CHAPITRE II : L'INTERFERENCE DES SAVOIRS MIS EN VALEUR
DANS LA CR
DE MADINA NDIATHBE
La dimension institutionnelle et politique des ressources
naturelles soulève des questions d'interactions et de confrontations
entre différents acteurs, entre les savoirs (technico-scientifique et
traditionnels) et entre des méthodes. La reconnaissance des savoirs
paysans est aujourd'hui un fait partagé, mais leur nature et leur
utilité sont des questions qui semblent bousculer bien des normes et
montrer leur insuffisance. De même, les savoirs techniques
développés par les institutions engendrent parfois des
désarticulations ou un refus de la part des populations qui n'acceptent
jamais d'être un moyen au service des institutions pour appliquer
mécaniquement leur système de gestion des ressources
naturelles.
La révision des méthodes et du rôle des
acteurs implique ainsi une complémentarité entre le savoir
scientifique et le savoir moderne.
I. LA LIMITE DES SAVOIRS MIS EN SYNERGIE DANS LA
GESTION DES
RESSOURCES NATURELLES
Si les savoirs locaux ne conviennent pas à toutes les
situations et ont montré leur limites, les connaissances modernes ont
par de là modifié profondément les relations entre l'homme
et la nature.
1.1 Les limites du savoir local
Les savoirs locaux ont permis aux populations de la CR de
vivre en harmonie avec la nature pendant longtemps et de subvenir à
leurs besoins vitaux. Seulement, la crise écologique des années
1970 à montrer que les savoirs locaux sont loin d'être une
solution miracle à tous les problèmes de gestion de la
biodiversité.
1.1.1 Le recul des systèmes de gestions
traditionnelles
L'insuffisance des pluies, la diminution des rendements des
cultures de décrue et pluviales ont entrainé une baisse des
activités agricoles. Le facteur de production limitant fut l'eau dont
dépend considérablement la culture du Walo et des Pallé.
Alors que, l'agriculture pluviale est enrayée du système de
production.
Les formes traditionnelles de lutte contre l'appauvrissement
des sols connaissent également des limites. (Encadré 4)
Encadré 4
Mon père pratiquait la jachère dans nos champs
de Diéri. Il cultivait dans le premier champ du mil, dans le second de
l'arachide. L'année suivante il faisait l'inverse. D'autre cas, il
exploitait un champ durant deux à quatre ans puis le laissait en
jachère pour mettre en valeur le second. Dans le Walo on laissait
pâturer le bétail après la récolte et le sol
revivait. Depuis la mort de mon père, on a morcelé ces
différents champs et beaucoup de pratiques ne sont plus en vigueur.
Extrait de l'entretien avec un agriculteur (Mamadou Gayel
Ndiath) à Madina Ndiathbé
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Ces pratiques diminuent de plus en plus à cause, d'une
part de la croissance démographique qui engendre le morcellement des
champs entre plusieurs membres de la famille ou l'accaparement des terres
fertiles par les familles les plus puissantes. D'autre part, l'irrigation offre
une alternative à tous les chefs de ménages.
1.1.2 La réduction des autres pratiques
traditionnelles de gestion Beaucoup d'actions de gestion
traditionnelle n'ont pu s'insérer de manière durable au contexte
de changement global.
- L'incohérence de la médecine traditionnelle
Les savoirs locaux souffrent d'un manque de précision
quand un dosage ou une mesure est nécessaire. Les paysans ou les
éleveurs ne peuvent pas quantifier exactement les dosages des plantes
utilisées en médecine traditionnelle. De plus, les savoirs locaux
peuvent s'effondrer suite à une crise environnementale ou à une
intervention extérieure.
- La limite dans le système de gestion de la
pêche
Malgré la diversité des systèmes de
pêche sur les différents cours d'eau, la raréfaction des
ressources halieutiques constituent un facteur bloquant des savoirs locaux qui
n'ont pas prévu certaines situations extrêmes (la
raréfaction des poissons ou la sécheresse des cours d'eau)
En gros, les savoirs locaux ne peuvent jouer aujourd'hui le
même rôle, ni avoir la même portée qu'autrefois. Entre
temps le contexte a beaucoup évolué.
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