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Pour une loi cadre sur l'eau en Haiti

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par Montes Charles
Universite d'Etat d'Haiti, Faculte de Droit et des Sciences Economiques - Licence en Droit 1986
  

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PREMIERE PARTIE:

PRINCIPES/ ENJEUX D'UNE BONNE GESTION DE L'EAU EN HAÏTI ET REGARD SUR LA LÉGISLATION ACTUELLE

CHAPITRE PREMIER:

LES PRINCIPES ET LES ENJEUX LIES À LA GESTION DE L'EAU EN HAITI

Section 1- LES PRINCIPES LIES À LA GESTION DE L'EAU

Une politique se fonde sur une série de principes. Ils en constituent la base, l'essentiel de l'orientation stratégique, la vision d'ensemble. Ils garantissent la cohérence entre les objectifs et les priorités d'action de la politique. Ils évitent la superposition anarchique de visions trop sectorielles, non intégrées, voire contradictoires. Les principes forment un cadre de référence nécessaire à la compréhension de la nature et de la portée de la politique. Ils guident son interprétation et son application à des situations particulières (concurrences et conflits, partage de l'eau, contrôle de la qualité, etc.). Ils éclairent la prise de décision et donnent du souffle à la gestion.

1. LES PRINCIPES GENERAUX

La politique haïtienne de l'eau et des milieux aquatiques devrait se baser sur de grands principes qui constituent autant de règles de conduite qui doivent permettre d'en assurer le respect. Parmi ces principes généraux nous décrirons six : Partie fondamentale du patrimoine collectif, l'eau requiert la concertation des acteurs pour être gérée de façon durable, selon une approche éco - systémique. L'équilibre dans la gestion des milieux naturels et des usages repose sur la prudence. Il appartient aux usagers et aux pollueurs de partager équitablement le coût de l'eau.

1.1 Les six principes généraux

§ L'eau, patrimoine commun de l'humanité

Dans de nombreux pays, l'eau est reconnue comme faisant partie du patrimoine commun de la nation. L'eau est une ressource essentielle à la satisfaction des besoins collectifs et individuels. L'eau est avant tout un bien naturel. Parfois rare, parfois abondante, elle est également un bien auquel les sociétés attribuent un prix en faisant alors un bien économique. Elle force des pratiques qui en font un bien culturel et un bien social. L'eau est une ressource irremplaçable, non substituable. Il s'agit d'un élément vital pour tout être vivant et pour l'ensemble de l'écosystème planétaire. Tout être humain a le droit d'y avoir accès. D'où la qualification de bien mondial de l'eau, laquelle confère à chaque communauté humaine le droit d'utiliser l'eau pour les besoins vitaux et le bien-être social et économique de ses membres. C'est pourquoi les droits et devoirs relatifs à l'eau appartiennent à l'ensemble de la population mondiale. Cette conception de l'eau comme patrimoine commun de l'humanité antérieure à l'appropriation d'une nation, d'une collectivité ou des individus s'inscrit dans une longue tradition de pensée qui s'appelle la destination universelle des biens.

En l'absence d'une véritable législation internationale dans le domaine de l'eau, l'hydropolitique doit passer par la coopération. Le corollaire de la reconnaissance du droit d'utiliser l'eau de surface ou souterraine sans égard aux frontières politiques est la gestion commune et le partage des données. On mesure l'importance d'un système de gestion intégrée de la ressource en eau qui dépasse le seul cadre national devant la nécessité d'une répartition raisonnable et équitable de l'eau d'un bassin transfrontalier ou d'un aquifère international. Mais, pour parvenir à cela, il faudra élaborer des principes juridiques et éthiques adéquats.

§ La gestion durable

La durabilité appliquée à la gestion de l'eau implique d'utiliser seulement les ressources en eau renouvelables. Une gestion durable de l'eau porte sur la conservation et la protection des écosystèmes aquatiques, le maintien de la diversité biologique des espèces animales et végétales, l'accès à l'eau pour la satisfaction des besoins humains et l'utilisation correcte de l'eau à des fins agricoles et industrielles. Pour être durable, la gestion de l'eau doit être globale, mais aussi « locale ». Elle exige la participation de la population aux décisions. La gestion durable doit être conforme aux caractéristiques et exigences de l'eau et des milieux aquatiques. C'est pourquoi le principe de la durabilité s'accorde avec la gestion intégrée par bassin hydrographique. C'est le cadre naturel de la gestion de l'eau et des milieux aquatiques. Un système de gestion intégrée de la ressource en eau et des milieux aquatiques amène, sur le plan quantitatif, à lutter contre le gaspillage et à colmater les fuites des réseaux, et, sur le plan qualitatif, à lutter contre la pollution de toutes origines.

§ La concertation des acteurs

L'expérience acquise, depuis plusieurs décennies maintenant, en matière de gestion de l'eau, a mis en évidence la nécessité pour que les décisions se prennent au plus près du terrain et s'appuient sur un partenariat avec les Pouvoirs locaux et les représentants des usagers (ménages, irrigants, industriels, pêcheurs, ... ).

Ainsi, pour concilier la gestion de l'eau et des milieux aquatiques avec le développement économique et le respect de l'environnement, la concertation des acteurs de l'eau est essentielle. Réunir tous les acteurs de l'eau et des milieux aquatiques dans chaque bassin, leur donner la parole et leur déléguer la responsabilité décisionnelle et les moyens d'action, c'est la base d'un système de gestion intégrée. Les acteurs de l'eau sont l'État, les élus locaux, les citoyens, les associations, les usagers industriels, agricoles et touristiques. Le défi de la concertation, c'est d'inventer et de pratiquer une gestion partagée et participative, fondée sur le respect des uns et des autres et sur la recherche du consensus.

La concertation s'appuie sur des processus transparents et démocratiques. La question de la composition des comités de bassin et de la représentativité de ses membres est fondamentale. La concertation s'organise sur le terrain, par des approches géographiques ou thématiques. Elle requiert de l'animation et du soutien technique. Elle s'actualise dans un contexte de communication entre les acteurs, de partage de connaissances et d'échanges itératifs.

La concertation s'opère de l'amont vers l'aval. Elle a besoin de l'initiative de quelques porteurs de projets. Elle se façonne par une action transversale à tous les niveaux. Elle soutient les nécessaires approbations et permet le règlement harmonieux des conflits. Elle suppose à certains moments un pouvoir d'arbitrage. Elle produit ainsi une précieuse valeur ajoutée 'dans la gestion de l'eau et des milieux aquatiques. La concertation oblige également à tenir compte des différentes échelles du territoire et des harmonisations entre bassins.

§ La gestion équilibrée des milieux naturels et ses usages

Des lois, règlements, normes et directives encadrent des usages de l'eau : eau potable, eau de baignade, assainissement municipal, assainissement industriel, etc. Le contexte économique, l'absence de moyens de contrôle et le laisser-faire freinent la lutte contre les nombreuses causes de dégradation des eaux souterraines et de surface. Le cadre normatif des usages est incomplet, pas assez sévère et d'application peu contrôlée.

La dégradation des équilibres écologiques est un phénomène global dont la maîtrise nécessite une action très en amont de la part de l'ensemble des acteurs concernés. C'est pourquoi la protection des milieux aquatiques doit précéder la gestion des usages (eau potable, eaux de baignade, piscicoles). En protégeant le milieu aquatique, on protège l'écosystème. On travaille en amont à l'amélioration de la qualité et au maintien de la quantité de l'eau brute.

Une vision globale environnementale de protection des milieux aquatiques est urgente. Elle est importante pour la qualité de l'eau et sa disponibilité. C'est cette vision globale que permet le principe d'une gestion intégrée des ressources en eau dans le cadre du bassin hydrographique. Elle assure l'équilibre nécessaire à long terme dans la gestion des milieux naturels et des usages. C'est une nouvelle approche d'aménagement et de planification qui choisit le bassin hydrographique comme cadre de référence. Elle favorise la gestion intégrée des eaux souterraines et de surface, à partir d'une vision globale des milieux naturels aquatiques. Elle recherche la protection des fonctions écologiques fondamentales du fleuve, des lacs, des rivières, des nappes souterraines, des marais des baies... et de tous les systèmes aquatiques.

§ La prudence

Haïti, selon les experts, n'est dans une situation d'abondance en eau. L'accroissement prévisible de la demande, fondé sur l'accroissement de la population et de la demande par personne, recèle un certain risque de pénurie. La sécurité n'est pas totale au regard de la quantité en eau et de la réponse aux besoins de la société. Dans un tel contexte d'incertitude, quelle est la place de la prudence dans une politique de l'eau ?

Pour réparer les négligences du passé et en prévenir de nouvelles, la gestion prudente s'impose. L'évaluation de la portée et des conséquences des décisions de gestion de l'eau amène à prendre des dispositions pour éviter des erreurs et prévenir des dommages. Elle conduit à réduire les pressions sur les ressources hydriques afin de restaurer la qualité de l'eau et la santé des écosystèmes aquatiques. Puisque la ressource est fragile, la gestion doit en être prudente. Or, pour être prudente, la gestion de l'eau doit être rigoureuse et fondée sur une bonne connaissance des ressources disponibles, de leur état qualitatif, des prélèvements et des pollutions. La surveillance et le contrôle sont essentiels à la gestion prudente. L'absence de certitude d'innocuité ne correspond pas à une absence de risque. C'est pourquoi le recours à l'analyse de risques doit être systématisé dans tous les projets relatifs à l'eau et aux milieux aquatiques.

§ Le partage équitable du coût de l'eau entre usagers et pollueurs

L'eau n'est pas gratuite. Les installations de distribution et d'assainissement de l'eau coûtent cher en immobilisations, en entretien et en exploitation. Les usagers assument l'essentiel des dépenses liées aux investissements et au fonctionnement des équipements nécessaires à la gestion de l'eau. Cette imposition fait habituellement partie de la taxe foncière générale versée à la municipalité, rarement par une tarification spécifique.

Dans une perspective de développement durable, le paiement de l'eau revient en équité aux utilisateurs et aux pollueurs. Il serait souhaitable que la facture de l'eau soit distinguée pour une meilleure visibilité des coûts. Les pollueurs ne paient pas, comme ils devraient le faire, l'ensemble du coût de la pollution. L'intérêt public exigerait que les coûts sociaux et environnementaux de protection de l'eau soient compris dans le prix des produits et des services. L'information sur ces coûts devrait être entièrement accessible, afin que les consommateurs soient sensibilisés au paiement du juste prix pour l'utilisation du précieux capital naturel qu'est l'eau.

Le principe pollueur-payeur amène à imposer des redevances qui devraient être calculées non seulement pour financer les programmes d'assainissement, mais aussi en fonction de la charge polluante produite par une activité. La mise en oeuvre progressive d'une fiscalité écologique - encouragerait les pollueurs à supprimer ou à réduire leurs rejets dans l'eau.

Ainsi, une taxe affectée à la pollution serait une façon équitable d'appliquer réellement le principe du pollueur-payeur. Les ressources dégagées ne devraient pas uniquement servir à réparer les dommages occasionnés par les activités polluantes, mais à les éviter. Pour être équitable, la reconquête de la qualité de l'eau doit être efficace. C'est pourquoi l'action doit se concentrer en priorité sur les milieux naturels les plus sensibles. C'est pourquoi également le régime des redevances doit s'appliquer à l'ensemble des formes de pollution rejetées, y compris les pollutions agricoles et les pollutions urbaines générées par les services municipaux d'assainissement.

2 Les principes spécifiques ou orientations stratégiques

En sus des principes directeurs ci-dessus définis, la politique pour le secteur de l'eau en Haïti devrait être guidée par des principes spécifiques suivants considérés comme des orientations stratégiques. Nous en avons retenus dix.

2.1 Les dix principes spécifiques

§ Garantir à la population de l'eau et des milieux aquatiques non pollués.

Comme nous l'avons indiqué précédemment, la perspective n'est plus de favoriser certains usages, mais de s'assurer de la qualité de l'eau et des milieux aquatiques. Car ce sont l'équilibre et la santé du milieu qui rendent possibles les usages. L'approche traditionnelle tend à considérer l'eau comme une réalité plus ou moins inerte disponible pour nos besoins. Elle repose sur le postulat que la nature s'arrangera avec le reste.

Une approche centrée sur la qualité de l'eau et sui la santé des milieux aquatiques s'appuie sur une compréhension écologique de l'eau : l'eau comme source de vie, les milieux aquatiques comme des écosystèmes complexes et fragiles. Le maintien de la qualité des milieux aquatiques n'est pas un objectif extrinsèque à la gestion de l'eau, mais en constitue l'étape première et toujours nécessaire.

Les bénéfices attendus sont de tous ordres : économiques, sociaux, culturels, sanitaires. Il est évident que la protection de la santé humaine doit demeurer prioritaire. Mais à une approche très sectorielle centrée sur les usages, nous estimons que l'approche milieu est plus productive et plus polyvalente à long terme.

Au point de vue stratégique, il faudra évidemment préciser les sous objectifs à atteindre pour les différents milieux aquatiques selon un échéancier à déterminer.

§ Gérer l'eau et les milieux aquatiques de façon concertée selon une approche écosystémique.

Une approche milieu plutôt qu'une approche usage exige, comme son corollaire, une approche écosystémique, c'est-à-dire qui tient compte des interrelations entre les différents éléments d'un écosystème.

Cette approche écosystémique suppose aussi une intégration des facteurs physiques, biologiques et humains, ce qui exige la définition d'un cadre de référence. Ce cadre de référence, c'est le bassin versant qui est un concept à la fois géographique et social.

Le passage à la gestion à l'échelle du bassin versant demandera un effort systématique et de longue haleine. Il exigera un énorme changement dans la culture de la gestion de l'eau et des milieux aquatiques en Haïti. Il suppose donc une série d'étapes de mise en oeuvre pour identifier les acteurs, établir le territoire, ramasser les données, définir les problèmes, identifier les solutions et réaliser la concertation. Étapes d'autant plus complexes qu'il n'y a pas encore en Haïti de vision claire de ce qu'est ou devrait être la gestion intégrée à l'échelle du bassin versant.

§ Maintenir et développer la participation des citoyens dans la gestion de l'eau.

Maintenir et développer la participation des citoyens peuvent constituer un sous objectif de l'objectif précédent puisque la gestion à l'échelle du bassin versant suppose la concertation des acteurs et la participation active de la population. La gestion de l'eau postule la pleine participation du public et exigera l'invention de nouveaux modes de participation particulièrement du côté de la négociation et de la concertation. Les acteurs de l'eau devront développer des compétences en cette matière.

§ Prévenir et réduire les pollutions d'origine agricole, urbaine et industrielle.

La mise en place d'un programme d'assainissement des eaux doit permettre de doter Haïti d'une panoplie d'équipements de traitement des eaux municipales. En d'autres termes, des objectifs de prévention et de réduction de la pollution devront donc être poursuivis même s'ils seront partiellement atteints.

§ Maîtriser l'usage de l'eau souterraine conformément aux caractéristiques des formations aquifères.

Jusqu'à tout récemment, l'eau souterraine suffisait aux divers usages auxquels elle était soumise et il y avait peu de conflits importants. Il n'y avait donc pas lieu d'attacher à ce secteur une importance primordiale. La situation a changé à cause de la pollution de certaines nappes, de conflits d'usages locaux et de l'hypothèse entrevue d'une utilisation plus importante de la ressource.

L'objectif est de parvenir à maîtriser l'usage, ce qui suppose l'acquisition de connaissances, la détermination des seuils de durabilité, la clarification des droits et responsabilités de chacun et la mise en place d'un cadre de règlement des conflits d'usages.

§ Planifier l'aménagement du territoire en vue de la protection de l'eau et des milieux aquatiques et de leur mise en valeur.

La gestion de l'eau doit s'inscrire dans l'aménagement du territoire préalablement à la satisfaction des usages si l'on veut parvenir au développement durable. Nous pensons que protection et mise en valeur ne s'opposent pas, à la condition que l'une et l'autre s'inscrivent dans une démarche planifiée d'aménagement. L'atteinte de cet objectif suppose donc l'inscription de la gestion de l'eau dans le schéma d'aménagement de l'Etat haïtien. Cela sera possible par le schéma directeur de l'eau et supposera une articulation claire des mécanismes de confection du schéma directeur de l'eau à l'échelle du bassin versant.

§ Assurer l'accessibilité des étangs et des cours d'eau.

L'eau de surface, en Haïti, n'appartient à personne. On la dit res nullius c'est à dire disponible à tous mais que nul ne peut accaparer à sa seule jouissance. Or, ce caractère public de l'eau est mis en échec dans le cas des cours d'eau par les droits des propriétaires riverains. Ainsi une large part du public n'a pas d'accès réel à l'eau pour des usages légitimes et bienfaisants : baignade, contemplation, pêche, etc. Certains cours d'eau sont entièrement privés ou enclavés en sorte que le plan d'eau n'est pas accessible au public. Dans le cas des rivières ou du fleuve, l'occupation des rives est telle que le public n'a, dans les faits, qu'un accès très difficile aux plans d'eau.

A notre avis, il est essentiel de s'assurer, sous forme légale ou par la mise en place de programmes spécifiques, que l'accès du public aux cours ou plans d'eau à des fins récréatives soit rendu possible dans toutes les villes et/ou villages attenants à un cours ou plan d'eau.

§ Favoriser la création d'emplois pour des jeunes dans le secteur de l'eau.

De nouveaux métiers sont prévisibles, par exemple dans la réhabilitation des réseaux qui sera une préoccupation majeure dans les années qui viennent, dans l'assainissement agricole, dans la mise en place de la gestion par bassin versant et dans la sensibilisation du public au domaine de l'eau. Il y a là des créneaux porteurs de création d'emplois pour des jeunes. Ici, un arrimage avec les milieux de formation professionnelle est important. Les perspectives d'une crise mondiale de l'eau permettent aussi de penser que le marché international est accessible à la condition que les critères de rigueur et de qualité soient poursuivis sans relâche.

§ Développer la connaissance sur l'eau.

C'est bien connu, la gestion suppose la connaissance comme préalable. Il y avait eu en Haïti un effort considérable d'acquisition de connaissances à l'égard de l'eau, surtout de l'eau comme ressource. Il suffit de penser aux collectes de données réalisées par le ministère de l'Agriculture (MARNDR) durant les années 1970. À partir des années 1980, à cause des réaménagements institutionnels et des compressions budgétaires, il y a eu une diminution considérable des investissements dans ce secteur. Il s'en est suivi, en certains cas, l'abandon des observations sur le terrain avec comme conséquence une rupture dans la continuité, ce qui, en météorologie et en hydrométrie entre autres, est particulièrement néfaste. Dans le domaine de l'eau souterraine, les insuffisances sont évidentes et sont dénoncées par tous les acteurs.

Le secteur de la connaissance a des inconvénients : il coûte cher, demande de la constance et suppose une perspective à long terme, trois inconvénients que la crise budgétaire de l'État ne permettait pas beaucoup de contrer.

De nouveaux secteurs de connaissance se développent rapidement à cause d'une précision accrue des instruments de mesure et des possibilités nouvelles ouvertes par les systèmes informatiques et les télécommunications. Haïti ne peut pas se contenter d'une approche empirique par essais et erreurs. Il doit restaurer et confirmer ses savoirs anciens en assurant la continuité de ses observations et inventaires. Il doit aussi développer d'autres champs et instruments de connaissances conformément aux exigences d'aujourd'hui.

§ Informer, sensibiliser, éduquer.

La gestion de l'eau exige un changement profond de comportements, d'attitudes et de valeurs de la part de l'ensemble des acteurs.

Experts et techniciens, mais aussi politiciens et gestionnaires, industriels, agriculteurs, citadins, tous les citoyens doivent accepter de changer leur manière de voir et leurs façons d'agir. Il nous semble qu'une politique de l'eau doit inclure les objectifs suivants :

· informer les citoyennes et les citoyens de la situation de l'eau et des milieux aquatiques, des coûts associés et des principaux programmes mis en oeuvre ;

· sensibiliser les différents acteurs sur les dossiers prioritaires suivant des programmes à définir selon les régions, les moments et les budgets disponibles ;

· éduquer les différents publics sur les savoirs, les savoir-faire, les savoir-être pour parvenir à des changements durables au sein de la société.

Les objectifs d'éducation ne peuvent être du ressort d'un seul ministère ni du seul milieu scolaire formel. À long terme, il faut rappeler qu'aucune loi, qu'aucun règlement ne peut parvenir à des résultats durables s'il n'y a pas un acquiescement de la part des populations concernées. Et cela nous renvoie toujours à la question des représentations et des valeurs.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci