Réflexions sur la problématique du coup d'état en Afrique.( Télécharger le fichier original )par Koffi Afandi KOUMASSI Université de Lomé - Master 2 en Droit Public Fondamental 2015 |
2-) Une architecture institutionnelle contingentéeLa première embûche tient à la précellence de la Conférence sur les dossiers de coup d'État. Organe suprême de l'Union aux termes de l'Art. 6-2 de l'Acte, la Conférence des Chefs d'État et de gouvernement détient le monopôle exclusif de tout le volet politique de l'Union. Elle intervient en amont et en aval de toutes les initiatives en matière de changement inconstitutionnel de gouvernement. Mais son caractère éminemment politique reflue négativement sur la gestion réaliste des situations de crise par l'UA. Ainsi la prédominance sans égal de la Conférence, composée des chefs d'État « hostiles à la volonté de l'UA de promouvoir rapidement et de manière inconditionnelle la démocratie sur le continent, l'organisation d'élections libres et transparentes, et surtout la limitation du mandat présidentiel »203(*) est une obstruction à la politique d'endiguement des coups d'État prônée par l'organisation continentale. Secrétariat de l'Union, la Commission de l'UA dépend fortement de la Conférence204(*) dont elle est l'organe d'exécution. A ce titre, ses pouvoirs sont lamentablement amincis au sein du dispositif anti coup d'État au point d'avoir été identifiée à « un corps malade » en janvier 2008. C'est la Conférence qui lui indique la conduite à tenir dans la prise des décisions. En tant qu'organe intégré, la Commission ne peut rien entreprendre de sa propre initiative qui outrepasse la volonté des chefs d'État. La Commission est constamment prise entre l'enclume des organes interétatiques et le marteau du Président en exercice de l'Union. A. Bourgi avait déjà entrevu cette mésaventure de la Commission lorsqu'il affirmait que « (...) aujourd'hui comme hier, l'exécutif de l'organisation a bien du mal à s'affranchir de la tutelle des États membres. L'extension de ses attributions et le rôle d'impulsion qui lui est reconnu, y compris dans les domaines relevant de la compétence de la Conférence de l'Union, du Conseil exécutif ou du Conseil de paix et de sécurité, ne le mettent pas à l'abri des pressions exercées par les États membres, notamment à travers le Comité des Représentants permanents »205(*). A n'en point douter, le challenge de l'UA en matière de lutte contre les coups d'État semble être une révolution avortée. Les innovations normatives manquent de pertinence. L'architecture institutionnelle rénovée ne produit pas les résultats escomptés à cause du mauvais échafaudage du système. La défaveur du contexte politique accentue les peines de l'UA dans son engagement (paragraphe II). * 203 A.-J. ADÉLOUI, « L'Union Africaine et la reconnaissance des gouvernements anticonstitutionnels », op. cit., p. 18. * 204 Aux termes des Art. 20 de l'Acte, 11 du Statut de la Commission et 4 du Règlement intérieur de la Conférence de l'Union, c'est la Conférence qui détermine la structure, les attributions et les règlements de la Commission. En clair, elle nomme le Président et le Vice-président ainsi que tous les autres Commissaires, sur proposition du Conseil exécutif pour ces derniers, et met fin à leurs fonctions. Ce mode de désignation des Commissaires est un mal pour cet organe car « le choix d'une personnalité importante en Afrique ne peut se faire de manière démocratique (...) ». Ce choix ne peut que « donner lieu à des manoeuvres où se manifestent les alliances d'État politiquement proches les uns des autres ». Y. E. AMAÏZO, « Qui va diriger l'Union Africaine ? », Afrique International, n° 346, septembre 2001, pp. 33-34. * 205 A. BOURGI, « L'Union Africaine entre textes et réalité », op.cit., p. 339. |
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