Université Paris X (Nanterre) Institut National
Agronomique de Paris - Grignon
(INAPG)
Recomposition des rapports ville - campagne en Ile de
France : Exemple de la zone maraîchère de Cergy.
Mémoire de première année Master
: Mondialisation et Dynamiques Rurales Comparées.
Présenté par Ibrahim HESSAS
Composition du jury :
Mme Monique POULOT : Maître de conférence
(Université Paris X) M Jean Paul CHARVET : Professeur (Université
Paris X)
Septembre 2006.
SOMMAIRE :
INTRODUCTION : 1
RAPPELS METHODOLOGIQUES : 9 PREMIERE PARTIE
:
L'AGRICULTURE EN ILE DE FRANCE : DE LA PRISE EN COMPTE
SPATIALE A LA CONSIDERATION FONCTIONNELLE
1. LA PRISE EN COMPTE DE L'ESPACE AGRICOLE DANS L'AMENAGEMENT
REGIONAL EN ILE DE
FRANCE : 13
2. VERS L'INTEGRATION FONCTIONNELLE DE L'ACTIVITE AGRICOLE EN
ILE DE FRANCE : 19
DEUXIEME PARTIE : LA ZONE MARAICHERE DE CERGY : UN
ESPACE AGRICOLE URBAIN
1. UNE POSITION PARTICULIERE : AU CENTRE DE LA VILLE NOUVELLE DE
CERGY PONTOISE. 24
2. UN ESPACE SOUS FORTES CONVOITISES URBAINES : 29
2.1. La zone maraîchère : un espace ouvert :
30
2.2. La zone maraîchère : un espace de sport et
de loisirs : 33
2.3. La zone maraîchère : un espace de liaisons
: 35
2.4. La zone maraîchère : un espace
habité : 36
2.5. La zone maraîchère : un lieu de
décharges sauvages : 38 TROISIEME PARTIE :
L'AGRICULTURE DE LA ZONE MARAICHERE : UNE ACTIVITE
FAIBLEMENT INTEGREE DANS L'AGGLOMERATION DE CERGY PONTOISE
1. PRESENTATION DE L'AGRICULTURE DE LA ZONE MARAICHERE DE CERGY
: 40
2. PEU D'ECHANGES AVEC L'AGGLOMERATION DE CERGY PONTOISE :
50 3. LES TENTATIVES D'INTEGRATION URBAINE DE L'AGRICULTURE PAR
L'AGGLOMERATION DE CERGY PONTOISE : 54
3.1. Les mesures de protection de l 'agriculture en zone
maraîchère : 54 3.2. L 'intégration dans un circuit de
recyclage de déchets urbains : une tentative
échouée. 56
QUATRIEME PARTIE :
LES BASES DU RAPPROCHEMENT VILLE - AGRICULTURE EN
ZONE MARAICHERE DE CERGY
1. DE NOUVEAUX ROLES URBAINS POUR L'AGRICULTURE : 59
1.1. Un rôle social : de l'emploi agricole pour une
main d'oeuvre urbaine : 59
1.2. Les tags : pressions urbaines, ou appropriation
citadine de l 'agriculture : 60
1.3. Le rôle patrimonial et paysager : 62
2. LES CONDITIONS DU RAPPROCHEMENT VILLE - AGRICULTURE : 63
2.1. La reconstruction du dialogue agriculteurs -
agriculteurs : 64
2.2. Le renforcement du contact agriculteurs - citadins :
65
2.2.1. L 'obstacle : un recul des clients sur les
marchés forains : 65
2.2.1.1. Les légumes attirent de moins en moins
d'acheteurs : 68
2.2.1.2. Les marchés forains n 'attirent plus les
clients : 70
2.2.2. La clé du déblocage : un rôle
actif pour les agriculteurs : 72
2.2.2.1. Tenir compte des attentes des citadins : 72
2.2.2.1.1. Envers les produits agricoles : des
légumes frais à des prix abordables : 72
2.2.2.1.2. Envers l'espace agricole : 75
2.2.2.2. Renforcer l'image de l'agriculture au sein de la
société : 76
2.2.2.2.1. L 'agriculture : une activité capable de
satisfaire les attentes de la société : 76
2.2.2.2.2. Redéfinir le métier d'agriculteur
par ses points positifs : 77
2.2.2.3. Convaincre les citadins de maintenir l'agriculture
francilienne : 79
CONCLUSION : 81 LISTE DES ILLUSTRATIONS
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
Introduction :
Le phénomène de la périurbanisation est
né en France à la fin des années 1960, c'est vers 1967 -
1968 que l'engouement pour la maison individuelle reprend une nouvelle vigueur
quarante ans après les lotissements de l'entre les deux guerres. Hormis
quelques franges qui se développent en continuité avec
l'urbanisation existante, il s'agit d'une croissance urbaine
détachée de la ville mère dont l'essentiel s'effectue
à des distances plus ou moins grandes sous la forme d'îlots
urbains en plein milieu rural (Steinberg, Desert et Metton, 1991).
L'essor de la périurbanisation a conduit à la
naissance d'un espace à contours non précis dans lequel se
mêlent l'urbain et le rural avec des proportions plus ou moins
significatives selon que l'on se positionne proche de la ville ou de la
campagne. Il se caractérise principalement par de fortes migrations
domicile - travail permises par le développement de l'automobile et du
réseau routier et autoroutier et par l'accès à la
propriété rendu plus facile grâce aux systèmes de
crédits à la consommation et des prix du foncier plus abordables
en s'éloignant du centre ville. Toutes ces caractéristiques ont
abouti à la mise en place d'un espace particulier qui n'est ni ville ni
campagne mais qui regroupe les caractéristiques des deux espaces : le
périurbain. C'est un non lieu où l'agriculture a
été peu à peu désorganisée. Aujourd'hui, ces
franges rurales / urbaines changent de sens. La forme urbaine recherchée
inclut dorénavant des espaces ouverts, et notamment des espaces
cultivés, dont la permanence à proximité du bâti est
devenue une condition essentielle de la qualité du cadre de vie (Fleury,
2004).
La part de plus en plus marquante de cet espace dans la
répartition des infrastructures, des activités et de la
population a conduit l'INSEE à réviser son système de
découpage du territoire français ; un découpage en aires
urbaines qui tient compte des nouvelles caractéristiques de ces nouveaux
espaces (notamment les migrations domicile travail) est proposé en 1996.
En s'appuyant sur les résultats du recensement de la population de 1999,
ce zonage classe désormais 14930 communes comme périurbaines
(soit 41% de l'ensemble des communes françaises), elles concernent
près de 179792 Km² (soit 33% du territoire) et plus de
12,25 millions d'habitants (soit 21% de la population), les zones rurales
correspondent au territoire de 18535 communes (soit 51% des communes), 320171
Km² (soit 59% de la surface totale de la France) et 10,5
millions d'habitants (soit 18% de la population), le reste étant
classé en zone urbaine (INSEE, 2000). En 1999, 73% de la population
française métropolitaine vit dans les 361 aires urbaines et 56%
dans les 73 aires de plus de 100000 habitants (Bessy - Pietri, 2000), entre
1990 et 1999, la population a augmenté de 1,03% dans
les couronnes périurbaines, de 0,42% dans les banlieues
et de 0,12% dans les villes - centres pour l'ensemble des aires urbaines. La
progression de la population du centre vers la périphérie
caractérise 19 aires de plus de 100000 habitants. Ce
phénomène résulte d'un fort excédent des
arrivées sur les départs ce qui confirme la vigueur de la
périurbanisation (INSEE, 2000).
L'étalement urbain s'effectue par l'artificialisation
des sols qui touche annuellement 55000 ha de terres agricoles (Boisson, 2005).
Sa progression est inégalement répartie selon les zones
concernées, entre 1992 et 2001, elle a augmenté de 14% en zones
périurbaines, de 12% en zones urbaines et de 10% en zones rurales
(Agreste, 2002). A partir de ces chiffres, il ressort que la perte
irréversible des terres agricoles concerne avant tout les espaces
périurbains. Dans ces derniers, l'agriculture utilise encore 10,3
millions d'ha avec 231000 exploitations contre 16,7 millions d'ha avec 375000
exploitations en zones rurales et seulement 1,6 millions d'ha avec 57000
exploitations dans les zones urbaines (Boisson, 2005, Agreste, 2002). En France
métropolitaine, 84% du territoire reste encore occupé par
l'agriculture et la forêt (Boisson, 2005).
Si l'artificialisation des sols agricoles peut être
aujourd'hui plus ou moins freinée à travers les documents
d'urbanismes (schéma directeur, ou encore POS et PLU) qui peuvent
parfois rétablir définitivement la destinée agricole
à certains de ces espaces les sécurisant ainsi de toute pression
foncière, la proximité urbaine pose encore de sérieux
problèmes à l'activité agricole dans ces lieux
particuliers du contact ville - campagne ; vols, dégradations,
difficultés d'accès aux parcelles et problèmes de
circulation pèsent aujourd'hui sur les agriculteurs des espaces
périurbains. Néanmoins, la proximité urbaine permet aux
agriculteurs de commercialiser directement leurs produits et de tirer une marge
bénéficière plus importante de leur travail, le contact
avec les citadins les place aussi dans une position de
privilégiés leur permettant d'ajuster leurs modes de travail et
leurs productions selon les demandes locales. Avec le contact ville - campagne
extrêmement fort dans ces espaces, l'agriculture s'adapte et porte des
caractéristiques spécifiques : une agriculture périurbaine
s'identifie et se met en place (Poulot et Rouyres, 2005). A travers cette
agriculture périurbaine, c'est tout le concept de « campagne
périurbaine » proposé par Jean Renard qui s'exprime
désormais comme composante à part entière d'une nouvelle
typologie des campagnes européennes, il se défini avant tout par
la forte disparition de l'agriculture ou sa spécialisation (Renard,
2002). L'émergence de réseaux dédiés au maintien de
l'agriculture des milieux périurbains (Purple en Europe, Terre en ville
en France) confirme l'existence de la spécificité de
l'agriculture périurbaine, elle témoigne aussi de la
préoccupation de plus en plus importante des pouvoirs
publics et des Etats concernant ce type d'agriculture,
aujourd'hui le maintien de cette activité mobilise de grandes
régions urbaines européennes.
Dans ce mouvement, l'Ile de France tient un rôle actif
pour maintenir l'agriculture sur son territoire. Après la reconnaissance
d'une destiné agricole à ses espaces de cultures
définitivement exprimée dans le SDRIF de 1994, c'est le maintien
de l'activité agricole qui préoccupe les différents
acteurs de l'aménagement régional. Si l'espace agricole ne change
que peu notamment grâce aux efforts consentis pour maîtriser
l'étalement urbain, l'agriculture recule sur le territoire
régional à une vitesse touj ours soutenue.
L'enquête sur la structure des exploitations agricoles
réalisée par le ministère de l'agriculture à
l'automne 2005 fixe à - 3,1% le rythme annuel de disparition des
exploitations agricoles franciliennes pour la période 2000 - 2005. Ce
taux s'est stabilisé depuis 1988 à une valeur proche de - 3%
(pour une moyenne nationale de -3,9%). En 2005, la région compte 5600
exploitations (soit environ 1500 exploitations de moins qu'en 2000) dont 4200
unités professionnelles, en cinq ans, 14% des exploitations
franciliennes ont disparu. Ce recul est différemment ressenti selon les
départements, il est plus fort en petite couronne (-30%) et plus faible
en Seine - Et - Marne (-10%), les autres départements enregistrent des
baisses intermédiaires (-18% pour les Yvelines et l'Essonne, -17% pour
le Val d'Oise).
Le recul des exploitations en nombre s'est accompagné
par la poursuite de leur agrandissement, 39% ont plus de 100 UDE (contre 33% en
2000). Les exploitations appartenant à l'OTEX grandes cultures sont
celles qui se maintiennent le mieux, toutes les autres catégories
reculent, notamment les unités de cultures spéciales qui ont
perdu 29% de leur effectif (contre seulement 9% pour les grandes cultures).
Dans un contexte d'augmentation des charges et de pression foncière,
seules les exploitations les plus performantes et les plus aidées au
niveau communautaire résistent (Agreste, 2006).
Le constat demeure alarmant malgré les engagements
forts et solennels de la région en faveur de son agriculture, le
maintien de cette activité sur le territoire francilien réclame
aujourd'hui des mesures plus adaptées au contexte global mais surtout
aux spécificités locales de chaque espace agricole. Ces mesures
doivent non seulement tenir compte de l'opinion francilienne de plus en plus
importante dans le débat sur l'avenir de l'agriculture régionale
(Charvet, 2003), mais aussi de celle des agriculteurs eux-mêmes car c'est
à eux qu'incombe la continuité et la transmission de ce
métier pour les générations futures sans compromettre
leurs intérêts et ceux de la société actuelle, les
agriculteurs doivent jouer un rôle actif. Les gestes du « refaire
campagne » doivent considérer les att entes de toutes les parties
concernées par
l'agriculture francilienne tout en veillant à
répondre aux sollicitations de l'ensemble de la société
régionale (Poulot et Rouyres, 2005).
Jean Paul Charvet résume les conditions du maintien
d'une agriculture viable en Ile de France, il propose des voies pour une
durabilité économique et sociale de cette activité. Il
s'agit de garantir l'accès aux espaces agricoles et de sécuriser
les productions, de valoriser davantage la situation en zone périurbaine
et de procurer des revenus suffisants et mieux assurer les successions à
la tête des exploitations. Les agriculteurs qui auront un accès
commode à leurs exploitations, vont pouvoir mettre en place des cultures
qui seront sécurisées des pressions urbaines, il pourront ensuite
commercialiser eux-mêmes leurs produits afin de récupérer
une grande partie de la plus value (perçue par les agents
économiques). L'exercice de production peut s'accompagner par des
formations en marketing afin d'optimiser les conditions de commercialisation,
la mise en place de démarches de qualité permet de justifier les
prix proposés notamment pour les catégories sociales les plus
aisées. Au-delà de la simple production alimentaire, les
agriculteurs peuvent développer d'autres activités en lien avec
la ville dans le cadre de la multifonctionnalité de l'agriculture
(accueil de groupes, entretien et gestion des paysages), en communiquant sur
leurs apports à la société régionale, ils peuvent
justifier les soutiens qui leur sont apportés leur garantissant des
revenus supplémentaires (Charvet, 2003).
D'autres chercheurs, notamment à l'Ecole Nationale
Supérieur du Paysage de Versailles, considèrent qu'à moyen
et à long terme, l'agriculture périurbaine n'existera que sous
forme d'une agriculture urbaine1. Son nouveau rôle sera la
production de paysage, la défense de l'environnement et la promotion de
la biodiversité et de l'harmonie sociale. Elle reste touj ours une
activité économique, mais sa production ne sera plus
identifiée aux seules denrées agricoles ; en devenant
multifonctionnelle, elle devient une composante spatiale et sociale des
territoires urbains (Donadieu et Fleury, 1997, Donadieu, 2004, Fleury,
2004).
Il ressort ainsi que la place de l'agriculture en Ile de
France reste garantie par sa capacité à intégrer
fonctionnellement les projets urbains et à devenir pleinement urbaine,
cette destiné ne peut sans doute s'accomplir dans des délais
courts car elle nécessite des ajustements profonds qui s'opèrent
non seulement du côté de l'agriculture elle-même qui doit
assumer sa multifonctionnalité mais aussi de la part de la
société entière notamment pour rémunérer les
aménités qui découlent des nouvelles fonctions de cette
activité. En attendant, l'enjeu est de la maintenir viable pour qu'elle
puisse atteindre ce stade ultime d'intégration
1 - Il s'agit de l'agriculture des périphéries
urbaines qui s'oriente vers les nouveaux besoins urbains (Donadieu et Fleury,
1997)
totale dans les projets urbains où l'agriculture est
considérée comme un outil d'urbanisme, une infrastructure
naturelle d'intérêt public, capable d'organiser durablement le
territoire des cités puisque le développement de la ville aux
dépends de l'agriculture n'est pas inéluctable (Donadieu,
1998).
Ce travail propose de vérifier les conditions de la
réintégration de l'agriculture en ville notamment lorsqu'elle se
trouve entièrement contenue dans l'espace urbain, ce positionnement qui
concerne de plus en plus d'espaces agricoles suffit-il pour que l'agriculture
accède à une forme urbaine à travers la mise en place de
rôles fonctionnels avec la ville ?
De telles problématiques deviennent intéressantes
à aborder en Ile de France où les rapports ville - campagne sont
en perpétuelle recomposition.
Rappels méthodologiques :
Ce travail se divise en trois grandes parties, la
première basée essentiellement sur une recherche bibliographique
a pour objectif de retracer les principaux moments forts qui ont conduit
à l'émergence de l'agriculture comme préoccupation
régionale en Ile de France, l'objectif étant de montrer
l'ascension de l'agriculture dans les problématiques
d'aménagement régional ; après la reconnaissance et la
fixation d'une destiné agricole à une vaste partie de l'espace
francilien, c'est le maintien de l'activité agricole qui devient une
nécessité pour l'aménagement du territoire en Ile de
France.
Dans la seconde partie, il s'agit d'analyser les adaptations
du fonctionnement de l'espace agricole lorsqu'il est maintenu au milieu urbain
notamment en terme d'interactions qu'il peut développer avec son
entourage urbain proche, l'objectif est de montrer le degré et les voies
d'intégration de ce type d'espace dans les milieux urbains. Pour cela
j'ai choisi un espace agricole homogène nommée « zone
maraîchère de Cergy » dont la localisation
géographique permet d'introduire dans l'analyse les conséquences
des actions et des décisions prises lors de l'élaboration des
orientations à l'aménagement régional (villes nouvelles,
ceinture verte régionale) ; Le chevauchement de plusieurs
échelles (communale, agglomération nouvelle, régionale...)
complique davantage la problématique d'intégration urbaine de cet
espace et permet de rendre compte de la complexité de la gestion de
certains espaces agricoles franciliens (ou autres) se trouvent dans des
contextes similaires.
Cette partie est basée essentiellement sur un travail
de terrain qui consiste en un diagnostic territorial complet de la zone
d'étude dans le but de repérer les différents usages et
servitudes en place qui, même lorsqu'elles paraissent secondaires pour
certaines d'entres elles, peuvent contribuer inéluctablement à
expliquer le fonctionnement actuel de la zone maraîchère.
Pour mener mon diagnostic, j 'ai effectué, plusieurs
visites et passages sur le terrain au cours desquels j 'ai recensé,
noté, photographié et schématisé toutes les
composantes spatiales présentes sur cette zone et dans ses alentours
immédiats. Au-delà de mes observations personnelles, les
récits et les explications qui m'ont été données
par les différents acteurs rencontrés ont appuyées mes
remarques sur le fonctionnement de chacune de ces composantes et de toute la
zone maraîchère.
La troisième partie de ce travail propose d'analyser
les effets de ce positionnement urbain de l'espace agricole sur la
capacité de l'agriculture qui s'y pratique à s'intégrer
dans le milieu urbain et à participer aux projets de la ville en
développant des relations fonctionnelles
avec celle - ci. Cette partie qui représente aussi
l'essentiel de mon travail, est menée en réalisant deux
enquêtes de terrain :
La première consacrée aux agriculteurs a pour
objectif de connaître les principales préoccupations de ces
derniers en insistant sur leurs propres attentes vis-à-vis de la
société en générale et francilienne en particulier.
Pour cela, j 'ai établi un questionnaire qui reprend les principales
difficultés de l'agriculture des milieux périurbains. Les
questions choisies reprennent ainsi largement les problématiques du
voisinage urbain (foncier, relations avec la ville,...), mais aussi de la
capacité des agriculteurs à valoriser leur proximité
à la ville (choix des cultures, modes de
commercialisation)2.
Une fois sur le terrain, et dès les premiers contacts
avec les agriculteurs, je me suis rendu compte que leurs interventions restent
principalement focalisées sur certaines problématiques
(rémunération du travail agricole, revenus, commercialisation des
produits...) sur lesquelles les agriculteurs répondent avec beaucoup de
précision en prenant le temps nécessaire. Sur les questions
relatives au fonctionnement de leurs exploitations (rotation, gestion du
personnel,...) les réponses sont souvent rapides et peu précises.
Au bout de quelques entretiens, j 'ai donc choisi de laisser s'exprimer les
agriculteurs sur les sujets qu'ils jugent plus urgents à traiter. Des
simples questions - réponses, mon enquête s'est transformée
en de véritables entretiens plus approfondis et plus longs durant
lesquels la parole est principalement laissée aux agriculteurs qui
s'expriment et orientent leurs interventions selon les thèmes qui les
préoccupent le plus : ce sont ces thèmes que j 'ai
considérés par la suite comme leurs principales attentes
vis-à-vis de la société.
Le dépouillement des résultats de ces entretiens
directs avec les agriculteurs, m'a orienté dans l'élaboration du
questionnaire destiné pour la seconde enquête que j 'ai
réalisée auprès des citadins3. Ni la
sécurisation du foncier, ni les pressions urbaines ne semblent
préoccuper pour autant les agriculteurs de la zone
maraîchère, en revanche, ils témoignent tous d'une grande
inquiétude quant aux débouchés de leurs productions au
point où leurs attentes vis-à-vis de la société
tournent exclusivement autour de ce thème toutefois exprimées
sous diverses formes.
La seconde enquête a pour objectif de rechercher les
réponses des citadins aux principales demandes que leur adressent les
agriculteurs. Elle m'a permis de proposer mon questionnaire à un
échantillon de 90 personnes dont 79 ont répondu et 11 n'ont pas
souhaité s 'exprimer.
2 - Voir questionnaire destiné aux agriculteurs en
annexe.
3 - Voir questionnaire destiné aux citadins en annexe.
Les individus interrogés sont rencontrés sur les
six quartiers qui composent la commune de Cergy dans lesquels ils sont soit
résidents soit travailleurs. Ceux qui ont répondu sont
âgés entre 17 et 80 ans avec une plus forte représentation
de la catégorie d'âge 20-60 ans (plus de 90% des individus), cette
catégorie est aussi la plus concernée par l'achat des produits
alimentaires en général et des légumes en particulier.
Graphe 01 : Les catégories d'âge des personnes
interrogées.
45%
40%
35%
30%
25%
20%
15%
10%
5%
0%
10_20 20_ 30 30_ 40 40_ 50 50_ 60 60_ 70 70_ 80 Classe
d'âge (années)
3%
41%
19% 21%
Nombre total d'individus = 79 (100%)
10%
5%
1%
Source : Travail de terrain (Mai 2006)
Les entretiens sont directs, ils se sont effectués de
deux façons : soit en abordant les gens dans les rues et les lieux de
passages (trottoirs, places publiques,...), soit, directement sur leurs lieux
de travail afin de pallier le problème d'indisponibilité
exprimé par une partie des personnes rencontrées. Cette
deuxième façon d'enquêter, qui a le plus contribué
à l'avancement de mon investigation, présente cependant le risque
de causer des désagréments pour les personnes interrogées
sur leur lieu de travail (Poste, commerces, pharmacies, administrations,
université, écoles...). Afin de minimiser les non -
réponses, j'ai proposé après explication de l'objectif de
mon travail de laisser mon questionnaire aux gens, pour qu'ils puissent avoir
le temps de réflexion nécessaire et répondre
tranquillement dans un délai raisonnable : cette méthode permet
d'éviter des réponses courtes et moins réfléchies
puisque les délais de réponses sont choisis par les
enquêtés ; en revanche, et au-delà de sept jours sans
réponse, je considère que la personne n'a pas souhaité
s'exprimer.
Une fois les questionnaires récupérés, la
saisie puis l'analyse des données a permis de dresser un portrait du
monde agricole tel qu'il est perçus par les citadins ainsi que les
comportements de ces derniers vis-à-vis de l'agriculture (espace,
activité et productions) : Certaines réponses peuvent être
apportées aux différentes attentes des agriculteurs.
Enfin une dernière partie sous forme de propositions en
vue d'un rapprochement entre agriculteurs et citadins, résume les
principales conditions permettant à l'agriculture de tenir compte des
évolutions de la société qui l'entoure. A travers les
attentes des agriculteurs et les réponses des citadins, une série
de mesures est proposée dans l'objectif de rapprocher les agriculteurs
des citadins autour des préoccupations soulevées des deux camps.
Dans cette partie qui s'adresse aux agriculteurs, l'importance est
donnée à la fonction nourricière de l'agriculture car
c'est la principale fonction dans laquelle se reconnaissent encore les
agriculteurs : c'est dans leur mission de nourriciers que ces derniers peuvent
facilement accepter de fournir des efforts supplémentaires.
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