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Impacts psychologiques de la séropositivité sur les patients adultes à  l'hôpital Saint-Joseph de Fort-Liberté : les manifestations de la dépression


par Asaph-Lino Etienne
Université d'Etat d'Haïti/Campus Henry Christophe de Limonade - Licence 2018
  

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Conclusion de l'entretien

À la fin de chaque entretien, la possibilité a été donnée à chaque sujet de soulever leur question par rapport à l'entretien, d'ajouter un dernier mot ou quelque chose qu'il pense pourrait nous être utile à cette recherche empirique. Il faut remarquer que trois de nos huits (8) sujets ont soulevé une question qui devrait avoir une importance capitale.

Une deuxième question a été posée par une femme enceinte de quelques mois. Elle l'a formulé ainsi :

Apre w fin poze m anpil kesyon m' byen kontan w' ban m' chans poze youn. Kesyon m' ta renmen poze sèke m' vin lopital la paske m' pa t' wè règ mwen depi kèk mwa e m' te vin fè yon tès grosès e m' konn tande y'ap di depi yon moun ansent e l' gen SIDA kan timoun nan fèt y'ap pran l' nan men l'. Eske se vre ? Epi m' bezwen konnen ki sa m' ka fè pou m' pa transmèt timoun nan li?? (Cas B E 04)

(Traduction libre : Après m'avoir posé autant de questions, je suis heureuse d'en poser une. Je suis venue à l'hôpital parce que je n'ai pas remarqué mes menstruations au cours des derniers mois et je suis venue pour un test de grossesse. J'ai entendu dire que quand une personne est séropositive et tombe enceinte, après son accouchement, son bébé lui sera enlevé. Est-ce vrai?? Que puis-je faire pour ne pas transmettre le virus au foetus)

Les deux autres questions étaient similaires. Elles traduisent le désir des interviewé d'être guéris. Un de ces deux patients nous a demandé :

M ta renmen konnen, èske pa gen yon remèd si moun nan pran l' lap geri nèt li pap bezwen pran okenn lòt remèd ankò?? (Cas N J-P 05)

(Traduction libre : J'aimerais savoir existe-t-il un médicament à suivre pour être totalement guéri afin que cette personne ne prenne plus de médicaments??)

CHAPITRE V

5. Analyse et interprétation des résultats

Comme il a été mentionné dans l'introduction, notre question de recherche principale était : en quoi la séropositivité peut-elle impacter le psychisme du patient adulte ? À cela s'ajoutent deux questions spécifiques : quelles sont les manifestations de la dépression chez les patients adultes séropositifs?? Quel est le jugement clinique de cette dépression??L'analyse et l'interprétation des résultats nous ont permis de répondre nos questions de recherche et d'atteindre les objectifs de cette recherche.

5.1- Question de départ

La première catégorie de réponse sous-entend que le VIH/SIDA rend mal à l'aise. Ce malaise peut être d'ordre psychosomatique. Sur le plan psychologique, la perception de la société face au VIH/SIDA peut représenter un obstacle à la santé mentale des patients. Cet obstacle peut se manifester par des troubles psychiques. Par exemple, Sanchez-Valero (2003) avancait que le VIH peut résulter d'un risque important de dépression. Ceci nous permet de comprendre que le malaise dont parle les séropositifs pourrait bien s'agir d'impact psychologique ou de malaise sur le plan psychique. Parlant de malaises, nos participants n'ont pas vraiment fait référence aux effets secondaires des médicaments qu'ils prennaient régulièrement dans le cadre du traitement antirétroviral (ARV).

Deux autres facteurs à prendre en compte qui peuvent susciter des malaises, comme les patients les appellent, que nous nous appelons impact psychologique, ce sont la stigmatisation et la discrimination. Ces deux facteurs sont souvent liés au VIH/SIDA comme le soulignent Aggleton, Wood et Malcolm (2006). Ces attitudes à l'encontre des PVVIH (Personne Vivant avec le VIH) se manifestent parfois par un manque de soin et d'appui. Elles accroissent les souffrances personnelles des personnes séropositives. Quand la stigmatisation devient une attitude courante, elle engendre la honte des PVVIH. Une telle honte peut empêcher les PVVIH à chercher de l'aide médicale, et peut aussi avoir une énorme incidence sur la santé mentale du patient séropositif. Ces attitudes peuvent susciter des malaises chez les personnes séropositives comme l'en témoignent certains participants.

Donc, sur le plan psychologique, il est difficile pour une PVVIH de vivre l'expérience de la séropositivité. Ce malaise s'explique aussi sur le plan somatique. Puisque le VIH est une maladie chronique, les patients qui veulent suivre un traitement sont condamnés à prendre des médicaments régulièrement, voire au quotidien. À un moment donné, ces médicaments peuvent susciter des effets secondaires qui rendent souvent mal à l'aise les patients sur le plan somatique.

Le deuxième type de réponse considèrait le VIH/SIDA comme une maladie mortelle causant beaucoup de décès.Cette réalité peut avoir une incidence majeure sur la santé mentale des PVVIH.Chaque individu a le désir de vivre.Quand une situation exogène entrave son avenir vital, cela peut entraver le bon fonctionnement psychique de la personne.Quand le sujet pense à demain, il peut imaginer une éventuelle mort proche ou lointaine.Dans certains cas, cela peut engendrer le stress, l'anxiété et la dépression.D'une part, le caractère mortel de la maladie peut susciter l'humeur dépressive chez le sujet.D'autre part, quand la personne prend conscience qu'un jour la chronicité de la maladie finira par mettre un terme à sa vie, cela peut augmenter l'humeur dépressive de la personne ce qui pourra susciter une perte d'intérêt pour les activités quotidiennes.Ces deux éléments sont deux symptômes importants de la dépression.Dans le cas des troubles de l'humeur chez les PVVIH, la considération des personnes face au VIH peut expliquer le résultat de la dépression.Par exemple, un de nos interviewés nous a confié ceci : «?Quel que soit ce que l'on peut dire de cette maladie, c'est une maladie drôle » ; « Dieu a créé chaque personne avec une espérance de vie, tout ce qui arrive, c'est avec la permission de Dieu. » Donc, quel qu'en soit la maladie qu'une personne puisse avoir, elle vivra le temps qui a été prédestiné par Dieu?» Il qualifie cette maladie de drôle, mais soutient que dans la mesure où le sujet suit son traitement son espérance de vie ne sera pas réduite.La considération qu'il porte au VIH pourrait affecter son psychisme, il voit que c'est une maladie drôle.Cependant, pour faire face à cette réalité cette personne fait du refoulement comme mécanisme de défense.Pour pouvoir apaiser la douleur psychique que cela peut provoquer qui se manifeste souvent par une humeur dépressive, certains sujets refoulent la réalité que le VIH/SIDA a un caractère mortel.Par exemple, un autre sujet voyait le VIH comme une maladie mortelle dans un premier temps et une fièvre dans un second temps.En réalité, le VIH n'est pas une simple fièvre, mais une maladie mortelle et chronique.Pourtant, au fil du temps, cette patiente, pour minimiser les impacts psychologiques de la séropositivité elle voyait cette infection comme une simple fièvre.Cependant, cette considération qu'elle a de cette maladie peut l'aider à mieux faire face à l'expérience de la séropositivité contrairement aux patients qui le considèraient comme une maladie mortelle ou une maladie qui peut mettre mal à l'aise.De ce fait, les impacts psychologiques ne seraient pas les mêmes. 

La troisième catégorie de réponse concerne une réponse solitaire qui voyait plutôt le VIH/SIDA comme une maladie contagieuse contractée surtout lors des rapports sexuels non protégés. Ce participant nous a confié que c'est une maladie que l'on peut contracter à cause de la débauche et par manque de prudence. C'est probablement par rapport à ses expériences personnelles ou celles de ses pairs séropositifs qu'il a une telle perception du VIH. Ces expériences peuvent susciter le regret qui peut se manifester par des sentiments de culpabilité qui constituent un symptôme de la dépression. Les souvenirs de ces expériences peuvent déclencher une humeur dépressive, mais essentiellement des sentiments de culpabilité.

Donc, la considération que les personnes séropositives ont du VIH/SIDA soulève l'impact que cette maladie peut avoir sur la santé mentale du sujet en question. Cela peut les aider à faire face à leur expérience de séropositivité.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld