3. LES SPECIFICITES DE L'ACTIVITE BANCAIRE
Le secteur bancaire est une activité à part
entière dont les spécificités peuvent nous aider à
comprendre les impacts qu'une crise déclenche chez les consommateurs.
Ces spécificités nous aideront aussi à appréhender
les problématiques auxquelles le secteur fait face en termes de
communication.
Les banques proposent des services, ce qui nous amène
à rappeler rapidement les implications de vendre un service plutôt
qu'un bien. Tout d'abord, le produit est intangible et donc non brevetable, ce
qui laisse place à la concurrence. La production et l'utilisation du
service sont inséparables ce qui implique le consommateur dans le
processus de production. En raison de la demande et de l'offre fluctuante
(épargne et demande de crédit), le service est donc
périssable et il faut réussir à ajuster la production et
la vente. L'hétérogénéité de qualité
de service est un point plus discutable dans le secteur bancaire car les
produits sont automatisés.
Dans un processus de servuction17 standard, quatre
éléments entrent en jeu : le support physique, le client le
personnel ainsi que le service final18. Or dans un processus
bancaire, nous pouvons identifier facilement le client, le personnel en contact
avec le client ainsi que le service (obtenir un crédit, placer son
argent, payer en carte bleu...). En revanche il y a peu de support physique
puisque les opérations financières se déroulent sur nos
comptes de manière scripturale. Une carte bancaire peut être
considérée comme un support physique mais ce n'est pas ce qui
produit réellement le service. Tout cela n'est pas visible pour le
consommateur. Tous ces facteurs expliquent pourquoi les banques ont du mal
à se différencier les unes des autres. L'époque où
les banques avaient des spécialités (exemple du Crédit
Agricole) est révolue et elles se partagent dorénavant les
mêmes clients.
Le professeur Badoc a déclaré en 2005 « les
banques ont une particularité, celle de ne pas avoir de véritable
marque ».19 Selon lui, les clients entrent principalement dans
une banque grâce aux parents, au prix ou encore pour la proximité
géographique. La qualité du service ou l'image
dégagée par un groupe bancaire restent des critères
d'arrière-plans. Or si l'on prend les composants le mix marketing, nous
comprenons rapidement qu'une banque ne peut pas se différencier
efficacement avec le prix, le produit ou la distribution. Cela est imitable par
les concurrents. Le seul vecteur de différenciation est la
communication, qui peut permettre à une marque de se créer une
réelle identité et de fidéliser ses clients.
17 Terme défini le glossaire p.69
18 Gabriel.G (2014) - Marketing des services, Edition
Dunod
19 M.Badoc (2005) - Professeur à HEC - Horizons
bancaires, n°325
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La contrainte légale est aussi une des
spécificités du secteur bancaire qui vient renforcer le premier
point. En effet la législation amène les banques à
homogénéiser leur offre. Cette contrainte légale a
été accentuée suite à la crise de 2008 avec par
exemple la mise en place progressive du traité européen BAALE
III20. La protection législative du consommateur en
matière de produits financiers et de communications est de plus en plus
forte et participe ainsi à lisser l'offre du marché21.
Les banques doivent donc appliquer ces lois, et de fait, se ressemblent de plus
en plus.
Dans le marketing bancaire, il faut aussi soulever la
problématique de l'argent. C'est en effet un produit qui revêt une
connotation bien spécifique aux yeux des clients. Tout d'abord, nous
accordons beaucoup d'importance à l'argent, puisque c'est le reflet d'un
héritage ou bien de la récompense de notre travail. Les clients
ont besoin d'avoir confiance dans l'entreprise qui manie son argent. Abdennabi
Aboulaarab (2006)22 a effectué des recherches basées
sur l'échelle de T.Tang (2002) afin de comprendre comment l'argent est
perçu par les consommateurs. L'auteur conclut que l'argent peut
être vu comme un symbole de succès ou de mal. Appliqué au
secteur bancaire, l'auteur affirme qu'à cause de l'importance
portée à l'argent, un client prête plus attention à
la manière dont est géré l'argent par la banque et une
mauvaise gestion de l'argent sera alors jugée de manière plus
critique et sévère. Dans la culture française catholique
(contrairement à la culture protestante), l'argent a toujours
été présenté comme un mal. « Vous ne pouvez
servir Dieu et l'Argent 23 ». Les banques restent encore
psychologiquement représentées comme des entreprises
opérant sur un marché non sain. D'un point de vue historique, il
faut aussi rappeler que l'argent a toujours été associé au
pouvoir qui est lui-même associé à une forte
défiance. En raison de cette perception paradoxale de la valeur de
l'argent, nous comprenons pourquoi la confiance des consommateurs peut
être rapidement engagée lors d'une crise.
Geneviève Paviot24 nous rappelle aussi que
dans ce secteur, le client est à la fois « utilisateur et
fournisseur » du service consommé. Il est donc très
impliqué dans les actions de l'entreprise. Rihab Ben Hamida
(2012)25 fait remarquer dans son Mémoire, qu'aujourd'hui, les
barrières de sortie d'une banque ont baissé grâce notamment
au développement d'Internet et de la concurrence. Changer de marque
bancaire reste toutefois plus complexe que de changer de marque de lessive.
Cette analyse du secteur bancaire nous amène à
comprendre que l'activité bancaire est une activité ancienne mais
que le paysage actuel des banques françaises est très
récent et en constante mouvance.
Le rôle des banques est primordial dans la
société capitaliste où nous vivons, ce qui impose au
gouvernement un contrôle et un soutien en cas de crise. Enfin nous avons
compris que les banques françaises ont du mal à se
différencier tout un manipulant un produit très
spécifique, l'argent.
20 Terme défini dans le glossaire p.69
21 2ème volet de la loi sur la régulation et la
séparation des activités bancaires 2013
22 Aboulaarab Abdennabi (2006) - Système de valeur et
attitude à l'égard de de l'argent
23 Nouveau Testament de la Bible - Matthieu 6:24
24 Paviot G. (1995) - La communication publicitaire et la
réputation des banques
25 Rihab Ben Hamida (2012) - Le marketing bancaire et la crise
financière
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