La Côte d'Ivoire abrite plus de 60 ethnies
différentes réparties en quatre grands espaces linguistiques
ainsi :
· Dans le sud-est, nous retrouvons le groupe
akan/baoulé dont les langues principales sont « kwa »,
également présent dans moitié sud-ouest du Ghana ;
· Dans le sud-ouest, le groupe krou/bété
avec dont les langues principales sont « krou », présent
également dans la partie Sud-Est du Liberia ;
· Dans le nord-est, les Malinkés dont les langues
principales sont « voltaïques », sont les principaux occupants
du Burkina Faso et du nord du Ghana ;
· Enfin dans le nord-ouest, nous avons le groupe
mandé dont les langues principales sont « mandées »,
présent également dans l'est de la Guinée, l'ouest du Mali
et le nord du Liberia.
Ces espaces ethnolinguistiques, bien que transcendant les
frontières nationales, constituent un point de repère utile mais
ne suffisent en aucun cas à l'analyse sociopolitique ivoirienne. Les
espaces urbains ivoiriens sont aujourd'hui très mixtes, accueillant
toutes ethnies confondues. La crise politique qu'a connu la Côte d'Ivoire
a révélée des tensions d'ordre ethniques entre les
populations du nord et du sud, nous y reviendrons plus tard.
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Le système agraire ivoirien
Figure 11 : Les cultures de rentes ivoiriennes (RABET &
TOBBI, 2020)
Les cutures de rentes composent l'essentiel de la balance
commerciale ivoirienne. Elles sont essentiellement cultivées au sud du
pays dans les régions ombrophiles.
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Figure 12: L'agriculture vivrière en Côte
d'Ivoire (RABET & TOBBI,2020)
L'agriculture vivrière ou agriculture familiale est un
système agraire reposant sur des exploitations de petite dimension
travaillées chacune par une famille consommant une partie de sa
production. L'expression tend à remplacer d'autres termes
équivalents sans être exactement synonymes : agriculture paysanne
(pour insister sur la dimension sociétale majoritaire de ce
système dans certaines régions du monde encore largement rurales)
ou agriculture vivrière (pour insister sur l'autoconsommation).
L'agriculture familiale est très largement le fait des
pays dits du Sud où elle concerne plus de la moitié des actifs.
Elle occupe 2,6 milliards de la population humaine qui produit 70% de la
production alimentaire mondiale. L'agriculture familiale n'a pas disparu des
pays dits du « Nord » où elle représente une part
infime de la production, mais concerne quelques millions de très petits
producteurs, souvent non recensés dans la statistique
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agricole qui ne comptabilise que les exploitations dites
professionnelles. L'agriculture familiale subsiste également sous la
forme de jardins ruraux ou urbains, ou dans le cadre d'une
multi-activité pour compléter des petits revenus
(retraités, ouvriers...) (CFSI,2020).
L'agriculture familiale englobe toutes les activités
agricoles reposant sur la famille, en relation avec de nombreux aspects du
développement rural. L'agriculture familiale permet d'organiser la
production agricole, forestière, halieutique, pastorale ou aquacole qui,
sous la gestion d'une famille, repose essentiellement sur de la main-d'oeuvre
familiale, aussi bien les hommes que les femmes (FAO,2015). Le CIRAD
précise des critères de définition : dans 81 pays
étudiés, les exploitations de moins de 5 ha représentent
94 % du total, celles de moins d'un hectare, 72 % (moyenne française en
2010 : 55 ha).
Le CIRAD ajoute trois critères :
-seuls travaillent à plein temps les membres de la
famille : ils ne sont pas liés par des rapports de salaire, mais par des
liens domestiques. Le travail crée des liens forts entre la famille et
l'exploitation,
-une partie de la production est consommée par la
famille elle-même : Les agricultures familiales alimentent, certes, les
marchés, mais l'autoconsommation est aussi un produit de ce travail,
-le capital est familial : il est indissociable du patrimoine
familial. Situation politique actuelle
Alors que la Côte d'Ivoire est redevenue « stable
» depuis la fin du conflit armé post-électoral de 2010-2011,
l'approche de l'élection présidentielle de 2020 est sources
incertitudes. L'annonce du 6 aout 2020 du président de la
République Alassane Ouattara qui brigue un troisième mandat
anticonstitutionnel met en péril la sécurité et l'ordre
public d'un pays encore marqué par ses violentes dérives
politiques récentes.
L'ancien président Laurent Gbagbo a pour sa part
été acquitté par la Cour pénale internationale et
libéré sous conditions dans l'attente d'un éventuel
procès en appel. Au terme de cette procédure, il pourrait
être en mesure de participer au scrutin présidentiel. Les
récentes tensions au sein de la coalition au pouvoir, le Rassemblement
des
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houphouëtistes pour la démocratie et la paix
(RHDP), ont abouti à la démission du président de
l'Assemblée nationale, Guillaume Soro.
Par ailleurs une nouvelle commission électorale
indépendante (CEI) chargée d'organiser les prochaines
élections, a été mise en place à la suite des
discussions entre le gouvernement et une partie de l'opposition. Le Parti
démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI) d'Henri Konan
Bédié et le Front populaire ivoirien (FPI) de Laurent Gbagbo,
ainsi que les partis proches de l'ancien président de l'Assemblée
nationale, Guillaume Soro, n'ont pas participé aux discussions. Ils
réclament un nouveau dialogue autour de la réforme de la CEI.
Les affrontements intercommunautaires du mois de mai 2019
dans le centre du pays et les arrestations récentes d'opposants
politiques suivis d'affrontements entre les forces de l'ordre et les
manifestants font craindre une montée des tensions politiques à
l'approche de l'élection présidentielle prévue en octobre
2020.
Situation économique
Figure 13 : Taux de croissance de la Côte d'ivoire
depuis 2011 (Banque mondiale 2019)
Les rapports de la banque mondiale mentionnent que depuis
2011, l'économie ivoirienne a progressé à un rythme moyen
de 8 % par an, ce qui en fait l'un des pays les plus dynamiques du monde. La
croissance du PIB a cependant progressivement ralenti pour
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passer de 10,1 % en 2012 à 7,7 % en 2017, tandis que
les estimations de la Banque africaine de développement sont d'une
croissance de l'ordre de 7 % pour l'exercice 20202021. Précisons que ces
estimations ont été faite avant la crise du COVID-19.
Le pays doit cependant relever un double défi :
maintenir un rythme de croissance rapide tout en favorisant une croissance plus
inclusive (le taux de pauvreté s'élève encore à
46,3 %) tout en réduisant les déséquilibres
budgétaires.
La proximité des élections nationales,
programmées en octobre 2020, risque de générer un climat
d'incertitude et d'avoir une incidence négative sur les investissements
privés.
Situation sociale et enjeux de développement
L'excellente performance économique de la Côte
d'Ivoire n'a pas donnée les résultats attendus sur le plan de
l'inclusion sociale et de la réduction du taux de pauvreté, qui
reste élevé. Le pays se trouvait au 170e rang sur 189 pays dans
le rapport 2018 du Programme des Nations Unies pour le développement
(PNUD) sur l'indice de développement humain et possède un faible
indice de capital humain (0.35) selon le classement de la Banque mondiale.
Malgré des efforts récents, la Côte
d'Ivoire demeure l'un des pays du monde où les inégalités
de genre sont les plus marquées.
Le faible taux d'achèvement scolaire au collège
(35,5 %), les disparités d'instruction entre les filles et les
garçons (elles sont 42,7 % à achever le secondaire contre 55,5 %
des garçons), la mortalité maternelle (645 décès
pour 100 000 naissances vivantes), la malnutrition infantile et le
chômage des jeunes (36 % des jeunes de 15 à 35 ans) figurent parmi
les principaux enjeux de développement de la Côte d'Ivoire.
Après avoir fortement augmenté de 10 à
51 % de la population entre 1985 et 2011, le taux de pauvreté aurait
reculé à 46,3 %, selon la dernière enquête sur les
niveaux de vie réalisée par l'administration ivoirienne.
La Côte d'Ivoire gagnerait à redistribuer
davantage les fruits de sa bonne performance économique aux populations
les plus vulnérables, à intégrer davantage les femmes dans
l'économie et à développer son capital humain afin de
mieux répondre aux besoins du
marché du travail. En effet, la création de
produits et services modernes requière des compétences qui
manquent encore à la main-d'oeuvre locale (Banque mondiale 2020).