Mémoire
L'assurance participative
Soutenance en date du 12 septembre 2016
Mémoinre réalisé par Monsieur Nicolas
CHANNAC
Sous la direction de Monsieur le Doyen Pierre-Grégoire
MARLY
Master 2 mention Droit des Affaires spécialité
Assurance Banque UFR Droit, Economie, Gestion 2015-2016
2
Sommaire
Introduction 4
I. Une assurance intégrée à
l'économie participative 7
A. La constitution d'un collectif d'assurés 7
1. Un modèle collectif afin de servir leurs
intérêts de ses membres 7
a) Un modèle d'assurance reposant sur un collectif de
personnes 7
b) Un assuré à la recherche d'une couverture
d'assurance moins onéreuse 9
2. Les garanties proposées par les assurances
participatives 10
a) Les risques couverts par l'assurance participative 11
b) Les exemples de plateforme d'assurance participative 13
B. L'assurance collaborative un modèle qui flirte avec la
qualification juridique de l'opération
d'assurance. 15
1. L'opération d'assurance participative
appréhendée contractuellement 16
a) Les assurances participatives face à un risque
d'aléa 16
b) La nature des fonds collectés par l'assurance
participative 18
2. Les incidences de l'exclusion de la notion de prime
d'assurance 20
a) Les conséquences fiscales de l'assurance participative
21
b) L'assurance participative exclue du financement des fonds de
garantie 22
II. Un cadre juridique inadapté à
l'exercice d'une opération d'assurance participative sûre
23
A. Une exécution à risque de l'opération
d'assurance 24
1. Les conséquences en cas de sinistre 24
a) Le règlement des sinistres et le recours subrogatoire
de l'assureur 24
b) Le règlement des litiges en matière d'assurance
participative 27
2. Les obligations légales liées à
l'assurance 29
a) Quid des assurances obligatoires 29
b) L'assurance participative face aux règles de
solvabilité et de contrôle étatique 31
B. Une activité d'intermédiation en assurance
participative 32
1. Les critères de l'intermédiation applicable
à l'assurance participative 33
a) L'activité consistant à présenter,
proposer ou aider à conclure des contrats d'assurance
contre une rémunération 33
b) Une obligation d'immatriculation à l'ORIAS 35
2. La création d'un statut réglementé sur le
modèle du financement participatif 38
a) Un régime juridique spécifique pour l'exercice
des métiers de l'assurance participative 38
3
b) Un régime juridique renforcé par une assurance
de responsabilité civile 40
Conclusion 42
Bibliographie 46
4
Introduction
L'économie participative, ou économie
collaborative, a été théorisée dès 1978.
Certains auteurs préfèrent cependant employer le terme
anglo-saxon, d'économie peer-to-peer1. Ce modèle
économique connaît depuis ces dix dernières années
une forte croissance2, en proposant une alternative à un
modèle économie dit « classique ».
Cette économie participative s'est notamment
développée avec l'avènement des outils numériques,
plus précisément, via la création de plateformes
numériques3. Ce modèle économique impacte une
multitude de domaines de notre économie, comme les transports avec la
société Ouicar, ou encore le logement avec le succès de
Airbnb.
L'économie participative s'est également
attaquée au monopole bancaire, en proposant une alternative
appelée « crowdfounding ». Il s'agit d'un financement
participatif, qui consiste à collecter des apports financiers de
particuliers en vue de financer un projet, sous forme de don, de prêt ou
d'investissement en capital4.
Ce mécanisme de financement reste encore confidentiel
en France en terme de volume de fonds collectés, mais connait une
très forte croissance . Ce moyen de financement a été
consacré par les
5
pouvoirs publics par un cadre juridique adapté à
l'activité.
La dynamique de l'économie participative, s'explique
par deux phénomènes distincts. Tout d'abord en raison d'un
contexte économique difficile qui incite les consommateurs à
chercher des services à des prix toujours plus bas. Mais aussi en
raison, de la sécurité croissante des
1
KAPLAN D. « Collaboratif - Trois questions
àÉ Daniel Kaplan » in Fing, Alliancy, 30 janvier
2016, disponible sur :
www.alliancy.fr/article/industrie/2014/01/30/collaboratif-trois-questions-a-daniel-kaplan-fing.
Consulté le 30/07/2016.
2 FELSON M., SPAETH J. L. « Community Structure and
Collaborative Consumption: A Routine Activity Approach », American
Behavioral Scientist, 1978
3 Plateformes numériques collaboratives : les
recommandations du Conseil national de la Consommation, Ministère de
l'économie,
http://www.economie.gouv.fr/plateformes-numeriques-collaboratives-recommandations-conseil-national-consommation.
Consulté le 25/07/2016.
4 Le financement participatif ou crowdfunding, Direction
générale des entreprises,
http://www.entreprises.gouv.fr/politique-et-enjeux/financement-participatif-ou-crowdfunding.
Consulté le 02/07/2016.
5 Chiffres de l'ORIAS
5
transactions sur internet , qui poussent de plus en plus de
consommateurs, notamment de produits
6
d'assurance à souscrire une police en ligne .
7
Ainsi, contrairement au financement participatif qui est
juridiquement encadré, l'idée est apparue de mettre en place un
mécanisme d'assurance participative. L'objectif est de
s'émanciper des « assurances traditionnelles » en constituant
des collectifs de personne. Ce modèle se rapproche de la notion de
« tontine »8 mais uniquement en matière de garantie
dommage au sens du titre II du Livre Ier du code des assurances.
Nous pouvons inventorier trois types d'assurances
participatives. Il y a la forme que nous pouvons qualifier « peer-to-peer
» pure et parfaite, qui consiste à couvrir un risque uniquement par
des fonds versés par des individus sur une plateforme. Le
deuxième modèle est celui que nous pouvons qualifier de «
peer-to-peer» complémentaire qui consiste à couvrir un
risque sur des fonds communs mais également en s'appuyant sur un contrat
d'assurance pour couvrir des risques plus importants. Et le troisième
modèle, plus original, qui est repose sur un rachat de franchise
participative, dont le coût est couvert par une communauté
d'individus.
Le principal objectif est donc de réduire le coût
des garanties, tout en cherchant à offrir des garanties
équivalentes que celles proposées par les acteurs traditionnels
de l'assurance.
Même si l'idée d'une assurance participative peut
paraître opportune et séduisante. La mise en place d'un tel
mécanisme assurantiel, s'avère en pratique complexe. Car il
n'existe en effet, aucune réglementation pour accompagner le
développement de ce modèle participatif, que ce soit sur le plan
juridique, mais également sur le plan fiscal.
Les acteurs de l'assurance participative jouent même sur
cette absence de réglementation pour proposer des produits de couverture
d'un risque tout en essayant de se rapprocher au plus près
6
GUIGUE S. « L'assurance peer-to-peer, prochaine étape
de la désintermédiation ? » in L'
Atelier.net, 21 octobre 2014,
disponible sur :
http://www.atelier.net/trends/articles/assurance-peer-peer-prochaine-etape-de-desintermediation_431913.
Consulté le 29/06/2016..
7
Accenture, Un marché de 470 milliards à saisir, 31
août 2015, disponible sur :
www.accenture.com/fr-fr/company-newsroom-
insurance-470-billion-grasp-accenturen. Consulté le
29/07/2016.
8 KULLMANN J., « Les assurances liées à un
produit livré : les garanties de l'avenir », Revue
générale du droit des assurances n °6, Juin 2016, p.
2016.
6
d'une activité d'assurance. Nous assistons
réellement avec ce mécanisme, à une volonté des
consommateurs d'assurance de s'affranchir des offres proposées par les
entreprises d'assurances, se tournant vers des offres d'assurances plus
innovantes.
Cependant, le modèle que propose l'assurance
participative échappe à toute réglementation, ce qui
in fine, peut être préjudiciable pour les consommateurs
d'assurances.
Nous pouvons donc nous interroger sur le fait de savoir, si
l'assurance participative peut être un modèle de couverture du
risque viable sur le plan économique, mais plus particulièrement
au regard des dispositions légales actuelles ?
Le modèle d'assurance participative étant
relativement peu connu et peu commenté, les idées
exprimées sont le fruit d'une interprétation théorique au
regard des règles de droit en vigueur. Ainsi, nous nous
intéresserons dans un premier temps au modèle de l'assurance
participative dans sa constitution et l'intérêt d'un tel
modèle ainsi qu'une analyse par analogie des éléments
constitutifs de l'opération d'assurance appliquée à
l'assurance participative. Nous nous attarderons sur la notion de risque
couvert, mais également sur la nature des fonds collectés par les
plateformes d'assurances participatives qui revêtent une
problématique fiscale.
Dans un second temps, nous nous attacherons a étudier
le modèle de l'assurance participative au regard du cadre juridique
actuel, notamment sur la nécessité de protéger le
consommateur d'assurance, mais également le marché de l'assurance
au sens macro-économique. Puis, nous tenterons de démontrer
l'opportunité de mettre en place un statut d'intermédiaire en
assurance participative sur le modèle de celui des intermédiaires
en financement participatif.
7
I. Une assurance intégrée à
l'économie participative
Bien que nous soyons aux prémices de ce modèle,
l'assurance participative se caractérise par le rôle important des
assurés constitués en collectif (A), c'est en cela que repose
toute la force du modèle, mais également les limites en raison du
caractère réglementé de l'activité d'assurance
(B).
A. La constitution d'un collectif d'assurés
L'objectif du collectif d'assurés est de réduire
la place des assureurs institutionnels afin de mieux servir les
intérêts de ses membres (1), en proposant de nouvelles formes de
garanties (2).
1. Un modèle collectif afin de servir leurs
intérêts de ses membres
L'assurance participative par son caractère collectif
(a) permet de responsabiliser au maximum ses membres qui cherchent avant tout
de bénéficier d'un maximum de garanties pour un coût
moindre (b).
a) Un modèle d'assurance reposant sur un
collectif de personnes
8
Le fait de créer un collectif limité et
déterminé d'individus autour d'un même but, permet de les
responsabiliser face aux risques. Nous retrouvons cette même philosophie
dans les sociétés d'assurance mutuelle9.
En effet, les sociétés d'assurance mutuelle sont
toutes fondées à l'origine sur un collectif de personnes ou une
corporation qui partageaient des intérêts communs. C'est le cas
par exemple de la MAIF qui à son origine ne regroupait qu'un groupe
précis d'assuré, les enseignants et leurs familles. Les mutuelles
cherchent ainsi à faire primer leurs finalités sociales sur leurs
finalités financières.
Les anglo-saxons qualifient l'assurance participative sous le
terme « peer to peer insurance » qui revêt l'idée d'un
échange et d'un partage direct entre les consommateurs
d'assurance10.
Le collectif d'assurés se regroupe ainsi en
communauté, aussi appelé « pool » pour assurer des
biens sans avoir systématiquement recours à un assureur. Cette
communauté détermine les risques à couvrir, les primes et
traite les réclamations de garanties en décidant collectivement
de la recevabilité de celle-ci . Le risque couvert doit être
identique pour chaque assuré en étendue et en
11
dommage. Les assurés deviennent ainsi, des acteurs
actifs dans le fonctionnement de la communauté, réduisant
l'aléa moral12. Il s'agit d'un mécanisme proche de la
mutualisation.
Certains acteurs de l'assurance participative ont parlé
d'un retour "aux racines de l'assurance", avec un sentiment de
responsabilité accrue en raison d'un fort sentiment d'appartenance
à la communauté d'assuré dû à la couverture
réciproque du risque . Ce modèle conduit les assurés a
13
prendre moins de risques et permettant également de
réduire la fraude à l'assurance.
9Article L. 322-26-1 du Code des assurances.
10 WALKER B., « How Peer-to-Peer Companies Are Transforming
the Insurance Sector», The Street, 20 avril 2016.
11
Prudence à l'égard des plateformes de partage de
risque entre particuliers, Portail Québec,
www.fil-information.gouv.qc.ca,
consulté le 20/07/2016..
12 AMA Assurance, « Assurance peer-to-peer : ubériser
ou se faire ubériser ? », in AMA Assurance, 11 mars 2016,
disponible sur
www.ama.fr/blog/assurance-peer-to-peer-uberiser-ou-se-faire-uberiser/.
Consulté le 12/07/2016.
13
FREDOUELLE A., « En France, l'assurance P2P devra miser sur
les communautés à risque », in Journal du Net, 8
mars 2016, disponible sur :
www.journaldunet.com/economie/finance/1174568-en-france-l-assurance-collaborative-devra-miser-sur-les-communautes-a-risque/.
Consulté le 10/07/2016..
9
Tout ceci n'a été possible qu'avec le
développement des technologies numériques, qui ont
facilité, via la mise en la place de plateforme, permettant de toucher
une communauté plus large par des sites internet, mais plus
particulièrement via les réseaux sociaux. Cette plateforme va
permettre "mise en réseau" des consommateurs qui vont utiliser un
service identique en qualité et en quantité .
14
Cependant, l'assuré est également un
consommateur qui cherche par ce modèle d'assurance à
réduire les coûts des garanties d'assurance.
b) Un assuré à la recherche d'une
couverture d'assurance moins onéreuse
Les assurés membres d'un collectif d'assurance
participative doivent verser une somme déterminée destinée
à alimenter un fonds commun. Ces fonds sont collectés et
gérés directement ou indirectement par la plateforme
collaborative.
Certains modèles d'assurances participatives ont la
particularité de reverser les fonds trop perçus si une faible
sinistralité est constatée sur une période
déterminée. L'assuré membre du collectif perçoit un
remboursement direct des fonds versés non utilisés. Nous pouvons
parler alors de « cash-back » . Ce modèle se
différencie des assurances classiques qui gardent les primes
15
perçues, il en va de même pour les assurances
mutualistes. Ces dernières utilisent généralement le trop
perçu des cotisations pour réduire celles de l'exercice suivant,
ou pour augmenter ses fonds propres ou relever les plafonds de garantie. Ainsi,
l'assuré d'une assurance participative peut être remboursé
en cas de trop-perçu par le fond, ce qui peut constituer des
économies non-négligeables pour le consommateur.
14
|
SITBON S., « L'Assurance Peer-to-Peer, mais qu'est-ce que
c'est que ça, à la fin ?! », in Linkedin, 10
novembre 2015, disponible
|
sur :
www.linkedin.com/pulse/lassurance-peer-to-peer-mais-quest-ce-que-cest-ça-à-la-sylvain-sitbon.
Consulté le 20/07/2016..
15 SITBON S., « L'Assurance Peer-to-Peer, mais qu'est-ce
que c'est que ça, à la fin ?! », in Linkedin, 10
novembre 2015, disponible sur :
www.linkedin.com/pulse/lassurance-peer-to-peer-mais-quest-ce-que-cest-ça-à-la-sylvain-sitbon.
Consulté le 20/07/2016..
10
De plus, les plateformes numériques ont pour avantage
d'avoir un coût de gestion et de prise en charge des sinistres assez
faibles. De même, les coûts de prospection de nouveaux clients sont
faibles en raison de sa composante communautaire et
numérique16.
Les plateformes d'assurance participative se
rémunèrent généralement sous la forme d'une
commission sur les fonds collectés, à l'image de la
société Inspeer qui perçoit une commission
17
de dix pour cent.
L'essence même du développement de telles
plateformes d'assurance participative est de proposer des prix
inférieurs à ceux pratiqués par les assureurs
traditionnels. Ce modèle va donc au-delà, du mécanisme
proposé par certaines associations proposant à ses membres un
achat groupé de produits d'assurance. Ces contrats souscrits par des
associations sont négociés et développés de
façon à répondre aux besoins de leurs membres. Nous
pouvons mentionner l'initiative d'une commune qui propose à ses
administrés de souscrire un contrat collectif de mutuelle santé,
car ces derniers avaient du mal à trouver une garantie satisfaisante
à un tarif moins cher18 19 .
De plus, le marché de l'assurance de particuliers est un
secteur extrêmement concurrentiel qui contrairement au secteur bancaire,
est marqué par une plus forte volatilité des consommateurs.
L'assurance participative doit donc être capable de proposer des produits
innovants pour saisir un marché de plusieurs milliards d'euros à
l'échelle mondiale20.
2. Les garanties proposées par les assurances
participatives
16 MALDONATO J., « Les assureurs et l'économie
collaborative : vers l'assurance P2P ? », Les Echos, 14 octobre 2013.
17 www.inspeer.me
18 BENJAMIN A., « Les mutuelles de village, une innovation
sociale ou un retour au XIXe siècle? » in Slate, 14
décembre 2014, disponible sur :
www.slate.fr/story/94993/mutuelles-village-innovation-sociale.
Consulté le 04/072016.
19 ADPassurance, « L'émergence du
phénomène assurance collaborative peer-to-peer », in
ADPassurance, disponible sur :
www.adpassurances.fr/articles/l-assurance-collaborative-se-developpe-en-europe.html.
Consulté le 22/07/2016.
20Accenture, « Un marché de 470 milliards
à saisir » in Accenture, 31 août 2015, disponible
sur :
www.accenture.com/fr-fr/
company-newsroom-insurance-470-billion-grasp-accenturen.
Consulté le 29/07/2016.
11
L'assurance participative se développe dans de nombreux
pays, notamment dans les pays anglo-saxons et en France. Les garanties
proposées couvrent des risques incendie, accidents et risques divers
(a). Une majorité de ces garanties sont complémentaires à
celles offertes par un contrat d'assurance (b).
a) Les risques couverts par l'assurance
participative
A ce jour, il n'existe pas en France de plateforme d'assurance
« peer-to-peer » pure et parfaite, c'est-à-dire une assurance
participative reposant uniquement sur l'intervention de particuliers qui
assurent d'autres particuliers. L'assurance participative vise essentiellement
à couvrir les atteintes aux biens ou aux personnes. Il n'existe
actuellement, aucune plateforme qui propose la souscription de contrat
d'assurance-vie ou de produits financiers, se limitant ainsi à des
garanties IARD .
21
Nous pouvons cependant citer la société
néo-zélandaise PeerCover, ou encore la société
canadienne Besurance Corporation, via son site
besure.com. Ces deux
sociétés qui proposent aussi bien une assurance habitation,
automobile ou encore une assurance contre les accidents de la vie . Ces deux
sociétés proposent à ses membres de couvrir
l'intégralité de la valeur du bien.
22
Les autres plateformes d'assurances participatives ont un
mécanisme différent qui consiste pour les membres de verser une
prime qui sera ensuite divisée entre une cagnotte dédiée
au groupe en cas de sinistre et une cagnotte globale à tous les groupes,
si la première fait défaut . C'est le cas
23
21
Incendie, accidents et risques divers.
22 ROY H., « Économie de partage : un modèle
voit le jour en assurance au Canada » in Journal Assurance, 8 avril 2016,
disponible sur :
journal-assurance.ca/article/economie-de-partage-un-modele-voit-le-jour-en-assurance-au-canada/.
Consulté le 29/07/2016.
23
|
FREDOUELLE A., « En France, l'assurance P2P devra miser sur
les communautés à risque » in Journal du Net, 8
mars 2016,
|
disponible sur :
www.journaldunet.com/economie/finance/1174568-en-france-l-assurance-collaborative-devra-miser-sur-les-communautes-a-risque/.
Consulté le 10/07/2016.
12
notamment du pionnier de l'assurance participative, la
société allemande Friendsurance, ou encore la
société britannique Guevara .
24
En France, la situation est différente. L'assurance
participative est envisagée non pas comme une assurance en soit, mais
plus comme une offre complémentaire à un contrat d'assurance
traditionnelle . C'est le cas des sociétés Inspeer et Otherwise,
qui sont actuellement en cours de
25
développement sur le marché français de
l'assurance de dommage.
Mais l'assurance participative pourrait ne pas se contenter de
couvrir des dommages aux biens. Le marché des complémentaires
santé représente en France 33 milliards d'euros , et pourrait
être un
26
marché porteur pour l'assurance participative. En
effet, le vieillissement de la population entraine une augmentation des frais
de santé, ce modèle pourrait donc « fonctionner dans la
santé en visant les personnes aux risques aggravés qui ont du mal
à s'assurer ou paient extrêmement cher » . Une
27
plateforme d'assurance participative pourrait être
développée sur des sites de communauté de patients. A
l'image du site français Carenity28, fondé en 2011 qui
a la particularité d'être un réseau social santé sur
internet destiné aux malades et à leurs proches, en proposant un
suivi médical ainsi que des informations sur le traitement de maladies
chroniques.
Un autre marché pourrait intéresser l'assurance
participative, celui de l'assurance emprunteur. Notamment pour les
crédits à la consommation au sens de l'article L 311-1 4° du
code de la consommation. Ainsi, une plateforme constituée d'un collectif
d'individus, pourrait assurer un prêt à la consommation contre une
défaillance de remboursement de l'emprunteur, pour des opérations
dont le montant total du crédit est compris entre 200 euros et 75 000
euros . Nous
29
24 BERNARD P., « Guevara, le « Che » de
l'assurance », in C'est pas mon idée, 7 août 2014,
disponible sur
cestpasmonidee.blogspot.fr/2014/08/guevara-le-che-de-lassurance.html,
7 aout 2014. Consulté le 03/07/2016.
25
Les Echos, « De la mutualisation de franchises entre proches
» in Les Echos, 18 mai 2015, disponible sur : www.lesechos.fr/
18/05/2015/LesEchos/21939-135-ECH_de-la-mutualisation-de-franchises-entre-proches.htm#xtor=CS1-33#moXQe3Xb8oPaLwpO.99.
Consulté le 29/06/2016.
26 THOMAZEAU A-M., « Le marché de la
complémentaire santé atteint 33 milliards d'euros »,
in Viva, 13 avril 2015, disponible sur :
www.viva.presse.fr/le-marche-de-la-complementaire-sante-atteint-33-milliards-euros-170752.
Consulté le 9/08/2016.
27
FREDOUELLE A., « En France, l'assurance P2P devra miser sur
les communautés à risque » in Journal du Net, 8
mars 2016,
disponible sur :
www.journaldunet.com/economie/finance/1174568-en-france-l-assurance-collaborative-devra-miser-sur-les-communautes-a-risque/.
Consulté le 10/07/2016.
28
www.carenity.com
29Article L. 312-4 3° du code de la
consommation.
13
écartons ainsi de périmètre de
l'assurance participative, les assurances emprunteur des crédits
immobiliers dont les montants pourraient être trop conséquents
pour être pris en charge par une plateforme. De plus, sa mise en place
peut être facilitée dès lors que l'assurance emprunteur
n'est pas légalement obligatoire pour souscrire un crédit. Mais
en pratique, cette assurance est quasiment systématiquement
exigée par l'établissement de crédit. L'assurance
participative permettrait de réduire le coût final du
crédit. En effet, le taux de l'assurance emprunteur devient aujourd'hui,
aussi important que les taux d'intérêt que se soit en
crédit immobilier ou en crédit à la
consommation30.
L'assurance participative est un modèle en plein
développement, quelques start-up ont développé en France
des plateformes.
b) Les exemples de plateforme d'assurance
participative
Le marché français de l'assurance
représente le 5ème marché mondial en terme de volume de
primes, avec plus de 200 milliards de primes collectées dont plus de 50
milliards de primes en assurances de biens et de
responsabilité31.
La société Otherwise, ex-Amalfi, est une
plateforme d'assurance participative « peer-to-peer »
complémentaire, qui sera lancée fin 2016 sur les marchés
de l'assurance dommage et de l'assurance santé32. Otherwise
à la particularité d'être d'un courtier proposant
également une assurance de type collaborative. En effet, cette
plateforme pratique l'intermédiation en assurance au sens de l'article
L. 511-1 du code des assurances, car elle présente, propose et aide
à conclusion de contrats d'assurance traditionnels. Les membres de la
plateforme remplissent un questionnaire
30 CHEILAN O., « Le taux de l'assurance emprunteur
presque aussi important que le taux d'un prêt immobilier » in
Bousier.com, 22 juin 2016, disponible
sur :
argent.boursier.com/immobilier/analyses/le-taux-de-l-assurance-emprunteur-devient-presque-aussi-important-que-le-taux-d-un-pret-immobilier-3418.html.
Consulté le 02/08/2016.
31 GRAS SAVOYE I CONSEIL & COURTAGE EN ASSURANCES, «
Les marchés de l'assurance en 2016 Note de conjoncture », 17
septembre 2015.
32
THOMAS H-M., « Les fintech de l'assurance misent sur le
collaboratif » in L'argus de l'assurance, 9 juin 2016, disponible
sur :
www.argusdelassurance.com/intermediaires/courtiers-cgpi/les-fintech-de-l-assurance-misent-sur-le-collaboratif.108078.
Consulté le 22/07/2016
14
afin de déterminer le produit d'assurance le plus
adapté à leurs besoins. Une fois le contrat souscrit les
cotisations vont dans un pot commun, une partie de ses sommes collectées
est versée à un assureur qui prend en charge les sinistres les
plus importants. L'autre partie des fonds sert à payer les petits
sinistres. Là, encore en cas de trop-perçu, les sommes non
utilisées du « pot commun du groupe » et du « fond de
protection de la communauté » seront réparties
équitablement entre les membres du groupe . Il faut cependant noter que
la part des fonds
33
collectés versés à l'assureur sont
définitivement acquis par ce dernier.
Une société d'assurance collaborative uniquement
destinée à l'assurance automobile, la « startup »
française Wecover , propose depuis 2016 via une application pour
smartphone, de rejoint
34
des groupes selon le profil de conducteur, qu'il soit jeune
conducteur ou encore, conducteur occasionnel. Et a pour ambition de couvrir
l'ensemble des risques automobiles. L'intérêt est de regrouper des
personnes exposées au même niveau de risque. De plus,
l'application permet d'évaluer la conduite et de déterminer un
« score de conduire » afin d'inciter le conducteur à limiter
sa prise de risque.
Il existe un second modèle d'assurance participative,
le mécanisme de rachat de franchise d'assurance collaborative
développé par Inspeer, via une mutualisation des franchises
d'assurances, et ce, sans changer de contrat d'assurance35. Ce
mécanisme de rachat de franchise d'assurance s'applique aux contrats
d'assurance automobile et d'habitation36. L'avantage d'une
mutualisation est de permettre aux membres de la plateforme de souscrire des
contrats d'assurance proposant une franchise plus importante. Ces types de
contrat sont plus abordables que ceux proposant de plus faibles franchises.
Ainsi, plus une franchise d'assurance est élevée dans un contrat,
plus coût des cotisations diminue37. Dans la pratique, un
assuré membre de la plateforme ayant subit un sinistre demande au
collectif une contribution aux autres membres, après avoir
33
otherwise.fr/comment-ça-marche/
34
www.wecover.fr
35Assurance collaborative : Inspeer s'occupe de tout,
Le Parisien Economie, 16 mars 2015, p. 17.
36 HAMMADI A., « Inspeer, la start-up qui repense
l'assurance, Bourse des crédits » in Bourse des
crédits, 9 décembre 2014, disponible sur :
www.boursedescredits.com/actualite-inspeer-start-up-repense-assurance-131.php.
Consulté le01/08/2016.
37 C.C, Une nouvelle économie fait sa révolution,
hors-série Terra Eco, été 2015, p. 65
15
déclaré le sinistre auprès de son
assureur 38. Les assurés peuvent ainsi se couvrir dès
le premiereuro en « s'appuyant sur une communauté
responsable et solidaire » . Ainsi, l'assuré ayant
39 40
bénéficié du rachat de franchise s'engage
à contribuer de manière équivalente en cas de sinistre
subit par un autre membre de la plateforme41. Ce modèle
d'assurance participative a l'avantage de reposer sur des appels à
contribution connus d'avance et limités car déterminés par
les contrats souscrits avec les assureurs traditionnels
L'assurance participative connaît un
développement rapide, mais reste encore confidentielle, en raison de la
réglementation sur l'activité d'assurance.
B. L'assurance collaborative un modèle qui
flirte avec la qualification juridique de l'opération d'assurance.
L'activité d'assurance est l'activité «
déployée par une entreprise organisée à cette
fin pour garantir le risque d'autrui » . L'entreprise d'assurance
doit donc être organisée afin de pouvoir
42
garantir des risques susceptibles de se réaliser.
L'assurance participative pratique une activité similaire à une
opération d'assurance pratiquée par un assureur traditionnel (1)
qui a des conséquences fiscales, mais également des
conséquences en matière de financement des fonds de garantie
(2).
38 ROBERT S., « Assurance auto : la franchise collaborative
voit le jour ! » in Assurland, 20 mars 2015, disponible sur :
www.assurland.com/assurance-blog/assurance-auto-actualite/assurance-auto-la-franchise-collaborative-voit-le-jour_123692.html.
Consulté le 24/07/2016.
39
40
Assurance-Finance, La prime à ceux qui bousculent les
géants, Management, Février 2016, p.58.
« Mutualisez vos franchises d'assurance avec vos proches
» in L'Union des économes, 13 avril 2015, disponible sur :
blog.pret-
dunion.fr/consommation-collaborative/mutualisez-vos-franchises-dassurance-avec-vos-proches/.
Consulté le 01/08/2016.
41 Inspeer, « Plateforme d'assurance collaborative.
Mutualisez vos franchises d'assurance dommage avec vos proches » in
Bonjour Idée Magazine, 20 mars 2015, disponible sur :
bonjouridee.com/inspeer/.
Consulté le 28./07/2016
42 Jean BIGOT, Traité de droit des assurances, tome 3 Le
contrat d'assurance, L.G.D.J, 2002, p. 21
16
1. L'opération d'assurance participative
appréhendée contractuellement
Les plateformes d'assurances participatives tendent à
proposer des offres similaires à des contrats d'assurance sans pour
autant le qualifier clairement comme telles. La doctrine a défini le
contrat d'assurance comme la « convention par laquelle l'une des
parties, appelée assureur, s'engage envers l'autre, appelée
souscripteurs ou preneur d'assurance, en contrepartie du paiement d'une prime
(b), à couvrir un risque, en fournissant au souscripteur ou à un
tiers, une prestation en cas de réalisation de ce risque (a) È
.
43
a) Les assurances participatives face à un
risque d'aléa
La notion de risque est essentielle en matière
d'assurance, cependant comme le contrat d'assurance, le code des assurances ne
donne pas une de définition du risque. La doctrine l'a défini
comme « un événement incertain et qui ne dépend
pas exclusivement de la volonté des parties, spécialement de
celle de l'assuré » 44 .
En premier lieu, l'incertitude qui est exprimée dans
cette définition recouvre la notion d'aléa. Ce caractère
aléatoire fait que ce risque devient un risque assurable. Cependant, le
code des assurances ne donne pas définition de l'aléa.
Une définition de l'aléa était
donnée par l'article 1964 du code civil avant son abrogation , qui le
45
définissait comme « le contrat
aléatoire est une convention réciproque dont les effets, quant
aux avantages et aux pertes, soit pour toutes les parties, soit pour l'une ou
plusieurs d'entre elles, dépendent d'un événement
incertain. Tels sont : Le contrat d'assurance [É] ».
43
44
Luc MAYAUX, in Encyclopédie DALLOZ, Droit civil, Ass.
terr. n°138. Maurice PICARD et André BESSON, ass. terr,
t. In n°21.
45 Ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 - art.
5.
17
L'assurance participative intègre la notion de risque
aléatoire, que ce soit dans sa forme « peer-to-peer »
pure46 ou de « peer-to-peer » complémentaire
à une offre d'assurance. Le membre du collectif d'assurance
participative mutualise avec la communauté le risque de destruction ou
de détérioration de ses biens ou de la
détérioration de son état de santé. L'assurance
participative pourra ainsi fournir une prestation de couverture en raison du
sinistre subi directement par un de ses membres.
Cependant, nous pouvons émettre des réserves sur
le mécanisme de rachat de franchise participative. En effet, la
franchise est la conséquence du contrat d'assurance souscrit entre
l'assuré membre du collectif d'assurance participative et l'assureur. La
notion de risque semble dans ce cas de figure, être un
élément connexe.
C'est la raison pour laquelle, la société
Inspeer spécialisée dans le rachat de franchise, ne mentionne
jamais dans ses conditions générales le terme «
assurance », et délègue à l'assureur de ses
membres le traitement des déclarations de sinistres faites par les
membres de la communauté. Ces derniers doivent déclarer la
survenance du sinistre à leur assureur pour être couvert
conformément à l'article L. 113-2 4° du code des
assurances.
En deuxième lieu, l'assurance est
caractérisée par la notion de garantie d'assurance qui impose
à l'assureur de rembourser ou de mettre en oeuvre la prestations
convenue dans le contrat d'assurance. Cette notion semble difficilement
envisageable en matière d'assurance participative notamment dans sa
forme « peer-to-peer » pure qui repose uniquement sur la
communauté pour engager ou non la prestation espérée par
un de ses membres ayant subit un sinistre.
En troisième et dernier lieu, l'assurance est
caractérisée aussi par la notion de prime, mais aussi dans la
prise en charge du risque, c'est la technique actuarielle. Qui consiste
à établir un ratio entre la fréquence et
l'intensité du risque47.
46
Nota bene : La forme la plus aboutie d'assurance participative
sans l'intervention d'un assureur. 47Jean BIGOT, Traité de
droit des assurances, tome 3 Le contrat d'assurance, L.G.D.J, 2002, p. 40
18
L'assurance participative repose sur un fort pouvoir
décisionnel des membres de la communauté qui choisissent de
prendre en charge ou non un risque. Or, en l'absence de données fiables
les membres peuvent accepter de couvrir un risque sans connaitre les probables
conséquences sur la plateforme d'assurance participative. Ignorer cette
notion peut avoir de graves conséquences sur la pérennité
de la plateforme. Pour rappel, classiquement le contrat d'assurance est conclu
intuitu personae, l'assureur peut donc refuser de contracter sans pour
autant pratiquer une discrimination caractérisée48.
Cette fonction est laissée à la communauté qui choisit de
prendre en charge ou non les conséquences du sinistre. Et enclenchera
une procédure proche de la « prestation d'assurance » qui
peut, se définir comme l'engage de l'assureur à verser une somme
d'argent, que ce soit un capital ou une rente qui sera servie
périodiquement.
Nous pouvons remettre en cause l'objectivité de ses
membres, notamment sur leurs capacités à sélectionner les
risques qui seront couverts par une prestation d'indemnisation.
Il est important de rappeler que pour être valable
l'objet du contrat d'assurance doit exister, être déterminé
et licite49. Nous pouvons mentionner une initiative
développée par des usagers de transports en commun qui ont mis en
place un mécanisme analogue à l'assurance participative. Ce
mécanisme consiste pour les usagers à verser chaque mois une
somme d'argent à une « mutuelle », en échange celle-ci
prend en charge les amendes des usagers dépourvus de titres de
transport50.
Mais le contrat d'assurance n'est pas seulement
caractérisé par un risque et une prestation d'assurance, mais
également par la notion de prime d'assurance.
b) La nature des fonds collectés par l'assurance
participative
48 Jean BIGOT, Traité de droit des assurances, tome 3
Le contrat d'assurance, L.G.D.J, 2002, p. 475 49Article 1108 du Code
civil.
50 « Avec 7 € par mois, on paie toutes nos amendes
» in Le Parisien, 03 mai 2010, disponible sur :
www.leparisien.fr/transports/
avec-7-eur-par-mois-on-paie-toutes-nos-amendes-03-05-2010-907335.php.
Consulté le 11/08/2016.
19
En matière de contrats d'assurance, conformément
à l'article L. 113-2 du code des assurances, l'assuré à
l'obligation de « payer la prime ou cotisation ». Selon la forme
juridique de l'assureur, nous pouvons parler de « primes » pour les
entreprises assurances ou de « cotisations » pour les mutuelles
d'assurances. Ces primes ou ses cotisations représentent le prix qui
couvre un risque en échange de sa prise en charge, sans pour autant
représenter le cout réel de la garantie du risque .
51
Plus exactement, il s'agit de « la contrepartie de
l'obligation de l'assureur » . Les auteurs
52
PICARD et BESSON ont même affirmé, «
s'il n'y a pas d'assurance sans risque, il n'y a pas d'avantage d'assurance
sans primes » 53 .
L'assurance participative cherche à réduire les
coûts pour ses membres, au plus près du coût réel, en
limitant les chargements commerciaux, voire également les chargements
fiscaux et parafiscaux.
Peut-on parler de prime pour qualifier les fonds versés
par les membres d'une plateforme d'assurance participative ?
Les assurances participatives sont alimentées par des
fonds versés par membres de la communauté. Pour les assurances
participatives de type « peer-to-peer» complémentaire, les
fonds destinés à l'assureur peuvent sans conteste être
qualifiés de primes ou de cotisations, puisque la plateforme les
collecte en qualité d'intermédiaire en assurance comme
mentionné à l'article L. 512-7 du code des assurances. Les sommes
restantes destinées à la plateforme sont difficilement
dissociables des primes versées. Il y a une véritable
incorporation des sommes dès lors qu'il s'agit d'un versement unique
fait par l'assuré membre à la plateforme qui agit comme
intermédiaire. La plateforme Otherwise, présente les fonds
versés comme des cotisations .
54
Toute la problématique repose sur la nature des sommes
versées destinées à constituer un fonds commun sur la
plateforme d'assurance participative.
51 Jean BIGOT, Traité de droit des assurances, tome 3 Le
contrat d'assurance, L.G.D.J, 2002, p. 43 52Jean BIGOT,
Traité de droit des assurances, tome 3 Le contrat d'assurance, L.G.D.J,
2002, p. 607
53 Jean BIGOT, Traité de droit des assurances, tome 3 Le
contrat d'assurance, L.G.D.J, 2002, p. 44, Maurice PICARD et André
BESSON, ass. terr, t. In n°28.
54
www.otherwise.fr
20
La société Inspeer évoque dans ses
conditions générales la notion de « contribution » ,
qui revêt
55
l'idée « d'une dépense en vue de contribuer
à une charge commune ». La particularité de la
société Inspeer est que celle-ci ne collecte pas directement les
fonds, mais mandate une société spécialisée dans la
collecte et la gestion de fonds par internet pour les acteurs de
l'économie collaborative . Autre particularité, contrairement
à un assureur traditionnel qui collecte les primes
56
avant la réalisation d'un sinistre, la communauté
verse des fonds après la réalisation du sinistre.
Certaines plateformes peuvent déléguer
l'encaissement des fonds à une autre société
spécialisée mais, peut également les encaisser pour un
assureur, notamment lorsqu'il s'agit d'une assurance participative «
peer-to-peer » complémentaire à une offre d'assurance
traditionnelle. Cependant, nous pouvons nous interroger sur la nature des fonds
qui sont collectés et gardés par la plateforme. Ce pot commun de
la communauté n'entre dans aucune définition juridique. Mais
pourrait se rapprocher dangereusement des méthodes pratiquées par
un assureur traditionnel. Celui-ci, en effet, collecte et garde les primes ou
les cotisations versés par ses assurés.
Nous sommes ainsi, loin de la définition de la prime
d'assurance et de son caractère obligatoire. L'assurance participative
évite ainsi d'adopter le vocabulaire propre aux assureurs traditionnels,
mais cela n'est pas sans conséquence.
2. Les incidences de l'exclusion de la notion de prime
d'assurance
Le rejet de la notion de prime d'assurance à
également des conséquences en matière de fiscalité
(a) et de financement des fonds de garantie (b).
55
Conditions générales Inspeer,
www.inspeer.me/informations-juridiques/. Consulté le 13/07/2016.
56 Nota bene : La société Mangopay filiale de
Leetchi.
21
a) Les conséquences fiscales de l'assurance
participative
Ecarter la notion de prime d'assurance, n'est pas sans
conséquence notamment sur le plan fiscal. En effet, une fiscalité
est appliquée sur les primes collectées par les assureurs
conformément aux articles 991 à 1004 du code
général des impôts.
Ainsi, le fait de ne pas définir les fonds
collectés comme des primes ou des cotisations d'assurance reviendrait
à s'exonérer des taxes. En application de l'article 991 du code
général des impôts57, cette taxe s'applique
à « toute convention d'assurance conclue avec une
société ou compagnie d'assurances ou avec tout autre assureur
français ou étranger ». Ce même article
précise également que « la taxe est perçue sur le
montant des sommes stipulées au profit de l'assureur et de tous
accessoires dont celui-ci bénéficie directement ou indirectement
du fait de l'assuré ». L'assiette de la taxe sur les
différents types de contrats d'assurance est fixée par l'article
1001 du code général des impôts.
La problématique repose sur le fait de savoir si une
assurance participative est une entreprise d'assurance. Cela est
déterminant pour savoir si les fonds récoltés sont
taxables ou non.
La notion « d'entreprise d'assurance »
désigne les entreprises mentionnées à l'article L. 310-1
du code des assurances, qui mentionne :
« 1° les entreprises qui sous forme d'assurance
directe contractent des engagements dont l'exécution dépend de la
durée de la vie humaine, s'engagent à verser un capital en cas de
mariage ou de naissance d'enfants, ou font appel à l'épargne en
vue de la capitalisation et contractent à cet effet des engagements
déterminés , ·
2° les entreprises qui sous forme d'assurance directe
couvrent les risques de dommages corporels liés aux accidents et
à la maladie , ·
3° les entreprises qui sous forme d'assurance directe
couvrent d'autres risques y compris ceux liés à une
activité d'assistance".
57 Loi 2004-1485 2004-12-30 art. 95 I D Finances rectificative
pour 2004 JORF 31 décembre 2004 en vigueur le 1er janvier 2006.
22
Ce même article mentionne également les mutuelles
ou les unions régies par le livre II du code de la mutualité,
ainsi que les institutions de prévoyance ou les unions régies par
le titre III du livre IX du code de la sécurité sociale et les
institutions régies par l'article L. 727-2 du code rural.
Il semble difficile à la lecture de ces articles de
rattacher l'activité de l'assurance participative à celle d'une
entreprise d'assurance. Les fonds collectés semblent hors de
portée de la fiscalité spéciale appliquée aux
contrats d'assurance, créant ainsi, une inégalité entre
les acteurs de l'assurance.
b) L'assurance participative exclue du financement des
fonds de garantie
Ce sentiment d'inégalité peut être
d'autant plus fort que l'assurance participative, qui ne fait intervenir aucun
assureur traditionnel dans leur processus de couverture de risque, ne participe
pas au financement des fonds spéciaux. Ces derniers sont financés
par des prélèvements sur les contrats d'assurance.
Nous pouvons notamment citer le fonds de garantie des victimes
des actes de terrorisme et d'autres infractions, dont le financement est assis
sur les primes ou cotisations des contrats d'assurance de biens qui
garantissent les biens et les véhicules situés en France,
conformément à l'article R. 321-1 du code des assurances. Depuis
le 1er janvier 2016, la participation s'élève à 4,30
€ par contrat, la législation ayant fixé un maximum de 6,50
€ par contrat58.
Nous pouvons également mentionner le Fonds de garantie
des assurances obligatoires de dommages59, qui est lui aussi
financé par les contrats d'assurance, et ce, proportionnellement aux
primes ou aux cotisations perçues les entreprises d'assurance lors de
son dernier exercice, en
58 Article R. 321-1 du code des assurances.
59Anciennement nommé Fonds de Garantie
Automobile.
23
application de l'article L. 421-4-1 du code des assurances.
Ces deux fonds de garantie connaissent
des difficultés chroniques de financement, car ces fonds
sont de plus en plus sollicités .
60 61
Certes, l'assurance participative repose sur une
solidarité entre les membres d'une plateforme. Mais nous pouvons porter
un regard critique en ce que l'assurance participative, en application de la
législation actuelle, ne participe pas à la solidarité
à l'échelle nationale. Que ce soit sur le plan de l'impôt
spécial ou sur les contrats d'assurance que sur le financement des fonds
de garantie.
Ainsi, l'n'assurance participative pratique en apparence une
activité d'assurance. Dès lors qu'aucun assureur intervient dans
l'opération, cette pratique a des conséquences dans l'exercice
même de l'opération d'assurance participative.
II. Un cadre juridique inadapté à
l'exercice d'une
opération d'assurance participative
sûre
Considérons que l'assurance participative est une
assurance, est elle adaptée aux cadre juridique actuel ? Certains
auteurs dont BESSON et HEMARD, ont fait la distinction entre le contrat
d'assurance qui est le support juridique de l'opération d'assurance avec
tous ses aspects techniques . L'opération d'assurance est une
activité strictement réglementée par la
législation
62
dans le but de protéger les intérêts des
assurés notamment en cas de survenance d'un sinistre, mais doit
également préserver l'équilibre du secteur de l'assurance
(A). Une meilleure protection
60 GOUBERT G., « Le fonds de garantie des assurances,
victimes de la crise, Fédération nationale des victimes
d'attentats et d'accidents collectifs », 6 janvier 2009, disponible sur :
www.fenvac.com/Le-fonds-de-garantie-des.
Consulté le 01/08/2016.
61
DURANT D., « La «taxe terrorisme» va peser sur les
contrats d'assurance » in Le Figaro Economique, 4 décembre
2015,
disponible sur :
www.lefigaro.fr/impots/2015/12/04/05003-20151204ARTFIG00018-la-taxe-terrorisme-peut-encore-grimper-de-50.php.
Consulté le 01/072016.
62 Jean BIGOT, Traité de droit des assurances, tome 3 Le
contrat d'assurance, L.G.D.J, 2002, p. 21
24
pourrait être envisagée par la création
d'un statut d'intermédiation en assurance participative sur le
modèle des intermédiaires en financement participatif (B).
A. Une exécution à risque de
l'opération d'assurance
L'activité d'assurance est une activité
réglementée par la législation. Le modèle de
l'assurance participative semble présenter des risques pour
l'assuré en cas de survenance de sinistre ou de contentieux (1). Nous
pouvons également mettre en évidence les contraintes
légales qui pèsent sur le marché de l'assurance (2).
1. Les conséquences en cas de sinistre
Classiquement, l'assureur doit en cas de survenance d'un
sinistre, répondre des pertes et dommages de l'assuré, cependant
le mécanisme de l'assurance participative peut présenter des
difficultés pour le règlement du sinistre (a) mais
également en cas contentieux (b).
a) Le règlement des sinistres et le recours
subrogatoire de l'assureur
L'article L. 113-1 du code des assurances dispose que «
les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou
causés par la faute de l'assuré sont à la charge de
l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police
». Ce même article précise également que
l'assureur « ne répond pas des pertes et dommages provenant
d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré ».
Cette obligation de règlement par l'assureur est
clairement explicitée à l'article L. 113-5 du code des assurances
qui dispose que « lors de la réalisation du risque ou à
l'échéance du contrat,
25
l'assureur doit exécuter dans le délai
convenu la prestation déterminée par le contrat et ne peut
être tenu au-delà ».
Ainsi, l'assureur doit garantir les conséquences des
sinistres survenus pendant la période de validité du contrat . Le
sinistre doit s'entendre comme « la réalisation du risque,
prévu au
63
contrat de nature à entraîner la garantie de
l'assureur » .
64
Nous pouvons nous interroger sur l'applicabilité de ces
mesures en matière d'assurance participative. En effet, si nous prenons
le cas des assurances de « peer-to-peer » pur, il ne s'agit pas d'une
entreprise d'assurance au sens de l'article L. 310-1 du code des assurances.
Les engagements pris par cette assurance participative ne pourraient être
couverts par les dispositions du code des assurances.
A défaut d'appliquer les dispositions spéciales
du code des assurances, nous pourrions envisager l'application du droit commun
et plus particulièrement de l'article 1134 du code civil à savoir
: « Les conventions légalement formées tiennent lieu de
loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être
révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que
la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne
foi ». Le contrat pourrait contraindre les membres de la
communauté à contribuer au règlement du sinistre subit par
un autre membre.
La plateforme participative de rachat de franchise, Inspeer,
dans ses mentions légales ne
65
mentionne aucune obligation pour ses membres de régler
le montant d'une franchise à la suite d'un appel à contribution.
Il a seulement été mis en place un système de notation
permettant d'évaluer le caractère « sérieux » de
ses membres. Cette note augmente avec le nombre de contributions
effectuées. Ainsi, un membre qui contribue activement sur la plateforme
n'est pas certains de recevoir en retour une contribution. La participation
à la contribution étant laissée à la bonne
volonté de ses membres. L'assurance participative ne peut garantir
à ses membres une prise en charge du sinistre subit par un de ses
membres, dès lors qu'aucun engagement contraignant
63 Jean BIGOT, Vincent HEUZE, Jérome KULLMANN
Traité du droit des assurances, Tome 2 Le contrat d'assurance, Lextenso
2ème édition, 2014, p. 1608
64
Maurice PICARD et André BESSON, ass. terr, t. In
n°21.
65 www.inspeer.me
n'est pris par tous les membres de la plateforme. Ainsi,
l'engagement des membres n'est pas un engagement contractuel mais un engagement
purement moral.
De plus, il est également probable que la
communauté ne dispose pas de fonds suffisants. C'est la raison pour
laquelle certaines plateformes, comme Inspeer, ont mis en place des plafonds
maximum d'indemnisation.
Il existe un autre point d'imprécision, celui de
l'évaluation du dommage subit par les membres. Les assureurs
traditionnels demandent à leurs assurés des pièces
justificatives permettant d'évaluer le dommage subit, mais ils ont
également recours à des expertises. Celle-ci est le plus souvent
une expertise contractuelle, mais elle peut être légale ou
judiciaire. Le rôle de l'expert est de « décrire le
sinistre, d'en rechercher éventuellement les causes, de constater et
d'évaluer les pertes » . Son intervention n'est pas
systématique et dépend généralement d'un seuil
contractuel.
66
L'expert est généralement
rémunéré par la partie qui l'a désigné, il
s'agit le plus souvent de l'assureur. Or, il semble difficile d'imaginer pour
une assurance participative de recourir à un expert, car celle-ci a un
coût significatif. Cela conforte ainsi l'idée que l'assurance
participative, dans sa forme actuelle, n'est destinée qu'à
couvrir pour des risques de faibles montants.
Il pourrait exister également des difficultés
pour mettre en place une pratique courante des assurances, le recours
subrogatoire contre le tiers responsable du sinistre. Conformément
à l'article L. 121-12 du code des assurances, l'assureur qui a
indemnisé son assuré bénéficie de la subrogation
légale dans les droits de ce dernier, à hauteur de
l'indemnité versée . Il s'agit d'un
67
« recours indispensable pour des raisons à la
fois morales et sociales qui apparaîtrait en son absence ».
Cependant, « l'assureur n'a aucun recours contre les enfants,
descendants, ascendants, alliés en ligne directe,
préposés, employés, ouvriers ou domestiques et
généralement toutes les personnes habitant au foyer de
l'assuré, sauf le cas de malveillance commise par une de ces personnes
» .
68
66
|
Jean BIGOT, Vincent HEUZE, Jérome KULLMANN,
|
Traité du droit des assurances, Tome 2 Le contrat
d'assurance, Lextenso
|
26
2ème édition, 2014, p. 922
67Jean BIGOT, Vincent HEUZE, Jérome
KULLMANN, Traité du droit des assurances, Tome 2 Le contrat d'assurance,
Lextenso 2ème édition, 2014, p. 1623.
68Article L. 121-12 al. 3 du code des assurances.
27
De plus, la subrogation légale trouve son fondement
à l'article 1251-3° du code civil qui dispose que « La
subrogation a lieu de plein droit : [É] 3° Au profit de celui qui,
étant tenu avec d'autres ou pour d'autres au paiement de la dette, avait
intérêt de l'acquitter ». L'assureur peut donc
potentiellement bénéficier de la subrogation prévue par le
code des assurances ou par le code civil, ou bien être conventionnelle
.
69
L'absence d'un tel recours aurait des répercussions sur
les primes exigées aux assurés, en exposant la mutualité
à l'impunité du tiers responsable70. Si nous
considérons que l'assurance participative n'est pas une entreprise
d'assurance, les dispositions du code des assurances sont alors
écartées. La plateforme d'assurance participative peut
éventuellement engager un tel recours contre le tiers responsable, sur
le fondement de la subrogation légale.
L'assurance participative ne soulève pas seulement des
difficultés en matière de règlement du sinistre, mais
également en cas de survenance d'un contentieux.
b) Le règlement des litiges en matière
d'assurance participative
L'assurance est naturellement source de contentieux . Les
contentieux portent sur le contrat lui-
71
même, mais la majorité des contentieux portent
sur l'assurance de responsabilité formé par les victimes des
assurés ou de l'assureur contre le tiers responsable.
Après avoir épuisé les voies de recours
internes, l'assuré peut avant toute saisine du juge faire appel
gratuitement au Médiateur des assurances en cas de litige,
conformément à l'article L. 152-2 du code de la
consommation72. Le Médiateur des assurances n'est pas un
juge, mais il est compétent si le litige est relatif à un contrat
d'assurance souscrit auprès d'une société ou d'une
69 CORONE S., « Le mécanisme complexe de la
subrogation » in L'Argus de l'assurance, 1er février 2008,
disponible sur :
www.argusdelassurance.com/reglementation/legislation/le-mecanisme-complexe-de-la-subrogation.24089.
Consulté le 27/07/2016.
70
Jean BIGOT, Vincent HEUZE, Jérome KULLMANN Traité
du droit des assurances, Tome 2 Le contrat d'assurance, Lextenso
2ème édition, 2014, p. 995.
71 Jean BIGOT, Vincent HEUZE, Jérome KULLMANN,
Traité du droit des assurances, Tome 2 Le contrat d'assurance, Lextenso
2ème édition, 2014, p. 1071.
72 Ordonnance n° 2015-1033 du 20 août 2015.
28
mutuelle d'assurances établie en France et
adhérente à la Médiation de l'Assurance. Le
Médiateur des assurances est également compétent pour les
litiges transfrontaliers avec une entreprise ou un intermédiaire
établit dans un état de l'Union-Européenne73.
Sa mission est de trouver un accord amiable entre l'assuré et l'assureur
afin de mettre fin à un litige.
Le Médiateur des assurances devra en application des
dispositions de l'article R. 152-4 du code de la consommation, fait «
connaître aux parties la solution qu'il propose, leur rappelle, par
courrier simple ou par voie électronique :
a) Qu'elles sont libres d'accepter ou de refuser sa
proposition de solution ;
b) Que la participation à la médiation
n'exclut pas la possibilité d'un recours devant une juridiction
c) Que la solution peut être différente de
la décision qui serait rendue par un juge.
Le médiateur précise également quels
sont les effets juridiques de l'acceptation de la proposition de solution et
fixe un délai d'acceptation ou de refus de celle-ci ».
Le Médiateur à trois mois pour rendre une
décision, les parties peuvent à tous moments mettre fin à
la procédure, en application de l'article R. 152-2 du code de la
consommation.
Cette procédure de médiation n'est cependant que
partiellement applicable en assurance participative, elle s'applique uniquement
si la plateforme est inscrite comme intermédiaire en assurance. Les
autres formes d'assurances participatives, à défaut du statut
d'entreprise d'assurance, ne peuvent être membres de la médiation
d'assurance . Les membres des
74
plateformes d'assurances participatives sont donc exclus de la
possibilité de saisir le Médiateur. Ils peuvent cependant saisir
le Médiateur de la consommation qui est compétent pour tout
litige qui oppose un consommateur et un professionnel.
Sur le plan procédural, l'assurance participative ne
semble pas poser de contraintes particulières. Il semble de toute
évidence que comme en matière d'assurance, en cas de litige les
juridictions de droit commun sont compétentes. Ainsi, le juge de
proximité est compétent si le litige porte sur un montant
inférieur à 4 000 euros , le tribunal d'instance si le litige
porte sur un montant inférieur à
75
73
74
www.mediation-assurance.org
Liste des adhérents à la Médiation
d'assurance :
www.mediation-assurance.org/Assureurs+adherents
75 Nota bene : Les juridictions de proximités seront
supprimées le 1er janvier 2017
29
10 000 euros et le tribunal grande instance si le litige porte
sur un montant supérieur à 10 000
euros.
L'assurance participative, à défaut de se voir
appliquer les règles de résolutions des litiges propres à
l'assurance, peut se tourner vers le droit commun. Les plateformes d'assurances
participatives et ses membres ont ainsi, des moyens de recours en litiges.
2. Les obligations légales liées à
l'assurance
L'assurance participative peut être confortée
à des obligations légales, que ce soit en matière
d'assurances obligatoires (a) que pour les règles de solvabilité
et de contrôle (b).
a) Quid des assurances obligatoires
Par principe, la liberté contractuelle règne
dans le cadre du contrat d'assurance, que ce soit dans le choix de l'assureur
ou du preneur d'assurance . Cependant, il existe des cas où l'individu
est
76
obligé par la force de la loi de contracter une
garantie d'assurance et à l'inverse dans certains cas, l'assureur est
obligé de contracter avec un candidat à l'assurance. Il s'agit
essentiellement d'assurances de responsabilité notamment en
matière d'assurance automobile77. Mais également des
garanties plus particulières comme celles couvrant contre les risques
technologiques ou
78
encore l'assurance de responsabilité du risque dit
locatif. Conformément à l'article 34 de la constitution, seul le
législateur peut imposer une assurance obligatoire79.
76Jean BIGOT, Vincent HEUZE, Jérome KULLMANN,
Traité du droit des assurances, Tome 2 Le contrat d'assurance, Lextenso
2ème édition, 2014, p. 105
77
78
Articles L. 211-1 du code des assurances et L. 324-1 du code de
la route.
Article L. 128-2 du code des assurances issu des de la loi
n°2003-99 du 30 juillet 2003.
79 CE, 14 février 1969, n°71.978
30
Ainsi, les plateformes d'assurances participatives semblent
inadaptées à la couverture de telles garanties dès lors
qu'elles ne font intervenir aucune entreprise d'assurance. En effet, si nous
prenons l'exemple de l'assurance automobile les articles L. 211-1 du code des
assurances et L. 324-1 du code de la route disposent que « ces
contrats doivent être souscrits auprès d'une entreprise
d'assurance agréée pour pratiquer les opérations
d'assurance contre les accidents résultant de l'emploi de
véhicules automobiles ». Or, les plateformes d'assurances
participatives n'ont pas le statut d'entreprise d'assurance aux sens à
l'article L. 310-1 du code des assurances.
Il en est de même pour les assurances des risques de
catastrophe technologique. Si l'obligation repose sous l'empire l'article L.
128-2 du code des assurances, l'article L. 128-3 du même code mentionne
que « l'entreprise d'assurance intervenant au titre de l'article L.
128-2 est subrogée dans les droits des assurés indemnisés
à concurrence des sommes versées à ce titre ».
Là encore, il est fait référence à la notion
d'entreprise d'assurance.
Il semble de toute évidence que l'assurance, notamment
dans sa forme « peer-to-peer » pure n'est pas en mesure de fournir
des contrats portant sur des assurances obligatoires. Ce qui réduit
considérablement le marché de l'assurance participative sachant
qu'il existe en France plus de cent quarante assurances obligatoires .
80
De plus, les candidats à l'adhésion d'une
plateforme d'assurance participative, ne peuvent se prévaloir de la
possibilité de saisir le Bureau central de tarification . Cet organisme
permet
81
d'obliger un assureur à délivrer une garantie
obligatoire qui a été refusée à un candidat
à l'assurance. Quatre assurances de responsabilité sont
visées, il s'agit de l'assurance construction ,
82
automobile 83 , exploitants de remontée
mécanique , et pour les professionnels de santé . Et une
84 85
relative aux dommages causés aux biens, c'est l'assurance
catastrophe naturelle .
86
80
Jean BIGOT, Vincent HEUZE, Jérome KULLMANN, Traité
du droit des assurances, Tome 2 Le contrat d'assurance, Lextenso 2ème
édition, 2014, p. 106
81 Article R. 250-1 du code des assurances.
82 Article L. 243-4 du code des assurances.
83 Article L. 212-1 du code des assurances.
84 Article L. 220-5 du code des assurances.
85 Article L. 252-1 du code des assurances.
86 Article L. 124-6 du code des assurances.
31
Ce n'est pas le seul obstacle réglementaire que doit
franchir un assureur. La législation impose des règles de
solvabilité et de contrôle par les autorités
étatiques.
b) L'assurance participative face aux règles de
solvabilité et de contrôle étatique
La Directive 2009/138/CE dite « Solvabilité II
» a pour but de simplifier le cadre réglementaire, tout en
renforçant par contrôle prudentiel la protection du marché
de l'assurance et leurs consommateurs.
L'étude du mécanisme de l'assurance
participative met en évidence une nouvelle fois les limites de ce
modèle. En effet, l'article L. 352-1 du code des assurances issu de la
transposition de la directive Solvabilité II, vise les exigences de
capital réglementaire en matière prudentielle. L'article
précise que « les entreprises d'assurance et de
réassurance détiennent des fonds propres éligibles
couvrant le capital de solvabilité requis ». Ainsi, les
règles de solvabilité s'appliquent aux entreprises d'assurance et
de réassurance au sens de l'article L. 310-1 du code des assurances.
Cependant, ces règles s'appliquent uniquement aux entreprises
d'assurance mentionnées à l'article L. 310-3-1 du code des
assurances, qui doivent également être agrées comme telles
par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.
Bien évidement, nous pouvons relativiser la
portée de cette absence de contrôle prudentiel pour les assurances
participatives. Le marché de ces plateformes reste encore confidentiel,
et a peu de chance en cas de défaillance d'impacter le marché de
l'assurance. Cependant, à une moindre échelle, les
conséquences pour le consommateur peuvent être plus
préjudiciable, notamment en cas d'insolvabilité du fonds pour
couvrir les engagements de la plateforme d'assurance participative, ou en cas
de perte des fonds.
32
L'Autorité des marchés financiers canadienne a
pris conscience du risque et a clairement mis en garde les consommateurs sur
les dangers d'insolvabilité et de non paiement des réclamations
d'indemnisation87.
De plus, le Titre 1er du Livre III du code des assurances
prévoit des dispositions sur le contrôle effectué par
l'Etat en matière d'assurance. L'article L. 310-1 du code des assurances
dispose que « le contrôle de l'Etat s'exerce dans
l'intérêt des assurés, souscripteurs et
bénéficiaires de contrats d'assurance et de capitalisation
». L'Etat joue donc un rôle dans la protection du consommateur,
mais protège également le marché.
En effet, il est important de rappeler que l'exercice de
l'assurance nécessite un agrément administratif
conformément à l'article L. 321-1 du code des assurances, les
entreprises d'assurance ayant leur siège social en France « ne
peuvent commencer leurs opérations qu'après avoir obtenu un
agrément administratif délivré par l'Autorité de
contrôle prudentiel et de résolution ». Cet
agrément administratif est donné après un contrôle
de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution en
application de l'article L. 321-10 du code des assurances.
Le modèle de l'assurance participative ne remplie pas
les conditions pour être considéré comme une entreprise
d'assurance, ni pour bénéficier du contrôle de
l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.
L'activité d'assurance participative n'a aucune
autorité de tutelle, cependant l'assurance participative pourrait
bénéficier d'un statut d'intermédiaire à
défaut de pouvoir être considérée comme une
entreprise d'assurance.
B. Une activité d'intermédiation en
assurance participative
87
Autorité des marchés financiers, Prudence à
l'égard des plateformes de partage de risques entre particuliers («
peer-to-peer risk
sharing »), 19 avril 2016, disponible sur :
www.lautorite.qc.ca/fr/communiques-2016-corpo.html_2016_plateformes-partage-risque-peer-to-peer-risk-sharing.html.
Consulté le 01/08/2016.
33
Le livre V du code des assurances règlemente toute
l'intermédiation en assurance. Cependant, il n'existe aucun statut
spécifique pour les plateformes d'assurances participatives. Pour les
formes d'assurance participative « peer-to-peer»
complémentaire, un statut d'intermédiaire peut leur être
appliqué (1) dès lors qu'intervient dans l'opération un
assureur « traditionnel ». Afin de permettre le développement
les autres formes d'assurances participatives, tout particulièrement des
plateformes qui ne peuvent être considérées comme des
intermédiaires en assurance, nous pouvons envisager un statut similaire
à celui de conseiller en investissement en financements participatifs ou
d'intermédiaire en financement participatif (2).
1. Les critères de l'intermédiation
applicable à l'assurance participative
L'intermédiation en assurance est issue de la
transposition de la directive européenne 2002/92 du 9 décembre
2002. L'intermédiation repose sur deux critères principaux, la
première est liée à l'activité consistant à
présenter, proposer ou aider à conclure des contrats d'assurance,
la seconde repose sur le fait de percevoir une rémunération pour
l'exercice d'activité (a). Ces notions peuvent être
appliquées qu'aux plateformes d'assurances participatives qui proposent
de couvrir un risque en collaboration avec un assureur. Dès lors que ces
critères sont remplis l'inscription à l'ORIAS pourrait être
obligatoire (b).
a) L'activité consistant à
présenter, proposer ou aider à conclure des contrats d'assurance
contre une rémunération
En application des dispositions de l'article L. 511-1 du code
des assurances, « l'intermédiation en assurance ou en
réassurance est l'activité qui consiste à
présenter, proposer ou aider à conclure des contrats d'assurance
ou de réassurance ou à réaliser d'autres travaux
préparatoires à leur
34
conclusion. N'est pas considérée comme de
l'intermédiation en assurance ou en réassurance l'activité
consistant exclusivement en la gestion, l'estimation et la liquidation des
sinistres ».
Ainsi, les plateformes d'assurance participative comme
Otherwise88, proposent des contrats d'assurance adaptés aux
besoins de ses membres.
De plus, l'article R. 511-1 du code des assurance
précise qu'est « considérée comme
présentation, proposition ou aide à la conclusion d'une
opération d'assurance, le fait pour toute personne physique ou personne
morale de solliciter ou de recueillir la souscription d'un contrat ou
l'adhésion à un tel contrat, ou d'exposer oralement ou par
écrit à un souscripteur ou un adhérent éventuel, en
vue de cette souscription ou adhésion, les conditions de garantie d'un
contrat ».
Un second critère s'applique, celui de la
rémunération qui s'entend au sens de ce même article L.
511-1 du code des assurances qui dispose qu'est « un
intermédiaire d'assurance ou de réassurance toute personne qui,
contre rémunération, exerce une activité
d'intermédiation en assurance ou en réassurance ».
Cette rémunération est entendue selon l'article R. 511-3 du Code
des assurances « comme tout versement pécuniaire ou tout autre
forme d'avantage économique convenu et lié à la prestation
d'intermédiation ».
Dans les faits, toutes les formes d'assurances participatives
répondent au critère de rémunérations, car leurs
rémunérations se font généralement sur une
commission sur les fonds collectés.
De plus, un statut d'intermédiaire renforcerait la
protection du consommateur d'assurance participative, car les
intermédiaires en assurance comme les assureurs doivent respecter un
devoir d'information du consommateur lors de la phase pré-contractuelle
. L'objectif de ces mesures est
89
d'établir « une relation de confiance entre le client
et son courtier fondée sur la transparence ».
90
88
THOMAS H-M., « Les fintech de l'assurance misent sur le
collaboratif » in L'argus de l'assurance, 9 juin 2016, disponible
sur :
www.argusdelassurance.com/intermediaires/courtiers-cgpi/les-fintech-de-l-assurance-misent-sur-le-collaboratif.108078.
Consulté le 22/07/2016.
89
90
Articles L. 511-1 à L. 530-3 et R. 511-1 à R.
530-12 du Code des assurances.
BERNARD E., « Devoir de conseil des intermédiaires
: Entre loi et jurisprudence, où en est la réglementation ?
» in L'Argus de l'assurance, 20 septembre 2011, disponible sur :
www.argusdelassurance.com/reglementation/jurisprudence/devoir-de-conseil-des-intermediaires-entre-loi-et-jurisprudence-ou-en-est-la-reglementation.51464.
Consulté le 15/08/2016.
35
Ainsi, l'intermédiaire doit d'abord se présenter
à leurs clients, les informer sur eux-mêmes , en
91
fournissant au candidat à l'assurance son
identité, son immatriculation, aux procédures de recours et de
réclamation et le cas échéant, à l'existence de
liens financiers avec une ou plusieurs entreprises d'assurances92.
L'intermédiaire devra également préciser à son
client quelle est sa qualité pour proposer ou gérer des contrats
d'assurance . Sur les informations relatives au contrat
93
d'assurance proposé, l'intermédiaire en
assurance devra fournir un minimum de « précision »
pré-contractuelles. Les conseils donnés par
l'intermédiaire doivent tenir compte des exigences et les besoins du
candidat à l'assurance.
Les assurances de forme participatives qui remplissent les
critères de l'article L. 511-1 du code des assurances ont l'obligation
de s'immatriculer à l'ORIAS.
b) Une obligation d'immatriculation à
l'ORIAS
L'article L. 512-1 du Code des assurances rend obligatoire
l'inscription à l'ORIAS, pour les personnes ou les
sociétés qui répondent aux critères de l'article L.
511-1 du code des assurances, sous peine de sanctions administratives et
pénales94.
De plus, l'article L. 512-2 du code des assurances qui impose
aux entreprises d'assurance de ne recourir qu'à des
intermédiaires immatriculés à l'ORIAS, ou des
intermédiaires autorisés à exercer en France par voie de
libre établissement ou de libre prestation de service95.
A titre d'exemple, la plateforme Otherwise est inscrite dans
la catégorie de courtier d'assurances ou de
réassurance96.
91 BLOCH L. « Devoir d'information et de conseil en
matière d'assurance » in Jurisclasseur Civil Annexes,
Fasc. 6, 25 octobre 2015.
92Article L. 520-1 du code des assurances.
93 BLOCH L. « Devoir d'information et de conseil en
matière d'assurance » in Jurisclasseur Civil Annexes,
Fasc. 6, 25 octobre 2015.
94 Articles L. 514-1 et L. 514-2 du code des assurances.
95 Articles L. 515-1 et L. 515-2 du code des assurances.
96Registre public de l'ORIAS disponible sur
www.orias.fr.
36
L'article R. 513-1 du code des assurances exclut de la
qualification d'intermédiaire en assurance les personnes qui exercent
l'intermédiation au titre d'une activité accessoire, lorsque les
contrats d'assurance répondent à l'ensemble des
caractéristiques suivantes:
« 1° Le contrat d'assurance requiert uniquement
une connaissance de la couverture offerte par l'assurance ;
2° Le contrat d'assurance n'est pas un contrat
d'assurance vie ;
3° Le contrat d'assurance ne comporte aucune couverture
de la responsabilité civile ;
4° Le contrat d'assurance constitue un
complément au produit ou au service fourni par un fournisseur et couvre
:
a) Soit le risque de mauvais fonctionnement, de perte, y
compris vol, ou d'endommagement des biens fournis ;
b) Soit l'endommagement ou la perte, y compris le vol, de
bagages et les autres risques liés à un voyage même si
l'assurance couvre la vie ou la responsabilité civile, à la
condition que cette couverture soit accessoire à la couverture
principale relative aux risques liés à ce voyage ;
5° Le montant de la prime annuelle ne dépasse
pas 500 euros et la durée totale du contrat d'assurance, reconductions
éventuelles comprises, n'est pas supérieure à cinq ans.
»
Ces caractéristiques ne sont pas de nature a
écarter les assurances participatives de type « peer-to-peer »
complémentaire, d'une inscription à l'ORIAS. Mais
l'activité des autres formes d'assurances participative, que sont la
forme dite « peer-to-peer » pure ou sous la forme de plateforme de
rachat de franchise participative, n'entrent pas dans le champ du livre V sur
l'intermédiation en assurance.
37
Une inscription à l'ORIAS permettrait une meilleure
protection du consommateur d'assurance et du marché de l'assurance. En
effet, l'intermédiaire en assurance transmettrait au registre unique des
informations relatives à sa capacité
professionnelle97, une assurance de responsabilité , et le
98
cas échéant, une garantie
financière99.
De plus, un contrôle d'honorabilité serait
effectué sur la base du bulletin numéro 2 du casier judiciaire
des « intermédiaires personnes physiques qui exercent en leur
nom propre, les personnes qui dirigent, gèrent ou administrent des
intermédiaires personnes morales, les personnes qui sont membres d'un
organe de contrôle, disposent du pouvoir de signer pour le compte ou sont
directement responsables de l'activité d'intermédiation au sein
de ces intermédiaires, ainsi que les salariés des entreprises
d'assurance qui sont directement responsables de l'activité
d'intermédiation »100.
Il existe une autre possibilité pour ces plateformes
d'assurances participatives leur permettant de contourner l'obligation
d'immatriculation à l'ORIAS. Celles-ci exercer leur activité en
qualité d'indicateur d'assurance au sens de l'article R. 511-3 du code
des assurances, « dont le rôle se borne à mettre en
relation l'assuré et l'assureur ou à signaler l'un à
l'autre ». Cela, suppose que la plateforme ne doit faire mention
d`aucun contrat d'assurance ni d'évoquer son contenu, et se limiter
à mettre en relation les membres de la communauté avec un
assureur.
Il serait ainsi, opportun de mettre en place une
réglementation obligeant les plateformes d'assurances participatives qui
n'ont pas opté pour une activité d'intermédiaire en
assurance, à s'immatriculer au Registre unique à l'image de
l'activité des plateformes de financement participatif. Cela permettrait
de sécuriser d'avantage les consommateurs d'assurance et le
marché de l'assurance, mais permettrait également de mettre en
place un cadre juridique clair autour de la pratique de l'assurance
participative.
97 Article L. 512-5 du code des assurances.
98 Article L. 512-6 du code des assurances.
99 Article L. 512-7 du code des assurances.
100 Article L. 512-4 du code des assurances.
38
2. La création d'un statut réglementé
sur le modèle du financement participatif
Créé par l'ordonnance n°2014-559 du 30 mai
2014 relative au financement participatif, a mis en place un régime
juridique pour l'exercice des métiers du financement participatif, que
sont les activités de conseillers en investissement participatif et
d'intermédiaire en investissement
101
participatif 102 . Il serait envisageable de
développer un régime similaire en matière d'assurance
participative (a), toujours dans l'objectif de protéger le consommateur
et le secteur de l'assurance (b).
a) Un régime juridique spécifique pour
l'exercice des métiers de l'assurance participative
Nous pouvons écarter l'idée que l'assurance
participative est une entreprise d'assurance aux sens à l'article L.
310-1 du code des assurances. Car l'assurance participative,
particulièrement dans sa forme « peer-to-peer » pure, ne
propose pas de contrat d'assurance ni ne se voit transmettre le risque de
l'assuré, puisqu'en matière d'assurance participative ce risque
est mutualisé dans une communauté.
Cependant, nous pouvons concevoir un régime
obligatoire, analogue au financement participatif applicable à
l'assurance participative, avec les métiers de conseiller en assurance
participative et d'intermédiaire en assurance participative.
Le code monétaire définit le conseiller en
financement participatif comme « les personnes
103
morales exerçant à titre de profession
habituelle une activité de conseil en investissement
101
102
Articles L. 547-1 et suivants du code monétaire et
financier. Articles L. 548-2 et suivants du code monétaire et financier.
103 Article L. 547-1 du code monétaire et financier.
39
mentionnée au 5 de l'article L. 321-1 portant sur
des offres de titres de capital et de titres de créance définies
par décret. [É] Cette activité est menée au moyen
d'un site internet remplissant les caractéristiques fixées par le
règlement général de l'Autorité des marchés
financiers ». Conformément à l'article L. 511-6 du code
monétaire et financier, les prêts ne peuvent excéder 1000
euros par projet ou 4000 euros s'il s'agit d'un prêt sans
intérêt .
104
Nous pouvons ainsi, concevoir par analogie une
définition du conseiller en assurance participative, comme une personne
morale exerçant à titre de profession habituelle une
activité de conseil en assurance participative. Il semble important
d'apporter une limitation dans l'étendue du conseil en le limitant
à l'assurance participative.
Mais la pertinence de l'existence d'un statut de conseiller en
assurance participative ne semble pas aussi évidente qu'en
matière d'investissement participatif. En effet, un conseiller en
financement participatif peut conformément à l'article L. 547-1
du code monétaire, exercer des services connexes sur matières
variées telles que des conseils sur la structure de capital d'une
entreprise, sur la stratégie industrielle encore en matière de
fusions et de rachat d'entreprises105. Or, il n'existe en
matière d'assurance des matières aussi variées.
Cependant, il semble que la création du statut
d'intermédiaire en assurance participative soit, quant à lui
pertinent. Si nous nous appuyons sur la définition de
l'intermédiaire en financement participatif comme « des
personnes qui exercent, à titre habituel, l'intermédiation au
sens de l'article L. 548-1 pour les opérations de prêt à
titre onéreux ou sans intérêt. Seules les personnes morales
peuvent être intermédiaires en financement participatif
» et qui « consiste à mettre en relation, au moyen
d'un site internet, les porteurs d'un projet déterminé et les
personnes finançant ce projet » . Nous pouvons donner la
définition suivante de l'intermédiaire en assurance
106
participative, comme consistant à mettre en relation,
au moyen d'un site internet, une plateforme d'assurance participative et les
personnes souhaitant couvrir leurs risques via celle-ci. Les plateformes
d'assurances participatives pourraient obtenir un cadre légal facilitant
ainsi leur développement avec une plus grande sécurité.
104
105
Article D. 548-1 issu du Décret n° 2014-1053 du 16
septembre 2014 relatif au financement participatif. Fiche ORIAS sur le
conseiller en investissement participatif disponible sur
www.orias.fr.
106 Articles L. 548-1 et L. 548-2 du Code monétaire et
financier.
40
A ce jour, aucun projet de loi n'envisage de créer un
statut d'intermédiaire en assurance participative. Cela s'explique par
le caractère confidentiel et limité du marché de
l'assurance participative qui souffre également d'une
réglementation inadaptée.
A titre de comparaison, le financement participatif est apparu
dès les années 1990, mais a connu un fort développement au
milieu des années 2000. Il aura cependant fallu attendre 2013 et les
Assises de l'entrepreneuriat107, et que les pouvoirs publics
légifèrent, après consultation publique sur le financement
participatif, par ordonnance en 2014108.
Comme le statut d'intermédiaire en assurance, la
création d'un statut d'intermédiaire en assurance participative,
est également vecteur de plus de sécurité pour le
marché de l'assurance et pour les consommateurs.
b) Un régime juridique renforcé par une
assurance de responsabilité civile
Les pouvoirs publics ont également pris des mesures
pour renforcer les activités de l'économie participative,
notamment en matière de financement participatif en imposant une
assurance de responsabilité civile professionnelle.
Si l'idée d'une assurance de responsabilité
civile professionnelle est acquise depuis plusieurs années en
matière d'intermédiation en assurance109 et
d'intermédiation en opérations de banque et en services de
paiement , dès lors que l'intermédiaire encaisse des fonds.
L'intérêt d'une telle
110
assurance est de faire face à une éventuelle
défaillance de l'intermédiaire.
107 Mesures issues des Assises de l'entrepreneuriat, Le portail
de l'Economie et des Finances, 29 avril 2013, disponible sur :
www.economie.gouv.fr/mesures-issues-des-assises-lentrepreneuriat.
Consulté le 02/08/2016.
108
109
Ordonnance n°2014-559 du 30 mai 2014, article 17, en vigueur
le 1er octobre 2014.
Article L. 512-7 du code des assurances.
110 Article L. 519-4 du code monétaire et financier.
41
Cependant, en matière de financement participatif la
souscription d'une assurance de responsabilité civile professionnelle
n'était pas obligatoire jusqu'à un décret du 16 juin 2016
pour une entrée en vigueur le 1er juillet 2016111.
Les pouvoirs publics par ce décret, ont voulu renforcer
la protection du consommateur et du secteur du financement. En rendant
l'assurance de responsabilité civile professionnelle obligatoire, les
pouvoirs publics ont également cherché à lutter contre les
plateformes de financement frauduleuses, en durcissant les conditions
d'inscription à l'ORIAS.
Ainsi, l'article 2 du décret du 16 juin 2016, a
inséré dans le code monétaire et financier un article D.
547-3 qui impose la souscription de « garanties dont le montant ne
peut être inférieur à 250 000 euros par sinistre et 500 000
euros par année d'assurance. Ce dernier montant doit permettre la
couverture d'au moins deux sinistres sur une même année
d'assurance ».
Il y a donc une véritable prise de conscience par les
pouvoirs publics, du risque que représente l'économie
participative.
Par analogie, si un régime encadrant l'activité
d'assurance participative, notamment dans sa forme « peer-to-peer »
pure ou de rachat de franchise participative, voit le jour, nous pourrions sans
conteste affirmer que le législateur insérera une obligation
d'assurance pour ces activités. En effet, il est important de
protéger le consommateur contre un dysfonctionnement même de la
plateforme qui pourrait porter préjudice aux membres de la
communauté. Mais également en cas de non respect des
règles classiques du devoir d'information dû par le professionnel
au consommateur .
112
Nous pouvons nous demander si les assureurs avaient
réellement anticipé le développement de l'économie
participative, ou si les assureurs sont réellement convaincus du
développement de ce marché. Cette fébrilité des
assureurs peut s'expliquer par l'absence de données actuarielles sur les
risques d'une telle activité économique. De plus, le
marché est encore assez restreint, les perspectives de profits sont pour
l'instant quasiment nulles à court terme, mais l'économie
participative connaît une forte croissance.
111
|
Décret n°2016-799 du 16 juin 2016 relatif aux
obligations d'assurance de responsabilité civile professionnelle des
conseillers en
|
investissements participatifs et des intermédiaires en
financement participatif.
112 Article L. 111-1 du Code de la consommation.
42
Même si une assurance obligatoire serait
bénéfique pour sécuriser les activités d'assurance
participative, cela ferait naitre un véritable paradoxe. En effet, si
nous prenons le cas d'une assurance « peer-to-peer » pure qui dans
son mécanisme et sa structure repose sur l'idée de s'exempter de
toutes interventions d'un assureur traditionnel. Faire intervenir un assureur
irait à l'encontre même de la philosophie de l'assurance
participative.
Nous arrivons à un statu quo, où il
faut choisir entre la sécurité du mécanisme d'assurance ou
le tout participatif. En l'absence de toute initiative, le développement
de l'assurance participative peut être freiné, d'autant plus que
sans obligation légale, les assureurs traditionnels seraient peu enclins
a faciliter la couverture des risques de potentiels concurrents.
Conclusion
L'assurance participative est un modèle innovant
d'assurance tout en revenant sur les idées mutualistes originelles de
l'assurance. Les individus qui adhèrent à une plateforme
d'assurance participative recherchent avant tout de réduire le
coût de l'assurance. Ce faible coût de garantie s'explique, par
l'absence totale ou partielle d'un assureur traditionnel dans
l'opération d'assurance, et par le faible coût d'exploitation
d'une plateforme numérique. Mais également par le fait que les
membres de la plateforme sont responsabilisés aux risques auxquels ils
sont exposés, réduisant ainsi les cas de fraude.
Cependant, l'assurance participative, au regard des
règles de droit actuelles, ne semble pas avoir d'avenir sans
coopération avec les assureurs traditionnels, notamment en
matière d'assurance obligatoire. L'assurance « peer-to-peer »
pure présente de trop grands risques pour le consommateur d'assurance et
doit donc se limiter à la couverture de risques nécessitant de
très faibles sommes, comme sur des biens de consommation courante.
43
Il est en effet, difficile d'imaginer une assurance «
peer-to-peer » couvrant des risques automobiles, qui relève d'une
obligation légale en matière de responsabilité, mais dont
les dommages peuvent être de plusieurs milliers d'euros pour les dommages
matériels, et jusqu'à plusieurs centaines de milliers d'euros en
cas de dommages corporels. Le risque de défaillance pour insuffisance de
fonds est très élevé. De plus, ce type d'assurance
participative ne peut rentrer dans aucun cadre légal, freinant ainsi
davantage son développement.
Les assurances de type « peer-to-peer »
complémentaire semblent développer un modèle plus viable.
En effet, en mutualisant les risques les moins importants et en confiant les
risques plus lourds à un assureur, le risque de défaillance est
grandement réduit. De plus, le risque de non-paiement dû au refus
de couverture par les membres de la plateforme doit porter uniquement sur la
couverture de biens de faible valeur.
De même, cette activité peut être
exercée sous le couvert d'une activité d'intermédiaire en
assurance, sous couvert d'une immatriculation à l'ORIAS qui assure ainsi
une meilleure protection du consommateur. Certaines de ces plateformes
d'assurances participatives remplissent les critères de
l'intermédiation en assurances. A titre d'exemple, l'activité de
courtage peut être l'activité principale de la plateforme et
l'activité d'assurance participative peut être accessoire.
Les sociétés participatives de rachat de
franchise sont-elles aussi susceptibles de se développer en France,
cependant l'offre proposée par des sociétés comme Inspeer
est limitée. Car reposant sur une seule offre de service. Le risque
porte uniquement sur la perte des fonds mis en commun par les membres de la
plateforme. Ce risque est écarté, car la collecte des fonds est
effectuée par une société tierce qui a elle-même
souscrit une garantie financière auprès d'un établissement
bancaire ou une entreprise d'assurance.
Sur le plan juridique, l'assurance participative n'est pas une
activité d'assurance au sens des dispositions du code des assurances.
Mais comme indiqué précédemment, l'assurance participative
peut reposer sur le statut de l'intermédiaire en assurance, mais doit
pour cela faire intervenir dans l'opération d'assurance, une entreprise
d'assurance traditionnelle. L'autre solution serait de créer un statut
spécifique pour les plateformes d'assurances participatives à
l'image des intermédiaires en financement participatif.
44
Cependant, le nombre limité d'acteurs sur le
marché et le manque de recul sur cette activé peut dissuader les
pouvoirs publics d'intervenir pour créer un tel statut. Il faudra
également du temps pour que les consommateurs prennent connaissance et
appréhendent ce modèle d'assurance. Comme dans le secteur
bancaire, les consommateurs d'assurance sont extrêmement sensibles
à la santé financière des entreprises, la confiance est la
clé de la relation contractuelle.
Même si la philosophie qui guide l'assurance
participative est louable, l'idée de s'affranchir de toute intervention
d'un assureur semble de toute évidence utopique au regard des
contraintes imposées par la législation française. De
fait, l'intérêt de recourir à l'assurance participative
perd de son intérêt. Nous retrouvons une problématique
similaire, en matière de financement participatif, où les frais
prélevés par la plateforme sont parfois plus importants que les
taux d'intérêts pratiqués par un établissement
bancaire.
L'assurance participative est ainsi confrontée à
la réalité économique et juridique. Les assureurs
traditionnels en sont conscients, à l'image du géant de
l'assurance, Generali qui avait lancé une plateforme d'assurance
participative avant d'abandonner cette offre après quelques mois
faute
113
de souscripteurs. Ainsi, même de grands assureurs
dotés d'une force commerciale et financière importante n'ont pas
réussi à imposer le modèle de l'assurance participative.
Peut-être que l'offre de Generali était prématurée
au regard du contexte de crise dans laquelle l'offre a été
lancée.
Pour se démarquer l'assurance participative mise sur
les nouvelles technologies et sur les réseaux sociaux, afin de se
rapprocher au plus près des attentes du consommateur.
Il faudra semble t-il, du temps et quelques ajustements
législatifs pour que l'assurance participative s'impose en France. Il ne
fait aucun doute qu'en cas de succès de ce modèle, les assureurs
traditionnels riposteront.
113
Kontsurnous.fr
45
Des sociétés innovantes, comme Uber ou Airbnb,
qui ont su profiter de vides juridiques pour se développer de
façon exponentielle et s'imposer sur leurs marchés respectifs .
Les failles
114
juridiques sont peu nombreuses voir inexistantes pour
permettre un développement « sauvage » de l'assurance
participative en France.
Faut-il alors miser sur l'assurance participative ? Nous
répondrons avec la réponse laconique suivante, « non mais
». Non, car l'assurance participative est peu sûre en raison de
l'absence de réglementation spécifique. De plus, l'assurance
participative ne semble pas encore avoir, à ce jour, la confiance des
consommateurs et des autorités. Cela peut remettre en cause la
viabilité économique et juridique de ce modèle
d'assurance. Mais l'assurance participative ose et fait le pari de l'innovation
en proposant un nouveau modèle d'assurance totalement
dématérialisé et plus économique pour
l'assuré.
114
LEGROS C., « Michel Bauwens : « Uber et Airbnb n'ont
rien à voir avec l'économie de partage » in Le
Monde, 25 aout 2015, disponible sur :
www.lemonde.fr/entreprises/article/2015/06/25/michel-bauwens-uber-et-airbnb-n-ont-rien-a-voir-avec-l-economie-de-partage_4661680_1656994.html#phUr1tXXcEeG6Huu.99.
Consulté le 02/08/2016.
46
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- Code monétaire et financier, Dalloz, 2015
- « Le financement participatif ou crowdfunding
», Direction générale des entreprises
- « Plateformes numériques collaboratives : les
recommandations du Conseil national de la
Consommation », Ministère de
l'économie
- « Prudence à l'égard des plateformes de
partage de risque entre particuliers », Portail Québec
49
- Rappport annuel de l'ORIAS 2015
- Mesures issues des Assises de l'entrepreneuriat, Le portail de
l'Economie et des Finances, 29 avril 2013
50
Je dédie ce mémoire de fin d'études
à mon cousin et ami, Jamil BEN-MAIZ.
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