La question Kaliningrad dans les relations UE - Russie( Télécharger le fichier original )par Hafid ASSAOUI Université de Perpignan - Master 2 droit public 2007 |
Paragraphe 2 : de Königsberg à KaliningradLes « Mémoires de Guerre » du général de Gaulle présente une bonne image des positions adoptées par les puissances alliées face à la perspective de la capitulation allemande, Dès le 21 juin 1942, un télégramme du Comité national au délégué de la France libre à Kouybichev : « Nous ne verrions, en ce qui nous concerne, que des avantages à ce que la Pologne se vit attribuer la Prusse orientale ». Le 10 novembre 1943, un rapport adressé au chef de la France Libre par le commissaire aux affaires étrangères René Massigli raviva les inquiétudes :« Les Russes n'ont pas dissimulé leurs prétentions territoriales : le gouvernement polonais (préfère écarter )toute discussion sur les frontière jusqu'à la paix ». Dix jours plus tard, au cours d'un entretien avec M. Morawski, ambassadeur de Pologne, le Général confirme qu'a son avis « ce serait pour la Pologne le plus mauvais moment pour poser la question de ses frontières avec la Russie et avec ses autres voisin » A l'évidence, les soviétiques lui paraissaient décidés à mesurer leurs concessions selon la nature du régime qui s'installerait en Pologne 57(*) Le chef de la France libre se souvenait des avertissements naguère prodigués par l'historien Jaques Bainville : « Pologne et Russie sont deux nations aux frontières indistinctes, entre lesquelles il n'y a pas d'accommodements depuis qu'elles se connaissent ».58(*) Les rapports de forces se précisèrent quelque peu lors de la visite du générale de Gaulle au Kremlin au début de décembre 1944.le 2 décembre, le maréchal Staline se déclara d'emblée disposé à ce que « les anciennes terres polonaises (soient) restituées à la Pologne» .Il restait à définir cette notion d' « anciennes terres polonaises », et surtout la nature du régime polonais escompté : «La Russie a, dans l'affaire polonaise, un intérêt essentiel », compléta Staline. « Nous voulons une Pologne amie des Alliés et résolument anti-allemande. Cela n'est pas possible avec le gouvernement qui est à Londres et qui représente l'esprit anti-russe, virulent depuis toujours. Au contraire, nous pourrions nous entendre avec une autre Pologne, grande, forte et démocratique ». De Gaulle ayant riposté qu'il n'avait « pas l'intention de reconnaître le comité de Lublin comme gouvernement de la Pologne, ni de traiter officiellement avec lui », la questions des frontières russo-polonaise parut rester ouverte jusqu'au accords qui seront signes à Potsdam le 2 août 1945. En réalité, cependant, la conférence de Téhéran s'était terminée le 1er décembre 1943, su un accord de principe retenant pour frontière l'ancienne ligne Curzon59(*) et un parallèle au sud de Königsberg; des protocoles en ce sens furent paraphés dés septembre et octobre 1944 par les Soviétiques et les Anglo-saxons, à l'insu des français et des Polonais de Londres. Ce sont ces textes qui seront officialisés par Postdam, instituant une ligne de partage voisine de parallèle de latitude 54°25N. La moitie septentrionale de la Prusse orientale sera incorporée au territoire soviétique, tandis que la moitie méridionale -beaucoup plus agricole- sera placée « sous administration polonaise », en attendant le tracé frontalier définitif, lui-même reporté au jour de traité de paix . Mais ce dernier ne sera jamais signé. La souveraineté soviétique puis russe sur le nord de l'ancienne Prusse orientale ne sera jamais contestée. Assurée de son droit de conquête et confortée par l'accord de ses grands partenaires, l'URSS en fit une « Oblast' » (un département) de droit commun , et pour prévenir le moindre doute, tous les noms allemands furent remplacés par des appellations russe. C'est ainsi que, depuis 1946, Königsberg est devenue Kaliningrad....60(*) * 57 Général de gaulle, op.cit., II p.596 * 58 Jaques Bainville : « Les conséquences politiques de la paix », A. Fayard, Paris, 1920 * 59 On rappellera ici que la ligne Curzon est proche de celle -là même que Staline avait obtenue de Hitler en 1939 et effectivement occupé en 1940 * 60 Viviane du Castel , de KÖNIGSBERG A KALININGRAD « L'Europe face à un nouveau département d'outre terre russe sur la Baltique » l'Harmattan, Paris 1996, p 99. |
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