3.3. Problématique et hypothèses
3.3.1. Problématique
La description du parcours des étudiants universitaires
et l'analyse des éléments favorisant l'abandon ou la
persévérance dans les études nous a mené à
considérer notre
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problématique en interrogeant les effets de la
certification vis-à-vis de la participation estudiantine.
Peu d'études ont été portées sur
le sujet et il a donc été difficile d'élaborer un cadre
contextuel et théorique approprié. Mais aux vues de
l'intégration de la FOAD dans les parcours traditionnels de formation,
et face aux données collectées jusqu'à nos jours sur les
aspects de la motivation étudiante, nous avons cherché à
savoir si une relation existe entre la motivation et la certification dans le
contexte d'une formation par MOOC. La possibilité d'obtenir un
crédit ECTS (la dernière apparition française pour se
démarquer proposée par l'Ecole Centrale Lille dans son MOOC
« gestion de Projet ») et, la profusion des outils de validation des
acquis tels que les diplômes, les attestations ou les certificats nous
amènent à nous interroger sur leur véritable
efficacité.
Cette course à l'artefact de valorisation questionne
les principes même des MOOC. S ». S'agit-il d'une volonté de
crédibilisation des formations proposées de manières
ouvertes, gratuites et massives ? D'une réponse à un besoin des
apprenants afin de se situer dans leur progression ? D'un outil d'attraction
supplémentaire ?
Dans la partie 3.2 de ce mémoire nous avons pu observer
un fort taux de décrochage dans les MOOC. Parallèlement nous
avons pu observer que la certification peut être utilisée à
des fins d'intégration professionnelle à travers la valorisation
des acquis. Cette valorisation peut-elle avoir un impact sur la
persévérance des apprenants de MOOC ?
Les MOOC sont principalement utilisés à des fins
de formation continue dans le cadre de la « formation tout au long de la
vie ». Le développement personnel est un élément
moteur de la participation à un MOOC. Selon Y. PETIT de l'agence Unow
certaines universités pourraient proposer sous peu des cursus complets
et gratuits à suivre en ligne.
Nous avons pu ainsi établir la problématique
suivante : les outils de valorisation des acquis (obtention de certificats,
diplômes ou crédits ECTS) dans les MOOC motivent-ils les
étudiants à s'inscrire et à achever une formation ?
3.3.2. Hypothèses
Nous avons pu élaborer face aux différents
éléments de contexte et de théorie abordés
précédemment trois hypothèses de réponse à
notre problématique. Dans celles-ci, nous observons trois degrés
d'intégration différentes des outils de valorisation des
acquis.
La vision de Matthieur Cisel : la certification vue comme
une « monnaie de singe ».
Notre première hypothèse se base sur la vision
de Matthieu Cisel (doctorant en Sciences de l'information et spécialiste
des MOOC) qui reconnaît parfois, et selon ses propres termes (issus de
son blog « La révolution MOOC ») la certification comme «
une monnaie de singe ».
Il décrit sous cette dénomination un manque de
reconnaissance de la certification des MOOC, malgré le
développement d'organisme de certification tiers : Degreed, Smarterer,
etc...
Il met également en lumière la difficulté
d'évaluer de manière massive (par l'intermédiaire de
l'industrialisation de l'évaluation) car à la différence
des formations traditionnelles dispensées à distance, l'aspect
massif de ces formations rend impossible la décentralisation des examens
de validation en centres dédiés. Des outils de reconnaissance
biométrique et des logiciels de surveillance d'examen font leur
apparition afin de pallier à cette difficulté mais des
problématiques techniques résident encore.
L'autre point que l'on peut soulever dans cette
hypothèse est le manque de crédibilité des certifications
délivrées par le MOOC. Par qui sont-elles établies ? Quels
champs d'application possèdent-elles ? De plus des certifications
institutionnelles commencent à faire leur apparition avec la
délivrance de crédits ECTS.
Les MOOC, les prémices de la reconnaissance, sur
les pas de la Formation à Distance.
Dans notre seconde hypothèse nous soulevons
l'idée que les MOOC seraient basés sur un modèle qui ne
serait pas encore tout à fait défini et toujours en
construction.
Ainsi en partant de ce postulat nous pouvons imaginer que
ledit modèle pourrait à terme avoir les mêmes contours que
la formation à distance traditionnelle, se heurtant aux mêmes
problématiques et finalement obtenir la même reconnaissance.
L'intégration de la formation à distance a
été un long processus tant du point de vue technique, que du
point de vue de la reconnaissance sociale. Nous avons vu
précédemment que les premiers cours par correspondance ont
été instaurés en 1840 par Isaac Pitman, mais ce n'est
qu'en 1915 que des normes identifiables sont établies afin de garantir
la qualité des contenus des programmes d'apprentissages. A partir de ce
moment-là, l'assortiment du développement technologique, des
volontés publiques et des besoins sociaux ont participé à
l'intégration sociale et universitaire de ce type de formation.
A l'image de ce petit rappel historique, les MOOC (dont on
peut situer leurs débuts à l'année 2008 avec le cours
CCK08 de Georges Siemens et Steven Downes) connaissent un engouement
progressif. En 2014 le MOOC gestion de Projet de de Rémi Bachelet
devient le premier MOOC français à délivrer une
certification institutionnelle : des ECTS. Les capacités techniques
continuent de se développer afin de garantir la capacité
d'accueil de ces plateformes et favoriser des apprentissages collaboratifs. Les
volontés publiques de développer ce type de formation se
révèlent avec la création de FUN (France Université
Numérique) et les besoins sociaux se font ressentir avec notamment pour
la formation continue et la formation professionnelle. Dernièrement des
institutions telles que « Pôle Emploi » encouragent leurs
allocataires à suivre des formations de type MOOC afin de faciliter leur
intégration professionnelle.
Mais à l'inverse du processus de reconnaissance de la
formation à distance, les MOOC ne bénéficient pas
actuellement de normes identifiables garantissant la qualité des
contenus des programmes d'apprentissages.
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Le MOOC, une valeur ajoutée au parcours
professionnel : un outil d'intégration.
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Cette troisième et dernière hypothèse que
nous émettons s'inspire de la démarche portfolio : le
portefeuille de compétences. Cette démarche se met
progressivement en place dans les institutions publiques, l'enseignement
secondaire, professionnel et supérieur et commence à être
connu par des employeurs privés. La démarche de portfolio
professionnel ou du eportefolio permettrait de répondre aux
problématiques de l'employabilité à travers une
reconnaissance des compétences individuelles.
Le portefeuille de compétences doit son origine
historique (datant des années 50) à la nécessité de
formaliser un dossier de description d'expériences et de preuves pour
témoigner des réalisations du candidat en vue de la
reconnaissance de ses compétences. Depuis le début des
années 2000, l'émergence du principe d'identité
numérique favorise la mise en valeur de des compétences
professionnelles sur le web : c'est la naissance du eportfolio.
A travers la délivrance de badges ou de certification
et de leur dynamique sociale (collaboration et utilisation des réseaux
sociaux) les MOOC pourraient devenir un outil complémentaire à
l'intégration professionnelle. La mise en valeur des différentes
certifications, ou des reconnaissances de réussite pourrait devenir un
des composants importants d'une démarche plus globale de constitution
d'un portfolio.
La participation à un MOOC et l'obtention d'une
certification en tout genre serait alors un pas vers une biographisation et une
médiatisation des facteurs individuels.
Ancré dans le principe de la formation tout au long de
la vie à l'image de la FOAD, les utilisateurs de MOOC pourraient
organiser et valoriser leurs compétences afin de les mettre au profit de
leur intégration professionnelle en valorisant leur CV.
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