La question Kaliningrad dans les relations UE - Russie( Télécharger le fichier original )par Hafid ASSAOUI Université de Perpignan - Master 2 droit public 2007 |
INTRODUCTION
L' Union Européenne et la Russie : une puissance qui ne l'est pas encore, et une puissance qui ne l'est plus. La complexité et le caractère laborieux des relations entre ces deux acteurs restent frappants. Ces incompréhensions s'expliquent d'abord parce que ces relations mettent en jeu des sujets cruciaux mais aussi par le caractère à priori très différent entre les deux entités. Autre raison majeure : la difficulté qu'ont aussi bien la Russie et l'Union Européenne à savoir et à formuler clairement ce qu'elles attendent l'une de l'autre. Sauf que la Russie attend au moins une chose de l'Union, c'est un traitement spécifique. Or la plus grande erreur de l'UE est de placer l'Ukraine, la Biélorussie ou le Maroc sur le même pied d'égalité que la Russie explique Jean -Louis Bianco1(*) Ce constat ne se veut pas alarmiste : si les relations entre l'Union et la Russie sont difficiles, il ne s'agit pas de s'entendre verbalement sur des questions, certes importantes, mais ponctuelles, ni de se réunir de temps à autres devant les caméras de télévision en affichant de grands sourires de circonstance. Il s'agit de négocier au jour le jour sur des questions de certificats vétérinaires, de sûreté nucléaire, de tarifs douaniers, de visas de longue durée ou de lanceurs spatiaux. Il s'agit d'aborder des sujets difficiles, tels que l'interdépendance énergétique, la construction d'une architecture de sécurité européenne efficace, la lutte contre la criminalité organisée, à Kaliningrad, en Tchétchénie... ou en Ukraine. Les relations entre l'Union européenne et la Russie se trouvent aujourd'hui à un carrefour. Les échanges économiques ne cessent de s'intensifier et la nécessité d'un dialogue approfondi face aux crises internationales apparaît chaque jour plus évidente. Si, face à la Russie, l'Union et ses Etats membres doivent s'unir pour défendre leurs intérêts, un dialogue constructif ne peut avoir pour condition préalable que la reconnaissance de la légitimité pleine et entière des deux partenaires. Un Partenariat renouvelé entre la Russie et l'Union européenne pourrait dès lors privilégier ce qui les unit, plutôt que ce qui les divise. Ces relations obéissent à trois contraintes2(*). La première est la différence de nature entre l'Union, construction récente, aux compétences évolutives et rassemblant des Etats indépendants et démocratiques, et la Russie, nation pleinement souveraine et héritière d'un Empire autocratique et multinational. La seconde est l'incertitude qui caractérise le comportement de ces deux entités, née des bouleversements internes intervenus depuis 15 ans et de l'instabilité de leur environnement géopolitique. La troisième est la proximité et l'interdépendance qui, sur tous les plans, unissent la Russie et l'UE et ne leur laissent d'autre choix que de s'entendre. Cette situation se complique du fait des particularités
de l'Union européenne en tant qu'acteur international. Dépourvue
pour l'essentiel de capacités militaires et stratégiques,
celle-ci a fait de l'action économique le coeur de sa politique
étrangère, tout en essayant de transposer sur la scène
internationale son savoir-faire en matière d'harmonisation des
législations internes. Cette tentative visant à effacer
progressivement la frontière entre politique intérieure et
politique étrangère s'est heurtée au refus de la Russie de
remettre en cause sa propre souveraineté et à l'incapacité
des Etats membres de l'Union à coordonner leurs propres politiques
vis-à-vis de Moscou et à reprendre à leur compte les
décisions prises en leur nom à Bruxelles. Ce dernier facteur
explique, pour une large part, le contraste entre le poids économique
déterminant de l'Union en Russie et dans l'espace post-soviétique
et la faiblesse parfois remarquable de sa position politique. L'élargissement à 27 pays de l'Union Européenne, notamment l'adhésion de la Pologne et de la Lituanie pose un nouveau défi au relation union Européenne - Russie. Car Kaliningrad l'ancienne Königsberg, devenue soviétique en 1945 et siège de la flotte russe de la mer baltique, devient en effet une enclave russe dans le territoire de l'Union européenne et pose la question de la circulation des personnes et des marchandises entre Kaliningrad et ses voisins, mais aussi entre celle-ci et le territoire central de la Russie. Si aucune mesure particulière n'est envisagée, les règles de l'espace Schengen s'appliqueront alors aux voyageurs russes qui en proviennent ou qui s'y rendent. Ceux -ci devront être munis de visas permettant d'entrer dans cet espace et d'y circuler librement, alors que les citoyens russes pouvaient jusqu'à présent traverser la Lituanie sans visa.. La Russie rejette cette évolution annoncée, au nom de sa continuité territoriale, et du droit de ses citoyens à se déplacer librement d'un point à l'autre du territoire national, principes soutenus par la France lors de la visite du président Jaques Chirac à Moscou en juillet 20023(*). Tant la Russie que l'Union européenne ont présenté de nouvelles propositions afin de trouver une solution mutuellement acceptable à cette situation très particulière. Dans cette atmosphère, la présente étude se consacre aux enjeux et perspectives stratégiques des relations Union européenne - Russie en général, et plus particulièrement au devenir de l'enclave de Kaliningrad, prise entre encerclement et élargissement : quelles sont ses perspectives d'évolution face à l'élargissement de l'Union européenne ? Et quels sont les scénarios possibles des relations de Kaliningrad avec l'UE ? Ainsi et de façon plus général l'étude essaie de répondre sur les question relatives au relation entre la Russie et l'Union Européenne Qu'est-ce que la Russie aujourd'hui pour l'Europe ? Tout à la fois un voisin (approche géographique), un partenaire (approche commerciale), un concurrent (approche géopolitique), une source de préoccupations (approche politico-éthique), une menace (approche dans certains nouveaux Etats membres), une source d'incertitudes (approche prospective), un contrepoids à la puissance américaine dans la perspective multipolaire (approche politique). A l'inverse, qu'attend la Russie de sa relation avec l'Union européenne ? L'élargissement de l'Union européenne doit donc se donner pour objectif d'exercer un effet stabilisateur.4(*) Sur ce, Notre plan sera dessiné de la façon suivante une première partie consacre au relation UE - Russie en générale avec deux chapitre sur les programmes de coopération et de partenariat et une deuxième partie consacre entièrement a la question de Kaliningrad dans les relations UE -Russie , les conséquence de l' élargissement ainsi que sur l'avenir de l'enclave * 1René André et Jean-Louis Bianco ; « Les relations entre l'Union européenne et la Russie : quel avenir ? » ; Rapport de la Commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale ; Paris,2004. * 2 L'union européenne et la Russie, Fondation Robert SCHUMAN - question d'Europe, n°35 10 juillet 2005- http://www.robert-schuman.org/supplement/questions_europe35.htm. * 3 Communication sur les relations entre l'Union européenne et la Russie « la question de Kaliningrad » rapport de M. René André, Député à la délégation de l'assemblée nationale pour l'Union Européenne, octobre 2002.p7 * 4 Jean Raux et Vladimir Korovkine ; « le partenariat entre l'Union Européenne et la fédération de Russie » ; APOGEE ; Rennes ; 1998,p 7. |
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