Emploi des modaux will et would dans les subordonnées en when en anglais contemporain( Télécharger le fichier original )par Julie TEISSEIRE Université de Nice Sophia Antipolis - Master 2007 |
Remerciements______________________________________________ De sincères remerciements tout d'abord à notre directrice de recherches, Bénédicte GUILLAUME, sans qui ce travail n'aurait pas pu prendre forme ni voir le jour. Ses remarques pertinentes et les conversations toujours constructives que nous avons pu échanger nous ont permis de mener à bien cette tâche difficile qu'est la rédaction d'un mémoire de linguistique. Nous tenions également à remercier certains linguistes, parmi lesquels Agnès CELLE, Renaat DECLERCK, Tony LATTES, Regis MAUROY et Jean-Claude SOUESME, qui ont su, de par leur réflexion sur le sujet, nous guider à travers le monde alambiqué de la linguistique anglaise, tant au point de vue de la recherche d'articles et d'ouvrages que de celui de la méthodologie spécifique à la discipline. Un grand merci enfin à notre famille et à nos amis pour leurs relectures et leur aide précieuse tout au long de cette année. Merci à Julien pour son soutien au quotidien. Une tendre pensée pour Pablo, sans qui la vie ne sera jamais plus la même. J. TEISSEIRE. Introduction______________________________________________ En anglais contemporain, on est fréquemment amené à penser, à tort, que l'emploi des modaux will et would s'avère incompatible avec les subordonnées temporelles introduites par le subordonnant when. Cette antinomie est ainsi souvent posée comme constante, sans plus d'explication, or ce postulat est insatisfaisant à bien des égards et ce monolithisme des règles syntaxiques dans l'enseignement de l'anglais -combien sommes-nous, en effet, à avoir entendu le sempiternel « pas de futur ni de conditionnel1(*) dans une subordonnée en when » lors de nos études secondaires?- plutôt irritant. En effet, il faut préciser que seules les subordonnées servant de repère à l'énoncé -les subordonnées en when faisant ainsi office de repères situationnels par rapport à la seconde partie de l'énoncé-2(*) répondent réellement à cette préconception: la modalité de visée inhérente aux auxiliaires de modalité à l'étude ici est en effet souvent exclue après when. Il n'est pourtant pas rare de voir ces deux auxiliaires de modalité cohabiter avec le subordonnant à l'étude ici, notamment au sein de subordonnées relatives, interrogatives ou autres, selon le cas. Le présent mémoire se propose d'étudier les occurrences des modaux will et would dans les subordonnées en when, en tentant de référencer les différents types de propositions où de tels phénomènes sont observables. Il est à noter que nous ne nous intéresserons qu'aux subordonnées en when renvoyant à un moment postérieur au moment de l'énonciation3(*), au moyen de will ou du présent simple selon le cas4(*). C'est cette dichotomie qui sera l'objet principal de notre analyse, à savoir, la distribution de ces deux systèmes au sein des différents types de subordonnées. Nous avons choisi de mener cette étude dans la perspective de la Théorie des Opérations Enonciatives5(*) d'A. CULIOLI, qui s'inscrit dans la lignée de la linguistique énonciative, c'est-à-dire une linguistique dont la conception du langage et de sa description introduit l'énonciateur et la situation d'énonciation -ainsi que les préconstruits de l'énonciateur- comme paramètres majeurs de toute explication linguistique. C'est la raison pour laquelle notre étude sera menée en accord avec ce cadre théorique, prenant en compte le contexte situationnel des énoncés authentiques qui feront l'objet de notre analyse. Nous utiliserons le système métalinguistique -c'est-à-dire le rapport entre le domaine de l'extralinguistique, ou réalité évoquée, et celui du linguistique, ou des mots- pour justifier nos représentations et opérations théoriques. L'étude de la co-occurrence de will / would et des subordonnées en when présuppose une définition des différents termes du sujet. Ainsi, quelques rappels sur la modalité, les systèmes de temps anglais et la subordination nous semblent des pré-requis indispensables à l'entrée en la matière à proprement parler. Cela fera l'objet de nos prochains paragraphes. Il est en premier lieu nécessaire de procéder à de brefs rappels sur la modalité, qui sera l'un de nos objets d'étude les plus intéressants. En effet, selon la Théorie des Opérations Enonciatives d'A. CULIOLI, l'énonciateur, lorsqu'il produit un énoncé, prend toujours position par rapport à la relation prédicative. C'est ce phénomène que l'on nomme modalité en linguistique, celle-ci étant mise en évidence par la présence de marqueurs -le plus souvent, auxiliaires de modalité- révélant le jugement de l'énonciateur. Tout énoncé se trouve donc modalisé. Il existe quatre types de modalité différents, appelés rangs. La modalité de rang 1 est appelée modalité du certain, ou de l'assertion. On utilise le terme de modalité épistémique pour définir la modalité de rang 2, qui est celle du non certain, où l'on évalue les chances d'occurrence de la relation prédicative. La modalité de rang 3 porte sur les appréciations d'un énonciateur sur une relation prédicative, elle est donc appelée modalité appréciative. La modalité de rang 4, enfin, répond au nom de modalité intersubjective, ou modalité radicale. Chaque auxiliaire de modalité -ou modal- possède différentes valeurs déterminées par ces quatre rangs. Toutefois, il n'est pas rare que plusieurs rangs se chevauchent, la classification établie ci-dessus ne constituant pas un « ensemble de cloisons étanches »6(*). Les auxiliaires de modalité à l'étude dans le présent mémoire, will et son homologue would, peuvent se rencontrer sous deux rangs de modalité: nous leur attribuerons donc soit une valeur épistémique -modalité de rang 2-, soit une valeur radicale -modalité de rang 4. Will est le modal de la prédiction par excellence, il indique une visée, l'énonciateur projetant la validation d'une relation prédicative dans l'avenir. Il peut aussi, dans des cas plus rares, avoir une valeur de prédictibilité. Dans ce cas, c'est la modalité radicale de will qui est à l'oeuvre. Cet aspect du modal est constatable dans des énoncés où la volonté -ou le refus- du sujet est la valeur centrale du modal, ou dans des phrases où l'emploi de will est lié à une propriété du sujet. Would, quant à lui, en tant que prétérit de will, a une valeur modale. Cet auxiliaire est la forme désactualisante de will, qui peut avoir une valeur hypothétique, d'atténuation, fréquentative, de commentaire ou de volonté. Il peut marquer une relation intersubjective -modalité de rang 4- ou emprunter la valeur de prédiction de will -modalité de rang 2. Les différents emplois de would sont régis par les mêmes règles que ceux de will; seul diffère le contexte, qui est passé dans le cas de l'emploi de would. Nous rencontrerons toutefois quelques rares exemples où l'emploi de would n'est pas dû à la concordance des temps, mais où cet auxiliaire de modalité renvoie à un « vrai » conditionnel. Les grandes lignes de la modalité -plus particulièrement des différentes valeurs modales de will et would- ayant été posées, il est dès lors nécessaire de nous pencher sur un autre élément de notre problématique, à savoir le fonctionnement des systèmes de temps anglais. En effet, l'anglais se distingue du français de par sa configuration temporelle binaire: il existe deux sphères temporelles -ou « time-spheres »- en anglais, l'une passée -« past tense »-, l'autre présente -« present tense »-. Il n'y a donc pas de « tense7(*) » futur en anglais, mais plutôt ce que l'on appelle « time8(*) ». Les auxiliaires de modalité à l'étude ici doivent alors se manipuler avec beaucoup d'attention. Ainsi, will est un modal appartenant à la sphère du présent, ce qui est plus palpable lorsqu'on envisage would comme étant le résultat de l'opération « past + will ». L'anglais utilise le « future time » au moyen de will, non seulement pour renvoyer à des situations du futur proche ou lointain, mais aussi pour parler de situations qui commencent à T0. Après ces quelques considérations modales et temporelles, il est nécessaire de nous pencher sur la question de la subordination. En effet, notre sujet d'étude s'avère être l'emploi desdits modaux au sein de subordonnées en when -appelées when-clauses en anglais. Il est donc bon de rappeler ici que when est selon le cas une conjonction de subordination introduisant une subordonnée circonstancielle -ou adverbiale-, de temps le plus souvent, ou un pronom relatif, au même titre que who ou which, introduisant une proposition du même nom, avec ou sans antécédent. Dans un cadre énonciatif, une proposition circonstancielle -de temps ici- fournit un repère pour la principale, when indiquant alors le repérage entre principale et subordonnée, comme le décrivent J.-R. LAPAIRE et W. ROTGÉ: Dans la [...] structure WHEN Prop1, Prop2, WHEN sert à poser un point de repère temporel par rapport auquel la deuxième proposition sera effective. On a alors le fonctionnement suivant: « je-énonciateur pose un repère temporel (Prop1) tel que quand Prop1 est vrai, Prop2 l'est aussi [...] ».9(*) Toutefois, une telle configuration semble incompatible avec la modalité épistémique, qui implique une non stabilité du repère. On sait en effet qu'un modal épistémique -will ou tout autre auxiliaire de modalité prenant cette valeur- « est incompatible avec une autre opération énonciative, or le choix d'un repère est justement une opération énonciative ».10(*) Ce constat sera l'un des points de départ de l'objet de notre recherche. L'une des questions qui se posent alors, à la lumière de ces rappels sur la modalité, les temps anglais et la subordination, est de savoir ce que devient ladite modalité au sein de tels énoncés complexes, formés d'une proposition principale et d'une ou plusieurs subordonnées en when. En effet, nous serons en présence de deux -ou plus selon le cas- relations prédicatives dans une relation de repérage donnée, qui seront en mesure de posséder une valeur modale chacune. When introduit diverses subordonnées, de la relative à la circonstancielle, et l'on peut remarquer, à l'instar de J. CHUQUET, que, dans certains cas de subordonnées relatives ou circonstancielles -donc potentiellement introduites par when- il s'avère que: Le rapport de repérage [entre la proposition principale P1 et sa subordonnée P2] s'avère souvent suffisamment « lâche » pour que les opérations de détermination modale dans l'une ou dans l'autre se fassent sans restriction. [...] Tout se passe comme si nous avions deux relations prédicatives, certes repérées l'une par rapport à l'autre, mais fonctionnant indépendamment bien que repérées toutes deux par rapport à une même origine énonciative.11(*) Ce second postulat méritera toute notre attention au sein du présent mémoire, car nous aurons constamment l'occasion, à la lumière de notre corpus d'exemples variés, de nous rendre compte de la véracité de cette hypothèse. Notre problématique s'avère subséquemment multiple, les considérations précédentes permettant de soulever diverses questions auxquelles nous nous efforcerons de trouver des réponses précises. Peut-on établir une typologie fixe des subordonnées en when où l'emploi de will / would est possible? Dans quels cas will et would sont-ils acceptables, voire nécessaires, au sein des subordonnées en when? Y a-t-il des règles, dictées par l'essence même des subordonnées en when, qui régissent l'emploi de ces modaux au sein de telles propositions? Ces auxiliaires de modalité peuvent-ils être en balance avec d'autres systèmes de temps dans les subordonnées en when? Existe-t-il des obligations, des restrictions quant à cette co-occurrence de will / would et des subordonnées en when ? Peut-on aboutir à un système universel et élaborer des postulats se voulant constants quant à ces co-occurrences? Notre premier chapitre s'attachera à mettre en relief l'état de l'art, à savoir, nous tenterons d'étudier les écrits de plusieurs linguistes qui se sont penchés sur notre sujet afin de mettre en lumière certaines hypothèses, maintenables ou réfutables selon le cas. Dans un second chapitre, nous établirons une typologie des subordonnées en when où l'occurrence de will / would est possible, notamment à travers l'étude de divers exemples tirés de notre corpus. Enfin, un troisième et dernier chapitre sera dédié à une analyse plus systématique des temps et modaux utilisés dans les subordonnées en when: nous nous attacherons à démontrer que l'emploi de will / would dans de telles subordonnées est régi par le type même de proposition, et que cet emploi peut être selon le cas approprié -voire obligatoire-, impossible, ou en balance avec un autre système de temps -le présent simple, le prétérit, voire d'autres temps selon le cas. Chapitre I - Etat de l'art: de différents points de vue sur la question. ______________________________________________ A travers l'analyse des écrits de linguistes reconnus qui se sont penchés sur notre problème, nous allons dans ce chapitre tenter de trouver matière commune et de déterminer certaines constantes quant à notre sujet d'étude. La recherche en linguistique présente de nombreux attraits et permet de confronter des points de vue variés. Toutefois, la difficulté est de prendre du recul par rapport aux idées puisées au hasard des rencontres. Chose assez surprenante, après plusieurs mois de recherche, il s'est avéré que peu d'articles traitent de notre sujet à proprement parler. L'emploi de will / would dans les subordonnées en when est donc un terrain encore peu exploré, et qui mérite vraiment qu'on s'y intéressât. Notre bibliographie comporte quantité d'ouvrages et articles plus généralistes ou moins axés sur le sujet, aussi, nous ne les aborderons pas ici -notamment les articles portant sur l'emploi de will et would au sein de subordonnées introduites par if qui, s'ils s'avèrent fort intéressants et utiles quant à la compréhension du mécanisme voisin qui s'opère avec when, ne seront pas portés à l'étude ici. Nous ne proposerons pas de simple résumé des articles et ouvrages, préférant délimiter les axiomes qui, nous semblant les plus pertinents, pourront étayer -ou réfuter- notre argumentation dans les chapitres suivants. Une analyse groupée de ces différents écrits nous permettra de mettre en évidence leurs points communs et divergences. 1. Les subordonnées en when: différentes approches.Si peu de linguistes -B. GUILLAUME ou J. CHUQUET mis à part, comme nous le verrons par la suite- ont consacré une analyse conjointe complète de nos deux objets d'étude, les subordonnées en when ont, elles, su attiser la curiosité de plusieurs chercheurs quant à leur variété et leur complexité. L'ouvrage de référence consacré à la cause des when-clauses, When-clauses and temporal structure12(*), s'est avéré être une véritable bible quant aux descriptions proposées, tant au niveau des types de propositions en when que de leur utilisation des structures temporelles. R. DECLERCK nous propose une typologie complète des subordonnées en when, parvenant à en dégager jusqu'à sept grandes catégories différentes13(*), qu'il nous semble pertinent d'analyser ici:14(*)
Ø Les subordonnées en when utilisées comme subordonnées relatives non restrictives sans antécédent (« when-clauses as Nonrestrictive Relative Clauses without overt antecedent, or NRCs »), du type « It may be opened with a lancet or a needle, when the fluid will run out ». Ø Les subordonnées en when utilisées comme subordonnées nominales (« when-clauses used as free relative noun clauses »), du type « These memories of when I was in India are gradually fading ». Elles peuvent dépendre d'une préposition (« I am waiting for when Johnny comes back »), ou faire partie de structures plus complexes (« When he visited Emma was last week, not last night », ou « It is nice when people say that »). Ø Les subordonnées en when utilisées comme subordonnées adverbiales (« when-clauses used as adverbial clauses »), qui peuvent se répartir en plusieurs sous-groupes:
Ø Les subordonnées en when dites narratives (« narrative when-clauses »), qui ont pour rôle de faire avancer l'action -en ce sens, elles sont proches des coordonnées en « and then »- et qui sont du type « I was sitting quietly in the kitchen when suddenly a stranger entered the room ». Ø Les subordonnées en when atemporelles (« atemporal when-clauses »), dont le sens semble dénué de toute indication de temps. Elles sont généralement de deux types:
Il nous a semblé fort utile au point de départ de notre travail de faire l'inventaire -peut-être exhaustif et redondant de prime abord- des subordonnées en when telles que les conçoit R. DECLERCK, car cette typologie paraît complète et satisfaisante, et se montrera de première utilité dans notre second chapitre. L'ouvrage à l'étude ici présente bien d'autres points intéressants, toutefois, nous n'allons pas nous y attarder trop longuement, ce chapitre se voulant non exhaustif. Nous retiendrons néanmoins que R. DECLERCK nous présente neuf configurations temporelles possibles pour des énoncés comprenant une subordonnée en when, qu'il démontre d'une façon assez convaincante qu'il serait plus judicieux d'attribuer à when l'appellation d'adverbe « relatif libre » -ou nominal, du type « at the time at which »-, plutôt que celle de conjonction de subordination, ce qui semble, à la lecture de ses arguments, envisageable. R. DECLERCK s'attache également à étudier de près les systèmes temporels utilisés au sein de chaque type de subordonnées en when, notamment ce qu'il nomme le « Future Perspective System » et le « Present Perspective System ».16(*) C'est un fait: l'ouvrage de R. DECLERCK fournit une véritable mine d'informations, et il nous a semblé naturel de lui consacrer quelques pages de notre mémoire, notamment en ce qui concerne sa typologie des subordonnées en when. Toutefois, ce sujet d'étude a engendré diverses autres réactions, comme nous allons le découvrir dans les quelques lignes suivantes. Dans son article « When et la temporalité »17(*), E. ZEITOUN se penche sur l'agencement des procès entre principale et subordonnée, à savoir, les relations de consécution, de concomitance ou l'interprétation itérative desdits procès et leurs conséquences sur les temps employés au sein des deux propositions. Cet article permet de mieux cerner le mode de fonctionnement de when et de saisir le lien entre les deux propositions que cette conjonction rattache. L'auteur nous met, entre autres, en présence d'énoncés où les subordonnées en when comportent le modal would, affirmant que cette configuration est possible de par la valeur itérative de l'énoncé: il y a parcours d'une classe de situation, « de telle sorte que pour chaque occurrence du procès posé dans la subordonnée, la relation contenue dans la principale est validée ».18(*) Ce parcours se fait à l'intérieur même du domaine notionnel. Toutefois, si l'article d'E. ZEITOUN ne traite pas de « when + futur »,19(*) l'une de ses notes de bas de page peut néanmoins apporter de l'eau à notre moulin: L'incompatibilité de when avec des modaux renvoyant à une opération de visée (shall, should, will, would) réside dans le fait qu'il est contradictoire de se placer dans le même temps dans le domaine modal du certain et celui du non certain. C'est cette contrainte qui permet d'opérer au niveau distributionnel, une distinction parmi les divers emplois de ce marqueur (when peut être employé comme conjonction de subordination ou coordination, interrogatif, relatif) et les diverses valeurs (temporalité, adversité, causalité). Quand il n'introduit pas une subordonnée temporelle, when est compatible avec une modalité de visée, soit parce qu'il ne détermine qu'un seul constituant phrastique (qu'il s'agisse d'une base verbale, nominale ou adverbiale), soit parce qu'il n'opère pas d'ancrage temporel.20(*) Ainsi, il semblerait que nous soyons en présence d'une hypothèse quant à la problématique qui nous intéresse. Selon E. ZEITOUN, la contrainte modale permet une distinction des divers emplois de when. Cette proposition méritera notre attention dans les chapitres à venir. Nous nous demanderons notamment si au contraire, les différents emplois de when ne sont pas à l'origine même d'une contrainte au niveau de la valeur modale de will / would -si contrainte il y a, cela va de soi. Cette remarque nous permet de considérer dès à présent l'article de C. MÉRILLOU et G. RANGER, « Repérage, déformabilité et ajustement dans les propositions circonstancielles en when »,21(*) dans lequel les auteurs nous proposent des explications très claires quant à la déformabilité du langage à travers l'étude de deux types de subordonnées circonstancielles en when, à savoir, celles comprenant une négation d'une part, et celles introduites par un when dit de péripétie d'autre part. L'intérêt de cet article, outre le fait qu'il présente une analyse claire des deux types de déformation, réside dans le fait que c'est justement cette possibilité de déformer et d'ajuster les rapports constants instaurés par les modèles grammaticaux qui est à l'origine de bien des faits de langue. Les auteurs nomment cela la « subversion du langage ».22(*) Cela nous amène à penser que les contraintes évoquées par E. ZEITOUN ne sont peut-être le fait que de la rigidité des règles grammairiennes dites « classiques », que certaines opérations de déformation pourraient dans ce sens venir « décontracter ». Nous nous pencherons sur cette idée lors de notre étude sur corpus. Au début de ce chapitre, nous avons évoqué le nom de J. CHUQUET comme celui d'un auteur ayant abordé à la fois les problèmes de la subordonnée en when et de la modalité portée par will. Son article, intitulé « Modalité et subordination »,23(*) va nous permettre de relier ce qui a été dit au sujet des subordonnées en when et ce qui est à venir à propos de will et would. En effet, une première remarque est nécessaire quant au point de vue partagé par notre auteur et E. ZEITOUN au sujet du parcours des classes de situation rendant possible l'emploi de will ou de would au sein de subordonnées en when. When peut alors prendre le sens de « whenever ». Un point important de l'article s'avère être que selon l'auteur, la modalité a un rôle de la plus haute importance à jouer quant à l'agencement entre la proposition principale et la proposition subordonnée. Repérage et modalité sont donc inexorablement liées, ce qui constitue un excellent pôle de réflexion pour les chapitres à venir. A noter que J. CHUQUET semble réticent à l'idée d'appeler certaines subordonnées à l'étude ici des relatives, et leur donne plutôt le nom de « `temporelle[s]' [...] spécifi[ant] un repère temporel lexicalisé dans P1 »24(*) Il fournit entre autres des exemples très intéressants de ce type de propositions, où will prend sa valeur de visée, que nous reprendrons dans notre second chapitre. Une dernière remarque quant à l'emploi que J. CHUQUET fait de l'hypothèse de R. A. CLOSE selon laquelle, pour les subordonnées en if 25(*), will est possible au sein de la subordonnée hypothétique s'il marque une « assumed predictability », mais impossible s'il s'avère marqueur d'une « assumed future actuality ».26(*) Cette hypothèse a d'ailleurs été reprise par divers linguistes, dont E. GILBERT27(*) et A. CELLE.28(*) Il est intéressant de constater que J. CHUQUET pousse le problème plus en avant, en émettant l'hypothèse selon laquelle l'apparition de will dans de telles subordonnées -qu'elles comportent un if ou un when indifféremment- est « plus étroitement [liée] au fonctionnement [de ces subordonnants] ».29(*) Les nombreuses hypothèses contenues dans cet article quant à la co-occurrence de when et de will / would mériteront d'être, dans la mesure du possible, vérifiées lors de notre analyse à proprement parler. L'article de J. CHUQUET, qui traite des deux aspects de notre sujet, à savoir, les subordonnées en when et les modaux will / would, nous permet de faire la jonction avec les écrits portant cette fois sur ces dits auxiliaires de modalité. Nous verrons dans notre second sous-chapitre quelles ont été les contributions de différents linguistes à l'analyse de ces modaux. * 1 Les termes de « futur » et de « conditionnel » sont employés ici car ils sont fréquemment employés au sein de tels postulats, les modaux will et would ne servant alors que de vecteurs à l'expression de ces temps. * 2 Par repère situationnel, on entend borne permettant de repérer une subordonnée principale -dans le temps ici-, qui est la fonction plénière des compléments circonstanciels -de temps dans le cadre de ce mémoire. La seconde partie de l'énoncé -que celle-ci soit située avant ou après ce repère- est alors repérée temporellement par rapport à la subordonnée en when. * 3 « On appelle Situation d'énonciation (Sit0) les coordonnées d'un énoncé constituées au minimum par un Sujet énonciateur (S0) et un Moment d'énonciation (T0) », Marie-Line GROUSSIER & Claude RIVIÈRE, Les mots de la linguistique. Lexique de linguistique énonciative (Paris: Ophrys, 1996), p. 183. * 4 Ou de would en balance avec le prétérit dans un contexte passé. A noter que nous pouvons rencontrer encore d'autres temps au sein de ces subordonnées en when renvoyant à un moment postérieur à T0. * 5 Ainsi qu'elle est décrite, entre autres ouvrages, dans Pour une linguistique de l'énonciation, Opérations et représentations d'Antoine CULIOLI, tome I (Paris: Ophrys, 1990). * 6 Jean-Claude SOUESME, Grammaire anglaise en contexte (Paris: Ophrys, 2003), p. 9. * 7 Nous utilisons ici la terminologie anglaise car elle exprime parfaitement ce que l'appellation « temps » en français laisse obscur et ambigu. * 8 En effet, chaque « time » anglais est localisé soit dans la « past time-sphere », soit dans la « present time-sphere ». * 9 Jean-Rémi LAPAIRE & Wilfrid ROTGÉ, Linguistique et grammaire de l'anglais (Toulouse: Presses Universitaires du Mirail, 1991), p. 685. * 10 Bénédicte GUILLAUME, « Will dans les subordonnées en when est-il un marqueur de différenciation au niveau qualitatif? », dans Cycnos, volume 23, n°1: le qualitatif (Nice: Cycnos, 2005), p. 151. L'auteur cite elle-même J. BOUSCAREN et J. CHUQUET d'une part, et M.-L. GROUSSIER et C. RIVIÈRE d'autre part. * 11 Jean CHUQUET, « Modalité et subordination », dans Cahiers de recherche, Modalité et opérations énonciatives, tome 8 (Paris: Ophrys, 2002), p. 148. * 12 Renaat DECLERCK ( London: Routledge, 1997). L'auteur a également consacré deux articles à la cause des when-clauses: « A functional typology of English when-clauses », dans Functions of Language, 1996, et « Tense choice in adverbial when-clauses », dans Linguistics, 1996, qui furent les prémisses de l'ouvrage à l'étude ici. * 13 L'auteur définit en réalité huit grandes familles de when-clauses, mais nous avons choisi de regrouper les interrogatives directes et indirectes en une même classe. * 14 Nous proposerons pour chaque type de subordonnées à la fois une traduction et l'appellation originale entre parenthèses. Les exemples cités sont tous empruntés à R. DECLERCK, sauf indication contraire. * 15 Ces deux exemples ont toutefois, à notre sens, une connotation temporelle, aussi minime soit-elle, puisqu'elles spécifient un cas précis d'occurrence de la principale. * 16 Ces deux systèmes représentent respectivement celui admettant will dans une subordonnée en when -ce système est aussi appelé « W-system » tout au long de l'ouvrage, ce dernier incluant would- et celui privilégiant le présent simple. * 17 Elizabeth ZEITOUN, « When et la temporalité », dans Cahiers de recherche, Types de procès et repères temporels, tome 6 (Paris: Ophrys, 2002).
* 18 Ibid, p. 107. * 19 L'auteur utilise cette appellation de « futur » pour renvoyer entre autres à will. Nous avons employé des guillemets ici car le terme futur peut sembler maladroit quant à l'appartenance à la sphère du présent de ce modal, et quant à un éventuel amalgame entre « future tense » anglais et « temps futur » français. * 20 E. ZEITOUN, op. cit., p. 107-108. * 21 Catherine MERILLOU & Graham RANGER, « Repérage, déformabilité et ajustement dans les propositions circonstancielles en when », dans Cahiers Forell (éd. J. CHUQUET, 2000). * 22 Ibid, p. 62. * 23 J. CHUQUET, op. cit. * 24 Ibid, p. 168. * 25 Les propositions subordonnées hypothétiques ne font pas l'objet de notre présente étude, toutefois nous avons eu l'occasion de nous pencher sur la question à maintes reprises quant à leur emploi de will / would -voir bibliographie. Ces if-clauses sont très proches de certaines when-clauses à bien des égards, nous aborderons d'ailleurs ce point dans notre conclusion. La remarque faite ici par R. A. CLOSE sur les if-clauses est également vraie pour certaines subordonnées en when, d'où notre intérêt de la faire figurer ici. * 26 R. A. CLOSE, «Will in if-clauses», in Studies in English Linguistics for Randolph QUIRK, GREENBAUM, LEECH & SVARTVIK (London: Longman, 1980). * 27 Eric GILBERT, « A propos de will », dans Les verbes modaux, éd. P. DENDALE & J. VAN DER AUWERA, Cahiers Chronos, tome 8 (Amsterdam: Rodopi, 2001). * 28 Agnès CELLE, « La visée dans les propositions hypothétiques en anglais et en français », dans A. CELLE & S. GRESSET (éd.), La subordination en anglais: une approche énonciative (Toulouse: Presses Universitaires du Mirail, 2003). * 29 J. CHUQUET, op. cit., p. 169. |
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