Session Octobre 2014
Université Paris-Est Marne-la-Vallée
Master Management
Spécialité Gestion des Ressources Humaines et
Mobilité Internationale
Le parrainage : un outil d'insertion professionnelle
L'exemple de Disneyland Paris et les jeunes
diplômés de Nos Quartiers ont des Talents
Présenté par Moon Torbey
Sous la direction de Catherine Maman
Maître de conférences en Sciences
économiques et co-responsable du Master 2 en GRH et Mobilité
Internationale
Session Octobre 2014
Université Paris-Est Marne-la-Vallée
Master Management
Spécialité Gestion des Ressources Humaines et
Mobilité Internationale
Le parrainage : un outil d'insertion professionnelle
L'exemple de Disneyland Paris et les jeunes
diplômés de Nos Quartiers ont des Talents
Présenté par Moon Torbey
Sous la direction de Catherine Maman
Maître de conférences en Sciences
économiques et co-responsable du Master 2 en GRH et Mobilité
Internationale
Je soussignée Moon Torbey certifie sur l'honneur que
les travaux soumis en mon nom dans ce mémoire sont le fruits de mes
propres efforts et réflexions personnels et que toute idée ou
tout document utilisé pour étayer ce travail et ne constituant
pas une réflexion personnelle, est en conséquence, cité en
référence.
Remerciements
Tout d'abord, je tiens à remercier ma directrice de
mémoire, Catherine Maman, pour son parfait encadrement dans la
réalisation de ce Mémoire. Je souhaite aussi remercier mon
maître d'apprentissage, Youcef Alem pour son fort soutien, son
écoute, sa confiance et ses conseils judicieux qui m'ont permis de
réussir en toute sérénité.
Ensuite, je tiens à remercier le département
Diversité et Inclusion de Disneyland Paris pour m'avoir accueillie en
tant qu'apprentie. Grâce à cette expérience et aux missions
confiées, j'ai pu confirmer mon souhait d'aller le plus loin possible
dans le management de la diversité en milieu organisationnel. Merci donc
à Youcef Alem qui m'a encadrée et m'a permis de réaliser
mon travail dans les meilleures conditions, ainsi que l'ensemble des personnes
impliquées dans la diversité qui ont répondu à
toutes mes questions avec patience.
Je souhaite aussi remercier l'équipe
pédagogique, particulièrement Sylvie Chevrier pour ses
enseignements utiles en management interculturel et ses remarques constructives
concernant la rédaction de ce Mémoire.
Sommaire
Introduction ..1
Partie 1 : Présentation du contexte de
recherche et de la problématique du sujet .2
1. La problématique 2
2. Les hypothèses de recherche .2
3. Conclusion de la première partie 3
Partie 2 : Revue de la littérature
4
1. Définitions de la diversité .4
2. Management de la diversité ..4
2.1. L'approche relative aux valeurs de l'entreprise .5
2.2. L'approche en termes de positionnement
stratégique de la fonction RH .6
3. Discrimination à l'embauche 6
3.1. La France, un grand pays d'accueil des migrants de
longue durée 6
3.2. L'immigration et le chômage en France 7
3.3. La réponse de la France à l'immigration :
la territorialisation 8
3.4. Les critères de disparités d'accès
à l'emploi 10
4. Conclusion de la deuxième partie .12
Partie 3 : Le département Diversité et
Inclusion et le partenariat avec l'association NQT
1. Le département Diversité et Inclusion de
Disneyland Paris et ses trois phases d'action 13
1.1. Phase 1 : Rendre conscient la valeur Diversité
13
1.2. Phase 2 : Passer de la culture de la diversité au
management de la diversité 14
1.3. Phase 3 : Pérenniser la diversité au coeur
des valeurs d'entreprise 15
2. Présentation du partenariat DLP/Nos Quartiers ont
des Talents .16
2.1. Présentation de l'association NQT 18
2.2. Quelques chiffres concernant l'association 18
3. Le dispositif du parrainage 19
3.1. La sélection des parrains et marraines DLP 19
3.2. Les différents types de zones : ZUS, ZRU, ZFU
..20
3.3. Le déroulement du parrainage 20
3.4. Les différents motifs de fin du parrainage .21
3.5. Le suivi post-parrainage ..24
Partie 4 : La méthodologie empirique de
l'enquête de terrain
|
25
|
1. L'identification des participants et la description du process
|
25
|
2. Les modalités de réalisation des entretiens
|
26
|
3. L'analyse des entretiens
|
26
|
3.1. Le codage des données
|
.26
|
3.2. La création des catégories d'analyse
|
27
|
Partie 5 : Analyse qualitative des entretiens
|
28
|
1. Les résultats des entretiens avec les parrains et les
marraines
|
..28
|
1.1. Les raisons d'implication des parrains et marraines dans le
dispositif
|
28
|
1.2.Le bilan post-parrainage
|
30
|
1.3.Les compétences nécessaires selon les parrains
et marraines
|
..31
|
1.4.Les difficultés rencontrées par les parrains et
les marraines
|
35
|
1.5.Les apports du parrainage selon les parrains et les marraines
|
.35
|
1.5.1. Remise en question des qualités de manager
|
36
|
1.5.2. Développement de certaines pratiques
managériales
|
37
|
1.5.3. Le lien entre le parrainage et la notion de traitement
égalitaire
|
38
|
1.5.4. Le lien entre le parrainage et la responsabilité
sociale de l'entreprise
|
.38
|
2. Les résultats des entretiens avec les filleules
|
40
|
2.1. L'état d'esprit des filleules à
l'entrée dans le parrainage
|
.40
|
2.2. Le bilan post-parrainage
|
.41
|
2.3. Les compétences nécessaires pour être
parrain ou marraine selon les filleules
|
.42
|
2.4. Les difficultés rencontrées par les filleules
|
43
|
3. Les conseils et suggestions des filleules et des marraines et
parrains
|
43
|
4. Discussion des résultats et conclusions analytiques
|
46
|
4.1.Première question de recherche : le rôle du
parrainage dans la remise en question des
compétences managériales 46 4.2.Deuxième
question de recherche : comment cette action est-elle bénéfique
pour les
filleuls 48
Conclusion .50
Bibliographie Annexes
1
Introduction
En France, près de 6 500 réclamations pour
discrimination ont été enregistrées en 20121,
deux fois moins qu'en 2010. Pour la première fois depuis la
création de la Halde en 2005, l'origine ethnique n'est plus le premier
critère de discrimination invoqué par les plaignants (22,5 %).
C'est à présent l'état de santé et le handicap
(25,9 %) qui sont les premiers motifs de réclamations. L'emploi reste le
domaine de réclamation majoritaire (51,5 %).
Nous pouvons nous interroger sur la signification de ces
évolutions. Y a-t-il moins de réclamations pour discrimination
parce que notre société devient de plus en plus inclusive et la
diversité des profils de plus en plus normale? Est-ce possible que le
critère de l'origine ethnique soit devenu de moins en moins
problématique grâce à la territorialisation et aux actions
positives mises en place ces dernières années?
Une entreprise comme Disneyland Paris où des
salariés d'une centaine de nationalités différentes se
côtoient quotidiennement et travaillent auprès de clients du monde
entier, est une entreprise où la diversité est naturellement
présente et qui se doit d'aborder ce sujet de société.
Ainsi, en 2008, avec l'implication entière de la direction, le
département Diversité et Inclusion de l'entreprise a
élaboré un plan d'action opérationnel et ambitieux pour
lutter contre la discrimination et pour promouvoir la diversité et
l'égalité de traitement.
En 2009, l'entreprise a signé un partenariat avec
l'association « Nos quartiers ont des talents » et s'est
lancée dans une longue aventure pour accompagner des jeunes
diplômés issus de quartiers prioritaires à trouver un
emploi. Quatre ans plus tard, cette action de parrainage atteste d'un bilan
positif avec un taux de réussite de 65% ; raison pour laquelle
l'entreprise a décidé de la reconduire pour trois ans mais cette
fois-ci avec l'objectif ambitieux d'accompagner un total de 200 filleuls dans
leur recherche d'emploi.
Nous présenterons le contexte de recherche dans un
premier temps. Ensuite nous présenterons plusieurs définitions de
la diversité, deux approches du management de la diversité ainsi
qu'une revue de la littérature sur les discriminations à
l'embauche en France. La troisième partie sera consacrée à
la présentation du contexte organisationnel ainsi que le dispositif du
parrainage. Nous nous pencherons ensuite sur l'enquête de terrain. Enfin
nous exposerons les résultats des entretiens réalisés avec
2 marraines, 2 parrains et 3 filleules en réponse aux questions de
recherche posées et nous présenterons les axes
d'améliorations proposés pour faire évoluer le dispositif
de parrainage à Disneyland Paris.
1 Rapport annuel 2012 du Défenseur des
Droits.
2
Partie 1 : Présentation du contexte de recherche
et de la problématique du sujet
Dans ce mémoire, je vais donc me focaliser sur l'action
de parrainage dans le cadre du partenariat entre Disneyland Paris et
l'association Nos Quartiers ont des Talents (NQT). Ce choix a été
fait pour deux raisons : premièrement parce qu'il s'agit d'un projet
majeur dont j'étais en charge pendant toute la durée de mon
apprentissage et deuxièmement, parce qu'il s'agit d'une action qui
impacte plusieurs sphères à la fois : l'entreprise et son image,
les parrains et les marraines, et les jeunes diplômés de NQT. En
partant de ce contexte, je vais poser, dans les paragraphes suivants, la
problématique du mémoire ainsi que les hypothèses qui en
découlent.
1. La problématique
Dans sa Politique de Diversité et d'Inclusion,
Disneyland Paris s'est engagée à contribuer à l'insertion
professionnelle en accompagnant plus de 200 jeunes diplômés dans
leur recherche d'emploi sur 3 ans.
Le bilan de ces 5 dernières années étant
extrêmement positif de part de son taux de réussite (65%), la
question est de savoir quels sont les impacts de cette action sur la
responsabilité sociale de l'entreprise, sur ses parrains et marraines et
sur les filleuls parrainés.
Plus précisément, le parrainage permet-il une
remise en question du parrain sur sa qualité de manager ? Ce dispositif
permettrait-il aux parrains et aux marraines de développer certaines
compétences managériales ? Si oui, lesquelles ?
Qu'en pensent les filleuls ? Et de quelle manière cette
action peut-être bénéfique pour eux ? Quelles sont les
difficultés qu'ils ont rencontrés et comment le parrainage les
à aider à les surmonter ?
2. Les hypothèses de recherche
Concernant les parrains et marraines
Hypothèse 1 : le dispositif de
parrainage permettrait aux parrains et aux marraines de remettre en question
leurs qualités de manager.
Hypothèse 2 : certaines
compétences telles que la capacité d'écoute, la
disponibilité et l'attitude bienveillante sont nécessaires pour
pouvoir être marraine ou parrain.
Hypothèse 3 : le dispositif de
parrainage permettrait aux parrains et aux marraines de développer
certaines pratiques managériales.
3
Hypothèse 4 : le dispositif de
parrainage permettrait aux parrains et aux marraines de prendre conscience de
l'importance du traitement égalitaire.
Concernant les filleuls
Hypothèse 5 : l'accompagnement de la
part des parrains et des marraines redonneraient confiance aux filleuls et les
remotiveraient dans leur recherche d'emploi.
Hypothèse 6 : le réseau des
parrains et des marraines faciliterait l'accès à l'emploi des
filleuls. Hypothèse 7 : certaines compétences
telles que la capacité d'écoute, la disponibilité et
l'attitude bienveillante sont nécessaires pour pouvoir être
marraine ou parrain.
3. Conclusion de la première partie
Le partenariat avec l'association NQT est un exemple probant
de l'engagement de Disneyland Paris en faveur de la diversité et de
l'inclusion. Impliquant plus de 100 acteurs internes et externes à
l'entreprise, il fera l'objet d'une enquête de terrain ayant un
intérêt à la fois pratique et théorique:
-sur le plan de la pratique, elle va relever les apports du
parrainage autant pour les parrains et marraine et les filleuls que pour
l'entreprise.
-sur le plan de la recherche en management d'actions de
parrainage pour l'insertion professionnelle, elle vise à
développer le peu d'études francophones ayant montré les
effets positifs du parrainage en entreprise.
4
Partie 2 : Revue de la littérature
1. Définitions de la diversité
Bender et Pigeyre (2003)2 définissent la
diversité en milieu organisationnel comme « la capacité
d'une entreprise à déployer tout le potentiel d'une main-d'oeuvre
hétérogène dans un environnement de travail qui n'exclut
personne ». Cette définition met l'accent sur le respect des
intérêts individuels et fait de l'entreprise un lieu de
développement de tous les potentiels humains sans distinction.
La diversité peut reposer sur des attributs observables
tels que le sexe, l'âge, l'origine ethnique réelle ou
supposée et le handicap, ou non observables comme l'orientation
sexuelle, les convictions religieuses et l'origine sociale, mais tous sont
rattachés à l'être humain.
Cornet et Delhaye (2005)3 proposent par exemple une
vision très extensive des composants de la diversité et
distinguent cinq caractéristiques de diversité non exclusives:
? Les caractéristiques physiques visibles
(âge, couleur de peau, sexe, taille, poids...)
? Les caractéristiques physiques fonctionnelles
(handicap, grossesse, taille, poids...)
? Les «caractéristiques individuelles
liées à l'histoire de vie de l'individu»
(expérience,
degré de maîtrise de certaines langues, orientations
sexuelles)
? Les caractéristiques sociales
(appartenance à un groupe ou un environnement social:
nom, prénom, langue maternelle, lieu de vie, orientations
politiques, nationalité...)
? Les caractéristiques organisationnelles
(appartenance à un métier ou une organisation)
On observe ainsi une conception de la diversité
hétérogène selon le secteur, le contexte, l'environnement,
la culture et la stratégie de l'organisation.
2. Le management de la diversité
Pour certains auteurs, le management de la diversité
est l'étape postérieure à la promotion de la
diversité : une fois promue, la diversité doit être
gérée pour apporter une valeur ajoutée à
2 Bender, A.F. (2003). « Egalité professionnelle
ou gestion de la diversité: Quels enjeux pour l'égalité
des chances ? » Revue Française de Gestion. Vol. 151.
3 Cornet A., Delhaye C. (2005), Gestion de la
diversité : la nécessaire articulation entre l'économique
et l'éthique ? Revue Entreprise et Éthique, Dossier n°23
« Quelle éthique pour l'égalité professionnelle
femmes-hommes ? », octobre 2005.
5
l'entreprise. D'après Thomas et Ely (1996)4, le
management de la diversité laisse l'organisation intérioriser les
différences parmi ses employés de telle sorte qu'elle apprend et
grandit grâce à elles. « Nous sommes tous dans la
même équipe avec nos différences et non malgré
elles. » 5 En vue de tout ce qui précède, la
définition de Keil et al. (2007) du management de la diversité
semble être la plus adaptée :
« Le Management de la Diversité est le
développement actif et conscient d'un processus d'acceptation et
d'utilisation de certaines différences et similarités comme
potentiel de l'entreprise. Il s'agit d'un processus de communication et de
management, orienté vers l'avenir, stratégique, guidé par
la recherche de valeur ajoutée pour l'entreprise. »6
Le management de la diversité répond à
une logique proactive qui consiste à prévenir les discriminations
à travers la reconnaissance et la valorisation des différences.
C'est-à-dire que pour s'inscrire dans la promotion de la
diversité, l'entreprise s'engage dans tout un ensemble de politiques et
pratiques visant le respect, l'inclusion et le traitement égalitaire de
tous. D'où la nécessité pour l'entreprise d'être au
clair à deux niveaux : d'une part, ses valeurs et d'autre part, le
positionnement stratégique de sa fonction RH.
2.1. L'approche relative aux valeurs de l'entreprise
Les cadres et les employés apportent à leur
environnement de travail les codes de comportement et les normes de leur propre
culture. Ces normes et ces valeurs déterminent les processus
organisationnels et les pratiques managériales. Les pratiques
managériales concernent la manière dont les managers traitent les
problèmes dans leurs organisations, comment ils délèguent
leur autorité, attribuent les récompenses, prennent des
décisions, décrivent les postes, mettent en oeuvre des programmes
par exemple d'amélioration de la qualité.
La gestion de la diversité est une «
démarche managériale visant à faire évoluer les
représentations pour éliminer tout comportement discriminatoire
dans l'entreprise et instaurer une culture de la tolérance qui permette
l'inclusion de chacun avec ses apports et ses
4 Ely, R. et Thomas, A.D. (1996). Making differences
matter: A new paradigm for managing diversity. Harvard Business Review.
5 Citation de Ely, R. et Thomas, A.D. (2001). Dans
« Cultural diversity at work : the effects of diversity perspectives on
work group processes and outcomes. Administrative Science Quarterly, Vol.
46(2).»
6 Keil et al. (2007). Manuel de formation pour le
Management de la Diversité. International Society for Diversity
Management. [En ligne]URL :
www.idm-diversity.org
6
différences » (Bender, 2003)7.
Une démarche pro-diversité est donc un processus de changement de
culture et de valeurs et s'inscrit donc dans le long terme.
Certains apports de la psychologie du travail (Erez,
2006)8, ont montré que les valeurs différentes d'une
entreprise avaient un impact conséquent sur ses pratiques
managériales. Mais les managers et les professionnels ne sont pas
toujours conscients de ce fait. Ce qui nous renvoie à la
nécessité d'assurer l'accompagnement approprié d'un tel
changement organisationnel pour permettre une prise de conscience
préalable à l'action contre la discrimination et à la
promotion et au management de la diversité.
2.2. L'approche en termes de positionnement
stratégique de la fonction RH
En considérant la gestion de la diversité comme
une démarche managériale, l'accent est également mis sur
la nécessité pour les entreprises de prendre en compte leurs
pratiques de management. Si nous considérons que les attitudes et les
comportements requis de la part du personnel ne sont pas les mêmes en
fonction des différents types de stratégies adoptées par
l'entreprise, nous pouvons supposer que les politiques RH qui sont
censés conduire à l'adoption de ces attitudes et comportements
spécifiques varieront également en fonction de la
stratégie.
Dans cette optique, « la diversité ne pourra
se constituer en avantage concurrentiel qu'à condition de mettre en
oeuvre une gestion responsable des ressources humaines et une refonte globale
des procédures RH destinées à définir un nouveau
modèle de leadership plus attentifs à la pluralité des
profils et des itinéraires des individus. » (Bruna,
2011)9.
3. Discrimination à l'embauche
3.1. La France, un grand pays d'accueil des migrants de
longue durée
En 2013, selon les estimations de l'ONU et de l'OCDE, 232
millions de personnes sont considérées comme immigrées
dans le monde, soit 3,2 % de la population totale (contre 2,9 % en
7 Bender, A.F. (2003). Egalité professionnelle ou gestion
de la diversité: Quels enjeux pour l'égalité des chances ?
Revue Française de Gestion. Vol. 151.
8 Miriam Erez. (2006). « Le management
interculturel » dans RH : les apports de la psychologie du travail.
Tome 2 : Management des organisations. Lévy-Leboyer, C., Louche,
C., Rolland, J.P. Editions d'Organisation.
9 Bruna, M.G. (2011). Diversité dans
l'entreprise : d'impératif éthique à levier de
créativité. Management & Avenir. Vol.43. DOI :
10.3917/mav.043.0203
7
1990)10. L'Europe reste la première
destination (72 millions) devant l'Asie (71 millions) et l'Amérique du
Nord (53 millions).
Comment la France se situe-t-elle dans ce contexte ? Est-ce
qu'elle reste encore une terre d'accueil importante ? Offre-t-elle des
perspectives d'intégration sur le marché du travail tant pour les
immigrés arrivés récemment que pour ceux
déjà installés ainsi que leurs enfants ? Comment se
positionne la France face aux principaux enjeux que soulèvent les
migrations ?
La France figure parmi les principaux pays d'accueil des
migrants de long terme au sein de la zone OCDE. Les migrations familiales sont
prépondérantes dans la plupart des pays de l'OCDE11
mais ce phénomène est particulièrement marqué en
France, tout comme en Suède et aux Etats-Unis. Les migrations en
provenance d'Algérie ont toujours pour principale destination la France.
Il n'en va pas de même pour les ressortissants originaires du Maroc et de
la Tunisie qui se dirigent également vers l'Espagne et l'Italie mais
aussi en Belgique et en Allemagne.
De plus en plus de pays considèrent que les
étudiants internationaux constituent un vivier potentiel de migrants
hautement qualifiés et instruits. Leur nombre n'a pas cessé
d'augmenter dans les pays de l'OCDE pour atteindre 2.3 millions en 2008, soit
une hausse d'environ 5 % par rapport à l'année
précédente. Parmi ces étudiants internationaux, plus de 18
% (environ 410 000) viennent de Chine, 7 % d'Inde (163 000) et 5 % de
Corée (110 000).
La France est un des plus grands pays d'accueil des
étudiants étrangers (en quatrième position après
les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l'Allemagne avec 221 600 étudiants
étrangers de l'enseignement supérieur en 2003). Ces quatre pays
accueillent à eux seuls plus de 50% de tous les étudiants
étrangers dans le monde. Dans le cas de la France, les étudiants
en provenance d'Afrique prédominent (47%) suivis des étudiants
originaires des autre pays de l'OCDE (21%) et de l'Asie (15%).
3.2. L'immigration et le chômage en France
Les immigrés constituent une part importante et
croissante de la force de travail de la plupart des pays de l'OCDE même
si leur taux d'activité reste généralement
inférieur à celui des autochtones. Les enfants d'immigrés
rencontrent dans plusieurs pays de l'OCDE des difficultés
10 OCDE et ONU, « World Migration in Figures, A
joint contribution by UN-DESA and the OECD to the United Nations High-Level.
Dialogue on Migration and Development », octobre 2013.
11 Les pays de l'OCDE en 2014 sont : Allemagne,
Australie, Autriche, Belgique, Canada, Chili, Corée, Danemark, Espagne,
Estonie, Etats-Unis, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Irlande, Islande,
Israël, Italie, Japon, Luxembourg, Mexique, Norvège,
Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République
slovaque, République tchèque, Royaume-Uni, Slovénie,
Suède, Suisse, Turquie.
8
pour s'insérer sur le marché du travail, avec
des situations plus difficiles en France et en Allemagne qu'en Suisse, aux
Etats-Unis et au Danemark.
Selon le ministère de l'Intérieur, on compte en
2011, 2,5 millions de travailleurs immigrés en France. Le vieillissement
des populations, l'apparition de pénuries de main-d'oeuvre et le
désintérêt pour certaines professions dans les pays de
l'OCDE laissent présager un retour accru à l'immigration de
travail dans les années à venir. Avec la perspective de recourir
à l'avenir à un plus grand nombre d'immigrés,
l'intégration des nouveaux arrivants et de ceux qui résident
déjà sur le territoire ainsi que les membres de leur famille
constitue un autre enjeu majeur des politiques migratoires.
Cette vue d'ensemble, relativement positive, ne doit toutefois
pas occulter les obstacles entravant l'accès à l'emploi des
immigrés qualifiés. Les rapports de taux de
déclassement12 - c'est-à-dire le fait d'exercer un
emploi moins qualifié que le niveau d'instruction ne permettrait
théoriquement d'envisager - mettent en évidence le fort
déclassement des immigrés comparé aux autochtones dans les
pays d'Europe du Sud (Italie, Grèce et, dans une moindre mesure,
Portugal et Espagne), ainsi que dans certains pays d'Europe du Nord
(Norvège et Suède). Ces écarts sont moins accentués
aux Etats-Unis, en France, au Royaume-Uni et en Suisse13.
3.3. La réponse de la France à l'immigration
: la territorialisation
En 1993, la discrimination positive était
déjà l'objet d'une critique, on lui reprochait de viser les
politiques spécifiques destinées aux exclus, ce qui tendraient
à les enfermer dans un statut d'exception stigmatisant.14 En
1994, l'appellation « territorialisation » s'est imposée,
éclipsant toute référence de discrimination positive dans
le discours officiel.
Comme nous l'avons vu, la France a une longue histoire
d'immigration basée essentiellement sur les besoins de main d'oeuvre
dans les années 1920 puis dans les années 196015. Les
recherches sur les disparités n'ont pourtant pas été
développées avant les années 1990. Comme le souligne
Garner-Moyer en 200316, ce sont surtout les difficultés des
jeunes issus de l'immigration sur le marché du travail, remettant en
cause le principe de l'égalité républicaine des
Français indépendamment de leur origine, qui ont suscité
les premières recherches empiriques sous la pression de la demande
sociale.
12 J. Robin (2012). Mesure et facteurs explicatifs du
déclassement
13 Perspectives des migrations internationales, OCDE
2006
14 « Les pièges de l'exclusion ». Robert Castel,
Lien social et Politiques, n°34, 1995.
15 Daguet et Thave, 1996.
16 Garner-Moyer H. [2003], « Discrimination et
emploi : revue de la littérature », Document d'études de la
Dares, 69, 128 p.
9
Lorsqu'est apparu la notion de « discrimination positive
territoriale », elle a pu laisser penser que le territoire n'avait d'autre
fonction, dans la politique de la ville que de cibler des groupes ethnique pour
leur attribuer un avantage catégoriel. Ainsi, la notion de politique de
ville est devenue synonyme de « donner plus aux territoires qui ont moins
», et de manière indirecte, aux populations qui y
résident.17
Certaines mesures d'accès à l'emploi, tel que
les quotas d'embauche d'habitants en contrepartie des exonérations
accordées aux entreprises implantées dans les zones franches
urbaines par exemple, laissent supposer que la catégorie «
quartiers prioritaires » a été
délibérément conçue pour accorder un avantage
spécifique à leurs habitants, notamment aux « jeunes issus
de l'immigration », en compensation du racisme et de la discrimination
dont ils sont victimes.18
Le mécanisme de compensation des « handicaps
territoriaux » cherchait à « assurer, à chaque citoyen,
l'égalité des chances sur l'ensemble du territoire », en
garantissant notamment « l'égal accès de chaque citoyen aux
services publics » (article 1er de la loi du 4 février
1995).
- L'apparition des zonages : la loi du 1er août
2003
La loi du 1er août 2003 a affirmé l'objectif,
pour la politique de la ville, de « réduire des
inégalités sociales et des écarts de développement
entre les territoires ». Les écarts concernent à la fois la
population et le territoire en tant que tel, l'urbain (enclavement, logement,
transport, etc.), l'économique (emploi, qualité de l'offre
commerciale, intégration de fonctions économiques dans le tissu
urbain, etc.) et le social (insertion, formation, réussite scolaire).
La politique de la ville a progressivement engendré
différents types de zonages précédemment
évoqués (ZUS, ZRU, ZFU et quartiers prioritaires). Les avantages
attachés à ces zones ont pour finalité principale le
développement de l'emploi, le maintien du logement au sein de ces
quartiers, et la diversité de la population y résidant.
- La récente réforme des quartiers
prioritaires
La ministre en charge de la politique de la ville a
présenté, le 17 juin 2014, la carte de la nouvelle
géographie prioritaire de la politique de la ville. Désormais,
une seule carte de la géographie
17 « Les adaptations du principe d'égalité
à la diversité des territoires », Revue française de
droit administratif, septembre-octobre 1997.
18 « Les jeunes des quartiers se cachent pour vieillir.
Représentations sociales et catégories de l'action publique
». Patrick Simon, VEI Enjeux, n°121, juin 2000.
10
prioritaire remplace les différents zonages
antérieurs (zones urbaines sensibles, zones franches urbaines, zones de
redynamisation urbaine, etc.).
1300 quartiers répartis sur 700 communes sont retenus
pour bénéficier des crédits de la politique de la ville.
Pour déterminer la liste des quartiers prioritaires, le gouvernement a
pris en compte le revenu des habitants, comparé au revenu médian
de référence. Pour cela, l'Institut national de la statistique et
des études économiques (Insee) a procédé à
un quadrillage de 200 mètres sur 200 mètres du territoire. Sur
cette base, l'Insee a défini les concentrations urbaines de
pauvreté. Il est intéressant de noter que leurs territoires
concernés se situent tant en quartiers périphériques des
grandes agglomérations, qu'en centre-ville pour certains ou encore en
ville moyenne. « C'est la réalité de la pauvreté en
France, loin d'être cantonnée aux territoires
périphériques des grandes villes, qui apparaît ainsi au
grand jour. »19
Tous les quartiers ont vocation à sortir à terme
de ces dispositifs d'exception. La politique de la ville étant une
politique de transition, on peut se demander si cette nouvelle réforme
permettra aux quartiers connaissant les dysfonctionnements les plus importants
de devenir, grâce à la concentration des efforts publics, des
quartiers comme les autres ? Dans l'avenir, entendrons-nous encore parler des
disparités d'accès à l'emploi des « jeunes des
banlieues20 » ?
3.4. Les critères de disparités
d'accès à l'emploi21
Rappelons qu'en 2009, selon un rapport22 du
Défenseur des Droits (anciennement la Halde), les discriminations
fondées sur l'origine étaient la première cause de saisine
(27%), suivies de l'état de santé et du handicap (19%) devant le
sexe et l'âge.
Aujourd'hui en 201423, les principaux
critères de discriminations au travail renvoient avant tout au sexe
(30%) et à la grossesse ou la maternité (20%). Les victimes
citent ensuite leur origine ethnique (27%) ou leur nationalité (19%)
comme source de leur discrimination.
19 « La nouvelle géographie de la
politique de la ville ». Dossier de presse du17 juin 2014
20 L'utilisation de cette expression fait
référence au livre de Dhoquois, Anne, Paroles libres de jeunes de
banlieue, 2011, Paris, Broché.
21 Insertion professionnelle et discriminations :
l'accès à l'emploi des étudiants issus de l'immigration en
région Provence - Alpes - Côte d'Azur
22 Il s'agit de la
quatrième édition du guide « Des pratiques pour
l'égalité des chances : que répondent les entreprises
à la HALDE ? » publié par la HALDE en 2010.
23 Il s'agit du rapport de l'Ifop intitulé «
Baromètre sur la perception des discriminations au travail - Janvier
2014 ».
11
Lors du processus de recrutement, l'incertitude
informationnelle est importante, les perceptions des recruteurs sur les
aptitudes des individus sont imparfaites et pas uniquement fondées sur
des caractéristiques « visibles » telles que le diplôme
initial ou la durée de l'expérience professionnelle.
L'évaluation des candidats peut être alors basée sur les
croyances des employeurs plutôt que sur les capacités productives
des individus. Plusieurs études se sont consacrées à
l'étude de ce phénomène.
Les Français issus de l'immigration sont victimes de
discrimination et éprouvent plus de difficultés à
effectuer un parcours professionnel comparable à ceux des autres
Français.
Dans une étude réalisée en 2006, Amadieu
a voulu démontrer le poids sur la décision du recruteur que
pouvaient avoir des critères tels que l'origine ethnique (par le
patronyme), le lieu de résidence, le sexe, l'apparence physique, la
situation de handicap et l'âge. Une totalité de 1806 CV ont
été envoyés, dont 258 ont reçu une réponse.
Les résultats ont montré que sur les 258 réponses, 75
concernent le candidat standard - « homme, nom et prénom
français, résidant à Paris, blanc de peau, apparence
standard ». Ce chiffre représente 29% des réponses. Dans ce
mémoire, nous allons uniquement nous centrer sur deux résultats
en particuliers : ceux qui démontrent des disparités de
l'accès à l'emploi selon le critère de l'origine ethnique
ainsi que le lieu de résidence.
- Pour critère d'origine ethnique (le
patronyme)
Selon les résultats de l'étude d'Amadieu, seules
14 réponses concernent un candidat dont le nom et prénom sont
maghrébin, ce qui représente seulement 5% des réponses
totales reçues.
Une autre étude réalisée en 2006 a
également mis en évidence ces disparités. Par exemple, les
résultats d'une étude de « Testing » sur des postes de
commerciaux24 ont montré qu'une candidate d'origine
maghrébine a obtenu trois fois moins de réponses positives que
les deux candidats de référence. Pourtant, à la lecture
seule de son CV, elle surclassait les autres candidats puisqu'elle était
major de promotion et encadrait une équipe. Les auteurs ont
expliqué ce résultat en disant que le fait qu'elle soit une femme
d'origine étrangère joue en sa défaveur, prouvant ainsi
que les variables se cumulent pour limiter davantage l'accès à
l'emploi.
Une enquête du Bureau International du Travail (BIT)
confirme ces résultats :
- Dans 28% des cas, l'employeur donne des réponses
différentes aux deux candidats, 3 fois sur 4 au détriment du
candidat d'« origine maghrébine » ou d'« origine noire
africaine ».
24 Hennequin & Karakas (2006). « Les discriminations
au travail : mise en évidence de l'accès
différencié à l'emploi, le cas des commerciaux ».
12
- 4 fois sur 5, le candidat d'« origine hexagonale
ancienne » est favorisé par rapport à un candidat
supposé d'« origine maghrébine » ou d'« origine
noire africaine ».
- Pour critère de lieu de
résidence
Selon l'étude d'Amadieu, 45 réponses concernent
un candidat résidant au Val Fourré à Mantes-la-Jolie
considéré par l'INSEE25 comme un des quartiers les
plus défavorisés, ce qui représente un total de 17%.
Une étude de l'Observatoire national des zones urbaines
et sensibles26, publiée en juin 2013, montrait ainsi qu'une
«bonne» adresse pouvait tripler les chances d'être
convié à un entretien d'embauche. L'étude, qui s'appuyait
sur des « Testing » réalisés entre octobre 2011 et
février 2012 par l'envoi de 3000 CV fictifs à des offres d'emploi
dans la restauration, montrait un « effet 93 » flagrant: pour une
même annonce, le taux de réponses favorables passait de 20% pour
un candidat résidant à Paris à 10% pour un résidant
en Seine-Saint-Denis.
Selon une autre étude de l'IFOP27
réalisée en octobre 2013 auprès de 1004 personnes de
l'Organisation internationale du travail, 77 % des diplômés des
zones urbaines sensibles considèrent qu'habiter dans un quartier
populaire est un inconvénient dans leur recherche d'emploi.
L'idée de l'intégrer dans la loi cheminait depuis une
recommandation du Conseil économique, social et environnemental en 2008.
Elus et associations de quartier tentaient de faire reconnaître ces
inégalités dont sont victimes les habitants des quartiers pauvres
et stigmatisés.
4. Conclusion de la deuxième partie
La présentation de ces statistiques semblait être
importante pour situer le contexte social actuel et pour présenter
l'état des discriminations au travail. Disneyland Paris n'est pas la
première ni la dernière entreprise à s'engager dans une
démarche de promotion de la diversité. De plus en plus
d'entreprises s'inscrivent aujourd'hui dans une telle démarche, prennent
des mesures pour lutter contre les discriminations et essayent de promouvoir la
diversité. Ce qui caractérise tout de même Disneyland
Paris, est son mode de fonctionnement en toute transparence et sa tendance
à mobiliser les ressources internes plutôt qu'externes en
plaçant les Cast Members au centre des actions.
25 Rapport « Recensement de la population 2007
» de l'Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques.
26 Observatoire national des zones urbaines sensibles,
rapport 2013.
27 « Enquête sur la perception des discriminations par
les demandeurs d'emploi ». Note de synthèse de l'IFOP. Octobre
2013
13
Partie 3 : Le département Diversité et
Inclusion de Disneyland Paris et le partenariat avec l'association NQT
1. Le département Diversité et Inclusion
de Disneyland Paris et ses trois phases d'action
Les actions mises en place pour la promotion de la
diversité à Disneyland sont de plus en plus nombreuses depuis
2008 et sont de plus en plus intégrées dans le fonctionnement de
l'entreprise, aussi bien dans les ressources humaines qu'au niveau
opérationnel. La diversité de talents, de cultures et de
richesses individuelles des Cast Members est à la source même de
la créativité à Disneyland Paris. Mais comment est
née cette démarche ? Quelles sont les actions mises en place et
qui sont les acteurs impliqués ?
En 2008, l'entreprise a fait le choix de commencer à
aborder concrètement le sujet de la discrimination avec ses
salariés. Youcef Alem, nouvellement nommé responsable
Diversité et Inclusion à l'époque a rédigé
la première politique « Diversité » de l'entreprise et
y a détaillé un plan d'action en trois phases.
1.1. Phase 1 : Rendre conscient la valeur Diversité
- Diagnostic & initialisation
Cette première phase a démarré par une
enquête de grande envergure. Youcef Alem a fait appel à l'Agence
Nationale pour la Cohésion Sociale et l'Egalité des chances
(ACSE) pour l'accompagner dans cette aventure. Ainsi, un bus itinérant,
baptisé « la Caravane de la Diversité », a parcouru
pendant deux semaines les coulisses de Disneyland Paris pour permettre
l'expression du plus grand nombre possible de ses salariés sur leur lieu
de travail. Disneyland Paris a ainsi permis à environ 540028
de ses collaborateurs de donner librement leur opinion et de dresser un
état des lieux complet des pratiques en matière de
diversité dans leur entreprise. Les résultats ont montré
que Disneyland Paris est perçu comme une entreprise diverse et ouverte
à tous. 91% des salariés ayant répondu à
l'enquête, estiment que les questions liées à la
diversité sont importantes et 87% d'entre eux ont affirmé leur
souhait de s'impliquer et de devenir acteurs du sujet Diversité.
Bien que ces résultats soient relativement rassurants,
l'entreprise a été surprise par les 18% ayant
déclarés avoir déjà été témoin
ou victime d'un acte discriminatoire commis par un collègue ou un
supérieur hiérarchique. Le département Diversité et
Inclusion a donc décidé de se lancer dans un travail de fond sur
la question et d'entamer une réflexion sur les meilleurs moyens
28 5400 salariés ont répondu à
l'enquête, ce qui représente presque 40% de l'effectif total en
2008.
14
d'accompagner ces 1026 personnes (les 18%) et de
prévenir de futures cas de discrimination en mettant les Cast Members au
centre du processus. Cette première phase a permis à l'entreprise
de prendre conscience que la diversité existait mais que le principal
défi était de trouver le moyen et outils de la manager.
1.2. Phase 2 : Passer de la culture de la diversité
au management de la diversité
Pour aborder le sujet du management de la diversité,
l'entreprise s'est fixé cinq leviers :
- Levier 1 : Participation et dialogue
Suite aux constats de « la Caravane de la
Diversité », quatre groupes de réflexion ont
été constitués. Chaque groupe était composé
de 15 Cast Members représentatifs de la diversité au sein de
Disneyland Paris (en matière d'origine, sexe, âge, orientation
sexuelle, situation de handicap. A l'issue de neuf mois de travaux en 2010
accompagnés par un cabinet de consultantes externes expertes dans la
matière1, au cours desquels Disneyland a
réalisé un état des lieux qualitatif sur la lutte contre
les discriminations et la promotion de l'égalité des chances au
travail, les groupes ont porté auprès du Comité Central de
la Diversité1 cinq propositions, dont celle de créer
une instance d'accueil, d'écoute et d'accompagnement. Cette proposition
a été validée et après plus d'un an de travail sur
les procédures, la méthodologie, la déontologie et le
fonctionnement, l'instance « I.D.E.(c)M. » Instance pour la
Diversité et l'Egalité des Cast Members a été
officiellement inaugurée en septembre 2011.
- Levier 2 : Sensibilisation et formation
Tous les nouveaux salariés de l'encadrement assistent
à une formation délivrée par des experts de «
Théâtre à la carte29 » visant à
sensibiliser, rassurer et former sur les thèmes de nondiscrimination
dans une démarche en faveur de la diversité.
- Levier 3 : Communication
Depuis 2009, plus de 150 présentations ont
été délivrées à l'ensemble des
salariés. Le nombre de personnes qui ont été
sensibilisées à la politique Diversité de Disneyland Paris
est estimé à 8964 salariés.
29 http://www.theatrealacarte.fr/
15
- Levier 4 : Mesure de la diversité
Il s'agit ici de définir des indicateurs de mesure
appropriés pour pouvoir évaluer l'avancement du sujet dans
l'entreprise. Pour l'instant les seuls indicateurs dont dispose le
département diversité et inclusion sont les plaintes
reçues par l'instance « I.D.E.(c)M. ». Par ailleurs, en 2015,
la « Caravane de la Diversité » sera relancée afin
d'évaluer les progrès en terme de nondiscrimination et
d'inclusion.
- Levier 5 : Organisation et structure
Lancé pour la première fois en 2010, le
Comité Central de la Diversité est un groupe de personnes
(membres de la direction et salariés de différents
métiers) dont le rôle est de définir la stratégie du
département diversité et inclusion, d'assurer le pilotage du plan
d'action à trois ans et de s'assurer que le management de la
diversité s'intègre dans les pratiques managériales
quotidiennes en mettant à la disposition de l'encadrement les moyens et
outils nécessaires. Dans ce levier, est également incluse la
nomination de 45 Relais-Diversité. Ce sont des salariés qui ont
souhaité s'impliquer dans le sujet de la diversité et qui
bénéficient de 14 heures de délégation mensuelles
pour le faire. Ces Relais-Diversité travaillent dans l'instance
I.D.E.(c)M. qui sera présentée plus bas.
? L'instance I.D.E.(c)M.
Ce projet fut considéré comme une réelle
innovation dans le domaine de la Diversité, car aucune autre entreprise
n'avait préalablement instauré une instance d'écoute et de
traitement des discriminations, portée par les salariés pour les
salariés. L'instance I.D.E.(c)M. a été créé
afin d'être une instance interne et amiable, complémentaire
à l'ensemble des autres dispositifs internes existants (services des
ressources humaines, mission handicap, assistante sociale, médecine du
travail, organisations représentatives du personnel, etc.), tout en
étant spécialisée sur la lutte contre les discriminations,
afin d'être en mesure de favoriser l'égalité des chances et
de traitement. » Depuis son ouverture officielle en septembre 2011,
I.D.E.(c)M. a reçu plusieurs dossiers de plaintes pour
discrimination.
Le bilan de cette deuxième phase a permis à
l'entreprise de poser les jalons du management de la diversité.
16
1.3. Phase 3 : Pérenniser la diversité au
coeur des valeurs d'entreprise ; 2014 - 2016
Suite à l'étude des dossiers de plaintes pour
discrimination, l'instance I.D.E.(c)M. a pu repérer que les motifs des
plaintes les plus fréquents sont liés à l'origine et au
sexe et que la majorité des discriminations concernent
l'évolution de carrière et l'égalité de traitement.
Ces éléments ont permis à l'entreprise de commencer
à cibler les populations et les thématiques concernées.
Pour faire ceci, Disneyland a décidé de se lancer dans un
deuxième travail de réflexion et de faire de nouveau appel au
cabinet d'expertise pour réaliser un état des lieux, mais cette
fois-ci de manière plus ciblée. Ainsi quatre groupes de
réflexion ont été constitués selon les familles de
métiers.
Les résultats qui sortiront de ces groupes de
réflexion ainsi que les résultats des dossiers d'I.D.E.(c)M.
permettront la construction d'un plan de formation et de sensibilisation
partant des préoccupations des managers et de leurs
réalités de terrain.
Sans aucune garantie de réussite, Disneyland Paris
s'est fixé un plan d'action ambitieux sur les trois prochaines
années, dont l'objectif principal est de passer d'une promotion de la
diversité à un véritable management de la diversité
et de positionner cette dernière comme une compétence essentielle
et déterminante pour être membre de l'encadrement. La question
maintenant est de savoir comment faire en sorte que la « Diversité
et l'Egalité » deviennent des compétences
managériales transmissibles et évaluables.
« Ce sont dans nos pratiques managériales
quotidiennes que nous devons désormais être exemplaires. Chaque
membre de notre encadrement doit pouvoir être porteur des valeurs de
l'entreprise, se les réapproprier et les appliquer au quotidien au sein
de ses équipes. Notre mission est donc de donner les outils permettant
cette responsabilisation et ce portage collectif, pour que le management de la
diversité devienne une réalité. »30
2. Présentation du partenariat Disneyland Paris
/ Nos Quartiers ont des Talents
Le 3 mars 2009, un partenariat a été
signé entre DLP et Nos Quartiers Ont Des Talents pour aider des jeunes
diplômés dans leur insertion professionnelle. Les 15 premiers
parrains et marraines, membres du Comité Exécutif, y compris le
président de DLP, Philippe Gas et quelques vice-présidents et
directeurs, ont accompagné 74 filleuls dont 48 ont trouvé un
emploi grâce à ce parrainage.
30 Editorial de Daniel Dreux, vice-président
des Ressources Humaines de Disneyland Paris dans le document « Politique
Diversité et Inclsuion, plan d'action 2014-2016 ».
17
En octobre 2013, Disneyland Paris a donc décidé
de reconduire ce partenariat sur 3 ans et s'est engagée cette fois-ci
à nommer 100 parrains et marraines pour encadrer plus de 200 filleuls.
L'objectif du parrainage est que le filleul31 trouve un emploi (CDI
ou CDD long) ou une solution de long terme (réorientation,
formation...). Le parrain oeuvre à redonner confiance au filleul,
répond à ses questions liées au métier, l'aide
à réfléchir sur le réalisme de sa perception, sur
ses méthodes de recherche et le met en relation avec les personnes
idoines pour ce faire. Certains d'entre eux acceptent de suivre tous types de
profils, y compris ceux qui ne sont pas dans leurs domaines d'activité
actuels.
Une des exigences et des forces de ce parrainage réside
dans le fait que chaque parrain et marraine est tenu de faire rencontrer au
moins 3 personnes de son réseau externe à son filleul.
La deuxième force de ce dispositif se trouve dans la
multiplicité des possibilités de parrainage. En effet, la
relation parrain/filleul se co-construit entre ces deux acteurs, le rythme de
rencontre et le mode de communication se définissent en fonction des
préférences de ceux-ci. Il existe toutefois des objectifs qu'un
parrain ou une marraine s'engage à remplir :
- aider son filleul à construire les outils
nécessaires à la recherche d'emploi (CV, lettre de
motivation...) ;
- contribuer à la compréhension des codes
sociaux de l'entreprise et permet une vision
réaliste du monde du travail ;
- guider dans la méthodologie de recherche
et la mise en oeuvre (ciblage des canaux d'accès
ou supports de recherche, planning de relances, stratégie
de réseau, ...) ;
- permettre de simuler des situations d'entretien
(présentation, valorisation, gestion de la
relation) et de mesurer le niveau de préparation ;
- favoriser le développement de la
confiance en soi ;
- inciter à l'auto-évaluation et
au positionnement par rapport à un poste
identifié
- analyser les atouts, préparer la
communication et l'argumentaire ;
- ouvrir dans la mesure du possible son réseau
professionnel, interne et externe et faciliter
les contacts.
En résumé, ce qui est attendu des parrains et
marraines, c'est d'apporter aux jeunes diplômés une approche
pertinente du marché du travail et surtout de leur redonner confiance en
eux. Une filleule évoque le rôle qu'elle attend d'un parrain ou
d'une marraine :
31 L'emploi du masculin a
été choisi pour alléger le texte.
18
« Il est là pour te remonter le moral et te
redonner de la valeur, valeur que tu as peut-être à la base, mais
que tu perds petit à petit quand tu vois des portes se fermer.
»
2.1. Présentation de l'association NQT32
Nos Quartiers ont des Talents a été
créée à l'initiative des entreprises adhérentes du
MEDEF 93 Ouest, sous l'impulsion de son président Yazid CHIR, alors
vice-président Prospective Cloud d'Orange Business Services et de
Raynald RIMBAULT, alors Délégué Général. NQT
vise à accompagner des jeunes demandeurs d'emplois diplômés
de l'enseignement supérieur (Bac+4 et plus et Bac+3 dans certains cas),
âgés de moins de 30 ans, issus des quartiers prioritaires de la
politique de la ville33 ou de milieux sociaux
défavorisés dans leur insertion professionnelle.
L'association organise des actions concrètes (forums,
ateliers coaching, rencontres entreprises,...) qui permettent de
décliner en pratique le principe d'égalité des chances :
donner à tous les mêmes opportunités d'accéder
à un emploi adapté à leurs profils et obtenu par le
mérite en facilitant les échanges entre jeunes
diplômés, cadres et dirigeants d'entreprises. Disneyland Paris et
NQT partagent des valeurs communes, celles de l'entraide et de
l'égalité des chances, qui font de ce partenariat une action
socialement responsable qui avait toutes ses raisons d'être
déployée.
2.2. Quelques chiffres concernant l'association
? 21 080 jeunes intégrés en cumul depuis 2006
En collaboration avec les différents
partenaires-mécènes (entreprises, Pôle emploi,
établissements d'enseignement supérieur, médias...), NQT
accompagne tous les mois, un grand nombre de jeunes diplômés (Bac
+ 4 et plus voire Bac+3 et plus dans certains territoires) à la
recherche d'un emploi à la hauteur de leur qualification.
32 Pour plus d'information, veuillez-vous rendre sur le site web
: http://www.nqt.fr/
33 Selon l'Institut National de la Statistique et des Etudes
Economiques, les quartiers prioritaires caractérisent la population qui
est dans une situation défavorisée : chômage
élevé, faibles revenus, forte pauvreté, surpopulation des
logements. Parmi ces quartiers se trouvent ceux définis depuis 1996, les
zones urbaines sensibles, qui demeurent en difficulté malgré
l'action publique, et les nouveaux quartiers prioritaires, définis en
2006, et dont la situation est plus hétérogène.
19
? 5 510 parrains et marraines
L'association compte tous les mois entre 50 et 100 nouveaux
parrains/marraines. De nombreuses d'autres entreprises font partie de ce
partenariat telles que : Orange, BNP Paribas, Carrefour, Crédit
Agricole, SNCF, Société Générale et beaucoup
d'autres.
? 72% de jeunes sont recrutés sur un poste à la
hauteur de leur qualification
Grâce à son réseau national de
parrains/marraines, NQT permet aux jeunes diplômés de trouver un
emploi à la hauteur de leur qualification. Ce pourcentage a atteint les
74% dans le cadre du partenariat de NQT avec Disneyland en 2009. Cette
année, suite à la reconduction du parrainage en avril 2014, sur
les 22 filleuls actuellement parrainés à Disneyland, 7 ont
déjà trouvé un emploi.
3. Le dispositif du parrainage
3.1. La sélection des parrains et marraines DLP
La sélection des parrains et des marraines s'est faite
en plusieurs étapes. Dès mon arrivée dans le
département Diversité et Inclusion, sous la responsabilité
de Youcef Alem, nous avons en binôme rencontré tous les managers,
senior managers, directeurs et vice-présidents que Youcef avait
préalablement identifiés selon les critères les suivants
:
- Il faut qu'ils aient un statut cadre (vice-président,
senior managers, managers, etc.)
- Il faut qu'ils aient un réseau extérieur
étoffé
- Il faut que leur parcours professionnel soit en rapport avec
le métier visé par les filleuls. Pour cela, il est demandé
aux parrains et marraines lors de leur inscription en ligne sur le site de NQT,
de décrire leur métier et de noter toutes leurs
compétences annexes.
- Et il faut bien sûr qu'ils fassent preuve
d'implication dans le sujet de la diversité (ayant
précédemment participé à des groupes de travail sur
la diversité, montrant un intérêt pour le sujet, etc.) et
qu'ils puissent se montrer disponibles et à l'écoute de leurs
filleuls.
Lors de nos rencontres avec les marraines et parrains, nous
les avons informés des grandes lignes du parrainage, en leur
communiquant la procédure de fonctionnement et en leur expliquant leurs
rôles et missions. Suite à cette rencontre, un mail de relance
leur a été envoyé. Ce courriel avait pour but de les
informer de la procédure d'inscription (directement sur le site
internet) ainsi que de leur communiquer la liste de tous les parrains et
marraines actuels afin qu'ils puissent entrer
en contact avec eux s'ils le souhaitaient. Il leur a
également été précisé qu'ils allaient
recevoir une première sollicitation de la part de leurs filleuls dans
les 15 jours suivants leur inscription.
- La sélection des filleuls
Dans les clauses du partenariat, il a été
convenu que NQT se charge d'identifier les filleuls et que je m'assure de
l'adaptation du profil de ces derniers avec le profil des parrains et des
marraines. Ainsi, à chaque affectation de nouveaux filleuls, je
reçois les CV de ces derniers pour vérification. Les
critères définis par NQT pour la sélection d'un filleul
sont les suivants :
- Moins de 30 ans ;
- Bac +4/5 (voire Bac +3) ;
- Qui soit en recherche active d'un emploi ;
- Qui ne soit pas en formation à temps plein ;
- Qui soit issu de zones urbaines sensibles (ZUS), zones
franches urbaines (ZFU), de quartiers prioritaires, ou de zones de
revitalisation rurale (ZRR) ;
- Bonne maîtrise de la langue française. Pour
vérifier ce critère l'association sélectionne les filleuls
ayant fait l'intégralité de leurs études lycéennes
en France.
3.2. Les différents types de zones : ZUS, ZRU,
ZFU34
100 ZFU
751 ZUS
435 ZRU
20
« ZUS ou Zones Urbaines Sensibles sont des zones
caractérisées par la présence de quartiers d'habitats
dégradés et par un déséquilibre accentué
entre l'habitat et l'emploi. Elles comprennent les zones de redynamisation
urbaine et les zones franches urbaines. »
« ZRU ou Zones de Redynamisation Urbaine sont des zones
confrontées à des difficultés particulières,
appréciées en tenant compte du nombre d'habitants du quartier, du
taux de chômage, de la proportion de jeunes de moins de 25 ans, de la
proportion des personnes sorties du système scolaire sans diplôme
et du potentiel fiscal des communes intéressées. »
« ZFU ou Zones Franches Urbaines sont des zones comptant
plus de 10 000 habitants particulièrement défavorisées au
regard des critères pris en compte pour la détermination des
zones de redynamisation urbaine ».
Une parenthèse semble nécessaire pour
présenter les différences entre les types de zonages
évoqués dans le schéma ci-dessous.
21
3.3. Le déroulement du parrainage
Chaque parrainage est unique. Il n'y a pas de
déroulement standard, encore une fois, chaque relation de parrainage se
construit entre le parrain et le filleul. L'attribution du filleul se fait par
l'association avec la validation de Youcef Alem et de moi-même ainsi que
de celle du parrain concerné. Le parrain s'inscrit en ligne en
précisant son métier et ses domaines de compétences,
ensuite l'association sélectionne les filleuls dont le profil est
adapté à celui du parrain. Il est important de préciser
que le profil est défini non seulement par le diplôme obtenu, mais
aussi par les expériences précédentes du filleul ainsi que
les domaines qui pourraient potentiellement l'intéresser. De la
même manière, le profil du parrain ou de la marraine est
défini par leurs domaines d'expertises actuelles à Disneyland,
mais aussi par les précédentes fonctions ou compétences
qu'ils ont été amenés à développer au fil de
leur parcours professionnel.
Il est recommandé que le parrain et son filleul aient
au moins un échange par mois afin d'assurer un réel suivi dans la
recherche d'emploi.
Les échanges peuvent prendre différentes formes
selon les besoins et les disponibilités des filleuls et du parrain ou de
la marraine : appels téléphoniques, e-mails, rencontres
physiques, réseaux sociaux, etc. Il n'y a pas de durée de
parrainage imposée. Un parrainage peut aller de quelques semaines
à six mois.
La reconduction du parrainage le 17 avril 2014 a
été lancée avec la nomination d'une première vague
de 22 parrains et marraines. Trois mois plus tard, au 15 juillet 2014, sur les
22 filleuls parrainés, 7 ont trouvé un emploi, et un filleul a
quitté le dispositif pour cause de départ à
l'étranger. Un bilan d'étape est prévu au mois d'octobre
avec tous les parrains et les marraines afin de faire un point sur l'action et
de permettre l'échange sur l'expérience de chacun et les points
d'amélioration du dispositif.
3.4. Les différents motifs de fin du parrainage
En règle générale, la relation de
parrainage prend fin lorsque le jeune a trouvé un emploi (CDD de 6 mois
minimum ou CDI à hauteur de ses qualifications). Il doit alors en
avertir l'équipe parrainage à NQT.
Cependant, l'association peut décider de mettre fin au
parrainage pour plusieurs raisons citées ci-dessous.
22
- L'indisponibilité du parrain ou du
filleul
Le parrainage peut être amené à prendre
fin, soit pour une raison d'indisponibilité professionnelle de la part
du parrain, soit pour une raison d'indisponibilité de la part du
filleul. Dans ce cas de figure, il est demandé au parrain et au filleul
d'en informer l'entreprise ainsi que l'association afin que le suivi
nécessaire soit fait. A Disney, depuis la reconduction du parrainage,
deux parrains nous ont informés de leur souhait de se mettre en
indisponibilité temporaire suite au parrainage de leur premier filleul.
Si le cas inverse se présente et que le filleul se montre peu
motivé et/ou peu assidu, le parrain doit également en informer
l'entreprise et l'association.
- L'absence de réponse du parrain ou du
filleul
Il arrive aussi que le parrainage prenne fin suite à
l'absence de réponse du parrain ou au contraire, du filleul. Cela a
déjà été le cas à Disneyland, où une
marraine s'est vue attribuer une filleule qui ne l'a jamais contactée.
Dans ce cas de figure, le parrain ou la marraine me font part de leur
expérience, j'en informe l'association, qui à son tour se charge
de relancer le filleul en question et de s'informer des raisons de cette non
réponse.
Le cas inverse peut également se produire, où le
filleul n'a pas l'occasion de rencontrer son parrain suite à la
non-réponse de ce dernier. Dans ce cas de figure, le filleul doit
immédiatement en informer l'association qui se chargera de lui attribuer
un autre parrain.
A Disneyland, nous n'avons pas rencontré ce cas de
figure. Cependant, lors d'un entretien avec une filleule extérieur
à Disney, j'ai appris qu'elle a vécu ce genre de situation avec
sa marraine :
« Ma marraine était très absente
à la fois psychologiquement et physiquement. Elle était
très débordée et semblait être
dépassée par le temps et les choses. Je pense que
psychologiquement je suis assez amère de cette deuxième
expérience. »
Et quand j'ai demandé à cette filleule comment elle
a vécu cette situation :
« Je pense que la personne doit être capable de
répondre à un email. Parce que non seulement on s'ajoute à
soi-même du stress en tant que parrain, mais si en plus on a la
volonté d'aider quelqu'un et qu'on n'y arrive pas on fait perdre de
l'espoir à la personne qui est en face. Moi en tant que chercheur
d'emploi, j'ai l'impression que c'est un prérequis à tout job.
»
23
- L'arrêt du parrainage par le parrain
Le parrain ou la marraine peut parfois être amené
à mettre fin à la relation de parrainage pour trois raisons :
- S'il considère que le jeune est « prêt
» pour une prise de poste et que le parrainage est arrivé à
son optimum. Ce cas de figure ne s'est pas produit à Disneyland, mais la
notion « d'être prêt » a bien été
explicitée dans le discours d'un des parrains :
« Ce qui va marcher c'est que la personne comprenne
ce dont elle a envie, qu'elle en ait vraiment envie qu'on l'accompagne dans
cette démarche et c'est ce que j'ai essayé de faire, mais encore
une fois moi j'ai eu un cas facile parce qu'elle était prête en
fait, sans le savoir, c'était peut-être le petit déclic qui
est arrivé au bon moment. »
- Si la relation de parrainage se trouve dans une impasse et
le parrain ou la marraine ne voit plus comment aider le jeune. Ce cas de figure
a récemment eu lieu à Disneyland où une marraine a
souhaité qu'on mette fin au parrainage entre elle et son filleul car
même après avoir essayé de l'aider de toutes les
manières : aide à la rédaction de son CV, à la
préparation des entretiens, mise en contact avec son réseau en
lui décrochant un entretien d'embauche, il semblait y avoir un certain
blocage de la part du filleul qui ne semblait démontrer aucune
motivation à bénéficier des conseils qu'on lui donnait et
à sortir du chômage. J'ai également eu l'occasion de
rencontrer ce cas de figure dans le discours d'une filleule extérieure
qui a raconté sa première expérience avec sa marraine :
« L'expérience que j'ai eue avec ma
première marraine était vraiment presque parfaite. C'était
quelqu'un qui était très impliqué, on s'envoyait des
emails régulièrement et on se voyait au moins, physiquement, une
fois par mois. C'est quelqu'un qui m'a vraiment ouvert son réseau, qui
n'a pas hésité à contacter ses anciens collègues.
Le problème c'est que les choses ne se décantaient pas et
même si j'avais pu développer mon propre réseau grâce
aux personnes qu'elles m'avaient présentées, au bout d'un an NQT
avec l'accord de ma marraine a décidé de m'attribuer une autre
marraine comme les choses se prolongeait et que ça ne bougeait pas, donc
ils se sont dit qu'ils allaient peut-être dynamiser un peu les choses en
changeant de marraine. Je pense que ce n'est pas une très mauvaise
idée non plus parce que c'est un avantage de découvrir d'autres
marraines, ça permet de découvrir d'autres personnes.
»
24
- Si le projet professionnel du filleul a évolué
: il suit une formation ; il part en VIE. D'ailleurs, à Disneyland un
filleul a quitté le dispositif parce qu'il a eu une opportunité
pour partir à l'étranger.
3.5. Le suivi post-parrainage
Lorsque le parrainage prend fin, les parrains et marraines
reçoivent un e-mail automatique de la part de l'association les
remerciant de leur implication dans ce dispositif et les informant du nouveau
statut d' « embauchés » des filleuls qu'ils ont
encadrés. Une lettre de remerciement nominative leur est
également adressée de la part de Daniel Dreux, le
vice-président des ressources humaines et des relations sociales
à Disneyland Paris, les remerciant de leur implication et les
félicitant de la réussite de leur filleul : «
J'espère que la réussite de ton filleul t'encouragera à
renouveler cette expérience et à en parler autour de toi, pour
que de nombreux autres jeunes puissent trouver ou retrouver le chemin de
l'emploi. »
Par la suite, le parrain ou la marraine peut informer
l'association de son souhait et de sa disponibilité pour un nouveau
parrainage.
25
Partie 4 : La méthodologie empirique de
l'enquête de terrain réalisé auprès des parrains et
marraines et des filleuls
1. Identification des participants et process
J'ai voulu qu'il y ait des « nouveaux » parrains et
marraines ainsi que des « anciens » qui avaient déjà
fait partie du parrainage en 2009. Avec l'aide de Youcef, nous avons ainsi
identifié les personnes avec qui j'allais m'entretenir :
- EV un nouveau parrain qui venait de terminer son premier
parrainage avec une filleule à DLP. Ce qui était
intéressant, c'est qu'il a avait déjà une longue
expérience en tant que parrain en dehors Disneyland Paris.
- GD un nouveau parrain qui venait de parrainer une filleule
au moment où l'entretien a eu lieu.
- NR une ancienne marraine qui a parrainé un grand nombre
de filleuls depuis 2009.
- SB une ancienne marraine qui a eu des expériences
très diverses avec des filleuls d'origine différentes.
Quant aux filleules, elles ont
également été sélectionnées pour
représenter des profils différents :
- JP est une ancienne filleule qui a fait partie du dispositif
en 2009 et a été embauchée à Disneyland Paris suite
à son parrainage.
- SM une nouvelle filleule à qui on venait d'attribuer une
marraine au moment de l'entretien. - AA une filleule extérieure à
Disneyland Paris.
Toutes ces personnes ont donc été
contactées d'abord par téléphone et plus tard, si
intéressées de participer à l'étude, par mail. Dans
le mail je détaillais davantage mon projet, et je précisais les
questions qui seraient abordées lors de l'entretien. J'invitais aussi
les personnes à me contacter en cas de questions ou de besoins
d'informations supplémentaires.35
Au cours de l'étude de terrain, un total de 7 entrevues
a été réalisé : 3 avec des filleules, 2 avec des
parrains et 2 avec des marraines. L'analyse est donc fondée sur un total
de sept échanges. Toutefois, en raison de la quantité
limitée de pages dans ce mémoire, la retranscription des
entretiens ne sera pas incluse dans le mémoire mais une analyse
qualitative très détaillée des échanges sera
réalisée.
35 Le mail d'invitation peut être trouvé
en annexe 1.
26
2. Les modalités de réalisation des
entretiens
Tous les entretiens ont été
réalisés entre le 11 Juillet et le 29 Juillet 2014, et leur
longueur varie entre 21 minutes et 59 minutes. Les entretiens ont
été préalablement testés sur un échantillon
de deux personnes pour vérifier que les questions étaient bien
compréhensibles et claires. Il était important que la personne
interrogée se sente à l'aise pendant l'entrevue, pour cette
raison, les entretiens ont été effectués selon les
préférences des personnes interrogées. En
conséquence, les quatre entrevues avec les marraines et les parraines
ont eu lieu dans leurs bureaux. Et les trois entrevues avec les filleuls ont eu
lieu dans des salles calmes et privées.
Afin d'être en mesure de me concentrer pleinement sur
les échanges avec les personnes interviewées, toutes les
entrevues ont été enregistrées avec le consentement des
personnes concernées. Pendant l'entretien je prenais également
des notes à l'aide d'un petit ordinateur qui me permettait d'avoir la
trame de l'entretien sous les yeux. Après chaque entretien, je
retranscrivais les échanges et les envoyaient aux personne
interviewées pour validation. Pour les personnes qui l'ont
souhaité, la grille d'entretien leur a été envoyé
préalablement à notre entretien. Ces grilles sont disponibles en
annexe 2.
3. L'analyse des entretiens
L'analyse qualitative des entretiens a été
réalisée par une analyse de contenu en trois étapes :
retranscription des entretiens, élaboration d'une grille d'analyse avec
des catégories et des sous-catégories, et codage des informations
recueillies.
J'ai utilisé l'analyse de contenu car elle m'a
semblé être la méthode la plus adaptée pour rendre
compte de ce qu'ont dit les interviewés de la façon la plus
objective possible et la plus fiable possible. Berenson (1952), son fondateur,
la définit comme « une technique de recherche pour la description
objective, systématique et quantitative du contenu manifeste de la
communication ».
3.1. Le codage des données
Avant de coder les données qualitatives retranscrites,
j'ai construit une grille d'analyse avec des catégories d'analyse. Ces
catégories n'étaient pas déterminées à
l'avance, seules des hypothèses de recherche avaient été
posées en amont des entretiens. Il s'agissait donc d'une « approche
ouverte et inductive de généralisation et d'abstraction des
données » selon Borg (2003). Ce qui veut dire que j'ai
procédé en lisant ligne par ligne pour généraliser
les données (processus
27
d'abstraction). Ensuite j'ai recherché les ensembles
similaires parmi ces données et les ai classé (par un code
couleur) et les ai comparé.
3.2. La création des catégories d'analyse
Les catégories d'analyse ont été
créées de manière à répondre aux
règles édictées par Berelson (1952), à savoir :
- L'homogénéité : les
catégories ont été définies de manière
à regrouper les idées de signification semblables.
- L'exhaustivité : toutes les
pensées des interviewés ont été codées,
aucune n'a été écartées de l'analyse.
- L'exclusivité : j'ai fait en sorte
que les catégories soient exclusives mutuellement les unes des autres,
c'est-à-dire qu'un thème ne puisse être classé que
dans une seule catégorie.
- L'objectivité : la règle
d'objectivité stipule qu'il ne doit pas y avoir de variation de
jugements entre les codeurs. L'application de cette règle n'a
malheureusement pas pu être contrôlée, comme j'ai
été la seule personne à coder les entretiens. J'ai tout de
même essayé d'écarter ma propre subjectivité de
l'analyse en me contentant de relater les verbatim et les témoignages
des interviewés pour chaque idée analysée.
- Enfin la pertinence : pour respecter la
condition de pertinence, le choix des catégories a été
fait de façon à répondre aux objectifs de
l'enquête.
28
Partie 5 : L'analyse qualitative des entretiens
Les résultats seront présentés en quatre
parties. Dans un premier temps, je présenterai les résultats des
entretiens avec les parrains et les marraines (les raisons de leur implication
dans ce dispositif, le bilan post-parrainage, les compétences
nécessaires pour être parrain ou marraine, les difficultés
rencontrées lors du parrainage, les apports du parrainage, et enfin
pourquoi ils considèrent que le parrainage est une action socialement
responsable).
Une deuxième partie sera consacrée à la
présentation des résultats des entretiens avec les trois
filleules (leur état d'esprit à l'entrée dans le
dispositif, le bilan post-parrainage, les compétences nécessaires
pour être parrain ou marraine, et les difficultés
rencontrées lors du parrainage).
Je présenterai dans une troisième partie les
conseils et suggestions proposés par les sept personnes
interviewées.
Avant de conclure le mémoire, les résultats
seront discutés et une conclusion analytique sera
présentée.
1. Les résultats des entretiens avec les
parrains et les marraines
1.1. Les raisons d'implication des parrains et marraines
dans le dispositif
Pour l'ensemble des parrains et des marraines, l'origine de
leur implication dans ce dispositif était d'aider les jeunes. Chaque
interviewé a présenté ses raisons personnelles.
Pour certains cela partait du désir d'aider, de
remotiver et de rassurer les jeunes diplômés. Ainsi NR par
exemple, dit qu'elle voulait « tendre la main » vers ces jeunes parce
que « tous ceux qu'elle a pu rencontrer étaient
dépassés, dépités par la situation et le contexte
économique dans lequel ils évoluent. ». Par ailleurs,
elle a fait un lien entre le fait d'être marraine et le fait d'être
parent : « il y a un élément important c'est que j'ai
des enfants et que eux-mêmes sont étudiants. D'échanger
avec eux me donnaient l'opportunité de mieux comprendre les jeunes
d'aujourd'hui. Et je me dis que finalement, ça pourrait être l'un
de mes fils. »
EV évoque une notion d'utilité : « moi
j'ai été beaucoup aidé quand j'ai commencé et je
sens une sorte de dette. Je vais aider les suivants, parce que comme ça
je me sentirai utile de ce point de vue-là. » Pour lui, «
il ne s'agit pas de favoriser ou de pistonner ou quoi que ce soit, mais il
s'agit de leur donner les bonnes informations aux bons moments pour qu'ils
passent cette transition entre la formation et le premier emploi de
manière sereine ». Parrain depuis 8 ans dans un autre
dispositif que celui proposé par NQT, EV dit avoir été
motivé par l'aspect
29
multiculturel proposé par l'association qui, selon lui,
« a un lien avec la diversité. Les jeunes qui passent par la
démarche de NQT sont atypiques, que ce soit pour leur origine
géographique, culturelle, ou religieuse. »
Il a également évoqué la notion de
culpabilité qui n'avait pas encore été abordée
jusque-là. Selon lui il faut combattre la culpabilité que peuvent
ressentir les jeunes diplômés qui veulent changer d'orientation :
« il y a une culpabilité qui se développe chez les
jeunes qui ont eu un premier emploi qui ne leur a pas plu ou à qui ils
n'ont pas plus. Ils se demandent s'ils doivent changer d'orientation ou s'ils
doivent au contraire s'obstiner, si c'est de leur faute. Et cette
culpabilité pour moi n'est pas acceptable pour la société.
» Un parrain au bon moment peut aider car, selon lui, « il
faut souvent être deux pour assumer ce genre de choses. C'est un
rôle d'orientation, de regard externe, et de déculpabilisation.
»
Nous vivons en effet dans un monde où tout est
investissement. Nos choix d'études ont un coût, nos
réorientations aussi. Par conséquent, il y a une certaine
pression lorsqu'on se retrouve face à une envie de changer de
discipline. Il est vrai que les conseils mais surtout le soutien d'un parrain
ou d'une marraine dans ces moments de doutes peuvent être d'une grande
aide. Un auteur, Kramer (1985)36, a parlé du
bénéfice que peut avoir une relation «
mentor/protégé » en disant qu'elle a pour
principaux objectifs d'accroitre la performance du «
protégé » et, de manière concomitante, de
faciliter sa progression de carrière. Il explique cela en disant qu'une
telle relation « renforce l'identité, le sentiment de
compétence et l'efficacité dans le rôle professionnel
». Selon lui, cette dimension de la relation émerge de la
« construction d'un lien personnel, affectif entre le mentor et le
protégé où l'identification au mentor joue un rôle
central ».
Finalement, SR dit faire partie de ce dispositif car il s'agit
de sujets qui font écho pour elle et qui la touche. Elle dit avoir
« envie d'accompagner » et « qu'il faut trouver des
solutions. » Elle décrit le parrainage comme étant
« un échange, une rencontre avec quelqu'un » dont
elle semble tirer une sorte d'apprentissage personnelle : « moi j'aime
les gens, notre relation avec les autres fait partie de ce qui nous fait
grandir, c'est quelque chose qui est important. On apprend de tout le
monde. » Elle explique plus tard que son parcours personnel l'a
également motivée à faire le choix d'être marraine :
« depuis mes études je vis dans un monde d'homme, c'est le fait
d'être confrontée depuis longtemps à la différence
et au traitement égalitaire qui m'a motivée à accompagner
des jeunes. »
36 Abonneau David et Campoy Eric, «
Étude de la relation d'apprentissage à travers le prisme du
mentorat : fonctions de mentorat et rôle médiateur de l'engagement
sur l'intention de quitter », Revue de gestion des ressources
humaines, 2014/1 N° 91, p. 29-42.
30
1.2. Le bilan post-parrainage
Deux sortes de bilans post-parrainage ressortent : d'un
côté, les prises de conscience de certains parrains et marraines.
D'un autre côté, les éléments pouvant constituer un
obstacle au bon déroulement du parrainage.
- Les prises de conscience
Suite à son premier parrainage, une marraine a dit
prendre conscience qu'elle « était utile » et qu'elle
« amenait de la valeur très concrètement au-delà
de la relation humaine qui se créée. »
Une autre marraine dit qu'elle a rencontré deux
exemples qui lui montrent qu'il faut que ce soit la personne qui décide.
Pour elle, « c'est ça qui est le plus important, il faut que
les filleuls fassent leur chemin. »
Selon un des parrains, « il ne s'agit pas de leur
changer leur nature mais plus de les rendre compatibles ou de leur permettre
d'avoir les clés». Il explique son idée en disant qu'on
est « dans une société de signes extérieurs : les
signes de présentation, les signes de savoir-être ». Il
insiste sur l'importance de savoir manipuler ces signes tout en gardant «
sa nature propre ».
Finalement, un parrain relate son expérience en disant
qu'il a essayé de montrer à sa filleule qu'elle avait beaucoup de
qualités qu'il fallait qu'elle mette en valeur.
- Les éléments pouvant constituer un
obstacle au bon déroulement du parrainage
Trois personnes interviewées ont insisté sur le
fait que si les filleuls attendent que les parrains et marraines leur trouvent
un travail, cela ne marchera pas. « Ce qui va marcher c'est que la
personne ait vraiment envie qu'on l'accompagne dans cette démarche
». L'efficacité du parrainage repose ainsi sur sa
compréhension et son appropriation par chacun des deux acteurs. Une
marraine relate l'expérience suivante avec une pointe de regret :
« Une des filleules que j'ai encadrée n'avait
pas envie d'apprendre, elle espérait que par mon réseau j'allais
lui trouver un travail. Si elle m'avait convaincue j'aurais pu la prendre dans
mes équipes. Si elle avait juste été plus ouverte j'aurai
pu être efficace. »
31
1.3. Les compétences nécessaires selon les
parrains et marraines
Avant de présenter la liste des compétences
mentionnées par les marraines et les parrains, je tiens à
préciser que deux des interviewés se sont demandés si le
terme « compétences » était le plus approprié.
En effet, pour eux il s'agissait plutôt de qualités.
Selon EV, il ne s'agit pas de compétences car «
un mentor en entreprise doit avoir des compétences bien
supérieures à celles-là37. Dans le rôle
d'un parrain il y a une notion d'accompagnement personnel. Je ne raisonne pas
en termes de compétences mais plus en termes d'aptitudes et de
caractéristiques. »
Une autre réponse s'est aussi démarquée
du reste des réponses. Il s'agissait d'une marraine pour qui «
aucune compétence n'est nécessaire sauf d'y croire
».
La synthèse des discours des quatre personnes fait
ressortir neuf compétences qui, à leur avis, sont
inhérentes à leur rôle. Certaines compétences ont
été clairement nommées par les interviewés (telle
que la capacité d'écoute, avoir de l'empathie, respecter la
personne) alors que d'autres, non. Concernant ces dernières, je les ai
moi-même nommées de la manière qui m'a paru la plus
représentative de leurs propos. L'ensemble de ces compétences est
détaillé ci-dessous :
- La capacité d'écoute et
l'empathie
La capacité d'écoute a été
évoquée par deux personnes :
« Il faut pouvoir écouter, poser des
questions, ça permet au filleul de se recentrer et de se resituer.
»
« Il faut avoir la capacité d'écoute
c'est ça qui va d'abord créer le lien. Il faut évidemment
répondre à leurs questions mais aussi aller un peu plus loin,
essayer de ressentir la situation et les interrogations profondes que les gens
peuvent avoir pour en parler et essayer d'apporter notre éclairage. Il
faut être psychologue, c'est-à-dire essayer de comprendre la
personne, par ce qu'elle dit mais aussi surtout par tout ce qu'elle ne dit pas.
Essayer de comprendre un petit peu qui elle est et ce qu'elle attend et donner
notre vision des choses. »
La majorité semble être d'avis qu'il faut un peu
d'empathie. Ils l'ont tous exprimé plus ou moins explicitement. Pour
certains, cela se caractérise par le fait d' « adapter son
discours aux attentes de la personne qu'elles soient formulées ou pas.
Il faut répondre aux questions mais aussi aller plus loin et
derrière ce qui est dit ».
37 La liste de compétences sera
détaillée dans la page suivante.
32
D'autres décrivent cette compétences en la
comparant au fait d' « être psychologue, c'est à dire
essayer de comprendre la personne, par ce qu'elle dit mais aussi surtout par ce
qu'elle ne dit pas. Essayer de comprendre un petit peu qui elle est et ce
qu'elle attend. »
L'empathie a aussi été décrite par un
parrain comme le fait « de ressentir la situation et les questions et
les interrogations profondes que les gens peuvent avoir. »
- La rassurance et le soutien moral
« Comme ils sont souvent fragilisés par la
situation et par l'échec, le fait de pouvoir leur dire `c'est normal'
les rassure. Ce qu'ils me disent le plus souvent c'est que le fait de parler
leur donne une bouffée d'oxygène, ils se sentent soutenus et ils
peuvent regarder plus loin que la simple lettre de refus qu'ils
reçoivent tous les jours. »
Tous les interviewés étaient du même avis
en disant qu'il faut donner envie aux filleuls, il ne faut pas les
décourager, il ne faut jamais les juger. Selon un des parrains, «
il faut essayer de leur montrer qu'il y a du travail et que trouver du
travail c'est un travail. »
Pour une des marraines, cela signifie se mettre au niveau des
filleuls : « On va se parler d'égal à égal : il
n'y a plus de titres, il n'y a plus d'expérience. Et ça met les
filleuls à l'aise. »
- La subjectivité - et non pas la
neutralité - bienveillante
Pour deux parrains, il est important d'adopter une attitude
non seulement de bienveillance mais aussi de « modestie ».
Quand je leur demande si une « attitude modeste » serait synonyme de
neutralité, tous deux me disent qu'il ne s'agit pas vraiment de
neutralité. Pour eux, dès lors qu'ils donnent leurs avis, ils
rentrent dans une forme de subjectivité, mais sans nécessairement
imposer leur avis. L'un des parrains explique ce processus de la manière
suivante :
« Il faut avoir une subjectivité qui se
présente extérieurement au filleul. Froidement dit : «
voilà, ce qui à mon avis vous manque de tel point de vue,
voilà ce qui à mon avis n'est pas à changer et
voilà une zone grise qu'il faudrait peut-être qu'on change
ensemble. »
Et la réponse évoquée par le deuxième
parrain :
« Neutre, oui et non parce que lorsqu'on donne son
avis on n'est pas neutre, mais on peut le faire avec beaucoup de doigté
et de psychologie pour ne pas essayer d'imposer quelque chose.
33
Ce sont des propositions qu'on fait, ce sont des
idées qu'on lance et les gens les prennent ou ne les prennent pas.
»
- Laisser le filleul faire son propre chemin
« Moi je dis souvent aux jeunes que je rencontre, ce
n'est pas moi qui vais faire l'exercice, c'est vous. Moi je peux vous proposer
une méthode de travail, un suivi personnalisé et je veux vous
entendre me dire ce que vous avez fait pour vous-même. Je pense que c'est
la seule qualité aujourd'hui qui doit ressortir. »
Les trois autres interviewés étaient du
même avis. Pour eux, il est important que le filleul ait compris
dès le début que ce sera à lui de faire le travail et que
eux (les marraines et les parrains) sont là pour les accompagner, «
leur donner une méthodologie, une écoute et un support.
»
Une marraine relate une expérience qu'elle a eue avec
une de ses filleules : « Il y a un poste de cadre qui lui est
proposé et elle me demande ce qu'elle doit faire. Je lui dis que ce
n'est pas à moi de décider. Elle a pris ce poste et elle a fini
par mettre fin à la période d'essai toute seule parce qu'elle
s'est dit que ce n'était pas ce qu'elle voulait. C'est un exemple qui me
montre qu'il faut que ce soit la personne qui décide, il faut aller
jusqu'au bout avec la personne dans ses choix. Je pense qu'au fond, au bout du
bout, les gens savent ce qu'ils veulent. C'est ça qui est le plus
important, il faut qu'ils fassent leur chemin. »
- La capacité d'être conscient de ses
propres processus mentaux et de savoir dire les choses
« Il ne faut pas caser aux filleuls des poncifs : `
il faut absolument être comme ça pour y arriver, etc.' Il ne
s'agit pas de lui caser un stéréotype en lui disant `ressemble
moi, ça va marcherÇ mais bien de lui donner les clés. Par
exemple, si c'est une question comportementale ou physique, il faut lui faire
passer délicatement le message qu'en modifiant un petit peu quelque
chose auquel il n'avait pas pensé, sa personne en tant que telle
passerait mieux, sans changer sa nature. »
En résumé, pour garder cette attitude
bienveillante, il semble important que les marraines et les parrains
eux-mêmes aient une qualité de recul non seulement par rapport
à eux-mêmes, mais
34
aussi par rapport à la personne : « Il faut
avoir fait la part des choses entre ce qui va être nécessaire au
filleul et indispensable pour qu'il progresse et ce qui peut être
laissé de côté. »
- La disponibilité
Deux interviewés ont mis l'importance sur le fait
d'être disponible. Cette disponibilité se manifesterait en termes
de temps consacré au filleul et en termes d'attention porté vers
le filleul lors de l'entretien : « Il faut se dire qu'on passe du
temps avec la personne et qu'on est intellectuellement focalisé sur
elle, on ne pense pas à autre chose. Et il ne faut pas qu'on soit
pressés. » Et ce parrain enchaine : « Il faut vraiment que ce
soit un échange vrai où il se passe quelque chose, quelque part.
»
- Le respect de la personne
La capacité de respecter la personne est ressortie dans
tous les échanges de manière plus ou moins directe. Dans les
propos des interviewés, cette compétence semblaient être
assez proche de la compétence « attitude modeste ».
J'ai tout de même fait le choix de les dissocier car les réponses
dans cette catégorie évoquaient plus ou moins explicitement la
notion de « respect ». La plus explicite étant qu'il
faut respecter la personne qui est en face de nous, il faut essayer
d'être extrêmement modeste et respectueux. Les réponses
moins explicites impliquaient le fait qu'il faut, en tant que parrain ou
marraine, essayer d'apporter notre éclairage : « Ce n'est pas
essayer d'imposer quelque chose, de dire que c'est une bonne réponse.
C'est la nôtre, c'en est une parmi d'autres et la personne va construire
quelque part son puzzle à elle et va s'approprier certaines choses qui
lui paraissent bonnes. »
- La capacité de demander de l'aide des
autres
Cette idée a seulement été
évoquée par un seul parrain. Selon lui « il faut savoir
quelle sonnette activer, quel bout de compétence activer, certains
appellent ça le réseau. Si on ne sait pas analyser un CV, on va
voir le responsable RH pour comprendre. Il faut aussi avoir une sorte de
réseau relationnel exploitable pour ceci ou au moins des connaissances
sur lesquelles on pourrait s'appuyer pour avoir un avis objectif.
»
35
1.4. Les difficultés rencontrées par les
parrains et les marraines
Même si aucune hypothèse n'a été
posée sur ce sujet, en vue d'améliorer le dispositif du
parrainage et de le rendre plus facile d'accès pour les deux parties,
j'ai voulu savoir ce qui a été le plus difficile pour les
personnes interviewées.
Suite aux échanges avec les parrains et les marraines,
il ne semblait pas y avoir de généralisation à faire. En
effet, chaque parrain ou marraine a relaté son expérience
personnelle.
Ainsi une marraine qui a accompagné un filleul ayant un
accent très prononcé qui semblait le pénaliser lors de ces
entretiens d'embauche a trouvé que c'était difficile de
travailler l'accent sans être blessant. « C'est un sujet
difficile parce que tu ne sais pas comment ton filleul va réagir, il
faut apprendre à se faire confiance ».
Un parrain a eu des difficultés à comprendre le
vocabulaire académique de la personne, dit-il. Selon lui il y avait une
« distance de langage qu'il a fallu briser ».
Il évoque aussi une deuxième difficulté,
celle de faire prendre conscience à sa filleule que ses
compétences avaient de la valeur, « mais peut-être pas
sous cette forme », dit-il. Il a essayé de lui faire
comprendre que « la valeur était relative à la
présentation ; que la compétence était là mais
qu'il fallait la remettre en forme ».
Un autre parrain trouve qu'il faut être
extrêmement prudent dans la relation avec les filleuls car selon lui
« il faut faire part d'une expérience sans donner la
leçon aux gens, il y a des choses qu'on sent mais on peut se tromper
» et rajoute plus tard : « ce qui est difficile c'est de
s'adapter à la personne, il faut vraiment que ce soit un échange
vrai où il se passe quelque chose, quelque part. Il faut donner envie.
Ce qui est difficile c'est d'être pertinent. »
Deux des interviewés ont avoué avoir «
balbutié » au début du parrainage, car ils
n'avaient pas conscience de ce qu'ils pouvaient amener aux filleuls. Une
marraine s'inquiétait de ne pas avoir le temps, et aussi du fait que ce
genre d'action sortait complétement de son cadre d'activité. Elle
se demandait ce qu'elle pouvait vraiment leur apporter.
1.5. Les apports du parrainage
Un des parrains considère que c'est très
important de rencontrer des jeunes qui sont sur le marché du travail et
d'être confronté à leur difficultés, car cela lui
permet de comprendre où en
36
est l'état du marché du travail, quels sont les
attentes des employeurs, quelles sont les difficultés qu'ils
rencontrent. « Pour moi c'est important de comprendre parce que je ne
suis plus confronté au marché du travail déjà
longtemps et les choses ont énormément évolué.
»
Il fait également le lien entre les rencontres avec ses
filleuls et les jeunes candidats qu'il est amené à recruter :
« Je pense que c'est important parce que naturellement quand moi j'ai
un entretien d'embauche, les gens sont préparés, donc ils ne font
pas part de leurs états d'âmes, de leur difficultés,
ça peut arriver mais c'est très rare, ce n'est pas le but. Donc
là j'ai l'envers du décor, c'est ça qui est
intéressant. »
Les autres réponses décrivent le parrainage
comme une rencontre humaine, un échange qui nourrit, qui apporterait en
valeur humaine et dont on apprend beaucoup.
1.5.1. Remise en question des qualités de
manager
Une des hypothèses de recherche était de savoir
si le parrainage permettait aux marraines et aux parraines une certaine remise
en question de leurs qualités de manager ou autre.
La plupart des personnes à qui j'ai posé cette
question ont répondu oui. A l'exception d'un parrain pour qui il existe
une différence entre l'encadrement d'un ou d'une filleul-e et
l'encadrement d'une équipe professionnelle : « dans le
parrainage, je n'étais pas en position managériale avec la
personne, j'étais en interaction humaine d'égal à
égal. Dans le management, il y a une notion de dépendance
hiérarchique et opérationnelle. La personne (faisant
référence à sa filleule) n'obéissait pas
à mes ordres, ne suivait mes directives et je n'attendais pas d'elle un
résultat concret à la fin de l'année. Donc en ça,
je n'ai pas beaucoup réfléchi en termes managériaux.
»
Selon un autre parrain, il y a effectivement eu une certaine
prise de conscience, même si celle-ci ne s'est pas produite de
manière évidente : « Je pense que ça existe,
cette prise de conscience des difficultés que peuvent avoir les jeunes
à trouver du travail, mais ce n'est pas une évidence. On ne va
pas se dire `ah tiens j'ai trouvé une recette, c'est quelque chose que
je vais appliquer dans ma vie quotidienne de manager'. Je pense que c'est plus
complexe que ça. »
Un parrain et une marraine ont trouvé que le parrainage
leur a permis de remettre en question leurs « attitudes
managériales ». Le parrain évoque l'exemple suivant :
« d'un point de vue managérial, je pense que cette
première expérience avec NQT m'a permis de prendre
conscience
37
que j'ai un discours relativement directe et qui peut
choquer. En entreprise, les gens savent utiliser un masque ou un langage qui
les isole de ceci, et ils ne vont pas avoir de réactions. Un filleul par
exemple, peut être surpris de ma formulation. »
La marraine fait le lien entre les filleuls qu'elle encadre et
les jeunes qui sont embauchés dans l'entreprise. Selon elle, dans une
relation de parrainage en opposition à une relation hiérarchique,
il n'y a pas de jugement. Elle poursuit : « quand un jeune rentre dans
une entreprise il ne va pas te dire qu'il est perdu, parce que forcément
il va être jugé. Alors que dans une relation marraine-filleule il
n'y a pas de jugement, ce qui fait qu'humainement tu apprends des choses. Et tu
te dis si c'est comme ça avec les filleules, je suis sûre que le
jeune ingénieur que je viens de recruter, c'est le même bazar dans
sa tête. »
Finalement, le parrainage selon une marraine permettrait de se
remettre en question personnellement. Ainsi elle explique : «
ça ouvre sur l'extérieur, sur des valeurs humaines sur des
valeurs relationnelles, mais ça ne m'a pas fait changer ma façon
de travailler ou de manager les équipes. »
1.5.2. Développement de certaines pratiques
managériales
Toutes ces prises de conscience citées plus haut ont
été suivies par une adaptation ou un désir d'adaptation du
comportement dans l'avenir de la part des parrains et des marraines.
A titre d'exemples, le parrain qui s'est rendu compte qu'il
pouvait avoir un langage qui choque, a dit qu'il serait dorénavant plus
prudent dans sa communication interne et dans sa formulation. Il ajoute :
« je serai plus attentif et plus prudent dans ma formulation quand il
y a des gens qui viennent de contextes différents et qui ne sont pas
habitués à l'entreprise et avec les jeunes qui rentrent chez nous
aujourd'hui ». Il généralise cette idée à
la sphère de son équipe en disant : « je
développerai sans doute différemment le coaching dans mes
équipes et la communication. »
Une autre marraine fait également le lien avec
l'encadrement d'une équipe : « dans le cadre du parrainage
c'est comme dans une équipe, tu as des sujets qui sont toujours
éminemment difficiles et il faut savoir comment les traiter et les
aborder. Dès que ça touche la personne dans ce qu'elle est, son
accent, ses convictions, ses sujets personnels, là ça devient
compliqué ». Elle m'explique aussi que le parrainage l'a
beaucoup aidée pour accompagner ses leaders et ses managers à
comprendre différemment les jeunes qui rentrent dans l'entreprise.
D'après elle, « ça aide au quotidien pour
intégrer les jeunes. »
38
1.5.3. Le lien entre le parrainage et la notion de
traitement égalitaire
Pour tous les parrains et marraines interviewés, il
semble y avoir un lien très clair entre l'implication dans le parrainage
et la conscience de l'importance du traitement égalitaire. «
Oui bien sûr, répond une marraine. Au-delà du fait que
le traitement égalitaire fait partie de mes valeurs personnelles, que
d'être marraine aujourd'hui n'a fait que confirmer, renforcer et mettre
en avant des valeurs et des qualités humaines que les gens ne
connaissent pas nécessairement ».
Une autre marraine me fait part de son expérience en
disant :
« La question de la différence et du
traitement égalitaire j'y étais assez vite confronté. Tu
ne peux pas être une femme ingénieure sans te l'être
posée avant. Moi depuis que je suis toute petite, depuis mes
études je vis dans un mode d'homme, on était 7 filles sur une
promo de 110. Ce n'est pas le fait d'être marraine qui m'a fait prendre
conscience de l'importance du traitement égalitaire, c'est plutôt
parce que je suis confrontée depuis très longtemps à ce
genre de fonctionnement qui me motive encore plus à accompagner des
jeunes. C'est dans l'autre sens. »
De la même façon, pour un des parrains ce n'est
pas le parrainage qui lui a fait prendre conscience du traitement
égalitaire, parce que lui-même ainsi que l'entreprise le pratique
déjà. « Par contre, dit-il, dont on prend conscience
c'est des différences sociales. Je suis tombé sur quelqu'un qui
avait tout ce qu'il fallait pour réussir. Mais ce n'était pas
dans un contexte social qui pouvait l'aider et je pense que pour elle
c'était plus difficile que pour quelqu'un d'autre : le fait qu'elle me
dise que personne autour d'elle ne pouvait la conseiller sur son CV, c'est
là qu'on se dit qu'il y a des gens qui ont la chance d'être dans
un contexte qui les aident et d'autres pas et c'est là qu'on se rend
compte qu'il y a des différences. C'est qu'elle partait avec un handicap
dont elle n'avait même pas conscience mais qu'elle voyait ».
Finalement, le dernier parrain voit le parrainage comme une
démarche d'opposition au traitement inégalitaire, « une
sorte de revanche, dit-il. Moi j'ai été très soutenu,
aidé, je n'ai pas eu de problèmes, du coup je ne comprends pas
que les gens de valeurs par ailleurs aient des problèmes, c'est quelque
chose que je n'accepte pas facilement ».
1.5.4. Le lien entre le parrainage et la
responsabilité sociale de l'entreprise
Parmi les réponses à cette question, il y a trois
raisons pour lesquelles les marraines et les parrains considèrent que le
parrainage est une action socialement responsable.
39
- Le parrainage en tant qu'action bénéfique
à la société
Dans les réponses des interviewés, on voit
ressortir des termes reflétant l'utilité du parrainage dans la
facilitation de l'accès au marché de l'emploi actuel : «
accompagnement des jeunes pour trouver un emploi », « grands
problèmes de société », « issus de quartiers
difficiles », « tu attaques deux grands sujets de la
société française », « cohésion sociale
», et « donner sa chance ».
La notion de devoir ressort également, comme pour ce
parrain qui donne sa définition de la responsabilité sociale de
l'entreprise (RSE) : « pour moi une RSE c'est le devoir d'être
innervé avec la communauté et pas de se positionner juste comme
mono acteur économique dans le 77. Et ça on a les moyens de le
faire facilement grâce à tous les métiers qu'on a ici
(à Disneyland Paris), toutes les compétences sur un seul site et
une présence au-delà même des frontières du site. Et
le parrainage rentre là-dedans, il crée des liens vers la
catégorie de ceux qui recherchent un emploi et qui n'en ont pas
trouvé pour une raison ou une autre. Et quand je parle de
responsabilité je parle de ça ».
- Le parrainage en tant qu'action bénéfique
aux filleuls
Deux réponses schématisent ce propos. Le
caractère remotivant et rassurant du parrainage se retrouve dans la
réponse de cette marraine :
« Le parrainage apporte une grande bouffée
d'air à des gens qui se disent aujourd'hui je ne trouverai jamais le
métier pour lequel j'ai fait toutes ces années d'études.
»
Un parrain pense que cette action peut apporter une certaine
confiance aux filleuls, qui pour lui manqueraient de confiance :
« Je pense que c'est des gens manquent de confiance en
eux et ne se sentent pas à la hauteur alors que personne n'est à
la hauteur. Je veux dire moi je ne suis pas né directeur, il y a des
gens qui m'ont fait confiance, il y a des gens qui m'ont donné ma
chance. Il y a toujours quelqu'un qui vous donne votre chance à un
moment. Personne ne réussit tout seul, ce n'est pas vrai ça,
ça n'existe pas. »
- Le parrainage en tant qu'action bénéfique
à l'entreprise
Le dispositif est décrit comme étant
potentiellement bénéfique pour deux raisons :
40
Premièrement parce qu'il facilite le contact entre des
potentiels recruteurs - les marraines et les parrains - et de potentiels
talents - les filleuls. Dans ce sens, le parrainage semblerait constituer un
vivier de compétences permettant à l'entreprise « de
voir s'il y a des profils qui l'intéressent ».
Deuxièmement, parce qu'il agit sur l'image de
l'entreprise et sur le regard que les filleuls ont de Disneyland. « La
personne se dira un jour `Disney m'a aidée' ». En effet, les
trois filleules que j'ai interviewées ont toutes exprimé le
désir de vouloir à leur tour aider quelqu'un si elles en ont
l'opportunité. Une filleule qui venait de commencer un parrainage avec
une marraine à Disneyland dit avoir « l'impression qu'à
Disney il y a une réelle envie d'aller vers le jeune et de l'aider
à s'en sortir ».
2. Les résultats des entretiens avec les
filleules
2.1. L'état d'esprit des filleules à
l'entrée dans le parrainage
Les trois filleules que j'ai interrogées, malgré
leurs diplômes, leurs expériences de stages et d'emplois et leur
motivation, recherchaient un emploi depuis plus d'un an. Il
m'intéressait donc tout d'abord de savoir dans quel état d'esprit
elles se trouvaient lorsqu'elles sont rentrées dans le dispositif du
parrainage.
Les avis des filleules étaient tous différents,
l'une évoquant l'espoir qu'elle a ressenti à l'idée que le
parrainage allait lui permettre de rencontrer des gens et de se faire un
réseau. Une autre plus sceptique car au début, pour elle, NQT
était une association comme une autre, « une autre alternative
au Pôle Emploi, dit-elle, qui va essayer de nous aider sans trop
d'efforts ».
Finalement, l'avis de la troisième filleule dans
l'encadré ci-dessous illustre bien son ressenti :
« Je me souviens que dans ma promotion on
était même prêts à enlever des lignes du CV pour
montrer qu'on était moins qualifiés pour trouver du boulot. C'est
pour te dire à quel point on cherchait du boulot, c'était
vraiment la crise. Donc quand tu reçois un mail de l'association te
disant qu'ils vont te mettre en relation avec un des vice-présidents de
Disneyland, c'est impressionnant. C'est une personne comme toi et moi mais son
titre fait que tu te demandes pourquoi il va perdre son temps avec moi.
»
JP entrée dans le dispositif en 2009 après un an
et demi de recherche d'emploi
41
2.2. Le bilan post-parrainage
La majorité des retours des filleules étaient
positifs. Une des filleules a évoqué le fait d'avoir l'impression
de « vraiment exister » parce que quelqu'un a porté
de l'intérêt à ce qu'elle réussisse à sortir
du chômage.
Une autre filleule a décrit le dispositif du parrainage
comme étant « une sorte de roue de secours : on sait qu'il y a
une sorte de filet de sécurité qui fait que si on tombe on ne
tombe pas complètement à terre ». Pour elle, le
parrainage l'a rassurée et lui a permis « d'avoir conscience
qu'il y a des gens qui ont de l'empathie et qui s'engagent dans des
démarches aussi altruistes. Ça réconforte un peu dans la
dureté de la recherche », dit-elle.
Une troisième filleule se remémore
l'accompagnement de son parrain : « j'ai le souvenir qu'il m'ait dit
plus de points positifs que de points négatifs. Ça me confortait
dans ma présentation. Le fait qu'un vice-président te dise `tu as
une super présentation et un bel entretien', tu en es fière
».
Cette filleule semble avoir fortement apprécié
la motivation et l'implication de son parrain. Elle l'a décrit comme
étant quelqu'un de « génial, à l'écoute,
abordable et la mettant à l'aise ». Et ces qualités
l'ont motivée et lui ont redonné confiance en elle : «
Je trouve vraiment que j'ai eu beaucoup de chances parce que quand
ça fait un an et demi que tu cherches, et que tu vois qu'en l'espace de
2 mois tout se chamboule, tu ne peux dire que du positif. »
- Les déceptions
Néanmoins, cette filleule a également eu une
expérience qui a été décevante car sa
deuxième marraine n'avait pas été disponible : «
Elle a été très absente à la fois
psychologiquement et physiquement. Elle était très
débordée. Je pense que psychologiquement je suis assez
amère de cette deuxième expérience ».
- Les attentes satisfaites
Quand je leur ai demandé si elles considèrent
que leurs attentes ont été satisfaites, elles ont unanimement
répondu que oui. Ce qu'elles attendaient du dispositif du parrainage en
général et de leurs marraines et parrains en particulier
c'était de les mettre en lien avec un réseau.
Elles semblent toutes considérer que leurs attentes ont
été satisfaites dans ce sens-là en disant :
« Le parrainage m'a permis de développer mon
réseau ».
« Quand tu sors de l'école ce qui te manque
aujourd'hui c'est un carnet d'adresse, sauf si tu as la chance d'être
issue d'une famille qui a de nombreux contacts, ou si tu sors d'une belle
école même. Ce que j'attendais c'est des conseils et surtout un
carnet d'adresses ».
« Mon souhait c'était vraiment qu'ils me
mettent en relation avec les bonnes personnes. Je ne demandais pas un travail
je demandais un nom de quelqu'un dans une boite qui était peut
être intéresse par mon profil. Que derrière j'aille me
vendre, c'est tout ce que j'attendais. »
« Oui, parce que ma première attente a
été vraiment de rencontrer des gens et d'avoir son réseau
et aussi de savoir comment je pourrai me présenter au mieux pour coller
le plus possible aux offres d'emploi».
42
2.3. Les compétences nécessaires pour
être parrain ou marraine selon les filleules
Du côté des filleules, seulement certaines
compétences en accord avec celles évoquées par les
parrains et marraines ont été citées, telles que la
capacité d'être à l'écoute, d'être disponible
et d'avoir de l'empathie. Cependant, trois nouvelles compétences ont
été citées par les filleules :
- Il faut que le parrain ou la marraine ait vécu
un moment sans emploi
D'après les trois filleules, un « bon parrain
» c'est quelqu'un qui a vécu un moment sans emploi. «
Parce que finalement de l'avoir vécu, c'est plus facile pour en
parler et ça crée une proximité avec son filleul. C'est
important qu'il ait le sens de la réalité de ce que certains
filleuls vivent. »
« D'après ce que j'ai entendu des
expériences des autres filleuls, les personnes qui ont le plus
trimé dans leur propre recherche d'emploi sont le plus à
même d'aider les autres. »
- Témoigner d'une ouverture vers
l'autre
« Il faut de l'ouverture d'esprit, mais surtout une
ouverture vers les autres, vouloir les hisser, leur dire `tu vas y arriver', un
peu comme un coach, il faut de la positivité. Il faut des personnes qui
soient surtout ouvertes à des milieux sociaux autres que leurs milieux
d'origine. »
43
- Etre honnête
« Il faut avoir de l'honnêteté. C'est
bien de donner des conseils, c'est bien d'aider, de donner du réseau
mais il faut réellement pointer où sont les problèmes
parce que c'est comme ça qu'on arrive à avancer. »
2.4. Les difficultés rencontrées par les
filleules
Du côté des filleules, les difficultés qui
sont ressorties sont également variées. Ainsi, pour une filleule
ayant vécu une expérience décevante avec une marraine du
à son manque de disponibilité, la difficulté majeure a
été au niveau de la prise de rendez-vous.
Pour une autre filleule qui est en recherche d'emploi depuis
deux ans, le plus difficile a été d'être encore dans une
position où elle a besoin d'aide. Elle m'explique : « je suis
déjà dans une position où je cherche très
activement, où je rechigne devant rien. Et de me dire que malgré
toutes mes démarches proactives, je suis encore dans une situation
où j'ai besoin d'aide, c'est frustrant et c'est désarmant
».
Finalement, pour une filleule qui a été
embauchée par son premier parrain, « la difficulté a
été dans le après, dit-elle. Parce que tu arrives dans une
équipe dont tu n'as jamais rencontré le manager et tu as souvent
l'impression d'avoir été la pistonnée, alors que ce n'est
pas du tout le cas parce que tu as trimé pour arriver à ce
poste-là ».
3. Les conseils et suggestions des filleules et des
marraines et parrains
Dans la dernière question de l'entretien, je cherchais
à savoir quels étaient les conseils et suggestions des marraines
et des parrains ainsi que ceux des filleules pour améliorer le
dispositif du parrainage. Cinq axes d'amélioration se sont
dégagés :
- Faire un meilleur appariement des profils
parrains/marraines et filleuls
Au moment d'apparier les deux parties, l'association NQT
essaye de faire en sorte qu'il y ait une totale adéquation entre les
profils. Mais ceci n'est malheureusement pas tout le temps possible. Il nous
est déjà arrivé par exemple de ne pas trouver de filleuls
appropriés pour l'un de nos parrains
44
travaillant dans le domaine de l'hôtellerie. Il a fallu
qu'il indique ces compétences transverses pour que l'association puisse
lui attribuer quelqu'un.
De même, une filleule pense qu'il serait bien que les
parrains et marraines soient idéalement dans le même corps de
métiers du filleul. Pour elle : « c'est agréable et
c'est plus facile quand les profils sont un petit peu plus en adéquation
et quand tu as quelqu'un qui sait à peu près de quoi tu parles
quand tu parles de ton métier ».
Cependant, l'adaptation des profils ne semble pas être
un critère impactant le bon déroulement du parrainage pour les
marraines et parrains. En effet, cette idée n'a été
évoquée par aucun d'eux.
- Faire aussi un suivi auprès des marraines et des
parrains
Au bout de quelques mois de parrainage, l'association contacte
les filleuls pour faire un point avec eux et leur demande de tenir à
jour leur compte sur le site web38 de l'association. Il est vrai que
l'association n'intervient pas nécessairement auprès des parrains
et des marraines sauf en cas exceptionnels (si les filleuls ne répondent
pas ou s'il y a un problème en particulier). Mis à part ces cas
de figure, la relation entre parrains/marraines et leurs filleuls restent assez
libre et à eux de la gérer à leur convenance.
Les parrains et marraines disposent également d'un
« compte Parrain/Marraine », mais ils semblent avoir
tendance à faire le point directement avec le filleul par emails ou par
téléphone plutôt que de passer par le site web.
Cependant, un parrain a suggéré l'idée de
disposer, sur le site web, d'une sorte de « dossier du filleul » dans
lequel il pourrait « rentrer des informations qui soient accessibles par
le filleul et qu'ils puissent y mettre des éléments sans pour
autant se les envoyer tout le temps par mail » et ceci afin d'assurer un
meilleur suivi.
Une filleule s'est également exprimée sur le
sujet. Après m'avoir expliqué qu'elle avait eu une
expérience en quelque sorte décevante avec une marraine due au
manque de disponibilité de cette dernière, elle suggère
l'idée de faire un suivi régulier non seulement des filleuls,
mais des parrains et marraines également. Elle dit « je pense
qu'il faudrait faire une sorte de bilan mensuel, une sorte de bilan très
procédurier avec combien de rendez-vous ont été faits,
combien d'emails envoyés, la qualité du contact, le ressenti,
etc. et obliger les deux
parties à le remplir ».
38 http://www.nqt.fr/
45
Elle insiste plus tard sur la nécessité de faire
un suivi sur le ressenti des deux parties. Elle l'explique en disant : «
le filleul peut être très facilement
déstabilisé, désarmé ou plein d'espoir, mais
souvent on omet le ressenti du parrain et peut-être que lui est en
difficulté et peut-être que lui pourrait bénéficier
d'être mis en relation avec un autre parrain qui est plus senior ou qui
peut l'aider à prendre du recul sur la situation ».
- Faire un suivi plus régulier
La suggestion de faire un suivi plus régulier a
été évoquée par une marraine qui a proposé
l'idée de faire des réunions semestrielles ou même
trimestrielles, pour échanger et afficher les résultats des
parrainages en cours. « Les forums où on réunit tous les
parrains permettent de créer des échanges et de stimuler
». Elle ajoute : « je pense qu'il faut être maintenant
sur du concret, sur de l'opérationnel : quelle sont les
difficultés ? Comment peut-on créer des passerelles aussi vers
l'extérieur ? On peut aussi créer des échanges avec
d'autres entreprises par exemple ».
- Revoir la façon de mettre en lien les filleuls
et les parrains et marraines
Concernant le moyen utilisé pour établir le
contact entre des filleuls et des parrains et marraines, une marraine et une
filleule ont donné leur avis. Avant de relater ces deux avis, il me
semble important de raconter une expérience qui a récemment eu
lieu.
A Disneyland, nous organisons annuellement une journée
au cours de laquelle des experts font découvrir leurs métiers
à des jeunes diplômés de NQT. Comme il s'agit d'une action
faisant partie du partenariat avec l'association NQT, nous avons
décidé de faire intervenir quelques parrains et marraines pour
présenter leurs métiers. La première partie de la
journée était consacrée à une présentation
orale des métiers qui permettait l'échange avec les filleuls. Au
cours des présentations, une des marraines - MS - est venue me dire
qu'elle était toujours en attente d'attribution d'un filleul depuis plus
d'un mois et que le profil d'une des participantes lui avait plu. En effet,
elle posait des questions, participait à l'échange, montrait une
motivation. Je lui dis que me chargerait de savoir si la filleule en question
serait intéressée d'être parrainée. A la fin des
présentations, la filleule en question est venue me parler pour me dire
qu'elle avait beaucoup apprécié cette première partie de
journée et souhaitais savoir si je pouvais la mettre en contact avec
l'une des deux personnes dont elle a particulièrement
apprécié la présentation. Une de ces personnes en question
était MS.
Plus tard pendant la pause déjeuner, MS et la filleule
ont eu l'occasion de discuter et d'échanger leurs coordonnées.
46
Moins d'un mois plus tard, la filleule a été
officiellement attribuée à MS et leur parrainage a pu
démarrer aussitôt. J'ai eu l'occasion de m'entretenir avec cette
filleule en question parce que je trouvais qu'il serait intéressant
d'avoir son avis.
J'ai voulu raconter cette histoire pour illustrer
l'idée suivante qui a justement été suggérée
par la filleule interviewée : « C'est peut-être mieux
d'aller dans le sens inverse de ce que NQT propose, parce que là on
s'enregistre sur internet et ils (NQT) nous proposent un parrain. Je pense que
ça serait plus logique et plus constructif que dans un premier temps les
jeunes participent à une journée de rencontre avec des
professionnels et après leur attribuer des parrains ».
Quand je l'interroge sur son vécu de cette
expérience, elle dit : « honnêtement, travailler à
Disneyland je n'y avais jamais pensé, mais d'avoir assisté
à la journée découverte des métiers et d'avoir vu
ce qui était proposé, a suscité beaucoup plus
d'intérêt et je me suis dit c'est à Disney que je veux
travailler. Pour moi c'est plus dans ce sens-là qu'il y a
intérêt d'avoir un parrain ».
- Avoir accès à la bibliothèque de
CV de NQT pour recruter de nouveaux filleuls
Une marraine trouvait dommage de ne pas pouvoir accéder
librement à la bibliothèque de CV de NQT. Elle m'explique :
« ça fait 6 mois que je recrute des ingénieurs dans le
même profil des filleuls, mais il n'y a pas une démarche proactive
pour qu'on puisse aller chercher dans la bibliothèque des talents de
NQT, pour qu'on l'utilise comme du sourcing. J'ai pleins de postes ouverts et
c'est dommage qu'on ne se serve pas de ça pour aller plus loin en termes
de vivier ».
4. Discussion des résultats et conclusions
analytiques
Après avoir présenté les résultats
des entretiens, l'analyse sera conclue en les référant aux
questions initiales de recherche. La première question visait à
savoir si le parrainage permettait une remise en question du parrain sur sa
qualité de manager, tandis que la deuxième question cherchait
à comprendre de quelle manière cette action pouvait être
bénéfique aux filleuls. Les réponses à ces deux
questions seront présentées dans le paragraphe ci-dessous, je
répondrai par la même occasion aux hypothèses de recherche
initialement définies.
47
4.1. Première question de recherche : le rôle
du parrainage dans la remise en question des compétences
managériales
? Hypothèse 1 : Le dispositif de parrainage
permettrait aux parrains et aux marraines de remettre en question leurs
qualités de manager.
Une des hypothèses de recherche était de savoir
si le parrainage permettait aux marraines et aux parrains une certaine remise
en question de leurs qualités de manager. Trois interviewés sur 4
ont répondu `Oui' à l'exception d'une personne pour qui
l'encadrement de filleuls est différent de l'encadrement d'une
équipe dans un contexte professionnelle. Nous avons pu voir à
travers l'analyse des entretiens qu'il y a effectivement eu une remise en
question. Ce qui confirme ainsi l'hypothèse comme quoi le parrainage
permettrait aux parrains et aux marraines de remettre en question leurs
qualités de manager. Cependant, deux interviewés ont plutôt
parlé de remises en question personnelle en mentionnant « une
prise de conscience de son attitude personnelle au travail ».
Résultat qui vient enrichir notre hypothèse de départ.
? Hypothèse 2 : Certaines compétences
telles que la capacité d'écoute, la disponibilité et
l'attitude bienveillante sont nécessaires pour pouvoir être
marraine ou parrain.
La capacité d'écoute ainsi que la
disponibilité ont été évoqués dans les
échanges. Quant à l'attitude bienveillante, elle n'a pas
été explicitement exprimée en ces termes-là.
Cependant, deux des interviewés ont parlé de
l'importance de rassurer le filleul en le conseillant, sans toutefois lui
imposer leur avis. Les verbatim et expressions tels que : « il faut
être neutre », « laisser le filleul faire son propre
chemin », « il faut avoir une attitude modeste », « il ne
faut pas les décourager », « il ne faut jamais les juger
», et finalement « on va se parler d'égal à
égal (...) ça met les filleuls à l'aise »
témoignent d'une forme d'attitude bienveillante qui, selon eux, est une
compétence nécessaire à avoir.
Cependant, un certain nombre de compétences
supplémentaires que nous n'avions pas préalablement
définies comme prérequis au rôle de parrain ou de marraine
ont été évoqués lors des échanges.
L'empathie, la rassurance et le soutien moral, la capacité d'être
conscient de ses propres processus mentaux et de savoir dire les choses,
laisser la personne faire son propre chemin, le respect de la personne, et
enfin la capacité de demander de l'aide des autres sont les
compétences qui, selon les parrains et marraines, sont importantes et
nécessaires pour faire partie du parrainage. Nous pouvons donc en
conclure que l'hypothèse 2 n'a été qu'en partie
confirmée.
48
Nous ferons en sorte de prendre en compte ces nouvelles
compétences dans la sélection des futurs parrains et
marraines.
? Hypothèse 3 : Le dispositif de parrainage
permettrait aux parrains et aux marraines
de développer certaines pratiques
managériales.
Les résultats des entretiens ont montré que les
remises en question évoquées tant au niveau des attitudes
managériales qu'au niveau des attitudes personnelles, ont
été suivies d'une adaptation du comportement des parrains et des
marraines qui démontre un changement. Ainsi les termes suivants ont
été évoqués : « développer - je
serai plus prudent - je serai plus attentif dans ma communication interne - je
développerai différemment - le parrainage m'a aidé
à mieux accompagner les leaders et les managers - à comprendre
différemment les jeunes - le parrainage aide au quotidien pour
intégrer les jeunes. » Ce qui confirme l'hypothèse de
départ.
? Hypothèse 4 : Le dispositif de parrainage
permettrait aux parrains et aux marraines
de prendre conscience de l'importance du traitement
égalitaire
Pour tous les parrains et marraines interviewés, il
semble y avoir un lien clair entre l'implication dans le parrainage et la
conscience de l'importance du traitement égalitaire. Cependant, notre
hypothèse de départ est infirmée car ce n'est pas le
parrainage qui leur a permis de prendre conscience de l'importance du
traitement égalitaire mais il n'a fait que confirmer et renforcer ce
qu'ils savaient déjà.
4.2. Deuxième question de recherche : comment cette
action est-elle bénéfique pour les filleuls
? Hypothèse 5 : L'accompagnement de la part des
parrains et des marraines
redonneraient confiance aux filleuls et les
remotiveraient dans leur recherche d'emploi.
La majorité des retours permettent de confirmer cette
hypothèse de recherche. En effet, les termes « motivé
», « boosté », « l'impression de vraiment exister
», « réussir à sortir du chômage », «
une sorte de roue de secours », « un filet de sécurité
», « ça réconforte un peu dans la dureté de la
recherche », « ça m'a motivé et m'a redonnée
confiance en moi », « ça te
49
remonte le moral et te redonne de la valeur »,
ont été évoqués pour désigner l'action de
parrainage. Ainsi on peut en conclure que l'hypothèse 5 est
confirmée.
? Hypothèse 6 : Le réseau des parrains
et des marraines faciliterait l'accès à l'emploi
des filleuls.
L'analyse des trois entretiens avec les filleules fait
ressortir l'importance du réseau. Ainsi, lorsqu'elles répondent
toutes que leurs attentes ont été effectivement satisfaites,
elles évoquent toutes le réseau. Ce qui confirme
l'hypothèse 6.
? Hypothèse 7 : Certaines compétences
telles que la capacité d'écoute, la
disponibilité
et l'attitude bienveillante sont nécessaires pour
pouvoir être marraine ou parrain.
Il était intéressant de constater qu'aucune des
trois compétences citées dans l'hypothèse de départ
n'a été évoquée par les filleules. Elles ont
plutôt mentionné trois autres compétences qui
qualifieraient un bon parrain ou une bonne marraine : l'honnêteté,
le fait d'avoir vécu une période sans emploi, et l'ouverture vers
l'autre. Ces résultats nous donnent des pistes pour l'avenir. Nous
prendrons en compte ces nouvelles compétences citées par les
filleules lors de la sélection des futurs parrains et marraines.
50
Conclusion
Ce travail a tenté de décrire le dispositif de
parrainage à Disneyland Paris et de montrer ses apports ainsi que les
difficultés vécus par les parrains et marraines et par les
filleuls. Il s'agissait aussi de voir comment cette action pouvait se
répercuter sur l'image de l'entreprise en contribuant à
l'insertion professionnelle.
L'enquête de terrain a donc répondu à un
intérêt pratique car elle a relevé les apports du
parrainage autant pour les parrains et marraine et les filleuls que pour
l'entreprise. Elle a également cherché à répondre
à un intérêt sur le plan de la recherche. En effet,
malgré l'étendue des études sur les actions contre la
discrimination et la promotion de la diversité au travail, il y a encore
beaucoup de chemin à faire pour répondre à la question de
l'inégalité de traitement à l'embauche et l'accès
différencié à l'emploi. Les méthodes
utilisées pour prévenir les discriminations dans la prise de
décision sont multiples et subjectives de par la singularité des
situations. Il reste donc difficile d'appréhender et de quantifier la
connaissance que peuvent avoir les personnes de la diversité au
travail.
En faisant le choix d'étudier cette action, j'ai
souhaité savoir si le parrainage pouvait développer des
compétences managériales chez les parrains et les marraines. Les
échanges nous ont permis de savoir que le fait d'accompagner des jeunes
diplômés vers l'emploi permettait effectivement aux parrains et
aux marraines de rester dans une dynamique de développement personnel de
certaines compétences humaines et relationnelles. Les échanges
ont aussi montré que le parrainage permettait aux filleuls de reprendre
confiance en eux et de trouver une motivation et un espoir qu'ils semblaient
avoir perdu.
L'enquête nous a aussi permis de se rendre compte des
difficultés qui peuvent freiner le bon déroulement du parrainage.
Dans l'avenir, nous saurons qu'il est nécessaire de veiller à ce
que les profils des parrains et marraines soient mieux appariés avec
ceux des filleuls. Nous veillerons également à faire un suivi
régulier tant auprès des filleuls qu'auprès des marraines
et parrains.
Depuis la signature du partenariat en 2009, cette action a
rassemblé plus de 150 personnes. Des parcours professionnels
diversifiés se sont croisés, des personnes d'origines et de
cultures différentes se sont côtoyées, des situations
difficiles ont été rencontrées et des réussites
gratifiantes se sont succédé. En résumé, le
parrainage est une action humaine partagées et portées par des
personnes qui pour une raison ou une autre sont sensibles à la
Diversité qui les entourent et qui souhaitent apporter leur pierre
à l'édifice de l'égalité des chances et de
traitement.
51
Si l'entreprise Disneyland Paris, portés par ses
parrains et marraines actuels et futurs continue dans cette aventure avec la
même motivation de départ, près de 175 parrains et
marraines auront accompagné près de 275 jeunes
diplômés vers l'emploi d'ici 2016. Soit, sur les trois prochaines
années, entre 6 et 9 jeunes diplômés trouveront par mois
l'emploi qu'ils souhaitaient et reprendront confiance en eux.
Bibliographie
Ouvrages imprimés
DHOQUOIS A., Paroles libres de jeunes de banlieue,
Paris, Broché, 2011.
Rapports imprimés
DREUX D., Editorial du document Politique Diversité et
Inclusion, plan d'action 2014-2016, Octobre 2013.
OCDE, ONU, World Migration in Figures: a joint contribution
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IDRISS N., RIES L., HECKMANN R., Discrimination dans le monde
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Articles de périodiques
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AMADIEU J.F., « Enquête Testing sur CV »,
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ANNEXE 1
Présentation de l'entreprise Disneyland
Paris
1. L'origine : Walt Disney
A la fin des années 1940, Walt Disney dessina les
plans d'une idée pour un parc de loisirs où il prévoyait
que ses employés puissent passer du temps avec leurs enfants. Il
développa cette idée durant ses nombreuses sorties avec ses
filles Diane et Sharon, quand il réalisa qu'il n'y avait aucun parc
où les activités permettraient aux parents et aux enfants de
s'amuser ensemble. Ce qu'il développa devint un concept d'une plus
grande envergure, Disneyland. Après cinq ans d'amélioration de
ses idées, Disneyland, surnommé « Happiest Place on Earth
»1, l'un des premiers parcs à thème au monde,
ouvrit finalement le 17 juillet 1955 en Californie et devint rapidement un
succès. Il est le seul parc Disney à avoir été
conçu et vu par Walt Disney.
Au fil des années, le concept du parc a été
dupliqué par la société Disney sur plusieurs sites : -
1971 Walt Disney World Resort en Floride, la première destination
touristique - 1983 Tokyo Disneyland
- 1992 Disneyland Paris
- 2005 Hong Kong Disneyland
- Shanghai Disneyland prévu pour décembre 2015
2. La Convention avec l'Etat et la naissance de
Disneyland Paris
Un accord officiel entre The Walt Disney Company (TWDC) et les
autorités françaises a été signé le 24 mars
1987 pour "la création et l'exploitation d'Euro Disneyland® en
France". Il a fait l'objet, le 14 septembre 2010, d'un avenant qui prolonge sa
validité jusqu'en 2030.
Le 12 avril 1992 à Marne-la-vallée, ces mots
ci-dessous marquèrent le début de Disneyland Paris :
« À tous ceux qui arrivent dans cet endroit
enchanté, bienvenue. Il était une fois... un maître
conteur, Walt Disney, qui, inspiré par les contes les plus populaires
d'Europe, utilisa ses
1 L'endroit le plus joyeux au monde
2 Discours d'inauguration par Michael Dammann
Eisner, président directeur général de la Walt Disney
Company à l'époque, le 12 avril 1992
propres dons pour les partager avec le monde. Il imagina
un Royaume Magique où ces histoires pourraient prendre vie, et l'appela
Disneyland. Maintenant son rêve revient vers la terre qui l'a
inspiré. Euro Disneyland est dédié aux jeunes et aux
jeunes de coeur... avec l'espoir qu'il sera une source de joie et d'inspiration
pour le monde entier. Et maintenant je déclare Euro Disneyland
officiellement ouvert." 2
Disneyland Paris, un espace de quelques 600 hectares
entièrement dédié au rêve et au plaisir a
été inauguré le 12 avril 1992. Aujourd'hui
présidée par Philippe Gas qui a pris ses fonctions en tant que
président d'Euro Disney S.A.S. en septembre 2008, Disneyland Paris est
devenue la première destination touristique des courts séjours et
fait plus de trois fois sa taille initiale. L'entreprise regroupe une multitude
de métiers différents (environ 500) et réunit des
activités très diverses qui contribuent toutes à la
cohérence de l'ensemble. Disneyland Paris n'offre pas à ses
visiteurs qu'une série de prestations (restauration, boutiques,
attractions, spectacles) mais bien une expérience globale.
Avec ces deux parcs à thèmes et ces 5800
chambres réparties dans 7 hôtels, Disneyland Paris est le premier
employeur mono-site d'Île-de-France.
- Qui sont les salariés de Disneyland Paris
?
L'entreprise compte plus de 15000 salariés. Ceux-ci
représentent plus de 100 nationalités et parlent 20 langues
différentes. 86% de ces salariés sont en CDI (soit 12 900
salariés).
La pyramide des âges de l'entreprise est relativement
jeune car l'âge moyen des salariés est de 35 ans.
L'ancienneté moyenne des salariés est de 8,2 ans. Environ 13% des
salariés sont dans l'entreprise depuis l'ouverture, depuis plus de 22
ans. Par ailleurs, 80 % des managers sont issus de la promotion interne.
L'entreprise atteint progressivement une parité
homme-femme. Actuellement, 48% des salariés sont des femmes et 52% des
hommes. Et le nombre de femmes au poste de Directeur a augmenté de 9
points depuis 2007. Ainsi, en 2012, 32% des postes de Directeur sont
occupés par des femmes.
- D'où viennent les visiteurs de Disneyland Paris
?
Aujourd'hui le parc compte plus de 275 millions de visiteurs
depuis son ouverture en 1992. Selon le dernier rapport d'activité en
2013, sur les 14,9 millions de visites en 2013, 51% venaient de France, 14% du
Royaume-Uni, 6% de la Belgique et du Luxembourg, 6% des Pays-Bas, 8% d'Espagne,
3% d'Italie, 3% d'Allemagne et 9% du reste du monde.
Pays-Bas, 3% d'Italie, 3% d'Allemagne et 9% du reste du monde.
Le taux d'occupation pour les hôtels Disney est de 79,3%.
L'ensemble de ces informations représente la
synthèse de rapports d'activités, d'études
réalisées par des cabinets, de bilans trimestriels internes,
ainsi que des informations trouvées sur des sites internet. Avant de
rentrer dans le détail du département Diversité et
Inclusion, il me semble important de faire un zoom sur expérience
d'intégration au sein de Disneyland Paris.
3. Une année au sein de Disneyland
Paris
3.1. La formation « Disney »
En 1993, Youcef Alem, aujourd'hui responsable Diversité
et Inclusion devient chef de projet Ressources Humaines et met en place «
la Disney University », le centre de formation interne, inauguré en
janvier 1995. Il contribue à la mise en place d'un programme de
formation destiné au management.3 L'enseignement et la
transmission des savoir-faire s'y effectuent, ainsi que le parcours
d'intégration des nouveaux salariés. L'université est en
quelque sorte l'emblème de la transmission de la culture
organisationnelle et des valeurs de Disneyland Paris.
Le premier jour de formation, qui a lieu à la «
Disney University », s'inscrit dans la logique des rites de passage. Cette
journée précède l'affectation sur le lieu de travail et
est intitulée la journée « la Tradition Disney ». Pour
tous les nouveaux Cast Members, cette journée est organisée pour
leur présenter l'histoire de la Walt Disney Company ainsi que les
valeurs de l'entreprise. Ces valeurs sont le respect, la
sincérité, l'intégrité, le courage, l'ouverture, la
diversité et l'équilibre. Une autre partie de « la Tradition
Disney » est axée sur la notion de
3 L'article est accessible sur le lien internet
suivant :
http://www.jeuneafrique.com/Article/LIN20048youcemelafe0/
d'accueil et de service. Une grande importance est ainsi
attribuée aux quatre clés : la sécurité, la
courtoisie, le spectacle et l'efficacité.
Tous ces éléments constituent une
référence pour tout Cast Member car ils reflètent la
culture Disney, traduisent l'identité de ses salariés et
inspirent leurs actions au quotidien. Y adhérer semble comme une
nécessité mais aussi une évidence pour travailler dans
l'entreprise.
3.2. Une multitude de métiers différents chez
Disney
Le fonctionnement du parc couvre un large spectre
d'activités et d'employés. Ceux-ci regroupent des métiers
opérationnels de base différents :
- l'accueil,
- l'animation,
- la mise en oeuvre des spectacles et attractions («
Attractions »),
- la restauration (« Food »),
- la vente (« Merchandise »),
- la mécanique, l'électronique,
- l'entretien (« Custodial »),
- enfin la sécurité et la surveillance.
D'un autre côté, se trouvent tous les
métiers Supports. Il s'agit de fonctions administratives et
générales telles que :
- le Marketing / Ventes : marketing produit, marketing
digital, marketing internet et affiliation, marketing media.
- Communication / Evénementiel : communication
institutionnelle, communication interne, mécénat.
- Ingénierie : ingénierie industrielle,
ingénierie environnementale, ingénierie informatique,
ingénierie génie civile et VRD.
- Ressources Humaines / Santé : paie, ressources
humaines, rémunération, médecine du travail, relations
sociales, prévention.
- Informatique : réseaux télécom,
logiciels SAP, IT, Unix, projets informatique, systèmes de
distribution.
- Juridique : droit immobilier, droit social, droit du
travail, droit environnemental, droit des affaires, droit pénal.
- Finance : relation investisseurs, analyse financière,
contrôle de gestion, comptabilité, crédits,
trésorerie, risques, fiscalités.
- Supply Chain / Logistique / Achats : optimisation supply
chain, qualités, achats, labor management.
- Revenue Management / Pricing / Etudes: analyses pricing,
merchandise, RMA, études, forecasting, planning.
- Stratégie et organisation / Audit : audit interne,
analyse stratégique, veille.
- Développement immobilier et construction :
développement durable, touristique, immobilier, urbain, infrastructure,
VRD, architecture, nouvelles destinations.
3.3. Le langage Disney
Le langage spécifique employé à
Disneyland Paris témoigne de sa volonté de se distinguer par
rapport aux autres parcs et de faire de Disney un cas unique. Ce langage si
spécifique se prolonge jusque dans les relations quotidiennes et
projettent les salariés , même ceux travaillant en coulisses, dans
le monde du spectacle. A titre d'exemple, ceci est un extrait de ce qu'on
pouvait trouver dans une brochure intitulée « Parlez-vous le Disney
? » :
« (...) Euro Disney est une scène, dont les
acteurs accueillant les visiteurs sont sur scène tandis que les acteurs
de soutien logistique sont en coulisses. Nous recevons un public et non une
foule. Notre public se compose de visiteurs et non de clients. Nous n'avons pas
de policiers ou de gardiens mais des Cast Members de sécurité.
Nous portons des costumes et non des uniformes. Pour finir, nous n'avons pas
des manèges, mais nous proposons des aventures, des spectacles et des
attractions. »
« Cast Member »
L'appellation de sa population, les « Cast Members
», renvoie directement au rôle de chacun, à sa participation
directe au spectacle, et donc qu'être Cast Member signifie appartenir
à l'empire Disney.
Walt Disney disait lui-même : "Il faut des gens pour
transformer le rêve en réalité". C'est exactement ce que
font les près de 15 000 personnes qui travaillent à
Disneyland® Paris. Le terme "Cast Member" vient du monde du spectacle et
s'applique bien aux salariés Disney. Chaque salarié fait partie
des membres de la "troupe" qui met tout en oeuvre, que ce soit en scène
ou en coulisse, pour jouer le spectacle magique que le parc présente
quotidiennement.
« Casting »
Disneyland Paris innove constamment dans ces campagnes de
recrutement en allant à la rencontre de candidats européens avec
ou sans qualification professionnelle, pour leur offrir la possibilité
d'avoir une expérience dans un environnement multiculturel.
Le « Casting » est à l'origine de ces
campagnes. C'est un service qui reçoit et recrute les Cast Members. Les
salariés représentent un vaste éventail
d'expériences et de compétences ; 100 nationalités
différentes sont actuellement représentées et 20 langues
parlées. Les métiers sont extrêmement divers et
variés : des comédiens aux responsables Marketing, en passant par
les réceptionnistes hôtels et les pompiers. L'entreprise
Disneyland Paris reçoit 20 000 candidatures spontanées par an et
créée plus de 55 000 emplois directs, indirects.
« Costumes »
Les costumes sont les tenues de travail de tous les Cast
Members, que ce soit pour les salariés de la Division Spectacles ou les
équipes opérationnelles, dans les Parcs à thèmes
Disney, les Hôtels Disney ou encore à Disney® Village. Une
grande attention est portée au moindre petit détail pour faire en
sorte que les costumes contribuent efficacement à l'expérience
Disney. Chaque tissu ou accessoire raconte une histoire et aide nos visiteurs
à s'immerger à leur tour dans le monde de Disney.
4.1. La démarche au niveau de la Walt Disney
Company
Il faut savoir qu'au niveau de la Walt Disney Company, la
diversité et l'inclusion contribuent depuis plus de 20 ans à
l'évolution, le soutien et la promotion des initiatives de
diversité et d'inclusion dans l'entreprise.
L'objectif principal du département « Diversity
and Inclusion » actuellement présidée par Paul J.
Richardson, le vice-président Sénior Diversité est de
mettre en oeuvre les objectifs stratégiques de la diversité et de
l'inclusion en les reliant au Business plan et aux priorités de
l'entreprise. Pour faire ceci, la WDC s'est fixée 4 axes :
- Workforce Diversity : ou la diversité des profils des
salariés ;
- Workplace Inclusion : la diversité au travail ;
- Products and services : la diversité des produits et
services proposés aux clients
- Corporate Social Responsability : la responsabilité
sociale et sociétale de l'entreprise
Le 26 février 2007, lors de la Diversity Conference aux
Etats-Unis, James A Rasulo, Directeur Financier et président du
Comité d'investissement de The Walt Disney Company (WDC), a pris la
parole en posant cette question :
La petite histoire à l'origine de la
démarche diversité
« Que dirais-je à une petite fille
afro-américaine qui vient me voir sur le parc et me demande tout
doucement : « Pourquoi n'y a-t-il pas de princesses qui me ressemblent ?
». Je suis sûr que les petites filles de diverses origines posent
cette question tous les jours - au moins dans leur subconscient. La
façon dont Disney répondra à la question de la petite
fille est essentielle à la survie de cette société.
»4
Depuis ce jour, la « maison-mère
»5 a voulu qu'un véritable travail de fond sur la
diversité soit réalisé au sein de tous les parcs du monde
afin que les Cast Member et les Guests6 se sentent inclus à
tout moment. Ce travail, à Disneyland Paris, démarra en 2008.
4 Discours de James A Rasulo le 26 février
2007, lors de la « Diversity Conference » aux Etats-Unis.
5 Le terme « maison-mère » ou
« segment » est utilisé dans le vocabulaire courant de
l'entreprise pour faire référence à la Walt Disney Company
en Californie.
6 Les visiteurs des Parcs.
ANNEXE 2
Les grilles d'entretiens
La grille d'entretien des parrains et des
marraines
- Est-ce que vous pouvez vous présenter et
présenter votre parcours professionnel ?
- Quelles sont les raisons de votre implication dans ce
parrainage ?
- Comment avez-vous abordé l'accompagnement de votre
filleul ?
- A votre avis, quelles compétences sont
nécessaires pour être parrain ?
- Et avez-vous l'impression que le fait d'être parrain
vous permette une remise en question
de votre qualité de manager ?
- Est-ce que le fait d'être parrain vous a permis de
prendre conscience de l'importance du
traitement égalitaire ?
- Est-ce qu'il y a eu des remarques ou des questions des
filleuls qui vous ont un peu
surpris, auxquelles vous vous n'attendiez pas ?
- Qu'est-ce qui a été pour vous le plus
difficile ?
- En quoi le dispositif du parrainage est une action
socialement responsable
- Quelles seraient vos conseils, suggestions et idées
pour faire évoluer ce parrainage ?
La grille d'entretien des filleuls
- Est-ce que vous pouvez retracer votre parcours
d'études, vos tentatives d'entrée sur le
marché du travail ?
- Quelles sont les raisons qui vous ont conduits à
chercher un parrainage ?
- Quel était votre état d'esprit à
l'entrée dans le dispositif ?
- Quel bilan tirez-vous de votre parrainage ?
- Comment avez-vous vécu l'accompagnement de votre
parrain/marraine ?
- Qu'est-ce que le parrainage a changé dans votre
quotidien ?
- Quelles étaient vos attentes au début de ce
parrainage ? Ont-elles été satisfaites ?
- Qu'est-ce qui a été le plus difficile pour
vous ?
- D'après vous, quelles sont les compétences
requises pour être parrain ?
- Quelles seraient vos conseils, suggestions et idées
pour faire évoluer ce parrainage ?
Résumé
Le but de cette étude est d'évaluer un
dispositif d'accompagnement à l'emploi, le « Parrainage », mis
en place dans le cadre du partenariat entre Disneyland Paris et l'association
« Nos Quartiers ont des Talents ». Des entretiens ont
été réalisés auprès de sept personnes : deux
marraines, deux parrains et trois filleules.
Les résultats montrent un effet significatif du
Parrainage sur le sentiment de motivation et de confiance en soi des filleuls
et par conséquent sur leur insertion professionnelle.
Mots-clefs: accompagnement à l'emploi, confiance
en soi, parrainage, insertion professionnelle.
Abstract
The goal of this study was to evaluate a job seekers' support
scheme, « Mentoring », implemented as part of the partnership between
Disneyland Paris and the association « Nos Quartiers ont du Talent ».
Interviews were conducted with seven people: four mentors and three mentees.
The results show a significant effect of Mentoring on the
motivation and self-confidence of the mentees, thus on their employability.
Keywords : job seeking support, self-confidence,
mentoring, employability.
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