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Redéploiement militaire américain : L'Afrique du Nord aprés le 11 septembre 2001

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par Rachid Oufkir
Université Paris VIII - Etudes Européennes et Internationales, spécialité La Construction Européenne, Option l'Europe et l'ordre International 2006
  

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2- Enjeux de cette militarisation

La question qui se pose et qui reste sans réponse, pourquoi l'Armée Nationale Populaire (ANP) se militarise ? A cette question, les réponses sont divers et variés, mais substantiellement on peut en retenir deux interprétations, pour la partie marocaine la seule réponse est que l'Armée algérienne est en course d'armement en préparation d'une guerre contre le Maroc, arguant le fait que les deux pays se retrouvent au centre d'un rapport de force sur le plan diplomatique et géostratégique concernant la question de Sahara occidental, la guerre des « sables » en 1963 qui a eu des répercussions sur les relations bilatérales, enfin la question d'hégémonisme est important dans ce refroidissement au Maghreb et explique beaucoup le « pourquoi » du renforcement de l'armement algérien.

L'Afrique du nord manque de leader, ce qui laisse un champ libre pour l'Algérie de pouvoir prétendre à jouer un rôle régional, aidés en cela par la coopération américaine au niveau sécuritaire qui fait penser que l'Algérie est une puissance régionale. D'aucuns voient des raisons internes pour expliquer les énormes contrats d'armement que le pouvoir en place passe avec la Russie notamment, les Etats-Unis et l'Inde, il s'agit de généraux algériens qui, pour se maintenir au pouvoir, déploient tous les moyens, y compris, créent des situations de conflictualité qui nécessitent leurs interventions, donc la nécessité de leur maintien en place, vu qu'ils sont les plus compétents pour répondre efficacement à ces situations de tension. Le maintien de la tension avec le Maroc reste un point nodal dans leurs stratégies géopolitiques96(*). Placés dans des centres de décisions stratégiques et maîtrisant tous les rouages de l'Etat, ils sont capables de bloquer ou saboter toute initiative de rapprochement entre les deux pays. Le Polisario qui est un « sérieux problème [...] pour le Maroc, » est un soutien fort dans cette entreprise. Selon M.Samraoui97(*), la normalisation ne peut se concevoir entre le Maroc et l'Algérie tant qu'il y au pouvoir ces généraux « ils sont capables du pire » comme la liquidation de Mohamed Boudiaf dont, entre d'autres raisons, le projet de résolution du conflit menaçait les intérêts et le système mis en place par les généraux, ainsi que ses positions risquaient de compromettre leur devenir, ou «  provoquer un conflit militaire avec le Maroc ».

La deuxième interprétation, celle des dirigeants algériens, est que l'armement n'est pas une provocation adressée au Maroc, mais un besoin de l'armée algérienne de mettre à jour et rénover son arsenal militaire, viellé et dégradé depuis les années 1980 et l'embargo imposé des pays occidentaux sur la vente d'armes durant les années 1990, pendant la guerre civile qui s'est soldé par des centaines de milliers de morts. D'autre part, l'Algérie doit aussi assurer l'intégrité d'un territoire cinq fois plus grand que le Maroc, et sa position centrale, au milieu de six Etats, fait qu'elle doit multiplier au moins par six les risques qu'elle encoure de voir surgir à ses frontières un conflit armé. Dans de nombreuses déclarations du chef d'Etat, et des autorités algériennes en général, la tendance est à l'apaisement de la crainte d'une guerre que l'Algérie déclencherait contre le Maroc, « Il n'y a aucune guerre possible entre deux pays frères et deux peuples frères 98(*)» déclare le ministre des affaires étrangères algérien, celle-là reste une option, seulement au cas où les frontières nationales algériennes sont transgreéssées « la guerre est une option que l'Algérie ne retient que dans le cas d'une violation de ses frontières [...] Si l'on ne touche pas à nos frontières héritées de la colonisation, il n'y aura aucune guerre avec un autre pays [...] l'Algérie n'a de visée sur aucun territoire de pays voisins et elle n'a aucune attitude belliciste et belliqueuse » "L'Algérie ne déclarera jamais la guerre au Maroc, car nous sommes des hommes de paix [...] le Sahara occidental n'est pas un casus belli entre l'Algérie et le Maroc frère99(*)".

Des deux côtés de la frontière, on assiste à une escalade médiatique, alimentée par ces interprétations entretenues par les hommes politiques, les intellectuels, les universitaires 100(*) et les journalistes.

Jusqu'à présent, il n y a pas de signe patent démontrant les velléités belliqueuses de l'Algérie, au delà de la thèse de l'armement, entretenue par les responsables marocains, qui mènerait inéluctablement vers une affirmation de sa puissance régionale du moins. Il est vrai aussi qu'aucun stratège, pour le moment, ne peut parier sur un futur conflit armé entre les deux pays voisins. Donc avancer une thèse, qui ne souffre pas de marge d'erreur, sur les intentions de l'armement algérien, serait une tâche ardue, l'important est de constater que la course aux armements existe bel et bien, que tous les pays de la région cherchent à acquérir des armes pour des raisons diverses. Dans une de ses déclarations à la presse, l'ancien président algérien, A Benbella a fait le constat de la course aux armements et l'augmentation des budgets alloués au renforcement de l'arsenal militaire et des armées, il s'en est prononcé contre, et regrette que cela se fasse au détriment de développement socio-économique et culturel, de telles initiatives ne peuvent qu'instaurer un climat de méfiance entre frères maghrébins101(*). Ce qui va m'intéresser dans cette partie est le fait que la lutte anti terroriste justifie la sophistication de l'armement des pays comme le Maroc, l'Algérie, la Libye et la Tunisie. Comme on l'a vu précédemment, ces pays sont engagés dans la lutte anti terroriste contre les islamistes et se liguent à la cause globale de guerre contre le terrorisme, cheval de bataille des deux mandats successifs de Mr G. Bush depuis 2000. Comme cette guerre exige du matériel adéquat et adapté à la menace, les Etats-Unis adoptent deux situations qui sont complémentaires, la première consiste à créer des bases et des installations militaires dans ces pays même où la menace, réelle ou supposé », est présente, ce qui implique la présence physique des soldats américains pour assurer des missions qui demandent la compétence, l'expertise, et le professionnalisme, dont les américains se croient être investis, et déléguer des tâches aux soldats locaux serait inefficace dans la lutte contre le GSPC par exemple. La deuxième consiste dans le fait que les américains sous-traitent la lutte anti terroriste à ces pays mêmes, et le rôle majeur est celui joué par les Etats hôtes mêmes. Dans ce dernier cas, les pays sont censés ne pas être à la mesure des défis sécuritaires qui se posent sur leur territoires, ils reçoivent pour cela l'assistance militaire américaine, les formations nécessaires et modernes dans le cadre des manoeuvres militaires, comme on l'a a vu dans la deuxième partie, dans le désert et en mer. C'est là que se pose la question de la destination de ces armes ? Sont-elles uniquement destinées à la lutte anti terroriste ? N'y aurait-il pas de dérive dans l'usage de ces armements à des fins hégémonistes et de prétentions territoriales ? En effet, comme on l'a vu précédemment avec Sean Moir102(*), les Etats Unis amplifient plus que de mesure la réalité des menaces des groupes terroristes dans le Sahel, certes, les menaces existent mais l'importance qui leur est accordée est exagérée ainsi que les moyens, largement militaires, mis en place pour résorber et venir à bout de ce phénomène, et on a oublié que le terrorisme a ses origines socio économiques et doit être traité comme tel. Dans d'autres cas, la menace est crée103(*), le cas d'El Para, ancien officier des forces spéciales de l'armée algérienne officiellement passé à la guérilla du (GSPC), pour servir les intérêts de la sécurité militaire en Algérie, tel que pour convaincre les responsables sécuritaires américains pour recevoir un soutien financier et militaire104(*), installer une base militaire dans le sud de l'Algérie, et passer pour l'allié naturel des Etats-Unis dans la région.

* 96 Interview du Colonel Mohamed Samraoui, auteur du livre  Chronique des années de sang  in Les généraux algériens sont capables de provoquer la guerre contre le Maroc, la Gazette du Maroc http://www.lagazettedumaroc.com/articles.php?r=2&sr=964&n=423&id_artl=6686

* 97 Colonel algérien, ancien des services de contre espionnage algérien.

* 98 Cité par Algérie-Maroc, Belkhadem « Une guerre n'est pas passible », El Watan, 11 octobre 2004, www.algeria-watch.org

* 99 Déclaration d'Abdelaziz Bouteflika le 32 octobre 2004 par la télévision algérienne.

* 100Abdelmohsin El Hassouni, EL Houssaini : « le Maroc doit se préparer militairement », Aujourd'hui le Maroc, 25-5-2005, http://www.aujourdhui.ma/couverture-details36030.html

* 101 Sahara Occidental Ben Bella s'aligne sur Rabat, Le Soir d'Algérie, 6 Mai 2006 http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2006/05/06/article.php?sid=37928&cid=2

* 102 Sean Moir, op.cit

* 103Salima Mellah, Jean Baptiste Rivoire Enquête sur l'étrange Ben Laden du Sahara, Le Monde Diplomatique février 2005 http://www.monde-diplomatique.fr/2005/02/MELLAH/11905

* 104 Allégement des Etats-Unis l'embargo sur les armes à destination d'Algérie et la vente d'équipement militaire antiterroriste

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