Louis Ferdinand Céline:une pensée médicale( Télécharger le fichier original )par David Labreure Université Paris 1 panthéon sorbonne - DEA Histoire et philosophie des sciences 2005 |
III: CELINE MEDECIN DE BANLIEUE ET D'AILLEURS :3.1:DEPART DE LA SDN : LES PREMIERES EXPERIENCES EN CABINETAprès son divorce d'avec Edith Follet le 21 juin 1926, Destouches ne fait rien pour que son contrat à la SDN ne soit renouvelé .Il en avait assez de la SDN et de sa bureaucratie et la bienveillance de Rachjman ne pouvait le protéger éternellement de ses errements administratifs. Rentré à Paris, il fait enregistrer son diplôme de médecin en juillet 1927.Mais où et dans quelles conditions exercer son métier ? Il s'installe à Clichy en août 1927 et ouvre un premier cabinet qu'il doit rapidement fermer, faute de clientèle : « Depuis que j'ai ouvert mon cabinet, c'est la déche ! Pas de clientèle...Rien à foutre de la journée ...Faudra le temps de démarrer qu'on m'a dit (...) Faut il que je sois con de l'avoir cru »47(*). Sans fonction officielle, Destouches s'initie alors à la médecine de dispensaire dans le service du professeur Léon Bernard à l'hôpital Laennec, où il côtoie notamment Robert Debré : « Louis s'intégra immédiatement à l'équipe de Laennec.J'atteste aujourd'hui qu'il y'a beaucoup travaillé, justifiant tout le bien que Rajchman avait dit de lui et forçant littéralement l'estime de ses confrères»48(*). Le 14 novembre, il retente l'expérience privée en ouvrant un nouveau cabinet de « médecine générale, maladie des enfants » dans l'appartement qu'il partage avec sa nouvelle compagne, la danseuse américaine Elisabeth Craig, au 36 rue d'Alsace. De par ses idées, sa personnalité un peu fantasque et malgré un premier contact réussi, il se trouve bien vite isolé parmi les autres médecins de la ville : il vit en concubinage, ne se fait pas toujours payer et pratique une médecine « sociale » peu en accord avec celle -privée, pratiquée habituellement. Il est toutefois apprécié de sa clientèle car attentif à son égard et fait preuve en toute occasion d'une grande humanité : F.Balta rapporte ainsi le témoignage d'une de ses voisines, Jeanne Carayon : « Il avait une grande faculté d'attention et un don d'expression inoubliable. J'ai pu vérifier plus tard la sagesse de certains conseils médicaux qu'il m'avait donnés »49(*).La gratuité occasionnelle (mais répétée) de ses consultations ,lorsqu'il estimait que ses clients n'avait pas les moyens de le payer était cependant considérée comme suspecte : « Je ne présentais qu'un seul avantage, moi, en somme, mais alors celui qui vous est difficilement pardonnable, celui d'être presque gratuit ; ça fait tort au malade et à sa famille un médecin gratuit, si pauvre soit elle »50(*) faisait il dire à Bardamu dans le Voyage au bout de la nuit. L'année 1928 se voit partagée pour Céline entre son activité privée à Clichy et sa fréquentation active du service du professeur Bernard à Laennec. En outre, voulant exercer une activité plus marquante, plus publique aussi, il présente sa candidature de membre adhérant à la société de médecine de Paris. Il est élu le 13 avril et ne tarde pas à exprimer ses idées à ses collègues : le 26 mai il fait une communication « à propos du service sanitaire des usines Ford », bilan de ses pérégrinations outre-atlantique où il reprend les conclusions du rapport qu'il avait fait à la SDN trois ans plus tôt. Dés lors, il fera plusieurs communications sur l'hygiène ou encore le système des assurances sociales. En ressortira un article paru dans la revue Presse Médicale du mois de novembre : « Les assurances publiques et une politique économique de la santé publique ».L'humanité quotidienne est aussi de son domaine à Clichy, même si les clients se font encore rares. Le docteur Destouches est donc à cours d'argent et dut multiplier les activités annexes pour trouver d'autres sources de revenus. * 47 Lettre de L.F Céline à un ami non identifié, cité dans A.Rossel-Kirschen Céline et le grand mensonge, Paris, Mille et une nuit, p.188 * 48 R.Debré, Témoignage oral 5/12/1968 in Philippe Alméras, Dictionnaire Céline, Paris, Plon, 2004, p.246 * 49 F .Balta La vie médicale de Louis Destouches, Paris, 1970, p.29 * 50 L.F Céline, Voyage au bout de la nuit, Paris, Folio Gallimard, 1932, p.272 |
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