C/ La création d'une
«région pilote »
Depuis 1999, l'UE et la Russie ont intensifié leur
intérêt pour le sort de Kaliningrad et l'ont inscrit dans leur
agenda. Le Conseil européen de Feira ( Portugal), en juin 2000, a
notamment souligné trois lignes d'action essentielles pour la Dimension
septentrionale : l'environnement, la lutte contre le crime organisé et
Kaliningrad. La Russie a accepté que l'UE mette Kaliningrad sur son
agenda et a elle-même proposé un éventuel «accord
spécial» pour que la région devienne une «région
pilote», désormais au coeur des relations UE - Russie. Si les
caractéristiques de cette "région pilote" sont encore mal
définies, c'est pour prendre en compte les modifications
stratégiques, politiques et économiques issues de
l'élargissement de l'UE, mais aussi afin de trouver pour Kaliningrad des
aides financières européennes, indépendamment de son
élargissement à l'Est. Cet élargissement oblige
l'économie de la région à se transformer, transformation
qui dépend aussi de l'avenir des frontières. D'un point de vue
économique, outre la question de la libre circulation des personnes, qui
affecte le mouvement de la main d'oeuvre et des hommes d'affaires russes ou
étrangers, le mouvement des biens entre l'UE et Kaliningrad touche le
second aspect du développement économique de l'enclave.
Après l'élargissement, il est prévu que le transit
à travers la Lituanie et la Lettonie s'effectuera sans taxe
douanière.
L'idée d'une meilleure intégration
économique entre la Russie et Kaliningrad est maintenant sur l'agenda
européen dans le cadre de la réflexion globale sur la
création d'un Espace Economique Européen commun. Il s'agit aussi,
en filigrane, du côté russe, de tester des réformes
d'ouverture et d'insertion économiques qui, le cas
échéant, pourront être étendues au reste de la
Russie.
A la différence de la plupart des régions
européennes, voire russes, la transition de Kaliningrad est double.
D'une part, Kaliningrad doit redéfinir sa place dans un environnement
russe en pleine mutation et transcender sa position d'esclave. D'autre part,
elle fait face au défi de l'élargissement de l'UE, pour lequel
elle n'est pas invitée à négocier. Dans ce cadre
particulier, la région a bénéficié de
l'introduction de régimes de libéralisation et d'ouverture
internationale particuliers, au premier rang desquels le statut de Zone
économique spéciale. Bien qu'incomplet et en contradiction avec
la législation fédérale, ce statut est le premier
élément structurant d'une politique de développement pour
Kaliningrad. Jusqu'à présent, cette mesure a surtout permis un
développement resté largement dans l'économie informelle.
Afin d'éviter l'indifférence, voire les tentations d'isolement,
et de favoriser l'émergence d'un cercle vertueux des relations entre la
Russie et l'Europe dans le cadre d'une nouvelle dynamique européenne, il
est souhaitable de réformer et de renforcer ce système de court
terme et d'engager des réformes globales. La volonté existe en
Russie comme en Europe, l'une voyant dans l'autre un partenaire
stratégique possible pour le long terme. Il paraît important que
l'UE accroisse substantiellement ses aides au développement et son
assistance technique en particulier pour les infrastructures
économiques, mais aussi dans les domaines de l'éducation et de la
formation.
L'Europe devra enfin adopter une approche nettement plus
flexible des quatre libertés (biens, services, capitaux et personnes) en
synchronisant ses politiques intérieures et extérieures. Elle
devra par exemple adopter une gouvernance des frontières et
dépasser le seul financement des programmes de coopération
transfrontaliers initiés par les acteurs économiques et
sociaux.
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