Conclusion
Si pour les professionnelles il n'y a pas de
différences entre auxiliaires et CAP, on constate pourtant qu'au sein de
la crèche municipale, et ce dans les deux sections, les auxiliaires ont
en charge les enfants les plus jeunes. Cependant les anciennes ont
également et ce en dépit du diplôme, un rôle de
conseil et de chaperon auprès des nouvelles professionnelles et
stagiaires.
On constate également que la pédagogie Pickler
Loczy, au centre du projet d'établissement est un repère dans le
travail des équipes.En effet cette pédagogie conditionne leur
pratique, car elle est à l'initiative du plan des locaux mais aussi de
l'organisation du travail (prise de repas, pédagogie, sieste).
Crèche parentale :
Une Journée type
Première journée en crèche
parentale :
Il est 8h00 C (AP) m'accueille, elle est d'ouverture avec N
(AP).
Il y a déjà quelques enfants présents. C me
montre les locaux pendant que N accueille les parents qui déposent leur
enfant.
Il y a une salle commune, avec un coin bébé
délimité par des barrières, au milieu de la salle commune
se trouve un espace de motricité avec toboggan et marche, et une cabane
entre les marches et le toboggan.
A droite il y a trois salles d'ateliers qui donne sur la salle
commune, ateliers transvasement et piscine, atelier peinture et atelier
lecture, musique ou relaxation.
A 8h30la crèche est à pleine capacité c `est
à dire 25places.
2personnels arrivent à 9h.
9h50, c'est très dense dans la salle, il y a des
allées et venues de personnelles et d'enfants sans arrêt. Certains
enfants chahutent, un bébé pleure pour palier à
l'effervescence Ev (AP adjointe en direction) décide de prendre un
groupe d'enfant en activité dessin.
Les bébés vont en sieste, deux bébés
restent dans le coin bébé.
5 enfants volontaires sont en activités dessin, Ev
m'explique à ma demande comment se passe les ateliers, soit l'atelier
est ouvert soit il est fermé et l'enfant reste jusqu'au bout.
Ici l'atelier est ouvert à ceux qui veulent,
« la porte reste ouverte mais ils doivent respecter la barre de
seuil ». Ils ne sortent pas et ne rentrent pas sans demander pendant
l'activité. On limite l'activité à un certain nombre
d'enfants pour ne pas « surcharger l'atelier » (Ev).
3 organisations des professionnels au sein des
deux structures:
On constate des différences d'organisation
remarquables entre les deux types de crèches :
Au sein de la crèche municipale les sections sont
cloisonnées, c'est à dire que les moyens grands sont
séparés des bébés par une cloison, cependant un
pan de cette cloison est en plexiglace les enfants peuvent donc s'apercevoir.
Les professionnelles sont en binôme au sein des sections elles sont deux,
une auxiliaire et une Cap.
Les encadrantes l'EJE en direction et l'infirmière en
adjointe ont leur bureau à l'entrée, la directrice partage le
sien avec la secrétaire. La halte-garderie est à
l'extrémité de la crèche dans une section à
part.
L'organisation spatiale de la structure et son effet
dans les pratiques :
Le type de locaux a une influence importante sur les
pratiques des professionnelles. Les
professionnelles restent en binôme, elles n'ont que très peu de
contact avec leurs collègues des autres sections.
De plus l'organisation spatiale permet de maintenir les
enfants en petit effectif et par groupe d'âge.Cela permet aux
accueillante d'être plus disponible pour les enfants que dans un groupe
où les enfants sont nombreux.Cela limite aussi le bruit, je remarque que
les enfants sont très calmes dans les sections et peu bruyants.Ce calme
peut être imputé pour partie à la méthode Loczy
(jeux peu bruyants importance du relationnel...), mais l'organisation spatiale
favorise aussi l'apaisement des enfants.
La section est ainsi comme un « cocon » ,
elle délimite l'espace et cadre l'action des accueillantes, canalisant
la concentration de l'intervenante sur le groupe d'enfants qu'elle a en
charge.
Les horaires des accueillantes :
J'ai recueilli les horaires des personnels des deux
crèches. Au sein de la crèche parentale les horaires sont
réalisés en fonctions des besoins des personnels. Les
accueillantes s'arrangent entre elles et avec la directrice pour les plannings.
Il y a des filles d'ouverture d'autres qui arrivent à
10h , celle d'après midi à 14h, et les filles de fermeture
partent à 19h.
En ce qui concernent la crèche municipale, il y a un
roulement fixe au sein de chaque binôme. L'accueillante
est une semaine d'ouverture et une semaine de fermeture (7h-18h ou 8h-19h).
Elle est donc seule une heure le matin ou une heure le
soir.
La directrice et l'infirmière :
La directrice vient de temps en temps dans les sections passer
les messages que les parents laissent lorsqu'ils rappellent la crèche
dans la journée, elle vient aussi signaler les absences.
J'ai observé que lorsqu'il n'y a rien à
signaler elle vient quand même quelques minutes le matin elle
« passe faire un coucou » selon ses termes.
L'infirmière quant à elle passe matin et
après-midi dans les sections « elle fait sa
ronde » demande si tout va bien discute un peu, regarde les
enfants malades et conseille les AP « il faudrait plus laver le
nez de Lisa car ça coule pas joli joli » a-t-elle dit un
matin à A AP qui lui indiquait que Lisa était malade.
Elle intervient aussi lors des visites du médecin
à la crèche, comme une intermédiaire entre les
équipes et le médecin. Quelques jours plus tard Lisa qui
présentait de la fièvre, a dû recevoir la visite du
médecin à la crèche après demande des parents et
accord de la directrice.
L'infirmière a dressé le bilan clinique de
Lisa : elle a résumé au médecin les symptômes
de Lisa son âge, poids et depuis quand elle présentait des
symptômes.
Comme le suggèrent ses fonctions, elle a donc un
rôle préventif et médical au sein de la structure,
puisqu'elle conseille pour éviter les maladies et intervient
auprès du médecin et des équipes lorsqu'elles sont
là.
Elle a également un rôle directif dans ce
même épisodes elle dit à l'axillaire en fin de visite du
médecin : « le mieux serait qu'on la garde
jusqu'à demain et qu'après elle reste à domicile, je
compte sur vous pour en parler aux parents si ils tiquent vous me les
envoyez ! »
En effet le cloisonnement des sections entraîne un
isolement entre les professionnels des deux structures et une communication
moins fréquente entre les professionnels dans la journée. J'ai
observé que lors de leurs journées les auxiliaires et animatrices
des sections bébés et moyens-grands ne sont pas amenés
à travailler ensemble. Elles se croisent parfois dans la salle de
déjeuner pour celles qui restent manger sur place ou lors de la pause du
matin, mais n'ont pas nécessité de communiquer pour mener
à bien leur journées de travail.
Cependant, dans la crèche municipale, cet isolement est
complété par les réunions d'équipe, les formations
en équipe et les groupes d'analyse de pratique.
Le projet d'établissement permet aussi une grande
cohésion des équipes, ainsi les personnels semblent
adhérer complètement à la pédagogie LOCZY et les
pratiques paraissent homogènes car toutes en cohérence avec cette
pédagogie.
B (cap en cours de VAE AP) du groupe des moyens m'a
expliqué plusieurs fois l'importance de mettre des jeux qui ne font pas
de bruits (jouets en mousse) avant le repas et la sieste.
E (AP ayant validé le diplôme EJE par VAE) de la
section bébé m'expliquait la même chose, selon elle :
« changer les jouets pour des jeux calmes avant le repas et la
sieste permettrait de calmer les enfants et de favoriser l'éveil des
saveurs lors du repas ».
De ce fait les équipes se retrouvent dans le projet
éducatif ce qui entraîne une certaine solidarité.
B disait d'ailleurs en parlant de la crèche et de son
projet pédagogique (méthode Loczy) « on est tous
dans le même bateau, ceux à qui ça plaît pas doivent
quitter le navire»
Modèle de solidarité mécanique (rappel
de la partie 1)
« Le premier type, qui repose sur un
modèle de solidarité mécanique [Durkheim,
2007], s'observe le plus souvent dans des petites crèches sans sections
ou unités de vie séparées.
L'ensemble des enfants est alors regroupé dans un
même espace de vie. Dans ces structures, la solidarité
mécanique résulte de la proximité: les professionnelles
travaillent ensemble dans une communauté
d'intérêts.
L'ensemble du personnel partage des valeurs communes
fortes. À cet égard, la conscience collective est
élevée et l'écart à la norme difficilement
tolérable car c'est la cohésion sociale de tout le groupe qui
peut en être ébranlée.
Dans ces crèches, les professions sont peu
différenciées : l'éducatrice de jeunes enfants, la
puéricultrice, l'infirmière, l'auxiliaire de puériculture,
la titulaire d'un CAP petite enfance ou d'un contrat aidé occupe la
même fonction. La division du travail est faible et la directrice,
même si elle joue un rôle à part, fait partie
intégrante de l'équipe et prend part à toutes les
tâches. C'est un schéma organisationnel qui peut fonctionner
à condition que les professionnelles ne soient pas trop attachées
à un titre ou une fonction. »29 (p7)
Ce schéma organisationnel s'observe dans la
crèche parentale étudiée, il y a un seul espace de vie ou
tous les enfants se retrouvent, deux coins change un pour les moyens-grands et
un pour les bébés; ces espaces peuvent fermer à l'aide de
porte lors du change pour respecter la pudeur des enfants. Donnant sur la salle
à vivre on dénombre trois salles d'ateliers qui ferment avec une
porte.
Un espace bébé a été
délimité dans le fond de la salle par une barrière, il se
trouve à proximité de la salle repas qui elle aussi est
séparée de l'espace à vivre.
En ce qui concerne les professionnels, les relations sont
horizontales et la hiérarchie des diplômes quasi inexistantes.
Il n'y a d'ailleurs pas de fiches de postes, sont prises comme
modèles celle de l'ACEPP, mais en réalité les personnels
en relation avec les enfants ont toutes les mêmes tâches prescrites
à accomplir, en dehors de l'EJE qui assure à la fois le terrain
et la charge de direction.
Il y a une entraide au niveau de l'organisation, on se
répartit les tâches on aide au repas si besoin même si on
est prévu ailleurs. Ev l'ancienne directrice me rapporte d'ailleurs
qu'avant d'avoir une employée ménagère tout le monde
faisait le ménage à tour de rôle même la
directrice : « Il n'y a pas plus de tâches
ménagères pour les CAP que les auxis, les tâches sont
reparties sur tout le personnel sans distinction »
Il existe cependant « un noyau de
base »dans l'équipe, ce sont les personnes qui sont là
depuis l'ouverture de la crèche, cette équipe
« d'anciennes » est très soudées et semblent
avoir plus de poids dans les décisions, et dans le fonctionnement
globales de la crèche, notamment parce qu'elles portent le poids du
projet de crèche qu'elles ont élaboré à
l'ouverture.
Elles interviennent plus souvent surtout auprès des
parents, j'ai remarqué que quand les mamans ont besoin de conseils, ce
sont les « anciennes » qui leur répondent.
Au niveau du projet d'établissement l'accent est mis
sur la place du parent et tout est fait pour que le parent fasse partie
intégrante de la crèche. En effet il assure occasionnellement des
permanences au sein de la structure, et quotidiennement il rentre dans la
pièce à vivre pour déposer son enfant puis la traverse
pour déposer le repas de l'enfant dans le frigo et enfin il va dans la
salle de change pour ranger les affaires de rechange et le doudou de
l'enfant.
Les locaux sont fait de telle façon qu'en
réalisant ce parcours le parent parcours une bonne partie de la
structure, certains même s'asseyent pour discuter avec le personnel au
moment de la séparation sur la banquette située à
l'entrée. J'ai pu observer ainsi une maman s'asseoir au moment de
déposer son enfant et rester parler à l'équipe demander
des conseils pour préparer la naissance du second enfant qu'elle attend,
puis s'en aller au bout d'une demi-heure.
Un système de solidarité organique.
Les deux autres types d'organisation des crèches
reposent sur un système de solidarité dit organique.
Ils sont à l'oeuvre dans des crèches plus ou
moins grandes accueillant entre trente et cent enfants. Elles sont
généralement divisées en sections ou unités le plus
souvent désignées de la façon suivante: les petits pour
les enfants qui ne marchent pas encore et les moyens et grands pour les enfants
qui marchent.
Les rôles et fonctions des personnels sont plus ou
moins définis selon le modèle suivant : la directrice et son
adjointe se répartissent les tâches liées au travail
administratif et comptable; elles gèrent les plannings, les absences,
les congés, organisent des réunions de travail, assurent le
premier accueil des parents et le cas échéant prennent en charge
les problèmes rencontrés avec ces derniers.
Du fait de leur charge de travail et de la nature de leur
fonction, elles ne sont qu'exceptionnellement présentes dans les
sections et le plus souvent pour compenser un manque de personnel.
Les auxiliaires sont les personnes référentes
pour l'ensemble des besoins à satisfaire chez l'enfant. Quant aux
éducatrices de jeunes enfants, selon leur nombre, elles
développent des activités éducatives en section de
façon discontinue ou sur un mode volant en consacrant des
journées ou des demi-journées à telle ou telle section,
à tel ou tel petit groupe d'enfants. Au sein de ce système de
solidarité organique reposant sur une plus grande spécialisation
des tâches, les fonctionnements peuvent toutefois être assez
différents en fonction des choix d'organisation, ce qui amène
à distinguer deux organisations type, l'une rigide et l'autre
ouverte. »29
La crèche municipale fonctionne sur ce plan de
solidarité organique, elle est divisée en trois sections
moyen-grands bébés et halte-garderie. On retrouve une
organisation rigide en ce qui concerne les postes de direction : la
directrice(EJE) et la directrice adjointe(Infirmière) ne sont pas
présentes en section.
Il y a une auxiliaire et une Cap qui travaille en binôme
dans chaque section, selon la fiche de poste de la crèches la CAP est
sous la responsabilité de l'auxiliaire, cependant les tâches
prescrites sont similaires entre les auxiliaires et les Cap, les Cap
étant détachées du ménage qui incombe à
l'agent d'entretien.. Il y a de l'entraide entre personnel, ainsi j'ai
observé un échange de connaissance au sein de la structure. Ainsi
B et A en binôme en section moyen-grand s'entraident B apporte son
expérience et A ses connaissances médicales, elle l'aide aussi
à faire son dossier VAE. Je n'ai pas observé de
différences entre les tâches réelles et les tâches
prescrites, les fiches de poste étant les mêmes pour auxiliaire et
CAP.
Cependant j'ai remarqué que les personnels endossaient
un rôle en fonction de leur diplôme, ainsi lors de la visite du
médecin pour un enfant malade, j'ai pu observer le concours de
l'infirmière au médecin pour lui rapporter les symptômes de
l'enfant et l'auxiliaire lui a décrit le comportement de l'enfant, les
soins réalisés et la température de l'enfant B la CAP
s'est plutôt tenu à l'écart de la scène en restant
auprès des autres enfants, elle n'est intervenues que pour rapporter les
transmissions que les parents lui ont faite en déposant l'enfant au
matin. Ainsi sur un épisode tel que celui-ci la hiérarchie
hospitalière se trouvait comme tout d'un coup rétablie alors
qu'elle était imperceptible avant l'arrivée du médecin.
Professionnalisation des personnels de
crèches
B est Cap dans la crèche municipale , elle passe la VAE
auxiliaire de puériculture pour la seconde fois car elle n'a pas tout
valider l'an passé « Il y a huit dossiers à
valider ,c'est assez complet, ça se rapporte à
l'expérience et quand on est sorti des études depuis longtemps
...voilà après j'aurai préféré faire la
formation parce que là ça apporte pas des connaissances nouvelles
, ça se base que sur la pratique en fait...moi ça fait 14ans que
je fais ça. »
Au sein de la crèche municipale, les VAEs sont
soutenues par le plan de formation ainsi B suit un accompagnement à la
VAE, cependant, elle ne voit pas cette VAE comme professionnalisante.
Elle me présente sa démarche comme une
démarche par dépit par rapport à la formation
(« j'aurai préféré faire la formation parce
que là ça apporte des connaissances
nouvelles »).
Au sein de la crèche parentale, les VAE sont
encouragé notamment par Ev (ancienne directrice) qui a d'ailleurs
monté un plan d'accompagnement avec la fédération des
crèches parentales du Lot pour les candidates à la VAE d'EJE. Cet
accompagnement permet aussi l'acquisition de connaissances théoriques
qui sont d'après Ev essentielles pour acquérir la posture de
l'EJE.
Dans ce contexte la VAE est une voie de professionnalisation
à part entière pour les personnels.
Professionnalisation de la structure :
La crèche municipale, était
avant(d'après le témoignage de B) gérée par la
C.A.F.
L'ancienne directrice était une puéricultrice,
c'est elle qui a décidé d'inclure la pédagogie Loczy dans
la pratique des équipes.
Pour B c'est mieux d'avoir une puéricultrice en
direction, car l'EJE n'a pas de connaissances médicales. Elle
reconnaît cependant les compétences de l'EJE en tant que
gestionnaire mais elle affirme: « L'EJE même
l'infirmière elles sont bien en encadrantes mais elles n'ont pas de
formation médicales, enfin si pour l'infirmière mais elle n'est
pas spécialisée dans l'enfant. »
Selon B, lorsque la crèche était à
gestion CAF il y avait plus de budget et plus de possibilités de
formation.
Elle a déjà participé à de
nombreuses formations réalisées en équipe sur la
pédagogie Loczy
La crèche avait aussi mis en place un groupe d'analyse
de la pratique, animé par un psychologue lors des réunions
d'équipe.
Les réunions d'équipe sont assez
fréquentes, tous les mois ou tous les deux mois, quant au groupe
d'analyse de pratique, selon B, cela a été suspendu depuis
quelques mois faute de budget.
Au sein de la crèche parentale, la professionnalisation
consiste plus en des formations continues proposées dans le cadre de la
DIF parfois elles sont suivies de façon collective (formation sur site)
mais la plupart du temps elles sont choisies de façon individuelle dans
un catalogue de formations proposées.
Le personnel de cette crèche est d'ailleurs
intéressé par un groupe d'analyse de pratique ou par des
formations avec un suivi (qui ont un prolongement dans le temps).
On constate des similitudes au sein de la crèche
parentale, Gen CAP regrette qu'il n'y ait pas plus de formations continues qui
soient des formations pratiques :
« Avant il y avait des formations sur un
à trois ans en peinture, conte, animations avec des stages et des
journées ponctuelles une fois tous les trois mois environ. Cela
transformait les pratiques et donnait de l'entrain et de la motivation au
personnel »
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