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Réflexion sur la prise en compte du changement climatique à  Rennes : eau, végétation & àŪlot de chaleur urbain

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par Thibaut FILLIOL
Université de Strasbourg - Master 2 Géographie Environnementale 2016
  

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III. Discussion des premières pistes de réflexion, difficultés rencontrées et perspectives

Tout d'abord, si ce travail de mémoire est rendu très intéressant par le fait qu'il a débuté en même temps que les premières réflexions à Rennes, cela peut également être perçu comme une contrainte. En effet, un certain temps fut nécessaire pour solliciter les différents services, leur expliquer le cadre des réflexions menées, leurs objectifs et finalement aboutir à la constitution de groupes de travail.

D'une manière générale, on constate qu'il y a un réel besoin de retourner à des règles simples, compréhensibles de tous et notamment des usagers. Jusqu'à présent, ce n'était pas forcément le cas, avec un règlement contenant une multitude de normes et de dispositions écrites en langage juridique parfois peu compréhensible.

A côté de cela, plusieurs difficultés subsistent au cours des réflexions menées. Dans un premier temps, on pourrait se demander s'il est nécessaire de refonder de nouvelles règles, ou « simplement » d'adapter celles existantes. Cette question se pose dans le cadre de l'ambition affichée par la mise en place d'un coefficient de biotope « unique », qui paraît pour le moment trop « novatrice » et qui pourrait ne pas être validée par les élus de Rennes Métropole. Il semble encore nécessaire de laisser du temps à la collectivité pour notamment faire les études complémentaires qui permettront de mieux cadrer les prochaines mesures réglementaires. On constate aussi une certaine peur de repartir d'une « feuille blanche » pour repenser de nouvelles pratiques.

Il est encore compliqué de faire accepter la présence du « vert » à certains habitants. D'une part, par la gêne qui peut être occasionnée, notamment pour les arbres à proximité directe du bâti.

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En effet, on dénombre chaque année une importante demande d'abatage d'arbres. D'autre part, par l'effet de désordre, voire même de « sale » que peut renvoyer une végétation faiblement contrôlée ou la présence d'eau sur l'espace public. Même si ces aspects ne sont pas partagés par l'ensemble de la population, il subsiste notamment des inquiétudes de la part de certaines personnes de voir revenir l'eau en surface. Ces premières observations démontrent le travail qui reste à réaliser pour sensibiliser le grand public à la présence d'eau et de végétation en zone urbaine, mais également au rôle qu'elle peut jouer pour le confort et le bien-être des citoyens. Il semble donc nécessaire de renforcer la communication sur ces différents aspects, notamment par l'intermédiaire de plaquettes pédagogiques. Par ailleurs, il semble tout aussi important de responsabiliser le citoyen par rapport à son lieu de vie et lui permettre de s'y investir, tout en laissant la collectivité en définir le cadre.

On remarque également certaines stratégies territoriales qui peuvent paraître paradoxales. Par exemple, dans la volonté de limiter la consommation d'espace en densifiant et en surélevant les constructions, ce qui contribue à renforcer l'ICU, phénomène qui est une des préoccupations majeures des stratégies d'adaptation sur le territoire. Ces contradictions expriment clairement le fait que la gestion menée par la collectivité ne peut pas être optimale sur toutes les thématiques, notamment sur l'aspect développement économique et lutte contre les GES et l'ICU. Il faut donc accepter le fait qu'on ne peut pas être « bon » sur toutes les problématiques et qu'il faudra faire des compromis selon les projets ou selon les priorités. Ce type de démarche nécessite en revanche l'appui politique, étant donné qu'il est généralement mal perçu d'avoir un tel discours au sein des services techniques.

Depuis quelques années, la baisse des finances publiques contraint de manière importante la gestion des collectivités, notamment concernant celle des espaces verts. En effet, la capacité à faire est de plus en plus limitée, notamment pour l'entretien des espaces verts. D'un autre côté, cet entretien reste relativement coûteux, en raison de la main d'oeuvre nécessaire, mais aussi des moyens techniques. Il y a donc une nécessité de trouver un équilibre entre intérêt écologique/esthétique et coût de réalisation/entretien.

Concernant la mise en place potentielle d'un coefficient de biotope, il subsiste un certain nombre d'interrogations. Avant toute chose, on pourrait se demander si le nom de « coefficient de biotope » est adapté concernant les objectifs qui sont majoritairement liés à la gestion de l'eau. Cela rend également compte de la difficulté qui existe à intégrer tous les enjeux en un outil synthétique. De plus, il n'existe pas encore de retours d'expériences solides sur la mise en place d'un tel dispositif. Il est donc très difficile de savoir sur quel exemple s'appuyer pour ensuite construire sa propre réflexion. En effet, la quasi-totalité des communes interrogées dans le cadre de ce travail viennent à peine de mettre en place leur nouvelle réglementation et il leur est donc encore impossible de tirer des conclusions. Seule Paris, qui a instauré son coefficient de végétalisation en 2006, dispose de quelques éléments de réflexions supplémentaires. La révision de leur PLU étant engagée actuellement, la règle à vocation d'être améliorée. Le problème principal reste malgré tout l'encadrement de la réglementation, son suivi et sa vérification une fois l'aménagement réalisé.

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En effet, il est impossible de contrôler le projet réalisé par rapport aux plans initiaux, comme vérifier les épaisseurs de terre par exemple. Hormis cette difficulté, des améliorations sont cependant souhaitées, à la fois sur l'aspect quantitatif, en augmentant les surfaces végétalisées, mais également sur le plan qualitatif, en renforçant la qualité des aménagements, notamment sur les substrats utilisés pour les toitures végétalisées. Ces derniers sont souvent trop peu épais pour avoir une réelle incidence sur la gestion des eaux pluviales, avec un substrat de mauvaise qualité, éloigné des caractéristiques d'un sol naturel. Une réflexion est également en cours à Paris pour mieux choisir les espèces végétales et optimiser la configuration des toitures végétalisées, afin de garantir un accès facile pour leur entretien. De plus, certaines contraintes supplémentaires, comme les mesures thermiques, nécessitent la mise en place de ventilation et/ou de climatisation, qui se font généralement au détriment des terrasses végétalisées.

Lorsqu'on s'intéresse à l'élaboration d'une nouvelle règle, il faut savoir sur quelle base elle s'appuie. Même si la plupart des communes utilisent généralement leur zonage PLU pour établir leur coefficient de biotope, cette solution n'apparait pas forcément comme la meilleure, car elle ne prend pas en compte tous les aspects (sensibilité des sols vis-à-vis de l'infiltration, sensibilité vis-à-vis de l'ICU). Cependant, on peut comprendre que cette solution soit généralement privilégiée, en raison du gain de temps mais aussi et surtout de l'aspect économique, de par les études qui peuvent parfois être nécessaires (comme sur l'infiltrabilité des sols). On peut aussi se poser la question des coefficients de pondération. Il est très difficile de déterminer la « valeur écologique » globale de chaque type de surface ou de chaque type d'espace vert. Les exemples choisis montrent d'ailleurs assez bien que les coefficients diffèrent selon les exemples, même pour une surface identique. De ce fait, on pourrait se demander s'il ne serait pas plus judicieux d'attribuer une « note » pour chaque surface et pour chaque thématique : gestion des eaux pluviales, ICU, biodiversité, etc. Même si le but est d'arriver à une règle plus globale, prenant en compte le maximum d'enjeux et d'objectifs, il sera difficile d'être efficace sur chacun d'entre eux. Les valeurs écologiques servent donc avant tout d'estimer « l'efficacité environnementale » de la surface.

Des interrogations se posent aussi sur la définition de l'espace de pleine terre. En effet, il n'existe pas réellement de définition stricte sur cette notion, qui est pourtant au centre de la démarche, puisque l'idéal serait d'avoir un maximum de cette surface. L'étude des différents PLU des villes ne permet pas de faire ressortir une définition unique. De même que l'épaisseur retenue pour définir un espace de pleine terre peut varier d'une commune à l'autre (de 60 cm à 1 m de profondeur). À Rennes par exemple, le règlement ne définit aucune valeur limite pour considérer un espace de pleine terre, précisant qu'il s'agit seulement d'un espace perméable devant recevoir des plantations, tout en excluant toutefois les espaces de stationnement. Dans une certaine logique, on devrait considérer qu'un espace de pleine terre est qualifié comme tel lorsqu'il n'y a rien d'autre en dessous que le sol.

Il existe encore sur le territoire français une vraie « rupture végétale » entre l'espace public et l'espace privé, d'où l'intérêt d'accentuer les réflexions sur ce point. Il risque cependant d'être difficile de faire vraiment évoluer les choses sur cet aspect, car il y a une vraie culture française de ce qu'on pourrait appeler un « cloisonnement ». A cela s'ajoute les problématiques liées à l'évolution des îlots et à leur reconversion.

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La question se pose notamment sur les limites séparatives et les haies végétales, qui ont souvent tendance à être remplacées par des claustras fermés, qui ne permettent plus la transparence des parcelles. Si les prochaines réglementations visent à instaurer davantage de haies végétales, la question sensible de l'entretien se posera, essentiellement pour les personnes âgées en incapacité d'entretenir leurs clôtures.

Il arrive aussi que les règles préalablement écrites soient transgressées. C'est notamment le cas au niveau des chantiers, où bien souvent toute la végétation présente sur la parcelle est rasée pour le nouvel aménagement. Hors, la végétation remarquable, notamment les grands arbres bien développés, font normalement l'objet d'une protection lors d'un nouvel aménagement. Autre problème, les aménagements sur dalle, qui sont parfois trop peu végétalisés et qui ne correspondent pas forcément aux plans initiaux. Ces aspects sont surtout permis par la difficulté de contrôle qui existe entre la validation du permis de construire et les travaux. Si on veut réduire ces risques, la collectivité doit se donner les moyens, ce qui implique des coûts supplémentaires de fonctionnement et des moyens humains plus importants.

Concernant le guide sur l'imperméabilisation, il faudra veiller à éliminer tout risque d'inondation en cas de non infiltration naturelle des eaux (surtout si les réglementations sont très restrictives). Un raccordement au réseau en cas de trop plein devra être nécessairement prévu pour éviter ce genre de situations. De même qu'il faudra s'assurer de l'entretien des ouvrages techniques en matière de gestion des eaux pluviales, par exemple les puits d'infiltration, qui peuvent être soumis à des risques de colmatage. Cette vérification devrait être à la charge de l'aménageur et examinée lors de l'établissement des plans du projet.

On pourrait également imaginer des règles différentes en fonction du type de réseau d'assainissement (séparatif ou unitaire), même si pour le moment, le réseau unitaire reste très largement majoritaire au niveau de la ville de Rennes.

Le débat reste également très ouvert sur la liberté octroyée aux aménageurs dans la conception des projets, notamment si on retient une hypothèse de règle avec une OAP. En effet, ces derniers ont généralement tendance à réaliser leur projet en fonction du coût et pourraient alors mettre de côté l'aspect « environnemental » recherché. Il faudra donc veiller au cadre instauré par la collectivité si le choix est laissé au prestataire.

Concernant les groupes de travail qui ont été mis en place, il pourrait être intéressant de rajouter un climatologue, afin de développer les principes et objectifs sur cette thématique et d'obtenir plus de précisions sur la disposition de la végétation au sein des parcelles par exemple. De même, que l'aspect pédologique, qui est surtout traité au travers de l'aspect végétation. Hors, il se trouve que c'est une problématique assez importante, surtout en ville où les sols sont souvent de mauvaise qualité (remblais, compaction).

Il semble aussi que les parcelles du centre-ville très imperméabilisées doivent faire l'objet d'une attention toute particulière. Celles-ci devront probablement être traitées spécifiquement par rapport à des secteurs moins denses.

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Il arrive aussi que certaines parcelles ne puissent pas réduire leur imperméabilisation, à moins de prendre de l'espace sur l'espace public ou de faire des toitures, qui ne sont pas toujours réalisables.

Enfin, afin d'éviter le côté trop réglementaire, on pourrait penser à un système de bonus, afin d'inciter les aménageurs à faire plus que ce qui est imposé par les réglementations. Par exemple, une réduction de l'impôt foncier si la preuve est donnée que les installations techniques (toitures végétalisées, noues) fonctionnement correctement, ce qui n'est pas toujours le cas.

Les questions soulevées dans cette partie démontrent la complexité du sujet à appréhender les thématiques dans leur globalité. Ceci est d'autant plus vrai compte tenu des liens étroits qui existent entre climat, végétation, eau et sol. Bien qu'il existe encore beaucoup d'interrogations sur la méthodologie à employer pour les futures réglementations, on constate globalement un réel intérêt de repenser l'existant et de retourner à des choses finalement plus simples et plus « naturelles » (végétation moins contrôlée, cycle « naturel » de l'eau).

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry