CONCLUSION
L'objet de ce chapitre était d'identifier les facteurs
théoriques de l'exclusion bancaire du côté de la demande
des services bancaires.
Cette démarche nous a alors permis de recenser des
barrières aussi bien sociodémographiques, qu'économiques
qui entravent l'inclusion financière de la grande masse.
On peut retenir qu'au Cameroun, l'exclusion bancaire est
engendrée par :
- les barrières
sociodémographiques suivantes : l'âge, le genre, l'origine
ethnique, la culture, le niveau d'éducation, le lieu de résidence
et le degré de confiance dans les institutions bancaires ;
- les barrières économiques
relatives à l'absence de revenu régulier et au coût
élevé des produits et services proposés par les banques.
Ces barrières poussent les personnes pas ou mal servies à opter
pour l'alternative du secteur financier non bancaire, qu'il soit formel ou
non.
Les résultats ainsi trouvés feront l'objet d'une
évaluation empirique dans le chapitre suivant.
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Les facteurs de l'exclusion bancaire au Cameroun
CHAPITRE 4 : L'EVALUATION EMPIRIQUE DES FACTEURS LIES A
LA DEMANDE DE SERVICES BANCAIRE
INTRODUCTION
Le chapitre liminaire nous a permis de mettre en perspective
l'état du débat théorique sur les facteurs qui structurent
et modulent l'exclusion bancaire au Cameroun. Il en ressort que ces derniers
sont aussi bien d'ordre sociodémographique qu'économique.
Toutefois, l'on ne saurait se limiter à une approche
théorique pour affirmer que lesdits facteurs expliquent effectivement
l'exclusion bancaire au Cameroun. Ainsi, importe-t-il de confronter ces
éléments théoriques à la réalité des
faits à travers une évaluation empirique conséquente.
Pour ce faire, nous nous inspirons du modèle
logit34 simple utilisé par Allen, Demirguc-Kunt, Klapper et
Peria (2012) pour déterminer les causes l'exclusion financière
dans 123 pays, dont le Cameroun.
Dans leurs travaux, l'exclusion bancaire est mesurée
par trois indicateurs, à savoir : la détention d'un compte dans
une banque ou toute autre institution financière formelle, l'utilisation
de ce compte pour épargner et la fréquence mensuelle d'usage
dudit compte.
L'idée est de déterminer le niveau de
corrélation qui existe entre l'exclusion financière et un
ensemble de variables explicatives préalablement identifiées dans
la littérature. Ces variables comprennent des caractéristiques
institutionnelles (la stabilité politique, la protection des
consommateurs, la gouvernance etc) et individuelles (le coût des
services, les exigences documentaires, la distance, la confiance et la
pauvreté).
34 le choix du logit est guidé l'avantage
que possède ce modèle de générer des rapports de
chance, ceux-ci rajoutent de la certitude aux résultats de
l'estimation.
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Les facteurs de l'exclusion bancaire au Cameroun
L'objectif de ce chapitre est donc d'évaluer,
grâce à l'approche d'Allen et al., (2012), l'influence de quelques
facteurs sociodémographiques et économiques sur l'exclusion
bancaire au Cameroun. Le choix desdits facteurs est régi uniquement par
la disponibilité des données.
Le présent chapitre s'articule autour de deux sections
parties : la première présente le modèle empirique et les
données ; la seconde porte sur l'estimation du modèle, la
présentation et l'interprétation des résultats.
SECTION I- La présentation du modelé et
des données de l'analyse
I.1- la présentation du modèle analytique
Le modèle utilisé par Allen et al. (2012) est le
suivant :
'
y ij* = x i j fl + z ' ij I +
8 ij
y ij = 1 si y1 * > 0
yij = 0 si *
yij < 0
Où i et j désignent
respectivement les pays et les individus, *
y1 ij est une variable
latente qui représente l'exclusion bancaire, xij
est un vecteur de caractéristiques institutionnelles, z1
ij est un vecteur de caractéristiques individuelles,
â et ã sont des
vecteurs de paramètres et å1ij est un
terme d'erreur normalement distribué, de moyenne nulle et de variance
égale à 1.
En estimant leur modèle par la méthode du
maximum de vraisemblance, ils arrivent au résultat selon lequel il
existe une corrélation entre l'exclusion financière d'une part et
l'âge, la pauvreté, l'éducation, le lieu de
résidence, le statut matrimonial et la confiance. Ces facteurs varient
en sens inverse de l'exclusion.
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Les facteurs de l'exclusion bancaire au Cameroun
Il convient d'apporter quelques précisions d'ordre
méthodologique avant de présenter le modèle analytique,
dans la mesure où notre approche diffère de celle sus
présentée en trois points.
D'abord, une différence est observée au niveau
du champ de l'étude. En effet, si les auteurs sus évoqués
étudient l'exclusion financière, qui est un concept beaucoup plus
large, nous nous limitons uniquement à l'exclusion du système
bancaire classique. Cela tient au fait que le système bancaire
camerounais est la seule composante opérationnelle du système
financier, les marchés financiers étant encore à un
état embryonnaire.
Ensuite, nous n'utilisons que deux indicateurs pour mesurer
l'exclusion bancaire. Si le premier est identique à celui retenu dans le
modèle de référence, le second en revanche est
différent. Ce second indicateur est la détention d'une carte de
paiement35.
Enfin, notre étude est menée dans un seul pays :
le Cameroun. Par ailleurs, compte tenu du fait que dans cette partie de notre
travail nous nous intéressons uniquement à l'impact des
caractéristiques individuelles sur l'exclusion bancaire, la variable qui
capte les effets fixes liés aux pays est exclue.
Ces distinctions faites, la spécification du modèle
peut à présent être donnée.
Supposons l'existence d'un caractère qualitatif qui
peut prendre K modalités disjointes ; Si K=2, on dit que la variable est
dichotomique36. Exemple: avoir un compte ou ne pas avoir de
compte.
Dès lors, on peut représenter un
caractère qualitatif dans le cadre d'un modèle
économétrique. En prenant le cas qui consiste à avoir un
compte ou non, on définit la variable y par :
35 Nous nous référons en effet à la
classification de Constans (2006) présentée en introduction et
qui établit trois niveaux d'exclusion, à savoir la possession
d'un compte bancaire, la détention de moyens de paiement
nécessaires à l'usage dudit compte et l'accès au
crédit
36 Dans le cas général K ? N* on dit que la
variable est polytomique.
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Les facteurs de l'exclusion bancaire au Cameroun
y = {1 si l'invididu possède un compte et 0 sinon.
Si P représente la probabilité qu'un individu
possède effectivement un compte, alors P n'est rien d'autre que
l'espérance mathématique de y : P = E(y).
L'objectif du modèle choisi est alors d'expliquer la
survenue de l'événement considéré en fonction d'un
certain nombre de caractéristiques observées pour les individus
de l'échantillon. Il s'agit donc précisément de
spécifier la probabilité d'apparition de cet
événement.
Supposons que l'on dispose de N observations y1 d'une variable
endogène codée yj = 1 ou yj = 0 par convention et soit x
= (x ... x '), un vecteur ligne de variables exogènes associées
à la variable endogène y.
Le logit linéaire simple s'écrit : y1 = x + e.
Où å~ est un vecteur de termes d'erreur gaussiens
supposés identiquement et indépendamment distribués,
tandis que â désigne un vecteur colonne
de K paramètres inconnus.
Dans la littérature économique, il est
établi que la régression logistique permet, au travers de la
méthode du maximum de vraisemblance, d'estimer les paramètres,
d'évaluer la précision de l'estimation, de mesurer le pouvoir
explicatif du modèle, de vérifier s'il existe une liaison
significative entre l'ensemble des variables explicatives et la variable
dépendante, d'identifier les descripteurs pertinents et donc
d'évacuer les variables non significatives (Rakotomalala, 2014).
La vraisemblance correspond spécifiquement à la
probabilité d'obtenir l'échantillon ? à partir d'un tirage
dans la population. La méthode du maximum de vraisemblance consiste
à produire les paramètres â de la régression
logistique qui rendent maximum la probabilité d'observer cet
échantillon.
Nous effectuerons donc une régression logistique de
manière à identifier les facteurs les plus statistiquement
pertinents de l'exclusion bancaire au Cameroun.
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Les facteurs de l'exclusion bancaire au Cameroun
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