
communiqués à des tiers par le requérant.
Les inscriptions faites dans ce registre doivent être
effacées au bout de trois ans à compter de la déclaration
sous serment du débiteur, de la contrainte ou de la cessation de cette
contrainte au bout de six mois. Il est possible de procéder à une
radiation des mentions plus tôt dans l'hypothèse où le
créancier qui a déclenché cette procédure de
prestation de serment aurait été satisfait ou si le tribunal a eu
connaissance de la disparition de la cause pour laquelle avait eu lieu
l'inscription.
Ce système allemand ne correspond certes pas au
régime français de protection des données d'ordre
personnel. Cependant cette procédure de déclaration est
intéressante eu égard au fait que c'est le débiteur
lui-même, le mieux à même de connaître
l'étendue de son patrimoine qui effectue cette prestation sous serment.
En Allemagne, les sanctions attachées au défaut de
déclaration, aux déclarations inexactes ou incomplètes
renforce le sérieux de cette prestation de serment et l'apport positif
qu'elle peut avoir. En France, la législation actuelle ne permettrait
pas d'adopter un tel système malgré les avantages qu'il
présente.
Section III Le cas de la Suède
Certains auteurs, à l'instar de M. Alain VERBEKE,
soulignent qu'en Suède : « tout est
enregistré ». Le droit suédois permet une recherche
d'informations sans garde-fous ou presque. En France, un tel droit et ses
procédures ne pourraient s'appliquer car la CNIL s'y opposerait
formellement. Cependant, certains fichiers existant en Suède pourraient
être source d'inspiration afin d'être reproduits dans les
administrations françaises.
En ce qui concerne les personnes pouvant être tiers
débiteur, les règles diffèrent beaucoup. En Suède
les tiers ont des obligations très étendues. Le tiers doit
préciser si le débiteur a quelques créances ou d'autres
aspects financiers qui les lient. Ces renseignements obtenus sont importants
pour déterminer si le patrimoine existe et de quelle nature il est. En
ce qui concerne les employeurs, ils sont tenus de fournir des informations sur
les revenus du débiteur lorsqu'ils y sont invités. Ainsi les
banques doivent aussi fournir l'information concernant tous les comptes ouverts
au nom du débiteur ainsi que si le débiteur en a, les
emplacements de son (ou ses) coffre(s). Ces établissements bancaires
doivent aussi indiquer les établissements centraux
pouvant offrir d'autres renseignements comme par exemple celui tenant le
registre central des chèques.
Selon le chapitre IV du code d'application, le débiteur
doit, s'il y est invité, fournir des informations sur ses capitaux,
confirmer également la véracité des informations qu'il a
fournies dans un document ou lors d'un interrogatoire. En effet, en
Suède, une des premières étapes substantielles dans une
recherche relative à un débiteur consiste à l'interroger
au sujet de ses dettes.
En Suède, chaque citoyen a libre accès aux
données relatives au patrimoine actif et passif d'un débiteur
tenu par le service public de recouvrement forcé, lesquelles font
l'objet de fichiers électroniques.
La localisation du débiteur est utile pour en
déduire la localisation de ses biens et, en conséquence,
permettre dans un second temps la réussite d'une saisie. C'est la raison
pour laquelle le registre de la population sera une pierre angulaire pour
réussir à pratiquer les mesures d'exécutions
adéquates.
Parmi tous les registres suédois dont fait l'objet la
population, on trouve les suivants :
- Le REX permet une centralisation de données
concernant la situation de saisie d'un débiteur. Tous les paiements et
actions pris en rapport avec un débiteur y sont enregistrés.
Grâce à un code d'accès personnel, il est possible de
savoir quelles mesures ont été prises, quels paiements ou saisies
ont déjà été effectués,
- Le registre d'injonction de payer géré par
l'application Authorities,
- Le registre des Impôts ou « tax
register » tenu par les autorités fiscales contient des
informations sur les redevables de tout impôt,
- Le « trade and association register »
donne toute information sur l'identité des associés d'une
société de personnes ainsi que ses comptes annuels,
Au côté de ces registres, il en existe d'autres
qui sont publics, toute personne peut donc y avoir accès. Parmi eux on
trouve :
- Le « matrimonial register » contient
toutes les informations sur les enregistrements prénuptiaux, les
documents de division de propriété commune ainsi que les
donations faites entre époux,
- Le « real estate register » contenant
des informations telles que les statuts de propriété, la valeur
d'imposition et les gages immobiliers...
- Le registre des sociétés « trade et
association register » tenu par le bureau des brevets et de
l'enregistrement et contenant des informations sur l'identité des
associés d'une société de personnes ainsi que ses comptes
annuels,
- Le « securities register » renseigne sur
des opérations boursières,
- Le « register if mortgage on a company
assets » relatifs aux sûretés concédées
sur les actifs d'une société,
- Le « traffic register » contenant
toutes informations sur les véhicules et propriétaires
enregistrés (identité du propriétaire actuel et des trois
précédents)
- Le « shipping register » et le registre
des avions contiennent respectivement toutes les informations concernant les
bateaux et les avions ainsi que leurs propriétaires,
- Le registre des chevaux permet de savoir si un
débiteur est propriétaire d'un cheval,
D'autres registres permettent de localiser des personnes
physiques et ainsi d'éviter de perdre leur trace par
exemple :
- Le registre des personnes mis à jour
régulièrement eu égard au fait que les individus
enregistrés sont tenus de communiquer à l'administration fiscale,
sous peine d'astreinte, leur déménagement.
Le système juridique suédois et le travail des
autorités sont fortement influencés par un modèle ouvert
de décision, tout ceci réalisé dans le cadre d'un principe
de liberté individuelle de la parole et du droit du public d'assister
à des affaires en jugement voire à des réunions des
autorités d'Etat ou de ville. Le public a le droit de lire des documents
rédigés et gardés par les différentes
autorités. Cependant ceci n'est pas une généralité,
certains documents peuvent être classés confidentiels. En
pratique, dans certains cas, les autorités ne peuvent donner certaines
informations sans savoir l'identité ou les buts du destinataire.
L'énumération des différents registres
n'est pas exhaustive, elle montre l'étendue de l'accès aux
renseignements pour les autorités d'exécution. Ce système
est centralisé et informatisé, signe de modernité pour
certains, cependant d'autres s'insurgent contre l'atteinte à la vie
privée des débiteurs résultant de cet accès.
Depuis la loi du 1er octobre 2001, les documents
des services publics en liaison avec les services du Trésor ne sont
accessibles qu'aux services de recouvrement et non à tous comme cela
était possible avant.
En France, la place donnée au respect de la vie
privée des débiteurs prime sur l'accès aux renseignements.
Cependant, il serait possible que le système français s'inspire
du système suédois en établissant un équilibre
entre vie privée et accès à l'information afin de
permettre une revalorisation du titre exécutoire. En Suède, les
personnes chargées de l'exécution sont des fonctionnaires et
à ce titre, à la différence de la France, ils ont le
même statut que le personnel administratif et ont donc accès aux
mêmes informations, c'est une des raisons pouvant expliquer le
système en vigueur.
Ces systèmes européens, italien, allemand et
suédois, présentent certaines idées quant à la
réforme qu'il faudrait poursuivre en France. En effet, avec la loi de
2004 permettant un accès aux fichiers FICOBA, le législateur a
montré sa volonté de donner plus de moyens à l'huissier de
justice afin qu'il mène à bien ses différents mandats.
Cependant, bien que cette avancée lui permette un gain de temps, elle ne
suffit guère à l'heure actuelle pour revaloriser globalement la
profession. La notion d'équilibre entre les intérêts des
débiteurs et ceux des créanciers est un axe de la réforme
de 1991, en l'état, elle n'est pas la réalité. En effet,
les intérêts des débiteurs priment sur les
intérêts des créanciers.
Chapitre II Les perspectives envisageables
A l'heure actuelle, comme étudié
précédemment, la profession d'huissier de justice n'a plus
à sa disposition les moyens nécessaires pour mener à bien
sa mission d'exécution et correspondre au mieux aux exigences
précises des créanciers. Ces derniers veulent essentiellement
plus de rapidité. Il faut donc un accès effectif à
l'information.
En matière de paiement direct de pension alimentaire,
les avancées sont visibles. En effet, certains organismes sont tenus de
communiquer à l'huissier de justice en charge du dossier :
l'adresse du débiteur ou de son employeur, si le
bénéficiaire ne les connaît pas. Ce sont :
l'administration fiscale, la sécurité sociale, le service des
recherches dans l'intérêt des familles, le fichier national des
chèques irréguliers (FNCI) ainsi que les fichiers
départementaux des cartes grises des préfectures. En
matière de recouvrement de la pension alimentaire, l'huissier de justice
va donc pouvoir requérir de la part du tiers saisi les mêmes
renseignements qu'une réquisition faite au ministère public.
Par ailleurs, en 2002, Jean Claude BELOT, président de
la CNHJ à l'époque, a précisé que
«depuis 1973, la loi sur les prestations compensatoires et les
pensions alimentaires a permis aux huissiers de justice l'accès à
toutes sortes d'informations, sans qu'il y ait eu en trente ans aucun
abus »41(*).
Le caractère alimentaire de la créance est-il
donc le seul élément capable de justifier un accès direct,
exceptionnel et spécifique à la matière ? Bien que,
dans certains cas, la créance concernée n'ait pas ce
caractère alimentaire, son recouvrement n'en est pas moins
nécessaire pour la survie d'une petite société ou d'une
famille. Par ailleurs, le système actuel établit une
hiérarchie des créances en plaçant les alimentaires au
premier rang de telle sorte qu'il favorise leur recouvrement. Cependant toute
autre créance peut être nécessaire pour une famille ou une
société.
L'accès à l'information devrait être total
pour l'huissier de justice dans le cadre de l'exercice de sa profession.
Les organismes requis par le biais de la procédure de
requête au procureur devraient pouvoir être interrogés
directement par ces officiers ministériels. Avec la mise en place d'un
système sécurisé d'accès aux différents
fichiers, les huissiers de justice qui le souhaitent pourraient dans cette
hypothèse obtenir directement des informations capitales pour la
poursuite de leur mission.
La CAF, la CPAM, les ASSEDIC, EDF et GDF,
organismes publics, devraient avoir l'autorisation de donner à un
huissier de justice sur présentation de sa carte professionnelle toute
information utile en leur possession. Il est légitime que le
législateur français soit réticent à ce que les
renseignements soient donnés par téléphone, mais s'ils le
sont par voie postale ou en personne, ce système devrait voir le
jour.
Par ailleurs, ce moyen déjà mis en pratique
dans certains ressorts de compétence serait donc simplement
étendu. Il est vrai qu'en pratique, certains procureurs de la
République, conscients de la lenteur avec laquelle ils répondent
à ces requêtes, n'ont pas hésité à
« autoriser » les huissiers de justice à interroger
directement les organismes concernés. Cette méthode a fait ses
preuves mais n'étant pas légale, sa réussite ne peut
être totale car seulement certains huissiers de justice peuvent en
bénéficier.
Si les procureurs de la République ont, en toute
conscience et sous leur responsabilité, autorisé certains
huissiers de justice à user de cette
« délégation » de fonctions, le
législateur devrait prendre en compte les avis des différents
protagonistes concernés pour faire évoluer la justice. Cette
pratique n'a qu'un seul but légitime, celui de faire appliquer au mieux
la justice française.
Une alternative au système précédent
existe, il suffirait de modifier légèrement la formule
exécutoire. Si la République Française mande et ordonne
également aux administrations et organismes publics de tenir la main
à tous commandants et Officiers de la Force Publique et de leur
prêter main-forte lorsqu'ils en sont légalement requis, il ne
serait plus utile de passer par le biais d'une requête au procureur de la
République. Les huissiers de justice pourraient ainsi interroger
directement les administrations et organismes publics qui au vu de leur
intégration au sein de la formule exécutoire, ne pourraient
refuser de prêter directement leur concours.
Au-delà de ces possibilités, la conservation des
données collectées devrait faire l'objet d'un assouplissement de
la part du législateur et de la CNIL. L'huissier de justice devrait
pouvoir réutiliser des informations déjà obtenues dans le
cadre d'un dossier précédent. Il est impensable d'imaginer que
les huissiers effectuent deux fois le même travail de recherche par
rapport à un même débiteur. La CNIL autorise la
conservation de documents tels que les minutes, les correspondances, les
pièces comptables pour une durée limitée. Cependant tous
les renseignements collectés dans le cadre de procédures
d'exécution ne peuvent pas faire l'objet d'un archivage. La CNIL permet
déjà de conserver ces informations dans des fichiers
sécurisés et accessibles dans la base active pendant une
durée de cinq ans, la durée devrait logiquement être
augmentée et alignée sur le temps de conservation des minutes.
Par ailleurs, le secret postal devrait être levé
envers les huissiers de justice qu'ils soient munis ou non d'un titre
exécutoire. Par un changement d'adresse auprès des services
postaux, un débiteur peut continuer à recevoir son courrier
désormais réorienté, cependant l'huissier de justice ne
peut pas en avoir connaissance. Il serait donc nécessaire que ce dernier
puisse être tenu informé des changements d'adresse. En pratique,
ceux-ci pourraient faire l'objet d'un fichier postal particulier auquel
l'huissier de justice munis de codes personnels pourrait avoir librement
accès. Aux yeux des services postaux, ce dernier passerait donc du rang
de n'importe quelle personne physique à celui de membre à part
entière de la Justice.
Dans un second temps, la mise en place d'un fichier central
des hypothèques et du cadastre serait un point positif. En effet, il est
particulièrement difficile pour l'huissier de justice voire
impossible, de savoir si un débiteur possède un
ou des biens immobiliers. S'adresser à chaque bureau local des
hypothèques est difficilement envisageable, c'est pourquoi un fichier
recensant l'ensemble des propriétaires et des informations concernant
leurs biens serait un point positif qui éviterait des frais dus à
une carence d'organisation des services étatiques. Au niveau
européen, certains pays ont déjà des registres
centralisés, très efficaces, des propriétés
immobilières. Sur une base des données sont enregistrées
toutes informations concernant les titres de propriété à
travers le pays comme en Suède par exemple. A l'heure actuelle, en
France, il existe un service Internet permettant d'obtenir gratuitement des
plans cadastraux, mais aucune information concernant le propriétaire.
Les renseignements obtenus restent parcellaires et incomplets.
Au-delà de ces systèmes d'accès à
l'information post-obtention d'un titre exécutoire, il est important de
donner les moyens au créancier de connaître l'étendue du
patrimoine de son débiteur avant l'engagement d'une procédure
d'exécution. La Chambre Nationale des Huissiers de Justice
considère qu'il serait en effet préférable de permettre
à l'agent d'exécution de rechercher, sous sa
responsabilité et préalablement à l'engagement d'une
procédure, des informations concernant la solvabilité du
débiteur en cause, évitant ainsi au créancier, d'engager
une action dont l'issue est rendue incertaine par une solvabilité
inconnue du débiteur. En l'absence de réelles informations sur la
situation de solvabilité d'un débiteur, le créancier ne
peut les obtenir qu'en étant titulaire d'un titre exécutoire, ce
qui l'oblige à engager des frais pour bénéficier d'une
source d'information légale.
Cette situation faisant du titre exécutoire le point
d'entrée obligatoire et légal d'information nuit donc à la
pertinence du système. En enlevant cette condition d'accès et en
la remplaçant par l'obligation de recourir à un huissier de
justice, en prenant évidemment en compte toutes les garanties offertes
par la profession, ceci donnerait plus de crédibilité au titre
exécutoire et permettrait une revalorisation de la profession en
matière d'exécution forcée. Cette hypothèse
illustrerait ainsi le processus actuel de déjudiciarisation de certaines
procédures de recouvrement.
Rachida DATI, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice a
participé, comme vu précédemment, au
23ème Forum de la Chambre nationale des huissiers de
Justice. A cette occasion, elle a annoncé une extension des moyens
d'actions des huissiers de Justice afin de faciliter
l'exercice de leurs missions. Afin de faciliter la recherche d'informations,
les huissiers doivent également "avoir accès à
tous les renseignements utiles". "Je veux que vous soyez autorisés
à interroger directement certaines personnes publiques afin d'obtenir
l'adresse d'un débiteur, celle de son employeur, ou celle de la banque
où il a ouvert un compte" a assuré le ministre. Cela simplifiera
le travail des huissiers de justice puisqu'ils n'auront plus besoin de passer
par le procureur de la République. Ainsi la nécessité de
la réforme est à l'esprit de tous y compris au sein du
Ministère de la justice. La Ministre de la justice ajoute que plusieurs
autres mesures vont être prises dans les mois à venir afin de
permettre aux huissiers de justice dont une concerne le sujet. Une de ces
dispositions devra permettre d'accéder aux dispositifs d'appel et aux
boîtes aux lettres particulières des immeubles d'habitation, le
syndic pourra ainsi être autorisé à fournir un passe et
communiquer aux huissiers le code d'accès à un hall
d'immeuble.
A l'heure actuelle, la CNIL met en place, en partenariat avec
la Chambre Nationale des Huissiers de Justice (CNHJ), un système qui
permet aux huissiers de justice de lui garantir l'utilisation et la
conservation des données personnelles concernant des débiteurs.
Peut-on y voir le début d'une confiance totale de la CNIL ? La
circulaire n°2007-46 fait part de cet accord grâce à la mise
en place d'un correspondant informatique et libertés (CIL)
mutualisé entre le plus grand nombre d'études. La mission
d'être le CIL mutualisé de la profession d'huissier de justice a
été confiée en janvier 2008 par le Président de la
CNHJ à Maître Guy CHEZEAUBERNARD. Six relais régionaux sont
également mis en place. Le rôle du CIL et des relais
régionaux va être d'accompagner les études dans la mise en
conformité des fichiers qu'elles détiennent. La démarche
d'adhésion au système de CIL mutualisé est propre à
chaque étude et non obligatoire. Cependant, le Président de la
CNHJ rappelle dans sa circulaire en date du 06/02/2008 que toute
adhésion à ce système dispensera l'étude des
formalités de déclaration du contenu des fichiers détenus
par elle à la CNIL. Ce système va garantir un accès
privilégié des services de la CNIL à la profession
d'huissier de justice.
Ceci permettra de trouver des solutions permettant de
concilier protection des libertés individuelles et intérêts
légitimes des professionnels concernés.
Conclusion
En France, la réforme de 1991 ainsi que son
décret d'application de 1992, ne suffisent plus pour permettre une
exécution convenable de la Justice à l'image d'autres pays
européens. Le législateur a souhaité donner le monopole de
l'exécution et du recouvrement à l'huissier de justice
grâce à toute une série de dispositions.
Cependant, les carences de moyens, les difficultés
présentes au quotidien pour l'huissier de justice dans son parcours
d'accès à l'information ont des conséquences
néfastes pour l'exercice de la profession. Des sociétés se
sont développées pour pallier à ces problèmes,
elles usent de moyens souvent illégaux, obtiennent des informations
d'ordre privé par le biais de corruption, de complicité d'agents
fonctionnaires d'Etat, d'organismes sociaux ou encore d'agents bancaires. En
parallèle, la CNIL, par son souci de protection des individus, contribue
à alimenter ce commerce de l'information. Ces sociétés ne
présentent aucune garantie contrairement aux huissiers de justice. Alors
la question que devrait se poser le législateur est simple :
n'est-il pas préférable de donner aux huissiers de justice les
moyens nécessaires pour exécuter les décisions de justice
plutôt que de laisser des sociétés sans scrupule continuer
à proposer leurs offres de services portant atteinte à la vie
privée des débiteurs ?
Certes, avec la loi du 11 février 2004 portant
réforme de la profession, les huissiers de justice se sont vu
conférer la possibilité d'interroger le fichier FICOBA,
avancée notable mais pourtant insuffisante. Cet accès ne concerne
qu'un seul aspect de la recherche d'informations, les comptes bancaires, le
reste du patrimoine, s'il existe, est tout à fait
délaissé.
Consciente du problème, la Chambre Nationale des
Huissiers de Justice tente souvent d'attirer l'attention du législateur.
Les huissiers de justice rencontrent ce problème tous les jours et
souhaitent vraiment que la réforme en marche s'accélère.
Il est nécessaire de donner aux huissiers de justice un
accès direct aux informations sans nier le souci de protection des
débiteurs quant à leur sphère privée.
Les deux parties, créancier et débiteur, y
trouveraient leur propre intérêt. Les premiers verraient un gain
de temps et les seconds ne paieraient pas de frais inutiles, les renseignements
obtenus permettant d'appréhender la réelle solvabilité du
débiteur et de choisir une procédure adaptée.
Le législateur et les administrations doivent prendre
réellement conscience du problème interdire le commerce de
l'information et mettre à disposition de l'huissier de justice les
moyens permettant que l'application de la justice française soit une
réalité.
« L'huissier de justice fait vivre la
décision de justice »42(*). Par cela, il est à même d'utiliser les
moyens adéquats pour mener à bien ses missions dans le respect
des individus.
Tables des matières
Introduction
1
Titre I
La recherche d'informations pour
l'huissier de...........8 . justice
8
Chapitre I Les moyens accessibles
à tous
9
Section I : Les acteurs principaux de
cette recherche
9
d'informations
9
Section II La recherche d'informations
à l'initiative de l'huissier
12
I A l'étude
12
II L'huissier de justice en tournée
14
Chapitre II : Les rapports avec les
autorités
17
Section I La recherche d'informations avec
l'aide du Parquet
17
I Les conditions de fond
17
II Les Conditions de forme
18
III La gestion de la demande par le procureur de la
République
19
IV Les différents organismes
interrogés
20
Section II : Le préfet en
possession de données importantes
22
Section II : Accès au fichier
des comptes bancaires
25
Chapitre III : La place des tiers dans
les procédures d'exécution
28
Section I Les obligations des tiers
28
I Devoir d'abstention
28
II Devoir de collaboration
29
Section II Les tiers et la saisie
attribution
30
I Obligations du tiers saisi
30
1) L'obligation de déclaration du
tiers saisi
30
2) Le contenu de la déclaration du
tiers saisi
31
3) L'assouplissement de la notion de
délai
32
II Les sanctions encourues par le tiers saisi
33
1) Les différentes sanctions
envisagées
33
2) Les cas d'exonération pour le
tiers saisi
34
Section III Le rôle des tiers dans la
procédure de paiement direct
35
Section IV : L'ordonnateur et le
comptable public
37
I Interrogation de l'ordonnateur
37
II Les obligations incombant au comptable
public
38
Section V La place des tiers dans les
autres mesures
39
I Saisie rémunérations
39
II Le rôle du tiers en matière de
saisie conservatoire, saisie vente
40
Chapitre III : Le régime
d'utilisation des données obtenues et ses
42
conséquences
42
I Le rôle de la CNIL
42
II La conservation des données obtenues
43
TITRE II :
Existence d'un marché
parallèle
47
Chapitre I : Le marché
parallèle de l'information
48
Section I : Des sociétés
spécialisées
48
I Les potentiels clients de ces sites Internet
48
II La nature des renseignements obtenus
50
Section II : La
réglementation
54
I Le secret professionnel
54
II La question de la réelle
réglementation
56
Chapitre II : La dévalorisation
du titre exécutoire
60
Section I : La dévalorisation
du titre exécutoire
60
Section II : Atteinte à la
profession d'huissier de
1
justice
62
Titre III :
Une réforme nécessaire
67
Chapitre I : La recherche
d'informations dans d'autres Etats
68
européens
68
Section I Le cas de l'Italie
68
I Identification du débiteur
68
II Détermination du patrimoine
69
Section II Le cas de l'Allemagne
71
I La déclaration sous serment
72
1) Le contenu de cette
déclaration
72
2) Modalités de la prestation sous
serment
73
II Le registre des débiteurs
74
Section II Le cas de la
Suède
75
Chapitre II Les perspectives
envisageables
79
Conclusion
83
Bibliographie
I Dictionnaire
- Lexique des termes juridiques, Dalloz
- G.CORNU, « Vocabulaire juridique », Presse
universitaire de France
II Codes
- Code de procédure civile, Edition Dalloz, 2008
- Code civil, Edition Dalloz, 2008
- Code de la route, Edition Dalloz, 2008
- Code pénal, Edition Dalloz, 2008
III Ouvrages généraux
- J .PREVAULT, J.VINCENT, « Voies
d'exécution », Mémentos, Dalloz, 2001
- G.COUCHEZ, Voies d'exécution, Armand Colin,
8ème édition, 2005,
- PERROT et THERY, Procédures civiles d'exécution,
Dalloz, 2ème édition, 2005,
- M.DONNIER, J.B DONNIER, Voies d'exécution et
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Nexis, Litec
- S.GUINCHARD, T.MOUSSA, Droit et pratique des voies
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- G.TAORMINA, Opérations préalables aux mesures
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IV Jurisprudence
- C.Cass 2ème civ 25/01/07, N° de pourvoi
05-13.618
- CCass 2ème civ 05/04/07 N° de pourvoi
05-14593C.Cass 3ème civ 23/05/07, N° de pourvoi
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- CA Grenoble, 15/05/06, JCP 2006, IV, 3327
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CA Lyon, 17/02/05
- CA Lyon, 6/02/02, N° de pourvoi 2000/06798
- CA Versailles, 07/01/03, N° de pourvoi 2001-5838
- CA Versailles, 29/12/00, N° de pourvoi 1998-9457
V Articles et chroniques
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- Professeur BURKHARD HESS, « Questionnaire sur la
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- J.C BELOT, « Le portrait de l'huissier de justice de
demain », Petites affiches, N°66, 02/04/02
- B.CRENEAU-JABAUD, « Le secret professionnel et la
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- R.PERROT, « Le droit du créancier de retrouver
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- Editions Techniques, Juris-classeurs, 1993, Fascicule 2090
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- Revue Procédures, Lexis Nexis, Janvier 2005, page 13
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- R.PERROT, « Présentation
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- Revue procédures 2001 commentaire 143 obs PERROT
- Revue procédures 2003 commentaire 165 note DOUCHY
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- www.cnil.fr
- www.senat.fr
- www.uihj.com
-
www.huissier-justice.fr
- Site de la Cour de cassation
* 1 C.Cass
1ère civ 9/05/01
* 2 G.CORNU, Vocabulaire
juridique, Ed PUF
* 3 R.Martin, Déontologie
de l'avocat, 4ème éd, Litec, 1999, spéc.
n°445
* 4 Juris-Data
n°2006-300763, JCP 2006, éd. G, IV, 3327
* 5 http://www.infogreffe.fr
* 6 www.hypoexpress.com.
* 7
http://www.orf.fr/pdf-documents-legaux-orf/documents-hypothecaires/demande-renseignements/orf-sommaires-urgents.pdf
: exemplaire de cette fiche de renseignements sommaires urgents
* 8 Pourvoi n° 06-11.211
* 9 Pourvoi n° 05-13.618,
Juris-Data n°2007-037078
* 10 Loi n° 2004-130
* 11 2 Juillet 1962, JCP
édition générale 1962, II, n° 12835
* 12 Voir Article L 330-1 du
Code de la route.
* 13 Loi n°90-1131 JO
22/12/1990 page 15860. Version originale.
* 14 Voir les articles L 330-2
et L 330-3 du Code de la route.
* 15 Loi n° 2004-130
* 16 Extrait de l'avis de la
CNIL 14 décembre 2002
* 17 BICC 15/10/1997
n°1172
* 18 Bull.civ II n°107
* 19 Bull Civ II n°132
* 20 Cour de cassation 28
janvier 1998
* 21 Rapport Cour de cassation
1999
* 22 Chambéry 8 Janvier
2002
* 23 Paris 7 avril 1998 D.1998
IR 135
* 24 CCass
2ème Civ 7 janvier 1920
* 25 CA Paris 8/11/1963, JCP
1964 Ed G,II,13632
* 26 Séance du 27 avril
2006
* 27 Par exemple :
www.juridis.org/recherches ou
encore
www.rocheinvestigations.fr
* 28
www.juridis.org/recherches
* 29 Titre I Section III page
21
* 30 Question n° 37302 du
20 avril 1977
* 31 Loi n° 2003-239
* 32 Décret n°
2005-1123 JO 9 septembre 2005
* 33 JOFR n°181 Page
13202
* 34 Loi n°83-629
* 35
Loi
n°2003-239 du 18 mars 2003 - art. 102 () JORF 19 mars 2003
* 36 Voir Titre I Chapitre II
page 10
* 37 Vocabulaire juridique,
Gérard Cornu, Ed. PUF
* 38 Op.cité
* 39 Ordonnance n°45-1418
* 40 Décret
n°75-770
* 41 Petites affiches,
02/04/02, N°66
* 42 R.DATI
23ème Forum des huissiers de justice
|