PREMIERE PARTIE:
PRINCIPES/ ENJEUX D'UNE BONNE GESTION DE L'EAU EN
HAÏTI ET REGARD SUR LA LÉGISLATION ACTUELLE
CHAPITRE PREMIER:
LES PRINCIPES ET LES ENJEUX LIES À LA GESTION DE
L'EAU EN HAITI
Section 1- LES PRINCIPES LIES À LA GESTION DE
L'EAU
Une politique se fonde sur une série de principes. Ils
en constituent la base, l'essentiel de l'orientation stratégique, la
vision d'ensemble. Ils garantissent la cohérence entre les objectifs et
les priorités d'action de la politique. Ils évitent la
superposition anarchique de visions trop sectorielles, non
intégrées, voire contradictoires. Les principes forment un cadre
de référence nécessaire à la compréhension
de la nature et de la portée de la politique. Ils guident son
interprétation et son application à des situations
particulières (concurrences et conflits, partage de l'eau,
contrôle de la qualité, etc.). Ils éclairent la prise de
décision et donnent du souffle à la gestion.
1. LES PRINCIPES GENERAUX
La politique haïtienne de l'eau et des milieux aquatiques
devrait se baser sur de grands principes qui constituent autant de
règles de conduite qui doivent permettre d'en assurer le respect. Parmi
ces principes généraux nous décrirons six : Partie
fondamentale du patrimoine collectif, l'eau requiert la concertation des
acteurs pour être gérée de façon durable, selon une
approche éco - systémique. L'équilibre dans la gestion des
milieux naturels et des usages repose sur la prudence. Il appartient aux
usagers et aux pollueurs de partager équitablement le coût de
l'eau.
1.1 Les six principes
généraux
§ L'eau, patrimoine commun de
l'humanité
Dans de nombreux pays, l'eau est reconnue comme faisant partie
du patrimoine commun de la nation. L'eau est une ressource essentielle à
la satisfaction des besoins collectifs et individuels. L'eau est avant tout un
bien naturel. Parfois rare, parfois abondante, elle est également un
bien auquel les sociétés attribuent un prix en faisant alors un
bien économique. Elle force des pratiques qui en font un bien culturel
et un bien social. L'eau est une ressource irremplaçable, non
substituable. Il s'agit d'un élément vital pour tout être
vivant et pour l'ensemble de l'écosystème planétaire. Tout
être humain a le droit d'y avoir accès. D'où la
qualification de bien mondial de l'eau, laquelle confère à chaque
communauté humaine le droit d'utiliser l'eau pour les besoins vitaux et
le bien-être social et économique de ses membres. C'est pourquoi
les droits et devoirs relatifs à l'eau appartiennent à l'ensemble
de la population mondiale. Cette conception de l'eau comme patrimoine commun
de l'humanité antérieure à l'appropriation d'une nation,
d'une collectivité ou des individus s'inscrit dans une longue tradition
de pensée qui s'appelle la destination universelle des biens.
En l'absence d'une véritable législation
internationale dans le domaine de l'eau, l'hydropolitique doit passer par la
coopération. Le corollaire de la reconnaissance du droit d'utiliser
l'eau de surface ou souterraine sans égard aux frontières
politiques est la gestion commune et le partage des données. On mesure
l'importance d'un système de gestion intégrée de la
ressource en eau qui dépasse le seul cadre national devant la
nécessité d'une répartition raisonnable et
équitable de l'eau d'un bassin transfrontalier ou d'un aquifère
international. Mais, pour parvenir à cela, il faudra élaborer des
principes juridiques et éthiques adéquats.
§ La gestion durable
La durabilité appliquée à la gestion de
l'eau implique d'utiliser seulement les ressources en eau renouvelables. Une
gestion durable de l'eau porte sur la conservation et la protection des
écosystèmes aquatiques, le maintien de la diversité
biologique des espèces animales et végétales,
l'accès à l'eau pour la satisfaction des besoins humains et
l'utilisation correcte de l'eau à des fins agricoles et industrielles.
Pour être durable, la gestion de l'eau doit être globale, mais
aussi « locale ». Elle exige la participation de la population aux
décisions. La gestion durable doit être conforme aux
caractéristiques et exigences de l'eau et des milieux aquatiques. C'est
pourquoi le principe de la durabilité s'accorde avec la gestion
intégrée par bassin hydrographique. C'est le cadre naturel de la
gestion de l'eau et des milieux aquatiques. Un système de gestion
intégrée de la ressource en eau et des milieux aquatiques
amène, sur le plan quantitatif, à lutter contre le gaspillage et
à colmater les fuites des réseaux, et, sur le plan qualitatif,
à lutter contre la pollution de toutes origines.
§ La concertation des acteurs
L'expérience acquise, depuis plusieurs décennies
maintenant, en matière de gestion de l'eau, a mis en évidence la
nécessité pour que les décisions se prennent au plus
près du terrain et s'appuient sur un partenariat avec les Pouvoirs
locaux et les représentants des usagers (ménages, irrigants,
industriels, pêcheurs, ... ).
Ainsi, pour concilier la gestion de l'eau et des milieux
aquatiques avec le développement économique et le respect de
l'environnement, la concertation des acteurs de l'eau est essentielle.
Réunir tous les acteurs de l'eau et des milieux aquatiques dans chaque
bassin, leur donner la parole et leur déléguer la
responsabilité décisionnelle et les moyens d'action, c'est la
base d'un système de gestion intégrée. Les acteurs de
l'eau sont l'État, les élus locaux, les citoyens, les
associations, les usagers industriels, agricoles et touristiques. Le
défi de la concertation, c'est d'inventer et de pratiquer une gestion
partagée et participative, fondée sur le respect des uns et des
autres et sur la recherche du consensus.
La concertation s'appuie sur des processus transparents et
démocratiques. La question de la composition des comités de
bassin et de la représentativité de ses membres est fondamentale.
La concertation s'organise sur le terrain, par des approches
géographiques ou thématiques. Elle requiert de l'animation et du
soutien technique. Elle s'actualise dans un contexte de communication entre les
acteurs, de partage de connaissances et d'échanges itératifs.
La concertation s'opère de l'amont vers l'aval. Elle a
besoin de l'initiative de quelques porteurs de projets. Elle se façonne
par une action transversale à tous les niveaux. Elle soutient les
nécessaires approbations et permet le règlement harmonieux des
conflits. Elle suppose à certains moments un pouvoir d'arbitrage. Elle
produit ainsi une précieuse valeur ajoutée 'dans la gestion de
l'eau et des milieux aquatiques. La concertation oblige également
à tenir compte des différentes échelles du territoire et
des harmonisations entre bassins.
§ La gestion équilibrée des milieux
naturels et ses usages
Des lois, règlements, normes et directives encadrent
des usages de l'eau : eau potable, eau de baignade, assainissement municipal,
assainissement industriel, etc. Le contexte économique, l'absence de
moyens de contrôle et le laisser-faire freinent la lutte contre les
nombreuses causes de dégradation des eaux souterraines et de surface. Le
cadre normatif des usages est incomplet, pas assez sévère et
d'application peu contrôlée.
La dégradation des équilibres écologiques
est un phénomène global dont la maîtrise nécessite
une action très en amont de la part de l'ensemble des acteurs
concernés. C'est pourquoi la protection des milieux aquatiques doit
précéder la gestion des usages (eau potable, eaux de baignade,
piscicoles). En protégeant le milieu aquatique, on protège
l'écosystème. On travaille en amont à
l'amélioration de la qualité et au maintien de la quantité
de l'eau brute.
Une vision globale environnementale de protection des milieux
aquatiques est urgente. Elle est importante pour la qualité de l'eau et
sa disponibilité. C'est cette vision globale que permet le principe
d'une gestion intégrée des ressources en eau dans le cadre du
bassin hydrographique. Elle assure l'équilibre nécessaire
à long terme dans la gestion des milieux naturels et des usages. C'est
une nouvelle approche d'aménagement et de planification qui choisit le
bassin hydrographique comme cadre de référence. Elle favorise la
gestion intégrée des eaux souterraines et de surface, à
partir d'une vision globale des milieux naturels aquatiques. Elle recherche la
protection des fonctions écologiques fondamentales du fleuve, des lacs,
des rivières, des nappes souterraines, des marais des baies... et de
tous les systèmes aquatiques.
§ La prudence
Haïti, selon les experts, n'est dans une situation
d'abondance en eau. L'accroissement prévisible de la demande,
fondé sur l'accroissement de la population et de la demande par
personne, recèle un certain risque de pénurie. La
sécurité n'est pas totale au regard de la quantité en eau
et de la réponse aux besoins de la société. Dans un tel
contexte d'incertitude, quelle est la place de la prudence dans une politique
de l'eau ?
Pour réparer les négligences du passé et
en prévenir de nouvelles, la gestion prudente s'impose.
L'évaluation de la portée et des conséquences des
décisions de gestion de l'eau amène à prendre des
dispositions pour éviter des erreurs et prévenir des dommages.
Elle conduit à réduire les pressions sur les ressources hydriques
afin de restaurer la qualité de l'eau et la santé des
écosystèmes aquatiques. Puisque la ressource est fragile, la
gestion doit en être prudente. Or, pour être prudente, la gestion
de l'eau doit être rigoureuse et fondée sur une bonne connaissance
des ressources disponibles, de leur état qualitatif, des
prélèvements et des pollutions. La surveillance et le
contrôle sont essentiels à la gestion prudente. L'absence de
certitude d'innocuité ne correspond pas à une absence de risque.
C'est pourquoi le recours à l'analyse de risques doit être
systématisé dans tous les projets relatifs à l'eau et aux
milieux aquatiques.
§ Le partage équitable du coût de l'eau
entre usagers et pollueurs
L'eau n'est pas gratuite. Les installations de distribution et
d'assainissement de l'eau coûtent cher en immobilisations, en entretien
et en exploitation. Les usagers assument l'essentiel des dépenses
liées aux investissements et au fonctionnement des équipements
nécessaires à la gestion de l'eau. Cette imposition fait
habituellement partie de la taxe foncière générale
versée à la municipalité, rarement par une tarification
spécifique.
Dans une perspective de développement durable, le
paiement de l'eau revient en équité aux utilisateurs et aux
pollueurs. Il serait souhaitable que la facture de l'eau soit distinguée
pour une meilleure visibilité des coûts. Les pollueurs ne paient
pas, comme ils devraient le faire, l'ensemble du coût de la pollution.
L'intérêt public exigerait que les coûts sociaux et
environnementaux de protection de l'eau soient compris dans le prix des
produits et des services. L'information sur ces coûts devrait être
entièrement accessible, afin que les consommateurs soient
sensibilisés au paiement du juste prix pour l'utilisation du
précieux capital naturel qu'est l'eau.
Le principe pollueur-payeur amène à imposer des
redevances qui devraient être calculées non seulement pour
financer les programmes d'assainissement, mais aussi en fonction de la charge
polluante produite par une activité. La mise en oeuvre progressive d'une
fiscalité écologique - encouragerait les pollueurs à
supprimer ou à réduire leurs rejets dans l'eau.
Ainsi, une taxe affectée à la pollution serait
une façon équitable d'appliquer réellement le principe du
pollueur-payeur. Les ressources dégagées ne devraient pas
uniquement servir à réparer les dommages occasionnés par
les activités polluantes, mais à les éviter. Pour
être équitable, la reconquête de la qualité de l'eau
doit être efficace. C'est pourquoi l'action doit se concentrer en
priorité sur les milieux naturels les plus sensibles. C'est pourquoi
également le régime des redevances doit s'appliquer à
l'ensemble des formes de pollution rejetées, y compris les pollutions
agricoles et les pollutions urbaines générées par les
services municipaux d'assainissement.
2 Les principes spécifiques ou orientations
stratégiques
En sus des principes directeurs ci-dessus définis, la
politique pour le secteur de l'eau en Haïti devrait être
guidée par des principes spécifiques suivants
considérés comme des orientations stratégiques. Nous en
avons retenus dix.
2.1 Les dix principes spécifiques
§ Garantir à la population de l'eau et des
milieux aquatiques non pollués.
Comme nous l'avons indiqué précédemment,
la perspective n'est plus de favoriser certains usages, mais de s'assurer de la
qualité de l'eau et des milieux aquatiques. Car ce sont
l'équilibre et la santé du milieu qui rendent possibles les
usages. L'approche traditionnelle tend à considérer l'eau comme
une réalité plus ou moins inerte disponible pour nos besoins.
Elle repose sur le postulat que la nature s'arrangera avec le reste.
Une approche centrée sur la qualité de l'eau et
sui la santé des milieux aquatiques s'appuie sur une
compréhension écologique de l'eau : l'eau comme source de vie,
les milieux aquatiques comme des écosystèmes complexes et
fragiles. Le maintien de la qualité des milieux aquatiques n'est pas un
objectif extrinsèque à la gestion de l'eau, mais en constitue
l'étape première et toujours nécessaire.
Les bénéfices attendus sont de tous ordres :
économiques, sociaux, culturels, sanitaires. Il est évident que
la protection de la santé humaine doit demeurer prioritaire. Mais
à une approche très sectorielle centrée sur les usages,
nous estimons que l'approche milieu est plus productive et plus polyvalente
à long terme.
Au point de vue stratégique, il faudra
évidemment préciser les sous objectifs à atteindre pour
les différents milieux aquatiques selon un échéancier
à déterminer.
§ Gérer l'eau et les milieux aquatiques de
façon concertée selon une approche
écosystémique.
Une approche milieu plutôt qu'une approche usage exige,
comme son corollaire, une approche écosystémique,
c'est-à-dire qui tient compte des interrelations entre les
différents éléments d'un écosystème.
Cette approche écosystémique suppose aussi une
intégration des facteurs physiques, biologiques et humains, ce qui exige
la définition d'un cadre de référence. Ce cadre de
référence, c'est le bassin versant qui est un concept à la
fois géographique et social.
Le passage à la gestion à l'échelle du
bassin versant demandera un effort systématique et de longue haleine. Il
exigera un énorme changement dans la culture de la gestion de l'eau et
des milieux aquatiques en Haïti. Il suppose donc une série
d'étapes de mise en oeuvre pour identifier les acteurs, établir
le territoire, ramasser les données, définir les
problèmes, identifier les solutions et réaliser la concertation.
Étapes d'autant plus complexes qu'il n'y a pas encore en Haïti de
vision claire de ce qu'est ou devrait être la gestion
intégrée à l'échelle du bassin versant.
§ Maintenir et développer la participation
des citoyens dans la gestion de l'eau.
Maintenir et développer la participation des citoyens
peuvent constituer un sous objectif de l'objectif précédent
puisque la gestion à l'échelle du bassin versant suppose la
concertation des acteurs et la participation active de la population. La
gestion de l'eau postule la pleine participation du public et exigera
l'invention de nouveaux modes de participation particulièrement du
côté de la négociation et de la concertation. Les acteurs
de l'eau devront développer des compétences en cette
matière.
§ Prévenir et réduire les
pollutions d'origine agricole, urbaine et industrielle.
La mise en place d'un programme d'assainissement des eaux doit
permettre de doter Haïti d'une panoplie d'équipements de traitement
des eaux municipales. En d'autres termes, des objectifs de prévention et
de réduction de la pollution devront donc être poursuivis
même s'ils seront partiellement atteints.
§ Maîtriser l'usage de l'eau souterraine
conformément aux caractéristiques des formations
aquifères.
Jusqu'à tout récemment, l'eau souterraine
suffisait aux divers usages auxquels elle était soumise et il y avait
peu de conflits importants. Il n'y avait donc pas lieu d'attacher à ce
secteur une importance primordiale. La situation a changé à cause
de la pollution de certaines nappes, de conflits d'usages locaux et de
l'hypothèse entrevue d'une utilisation plus importante de la
ressource.
L'objectif est de parvenir à maîtriser l'usage,
ce qui suppose l'acquisition de connaissances, la détermination des
seuils de durabilité, la clarification des droits et
responsabilités de chacun et la mise en place d'un cadre de
règlement des conflits d'usages.
§ Planifier l'aménagement du territoire en
vue de la protection de l'eau et des milieux aquatiques et de leur mise en
valeur.
La gestion de l'eau doit s'inscrire dans l'aménagement
du territoire préalablement à la satisfaction des usages si l'on
veut parvenir au développement durable. Nous pensons que protection et
mise en valeur ne s'opposent pas, à la condition que l'une et l'autre
s'inscrivent dans une démarche planifiée d'aménagement.
L'atteinte de cet objectif suppose donc l'inscription de la gestion de l'eau
dans le schéma d'aménagement de l'Etat haïtien. Cela sera
possible par le schéma directeur de l'eau et supposera une articulation
claire des mécanismes de confection du schéma directeur de l'eau
à l'échelle du bassin versant.
§ Assurer l'accessibilité des étangs
et des cours d'eau.
L'eau de surface, en Haïti, n'appartient à
personne. On la dit res nullius c'est à dire disponible à tous
mais que nul ne peut accaparer à sa seule jouissance. Or, ce
caractère public de l'eau est mis en échec dans le cas des cours
d'eau par les droits des propriétaires riverains. Ainsi une large part
du public n'a pas d'accès réel à l'eau pour des usages
légitimes et bienfaisants : baignade, contemplation, pêche, etc.
Certains cours d'eau sont entièrement privés ou enclavés
en sorte que le plan d'eau n'est pas accessible au public. Dans le cas des
rivières ou du fleuve, l'occupation des rives est telle que le public
n'a, dans les faits, qu'un accès très difficile aux plans
d'eau.
A notre avis, il est essentiel de s'assurer, sous forme
légale ou par la mise en place de programmes spécifiques, que
l'accès du public aux cours ou plans d'eau à des fins
récréatives soit rendu possible dans toutes les villes et/ou
villages attenants à un cours ou plan d'eau.
§ Favoriser la création d'emplois pour des
jeunes dans le secteur de l'eau.
De nouveaux métiers sont prévisibles, par
exemple dans la réhabilitation des réseaux qui sera une
préoccupation majeure dans les années qui viennent, dans
l'assainissement agricole, dans la mise en place de la gestion par bassin
versant et dans la sensibilisation du public au domaine de l'eau. Il y a
là des créneaux porteurs de création d'emplois pour des
jeunes. Ici, un arrimage avec les milieux de formation professionnelle est
important. Les perspectives d'une crise mondiale de l'eau permettent aussi de
penser que le marché international est accessible à la condition
que les critères de rigueur et de qualité soient poursuivis sans
relâche.
§ Développer la connaissance sur
l'eau.
C'est bien connu, la gestion suppose la connaissance comme
préalable. Il y avait eu en Haïti un effort considérable
d'acquisition de connaissances à l'égard de l'eau, surtout de
l'eau comme ressource. Il suffit de penser aux collectes de données
réalisées par le ministère de l'Agriculture (MARNDR)
durant les années 1970. À partir des années 1980, à
cause des réaménagements institutionnels et des compressions
budgétaires, il y a eu une diminution considérable des
investissements dans ce secteur. Il s'en est suivi, en certains cas, l'abandon
des observations sur le terrain avec comme conséquence une rupture dans
la continuité, ce qui, en météorologie et en
hydrométrie entre autres, est particulièrement néfaste.
Dans le domaine de l'eau souterraine, les insuffisances sont évidentes
et sont dénoncées par tous les acteurs.
Le secteur de la connaissance a des inconvénients : il
coûte cher, demande de la constance et suppose une perspective à
long terme, trois inconvénients que la crise budgétaire de
l'État ne permettait pas beaucoup de contrer.
De nouveaux secteurs de connaissance se développent
rapidement à cause d'une précision accrue des instruments de
mesure et des possibilités nouvelles ouvertes par les systèmes
informatiques et les télécommunications. Haïti ne peut pas
se contenter d'une approche empirique par essais et erreurs. Il doit restaurer
et confirmer ses savoirs anciens en assurant la continuité de ses
observations et inventaires. Il doit aussi développer d'autres champs et
instruments de connaissances conformément aux exigences
d'aujourd'hui.
§ Informer, sensibiliser,
éduquer.
La gestion de l'eau exige un changement profond de
comportements, d'attitudes et de valeurs de la part de l'ensemble des
acteurs.
Experts et techniciens, mais aussi politiciens et
gestionnaires, industriels, agriculteurs, citadins, tous les citoyens doivent
accepter de changer leur manière de voir et leurs façons d'agir.
Il nous semble qu'une politique de l'eau doit inclure les objectifs
suivants :
· informer les citoyennes et les citoyens de la situation
de l'eau et des milieux aquatiques, des coûts associés et des
principaux programmes mis en oeuvre ;
· sensibiliser les différents acteurs sur les
dossiers prioritaires suivant des programmes à définir selon les
régions, les moments et les budgets disponibles ;
· éduquer les différents publics sur les
savoirs, les savoir-faire, les savoir-être pour parvenir à des
changements durables au sein de la société.
Les objectifs d'éducation ne peuvent être du
ressort d'un seul ministère ni du seul milieu scolaire formel. À
long terme, il faut rappeler qu'aucune loi, qu'aucun règlement ne peut
parvenir à des résultats durables s'il n'y a pas un acquiescement
de la part des populations concernées. Et cela nous renvoie toujours
à la question des représentations et des valeurs.
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