1.2. La motorisation
1.2.1. Ses principaux usages
La motorisation agricole englobe tout ce qui concerne l'emploi
des moteurs pour effectuer les travaux agricoles :
ü Les tracteurs avec leurs équipements et les
automoteurs ;
ü les motoculteurs et autres engins
spécialisés ;
ü les moteurs pour entraîner les machines
utilisées à poste fixe ou portées à dos d'homme.
En 1997, plus de 80 % des 26 millions de tracteurs agricoles
sont utilisés en Amérique du Nord, en Europe et en Asie.
L'Afrique et l'Amérique du Sud n'en comptaient que 1,8 million, soit 6
%.
Les machines de récolte automotrices utilisées
en Afrique sont principalement des moissonneuses-batteuses, dont 90 % sont
utilisées en Afrique du Nord et en Afrique du Sud. Les motoculteurs sont
souvent moins utilisés dans les pays africains.
Par contre, l'emploi de moteurs sur des machines
utilisées à poste fixe ou portées à dos d'homme est
très développé. Leur utilisation est facilitée par
la diffusion de cellules autonomes, compactes et légères, faciles
à déplacer tant pour les travaux au champ (irrigation,
traitement) qu'en bordure de champ après la récolte (battage,
triage, vannage, broyage). Le nombre de moteurs ainsi utilisé est
nettement supérieur au nombre de tracteurs (BALLUT, 2004 : 21)
En agriculture, le concept de motorisation dépasse donc
le cadre strict de l'emploi destracteurs et autres machines automotrices pour
s'appliquer à tout ce qui touche à l'utilisation des moteurs
comme source d'énergie pour réaliser des travaux. En Afrique
subsaharienne, la motorisation concerne, à des degrés variables,
les travaux de défrichement et d'aménagement des terres, et les
transports.
La motorisation des travaux culturaux concerne principalement
le travail du sol. Les autres façons culturales sont
réalisées manuellement et en traction animale. La combinaison
d'opérations mécanisées et manuelles, ainsi que
l'utilisation à poste fixe de quelques matériels
spécifiques comme les batteuses à mil, les égreneuses
à maïs ou les décortiqueuses à riz est originale.
Pour les transformations post-récolte, les installations industrielles
traitent surtout les produits destinés à l'exportation. Les
unités artisanales ou semi-industrielles sont beaucoup plus
adaptées aux besoins des marchés locaux (MONDE, 2012).
I.2.2. Les critères de
choix d'un équipement motorisé
I.2.2.1. Les critères
généraux
À l'échelle d'un pays, la motorisation agricole
pose des problèmes qui dépassent largement le cadre du choix
technique et du coût des équipements. Il s'agit de choisir les
formules les plus appropriées pour atteindre des objectifs de
développement économique.
Il faut :
Ø Prendre en compte l'environnement dans lequel sera
utilisée cette motorisation,
Ø évaluer l'intérêt de son
introduction,
Ø étudier les conditions de sa mise en
oeuvre,
Ø proposer les niveaux de puissance et les
équipements les plus adaptés.
Plusieurs éléments déterminent le type de
mécanisation à adopter et son développement: la demande de
produits agricoles, l'offre et le coût de la main d'oeuvre, le volume et
le coût des capitaux disponibles et le coût d'exploitation des
machines. Il est fréquent que l'option retenue combine l'utilisation de
divers niveaux de mécanisation.
Comment, dans un contexte déterminé, choisir une
solution motorisée adaptée à l'environnement
économique et social, permettant de satisfaire les exigences de
productions, de superficies à mettre en culture, de calendriers
culturaux, des variétés cultivées et des conditions de
transformation post-récolte (BALLUT, Op Cit).
Globalement, les choix techniques s'articulent autour de deux
axes :
Ø Les niveaux de puissance ;
Ø Le type de motorisation.
La recherche d'économies d'échelle(diminution
des coûts unitaires de production liée à l'augmentation des
quantités produites et du volume des ventes) favorisait autrefois le
choix de gros matériels que seules les grandes exploitations pouvaient
acquérir. Actuellement, grâce aux innovations techniques et aux
possibilités de location, la motorisation peut aussi s'appliquer aux
petites exploitations, soit partiellement pour une opération culturale,
soit pour la majorité des opérations.
1.2.2.2. Les problèmes
d'utilisation
1. L'approvisionnement
Les possibilités d'approvisionnement en
équipements varient énormément suivant les pays. Rares
sont ceux disposant d'unités de fabrication industrielle. Quelques-uns
possèdent des unités de montage ou d'assemblage pour un nombre
restreint de matériels. Les pays africains sont donc fortement
dépendant des conditions d'approvisionnement en machines et en
pièces détachées : problèmes de devises, de
délais d'acheminement, de disparité des marques et des
modèles.
Le marché de l'occasion, issu du parc de réforme
des matériels des pays industrialisés, offre de nouvelles
perspectives. Mais les circuits ne sont pas encore très organisés
et ne permettent pas, le plus souvent, le contrôle de qualité.
2. Les infrastructures
Les infrastructures d'entretien et de réparation
s'organisent assez rapidement aux abords des grands centres urbains et
commerciaux, mais restent quasi inexistantes dans les zones rurales
éloignées. La maintenance est fortement pénalisée
par l'impossibilité de s'approvisionner rapidement en pièces
détachées d'usure courante qui sont importées à la
demande. Elle est rendue difficile par le manque d'infrastructures techniques
de qualité pour les réparations et les contrôles, et par la
rareté ou le manque de compétence des mécaniciens. Ces
derniers sont souvent contraints de procéder à du bricolage avec
du matériel de récupération (BALLUT, Op Cit).
3. Les moyens financiers
La motorisation coûte relativement cher à l'achat
et en fonctionnement. Le recours aux emprunts est fréquent. Des mesures
d'accompagnement en matière de fiscalité et de crédit
favorisent l'introduction des équipements. Dans certaines situations,
les producteurs sont contraints de réaliser des prestations de service
pour obtenir les liquidités nécessaires au fonctionnement.
4. La compétence du personnel
La compétence du personnel chargé d'utiliser et
de gérer des matériels aussi coûteux est impérative,
et ce facteur est trop souvent négligé. Pour les utilisateurs, la
formation s'opère le plus souvent sur le tas par approche progressive.
Trop souvent, cette formation insuffisante se traduit par une mauvaise
utilisation pénalisant la qualité du travail ou du produit, le
rendement et la durée de vie de la machine, ce qui génère
un coût de fonctionnement exagérément élevé
et une diminution des recettes.
1.2.2.3. Des compétences
variées et complémentaires
Les compétences sont différentes pour les
mécaniciens, les chauffeurs et les responsables et elles doivent se
compléter. Les mécaniciens chargés de l'entretien et des
réparations, doivent posséder un minimum de notions sur les
conditions d'utilisation et les différents réglages des machines
pour en assurer le bon fonctionnement. Les chauffeurs doivent connaître
la conduite de leur machine avec leurs matériels d'accompagnement, ainsi
que tous les réglages et les entretiens courants.
Les responsables, qu'ils soient propriétaires,
présidents ou gestionnaires d'organisations paysannes, doivent avoir des
notions sur la conduite et l'entretien des matériels pour être en
mesure de dialoguer avec les chauffeurs et les réparateurs. Ils doivent
aussi posséder un minimum de connaissances sur les
conditions d'intervention pour apprécier, contrôler et faire
rectifier les réglages permettant d'améliorer la qualité
du travail et la rentabilité de la machine (KABONGO, 2014).
Généralement, on se préoccupe peu des
responsables dans les programmes de formation technique, alors que ce sont
souvent eux qui décident de la nécessité ou non
d'effectuer des entretiens. Ceci suppose l'organisation de formations pratiques
dans les conditions d'utilisation des matériels.
En regard des sommes importantes engagées, les
responsables doivent avoir une formation en gestion, en programmation et
organisation des chantiers. Ces compétences sont indispensables pour
avoir une bonne maîtrise technique de la motorisation, préalable
indispensable à la maîtrise économique.
1.2.2.4.Importance de la motorisation
La motorisation permet généralement d'augmenter
de façon importante la productivité du travail. Elle
répond à des besoins d'augmentation de la production ou des
surfaces cultivées, de remplacement ou de complément d'une main
d'oeuvre insuffisante, non disponible ou plus chère. L'avantage attendu
de l'utilisation de nouvelles machines est alors de réduire le
coût de production, en substituant la nouvelle technique à la main
d'oeuvre, à des animaux de trait ou à de vieilles
machines(KABONGO, Op Cit).
Selon la Banque mondiale, les principaux facteurs qui influent
sur l'utilisation de tracteurs sont l'intensification de l'agriculture, souvent
associée à une extension des superficies irriguées, la
croissance des capitaux disponibles et l'amélioration des routes.
1.2.2.5. Le contexte
socio-économique
Les choix adaptés techniquement doivent être
rentables. Trois éléments économiques sont fondamentaux :
Ø la valeur marchande des produits;
Ø le coût des opérations
motorisées ;
Ø le coût de la main d'oeuvre.
En général, la motorisation se développe
avec les hausses du coût de la main-d'oeuvre. Mais il est
nécessaire que le prix de vente de la production soit suffisamment
élevé pour favoriser l'investissement et couvrir les
différentes charges d'exploitation.
La diffusion de la motorisation, freinée
généralement dans les pays en développement par la
faiblesse des revenus des exploitants, doit viser la réduction des
coûts de production et l'amélioration de la productivité du
travail.
Localement, les résultats économiques de la
culture dépendent fortement des contraintes pesant sur la
productivité de la terre, du travail et des plantes.
1.2.2.6. Volonté politique d'équiper le
monde agricole
Les deux principaux objectifs que peut poursuivre un Etat afin
de favoriser la mécanisation agricole sont les suivants :
Ø Prendre en compte l'apprentissage technique du
matériel introduit, les écarts entre les normes et les
utilisations réelles; connaissance de l'emploi réel du
matériel indispensable à l'analyse économique.
Ø Etudier en détail la diversité et la
stabilité des capacités de financement des agriculteurs.
Bonne connaissance de ces deux objectifs permettra de
définir les rôles respectifs des divers agents économiques
concernés, et l'Etat en tout premier lieu, non seulement pour
évaluer l'importance de son appui, mais aussi pour en établir les
modalités (KABONGO, Op Cit).
Equiper les campagnes signifie aborder l'ensemble des
problèmes de mécanisation :
Ø études sur les politiques et stratégies
de mécanisation ;
Ø mise en oeuvre de programmes de recherche sur
l'étude de la mécanisation dans le milieu;
Ø élaboration de nouvelles approches de la
mécanisation dans les programmes de formation.
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