Année universitaire 2014-2015
Université Lumière Lyon
2 Faculté de Droit
Mémoire pour le Master 2 Droit
des transports et de la logistique
Présenté par Thibaut SCHWIRTZ Sous la
direction de Maître Frédéric BLANC
DROIT MARITIME ET ENERGIES
MARINES RENOUVELABLES
REMERCIEMENTS
Je tiens à remercier tous les membres du Cabinet LBEW qui
m'ont accueilli dans leurs murs pour réaliser mon stage.
Je remercie en particulier Maître Béatrice Witvoet
pour m'avoir fait découvrir les énergies marines renouvelables et
qui a su m'aiguiller tout au long de mes recherches.
Merci également à Gilles Legué et Serge
Azebaze, du Groupe Eyssautier, ainsi qu'à François Richard, de
Marine Renewable Energy Group, pour ces réunions fructueuses.
Je remercie enfin Isabelle Bon-Garcin et Vincent Soubise pour
m'avoir admis dans ce Master et m'avoir ouvert au droit maritime.
SOMMAIRE
PARTIE 1 : La nécessité d'incorporer les
énergies marines renouvelables dans les règles organisant les
rapports privés en mer
Chapitre I : La difficulté d'attribuer un statut
juridique aux engins EMR
I. Les installations EMR, navires ou engins flottants ?
II. Un rapprochement possible entre les engins EMR et les
plates-formes pétrolières
Chapitre II : les règles applicables aux installations EMR
en matière d'évènements de mer
I. L'abordage
II. Le jeu des limitations de responsabilité
appliqué aux engins EMR
III. L'application de l'assistance maritime aux engins EMR
flottants Chapitre III : les règles de droit social en mer
résultant de l'implantation d'EMR
I. Le statut des travailleurs opérant sur les sites
EMR
II. Les règles de droit social international applicables
aux travailleurs opérant sur les installations EMR
PARTIE 2 : Un droit public contraignant responsable du retard de
la France dans le développement des EMR
Chapire I : les contraintes administratives relatives aux
énergies marines renouvelables
I. Les conditions à remplir par les candidats pour
exploiter des énergies marines renouvelables
II. L'installation d'EMR confrontée au domaine public de
la mer Chapitre II : Les énergies marines renouvelables face aux
contraintes environnementales
I. L'existence de zones marines protégées
restreignant l'implantation des EMR
II. La prise en compte de l'impact des EMR sur l'environnement
marin
ABREVIATIONS
- CGPPP : code général de la
propriété des personnes publiques
- CMB : convention de Montego Bay
- CRE : commission de régulation de l'énergie
- DPM : domaine public maritime
- DTS : droit de tirage spécial
- ETM : énergie thermique des mers.
- MW : megawatt
- OMI : organisation maritime internationale
- ONU : organisation des Nations Unies
- PC : plateau continental
- UE : union européenne
- ZEE : zone économique exclusive
1
INTRODUCTION
« Être une puissance mondiale, cela signifie
être une puissance maritime » selon Georges Leygues, qui fut
ministre de l'Intérieur puis plusieurs fois ministre de la Marine entre
1917 et 1933. Cette phrase, prononcée à une époque de
conflits entre puissances belliqueuses, devait s'entendre de l'importance des
États de disposer d'une flotte militaire et commerciale puissante, ceci
afin de contrôler les zones stratégiques du globe. Près
d'un siècle d'industrialisation plus tard, l'enjeu maritime reste
toujours autant de taille : à l'heure de la raréfaction des
ressources énergétiques, l'homme s'est progressivement
tourné vers la mer, jusque-là essentiellement destinée
à la navigation, pour y puiser de nouvelles réserves
d'énergie. Si l'exploitation de son sous-sol n'est pas un
phénomène nouveau (les plates-formes pétrolières se
sont multipliées dès les années 50), la flambée des
prix du pétrole causée par les chocs pétroliers a
provoqué un regain d'intérêt des États pour
l'éolien, source possible d'indépendance
énergétique.
En parallèle, la prise de conscience collective de la
catastrophe environnementale provoquée par l'industrie traditionnelle,
cumulée à la demande croissante en électricité (il
est estimé que la demande énergétique mondiale sera
multipliée par deux entre 2010 et 2050), ont convaincu plusieurs pays
d'Europe du nord d'engager leur transition énergétique. Cette
politique s'est traduite par le déplacement de la production
d'énergie vers la mer, avec la construction de parcs éoliens
dès les années 90. Le Royaume-Uni, le Danemark, l'Allemagne et
les Pays-Bas se sont ainsi érigés en leaders mondiaux de
l'énergie éolienne offshore. Au vu de ces
expériences fructueuses et au fur et à mesure de la baisse du
coût de l'électricité issu de l'éolien
offshore, d'autres pays ont commencé l'installation de parcs
aux dimensions toujours plus importantes. De nouvelles techniques de production
d'électricité ont également émergées, telles
que les éoliennes flottantes, les hydroliennes, les dispositifs
houlomoteurs ou encore les engins utilisant l'énergie thermique de la
mer, toutes regroupées sous l'appellation « énergies marines
renouvelables » (EMR). Parmi ces technologies, l'éolien
offshore posé reste actuellement la seule
opérationnelle.
Les éoliennes dites « posées » sont,
de la même manière que pour les éoliennes terrestres,
destinées à transformer l'énergie mécanique du vent
en électricité. Elles sont composées d'un mât
fixé au fond marin, d'une nacelle abritant les composants
mécaniques et électriques, et d'un rotor assorti de trois pales.
Il existe déjà 66 parcs éoliens offshore en
activité installés en Europe, dont le plus grand est celui de
London
2
Array, situé au large de l'estuaire de la Tamise.
Achevé prématurément en 2012 (il était prévu
que le parc soit deux fois plus grand que celui actuel), il s'étend sur
100 kilomètres carrés et se compose de 175 turbines de plus de
120 mètres, pour une puissance totale de 630 MW. En avril 2015, la barre
des 3 000 éoliennes offshore installées en Europe a
été dépassée, pour un total de 10 000
MW1. Au-delà de l'Europe, il est à noter que la Chine,
qui entame progressivement des actions de grande envergure en faveur de
l'environnement, s'est également dotée de trois parcs
éoliens en mer depuis 2010, représentant une puissance totale de
près de 400 MW. De même, les Etats-Unis ont validé la
construction du parc Cape Wind, situé à 8 km des
côtes dans le Massachusetts. Composé de 130 éoliennes, il
est destiné à fournir 75 % de l'électricité du Cap
Cod et des îles Martha's Vineyard et Nantucket2.
Cependant, l'éolien posé présente comme
limite de ne pouvoir être installé qu'en eaux peu profondes (40
mètres maximum). Cette contrainte est relativement absente en Europe du
nord, où la profondeur reste faible sur plusieurs dizaines de
kilomètres, mais elle apparaît vite sur le front océanique
ou en Méditerranée, où s'y ajoute une concurrence pour
l'espace conséquente. A l'issue de deux appels d'offres
réalisés en 2011 et 2012, la France a toutefois autorisé
le lancement de programmes éoliens posés sur 5 sites
différents (Tréport, Fécamp, Courseulles-sur-mer,
Saint-Brieuc, Saint-Nazaire et Veulettes-sur-mer), pour un total de 3 000 MW,
soit la moitié de la puissance éolienne attendue en France pour
2020.
Malgré cela, l'éolien flottant présente
plus d'intérêt en ce qui concerne l'Europe du sud. A l'inverse de
l'éolien posé, les éoliennes flottantes en projet sont
construites sur des flotteurs amarrés au fond marin. Celles-ci sont donc
prévues pour être installées dans des zones dont la
profondeur peut atteindre 200 mètres, ce qui étend
considérablement le nombre de zones aménageables. A l'heure
actuelle, aucun parc de ce type n'a encore été construit.
Cependant, un premier prototype WindFloat a été
installé en 2011 à 5 km au large des côtes
d'Aguçadoura au Portugal3. En France, l'éolienne
Winflo est en conception, prévoyant l'installation du premier
parc éolien flottant au large du Croisic d'ici 2020, pour un budget de
35 millions d'euros. Un deuxième projet plus ambitieux, le projet
Vertiwind, financé par EDF Énergies, prévoit
l'installation d'éoliennes flottantes à axe vertical d'ici 2017,
moins coûteuses et moins grandes pour une performance similaire aux
éoliennes à axe horizontal, au large de Fos-sur-mer. Le budget
total du projet est de 130 millions d'euros, dont 37 millions proviennent de la
commission
1 « Le marché de l'éolien en mer atteint le
cap des 3 000 turbines en Europe », Les Échos
19/08/2015
2
capewind.org
3
principlepowerinc.com
3
européenne4.
Les hydroliennes, quant à elles, sont des engins
exploitant les courants marins. Leur capacité de production
d'électricité est deux fois supérieure à celle des
éoliennes offshore et sont destinées à être
immergées, ce qui présente de nombreux avantages. La technologie
hydrolienne est cependant encore mal connue : en France, les prototypes
Orca et Beluga sont les plus prometteurs mais ont tous les
deux accumulés du retard. Sabella, prévoit d'implanter
la D10, hydrolienne de 10 m de diamètre, dans le Fromveur, où les
courants marins sont forts. Après assemblage, la machine sera en
principe immergée en 2015 et reliée à Ouessant pour un
test d'un an.
A un stade encore moins mature se trouvent les systèmes
houlomoteurs, théoriquement deux à trois fois plus performants
que les éoliennes offshore, et destinés à
utiliser l'énergie fournie par les vagues. Dans le monde, il existait en
2012 une cinquantaine de projets houlomoteurs, dont la quasi-totalité
sont flottants, selon l'Agence internationale de l'Énergie. Le prototype
houlomoteur français Ceto, installé au large de La
Réunion, semblait très prometteur, mais le projet a
également accumulé du retard en raison de la destruction des
engins en 2014 par le cyclone Bejisa. DCNS et Fortum se sont également
engagés à expérimenter en France le système
houlomoteur WaveRoller développé par AW Energy en baie
d'Audierne. Le calendrier du projet est prévu en 3 phases. La
fabrication des modules et l'obtention des autorisations sont prévues
pour 2015, l'installation et le début du test pour 2016.
Enfin, des dispositifs ont été inventés
permettant de transformer l'énergie thermique de la mer (ETM) en
électricité. Ils sont basés sur le pompage d'eau profonde
vers la surface, le choc thermique étant destiné à
produire de la vapeur alimentant une turbine. De tels dispositifs n'ont
vocation à être installés qu'en zones tropicales mais
constituent un potentiel intéressant, d'autant plus que la France occupe
une place de choix dans le marché éolien : avec une surface de 11
millions de kilomètres carrés (3 500 km de côtes), elle
dispose du deuxième plus grand domaine maritime du monde,
derrière les États-Unis5, et près de 20% du
potentiel éolien flottant européen.
Sur le plan juridique, l'intérêt porté aux
EMR remonte à la Convention de Rio des 3-14 juin 1992 sur le climat,
conduisant à la signature de la Convention cadre des Nations-Unies sur
le changement climatique qui impose aux États industrialisés une
réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre aux
niveaux de 1990. Le protocole de Kyoto a suivi en 1997, mettant en place des
objectifs contraignants pour réduire les gaz à effet
4 Pôle mer Méditerranée
5 « Pourquoi la France doit enfin se doter d'une politique
maritime », La Tribune, 7 juillet 2014
4
de serre. L'Union Européenne l'a approuvé le 25
avril 2002, avec comme objectif une réduction de 8% sur la
période 2008-2012 par rapport aux niveaux de 1990. Afin d'atteindre cet
objectif, l'UE a adopté la directive 2001/77/CE6 sur la
production d'électricité à partir de sources
d'énergie renouvelables, qui a été abrogée par la
directive fondamentale du 23 avril 20097. Celle-ci vise à
porter à 20% à l'horizon 2020 la part de l'énergie
provenant de sources renouvelables sur l'ensemble de l'Union. L'objectif est
variable selon la situation d'origine des États : la France est ainsi
tenue de porter à 23% la part de production d'électricité
renouvelable dans sa production globale. Cette directive est d'une importance
particulière en ce qu'elle est la seule en matière
d'environnement à fixer des objectifs contraignants d'une telle ampleur
pour les Etats membres. Ces derniers s'engageaient de plus à transposer
la directive dans leur droit interne avant décembre 2010, ce qui a
été fait au travers de la loi dite « Grenelle II »8
portant engagement national pour l'environnement.
Le constat est donc le suivant : la France est dotée de
centres de recherche et développement très performants
constituant un laboratoire d'idées majeur dans le domaine des EMR. Elle
dispose en outre d'une situation géographique extrêmement
favorable à un développement massif de parcs EMR sur son
territoire. Enfin, ses engagements internationaux et sa politique
environnementale en matière d'EMR semblent attester de sa volonté
d'opérer un virage écologique concernant ses méthodes de
production énergétique. Pourtant, il faut bien avouer qu'en 2015,
aucune éolienne en mer n'a été installée, et
presque tous les lancements de prototypes EMR ont été
repoussés. Quelles sont les explications à ce retard significatif
sur nos voisins européens ? Pourquoi aucun MW n'a été
installé depuis le premier appel d'offres lancé par le
gouvernement en 2004 ? De nombreuses raisons peuvent être
avancées, mais les plus pertinentes ne sont assurément pas
d'ordres économique ou technique : l'élément principal qui
constitue un frein au développement des EMR en France depuis maintenant
plus de 10 ans est le droit. Le principe des EMR implique ni plus ni moins de
faire intervenir des industriels historiquement amenés à produire
sur terre (EDF, GDF, Areva...) à mettre en place des technologies en
mer. Or, si le droit commun s'applique sur les côtes, il devient un droit
résiduel en mer, les spécificités du milieu marin
nécessitant de le remplacer par les règles du droit maritime.
6 Directive 2001/77/CE du Parlement européen et du Conseil
du 27 septembre 2001 relative à la promotion de
l'électricité produite à partir de sources
d'énergie renouvelables sur le marché intérieur de
l'électricité
7 Directive 2009/28/CE du Parlement européen et du
Conseil du 23 avril 2009 relative à la promotion de l'utilisation de
l'énergie produite à partir de sources renouvelables
8 Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement
national pour l'environnement
5
Il ressort que certains pans entiers du droit maritime
privé restent à adapter à l'apparition de techniques de
production inédites dans un milieu inédit. Dès lors,
comment inciter les investisseurs à se lancer dans de tels projets
pharaoniques sans leur apporter un cadre légal stable leur permettant
d'établir un programme financier fiable ? La notion même «
d'installation EMR », « d'engin » ou « dispositif EMR
» est inexistante en droit français. Quel régime doit-on
alors leur appliquer ? Doit-on raisonner par analogie en les rapprochant
d'entités juridiques existantes, ou doit-on leur créer un
régime propre prenant en compte leurs spécificités
techniques ? Et selon le choix qui sera fait, quelles règles du droit
maritime privé devront être appliquées ? Les parcs
éoliens, comme la plupart des engins EMR, vont constituer des obstacles
plus ou moins visibles à la navigation et vont concurrencer l'espace
maritime. Une fois installés, ce ne sera donc qu'une question de temps
avant qu'un navire entre en collision avec un engin. Quelles seront les
règles de responsabilité à mettre en oeuvre dans cette
situation ? Faudra-t-il instaurer des règles de circulation
particulières dans les parcs ? Les règles de l'assistance
maritime pourront-elles s'appliquer ? Quelles seront les répercussions
sur les contrats d'assurance ? Le volet social représente
également une part non négligeable des règles qu'il reste
à établir en matière d'EMR. Les parcs éoliens
construits en Europe représentent des mois de travail de longue haleine
en pleine mer, ce qui amène à se demander quel statut sera
applicable aux travailleurs participant à leur installation et
gérant leur exploitation.
Des solutions à certains de ces problèmes ont
déjà été trouvées à
l'étranger, comme en matière d'assurance, où les
compagnies britanniques ont opéré par « saucissonnage »
en empruntant à divers contrats existants. L'Angleterre étant le
leader incontesté en matière d'assurance maritime, on peut
supposer que la France se calquera sur les produits d'assurance d'Outre-Manche.
Ceci étant, les particularités du marché français
ne permettent pas de raisonner de la sorte sur toutes les matières. Il
est en conséquence impératif pour la France d'intégrer les
EMR dans sa législation au plus vite, au vu des projets qui devraient se
mettre en place prochainement.
Par ailleurs, force est de reconnaître que les projets
EMR en France en sont à un stade bien avancé ; la construction
d'éoliennes offshore devrait bientôt voir le jour. Pour
autant, leur construction sera l'aboutissement d'une procédure
administrative longue de 15 ans, qui conduit à se demander si cette
procédure ne devrait pas être simplifiée. Les investisseurs
doivent en effet passer par un véritable parcours du combattant durant
lequel un grand nombre d'autorisations doivent être
délivrées par les autorités compétentes. Certaines
autorisations sont délivrées sur la base d'appels d'offres :
les
6
investisseurs sont ainsi jugés sur leurs
capacités à assurer la construction et la gestion des parcs et
à prendre en compte l'existence des activités existantes, tout en
préservant l'environnement. Si de nombreux critères sont requis
afin d'assurer aux autorités de disposer d'opérateurs fiables,
celles-ci assurent-elles en retour aux investisseurs des garanties suffisantes
? Les EMR seront installées en mer, domaine public par excellence, sur
lequel l'État a la mainmise. La construction d'EMR par des acteurs
privés sur un domaine public n'entraine-t-elle pas un droit de regard
trop important de l'État ? Dans l'optique où les EMR seront
installées toujours plus loin des côtes, comment articuler ces
installations avec le droit international de la mer ? Enfin, des
préoccupations environnementales contraignantes accompagnent aujourd'hui
la prolifération des fermes éoliennes. Comment le
développement des EMR va-t-il composer avec l'existence des zones
naturelles protégées ? Et comment les Etats peuvent-ils faire
face à la création de nouveaux risques environnementaux
créés par l'utilisation des énergies marines ?
Dans ces conditions, le sujet amène la question
suivante : la France, en l'état actuel de son droit positif, a-t-elle
les moyens de développer de manière sécurisée son
marché des Énergies Marines Renouvelables afin de répondre
aux objectifs fixés par l'Union Européenne ? Il apparaît
que le droit maritime privé, avec les EMR, doit faire face à
l'apparition de nouveaux utilisateurs de la mer nécessitant leur
incorporation aux règles organisant les rapports privés en mer
(Partie 1). La France est également confrontée à un droit
public contraignant, tant administratif qu'environnemental, responsable de son
retard dans le développement des EMR et qu'il convient de simplifier
(Partie 2).
7
PARTIE 1 : La nécessité d'incorporer les
énergies marines renouvelables dans les règles organisant les
rapports privés en mer
Le droit français n'ayant pas encore attribué de
statut juridique aux EMR (Chap. 1), les règles de droit maritime
privé qui leur seront applicables restent à définir (Chap.
2). Leur construction et leur exploitation supposent en outre d'articuler le
droit social terrestre et le droit social maritime (Chap. 3).
Chapitre I : La difficulté d'attribuer un statut
juridique aux engins
EMR
Si la qualification juridique des engins EMR est
nécessaire à l'organisation des rapports privés
découlant de leur installation puis de leur exploitation en mer,
l'opération reste complexe du fait de
l'hétérogénéité des installations et de
leurs évolutions possibles dans les prochaines décennies. Cet
ensemble, aux fonctions et caractéristiques inédites,
amène naturellement le juriste à le comparer et à le
ranger dans des catégories déjà existantes (I). Mais ces
engins, parfois meubles, parfois immeubles, aptes à la navigation ou non
et mêlant le droit commun avec le droit maritime, conduisent à
leur donner un statut modulable s'adaptant aux besoins créés par
leur exploitation, à l'image des installations pétrolières
en mer (II).
I. Les installations EMR, navires ou engins flottants ?
La notion d'engin flottant découlant de celle du
navire, la difficulté réside avant toute chose dans l'absence
d'une définition claire du navire en droit international (1), ce qui a
conduit la France à se construire une définition fluctuante,
récemment cristallisée par le Code des transports (2).
A. Le navire en droit international
Si certaines conventions écartent complètement
la question relative à la définition du navire (Convention de
Bruxelles de 1910 relative à l'abordage et de 1952 sur la saisie
conservatoire des navires), d'autres vont appliquer des critères plus ou
moins larges selon le thème abordé.
8
C'est ainsi que la Convention de Bruxelles de 1924
définit le navire comme « tout bâtiment employé pour
le transport des marchandises par mer », de même que la Convention
des Nations Unies du 7 février 1986 sur les conditions d'immatriculation
des navires entend par navire « tout bâtiment de mer apte à
naviguer par ses propres moyens qui est utilisé dans le commerce
maritime international pour le transport de marchandises, de passagers ou de
marchandises et de passagers, à l'exception des bâtiments de moins
de 500 tonneaux de jauge brute ».
Au contraire, la Convention Colreg de 1972 relative aux
abordages qualifie le navire de « tout engin ou tout appareil de quelque
nature que ce soit, y compris les engins sans tirant d'eau, les navions et les
hydravions, utilisé ou susceptible d'être utilisé comme
moyen de transport sur l'eau ». La Convention de Bruxelles du 29 novembre
1969 portant sur l'assistance et la pollution en haute mer, encore plus large,
retient que le navire s'entend de « tout bâtiment de mer, quel qu'il
soit, et de tout engin flottant, à l'exception des installations ou
autres dispositifs utilisés pour l'exploration des fonds des mers, des
océans et de leur sous-sol ou l'exploration de leur ressource ». La
Convention de Londres du 28 avril 1989 va quant à elle désigner
le navire comme « tout bâtiment de mer, bateau ou engin ou toute
structure capable de naviguer ».
On retient de tout ceci que le navire, selon les conventions,
peut aller du simple engin flottant au bâtiment capable de naviguer,
voire d'être affecté au transport. Les conventions internationales
incluent parfois dans leur définition du navire les engins flottants,
sans pour autant les définir. Il ressort des textes que tout navire est
un engin flottant auquel on il faudrait ajouter une aptitude telle que le
transport ou la navigation maritime.
Ainsi, on peut tirer deux conséquences du droit
international : d'une part, s'il semble clair que les éoliennes en mer
traditionnelles, fixées au fond marin, ne peuvent pas avoir la
qualité de navire, la question est plus délicate concernant les
autres générateurs tels que les éoliennes flottantes ou
encore les hydroliennes. Dans la majorité des situations, ils ne
pourront pas avoir le statut de navire, mais la pluralité des
définitions entraîne toutefois des indécisions. D'autre
part, dans le cas où un engin EMR ne peut être qualifié de
navire, il présente en revanche des traits communs avec les engins
flottants.
Le droit français, en apportant des précisions
sur la nature juridique du navire, va également permettre de faire
ressortir de manière résiduelle la notion d'engin flottant.
9
B. Une définition des engins flottants
découlant de la qualification du navire en droit français
1) Le navire au regard de la loi
La loi française a pendant longtemps refusé de
donner toute définition au navire, celui-ci englobant des
critères trop variés pour faire l'objet d'une désignation
unique. C'est ainsi que la loi n°67-5 du 3 janvier 1967, bien que «
relative au statut des navires et autres bâtiments de mer » ne donne
aucun indice quant à sa notion.
Ce n'est que récemment, avec l'entrée en vigueur
du Code des transports au 1er décembre 2010, qu'une définition
légale du navire a été donnée, l'article L 5000-2
disposant que s'entend de navire « tout engin flottant, construit et
équipé pour la navigation maritime de commerce, de pêche ou
de plaisance et affecté à celle-ci ». Apparaît ainsi
clairement la notion d'engin flottant, qui n'est pas définie ici mais
qui, comme en droit international, peut être cernée par la
négative : un engin flottant doit s'analyser comme étant un
navire qui n'aurait pas été affecté à la navigation
maritime.
La conception du navire par le Code des transports a
été vivement décriée par la doctrine, l'amenant,
entre autres, à dire que la définition avait été
rendue « en ignorant superbement les subtilités de la
jurisprudence9 ». Le Code fait en effet fi d'une construction
jurisprudentielle et doctrinale volontairement évolutive qui permettait
d'adapter la notion de navire aux situations d'espèce. La question
essentielle en droit interne était en effet de savoir s'il fallait
« adopter une définition légale du navire au risque de
retenir des critères qui se révèlent inadaptés en
fonction des progrès techniques en constante
évolution10 ».
L'éolien offshore, en tant que technologie d'avenir,
est donc au centre de cette problématique puisque la recherche ne fera
que développer des appareils nécessitant d'appliquer de plus en
plus les règles du droit maritime et non du droit commun. Or, les juges
seraient à ce titre plus aptes à juger du statut des EMR, la loi
s'adaptant mal aux évolutions rapides de la technologie.
D'anciennes jurisprudences de la cour de cassation et de la
Cour d'appel de Rennes ajoutent en outre que d'une manière
générale, les diverses définitions légales n'ont
9 P. Delebecque, Rev. dr. transports, 2010,
Repère 9
10 JC Transport vol.4, facs. 1045, 12.
10
qu'une valeur relative limitée à la
matière qu'elles régissent11. Ces jugements n'ont
jusqu'à présent jamais été contredits. Il convient
dès lors d'examiner le statut du navire, et par ce biais celui des
engins flottants, au vu des sources qui le définissaient
traditionnellement.
2) Le navire au regard du juge
français
En l'absence de définition légale, il revenait
à la jurisprudence de définir le navire. La cour de cassation
posait comme principe en 1844 qu'il faut « entendre par bâtiment de
mer, quelles que soient leurs dimensions et dénominations, tous ceux
qui, avec un armement et un équipage qui leur sont propres,
accomplissent un service spécial et suffisent à une industrie
particulière ». Elle ajoutait que « le bâtiment flottant
n'est pas navire s'il n'est pas exposé au risque de la mer12
». Les juges ont donc eu très tôt une conception
précise du navire qui a continué à s'affiner.
Plus récemment, la Cour d'appel de Rouen a
ajouté comme critère qu'un navire « est un bâtiment
affecté à la navigation maritime ; que la navigation est maritime
lorsqu'elle expose le bâtiment aux risques de la mer13 »,
critère également retenu par la Cour de Cassation14
(« Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si
l'embarcation était habituellement utilisée pour la navigation
maritime et devait en conséquence être qualifiée de navire
»).
Le Conseil d'État, pour sa part, avait qualifié
une barge, immergée aux trois-quarts et venue s'échouer en aval
des quais d'un port, de navire « au sens des dispositions du chapitre
premier du Code des Douanes, de la loi du 3 janvier 1967 et du décret du
27 octobre 1967 15 ». On en conclut que le Conseil
d'État ne jugeait pas utile qu'une barge dispose d'une autonomie de
conduite pour être un navire.
C'est pourtant un critère essentiel retenu par la Cour
d'appel d'Aix-en-Provence, observant que « la barge n'est pas un navire ;
qu'elle ne possède ni engin de propulsion ni de direction ; qu'elle
répond à la définition d'engin de servitude 16
». On rejoint ici l'idée selon laquelle un navire inapte à
la navigation maritime doit être qualifié d'engin flottant.
On peut encore retenir divers critères tels que
l'indifférence des eaux dans lesquelles se trouve l'engin ou encore
l'indifférence du caractère hybride de son mode de propulsion.
11 Cass. req., 13 janvier 1919 ; CA Rennes, 18 décembre
1956, DMF 1957, p.538
12 Cass. req., 4 janv. 1898
13 CA Rouen, 30 novembre 2000
14
Cass. Com. 19 juin 2007,
n°06-14544
15 CE 22 avril 1988, 6e et 2e s-sections
16 CA Aix-en-Provence, 14 avril 1987
11
Face à ces nombreux éléments, non
exhaustifs et alternativement utilisés, il est considéré
« qu'il appartiendra à la jurisprudence de faire évoluer
cette tentative de définition du navire, (...) au cas par cas et selon
son intime conviction 17 ».
Selon les auteurs, il serait ainsi plus pertinent que les
juges retiennent une définition fonctionnelle plutôt que
notionnelle du navire, permettant d'intégrer ou non les engins à
la périphérie du statut de navire18 (engins flottants,
plates-formes pétrolières et EMR...) en fonction des situations
envisagées.
3) Le navire au regard de la doctrine
La doctrine s'est elle aussi fréquemment saisie de la
question de la définition du navire, la plus pertinente restant celle
élaborée par Rodière et du Pontavice qualifiant le navire
de « tout engin flottant, construit et équipé pour la
navigation maritime de commerce, de pêche ou de plaisance et
affecté à celle-ci 19».
A la manière de la jurisprudence, des critères
ont été ajoutés par les auteurs. C'est ainsi que Ripert a
retenu que « le navire se meut habituellement par ses propres moyens :
voiles, machines à vapeur, moteur à propulsion. Mais une coque
qui n'a pas reçu ses mâts ou sa machine, ou qui est
accidentellement privée de ses moyens de propulsion, n'en est pas moins
un navire20 ». La façon dont est utilisé le
navire importe en réalité peu pour Ripert, à partir du
moment où il est destiné à la navigation21.
Il semblerait que, malgré les variations données
au statut juridique du navire, une sorte de tronc commun ait été
unanimement reconnu par la doctrine, présentant le navire comme un engin
flottant de nature mobilière affecté à une navigation qui
l'expose habituellement aux risques de la mer22. L'engin flottant
est défini comme « tout engin qui affronte directement la force
d'inertie de l'eau23». On parle donc d'une construction, d'un
assemblage de pièces en vue de constituer un bâtiment de mer et
qui ne coulerait pas. A défaut de définition universelle, nous
retiendrons cette dernière qui nous semble la plus exhaustive tout en
permettant d'intégrer suffisamment de facettes du navire pour être
pertinente.
17 Stephan Miribel, DMF 2012, n°741
18 P. Delbecque, Droit maritime 13ème
éd., n°83
19 Droit maritime, précis Dalloz, 12ème
édition, 1997
20 Luc Briand, DMF 2014, statut du navire en construction et
responsabilité de son armateur pour préjudice corporel au
pilote.
21 Ripert, Traité de droit maritime,
4ème ed., n°305
22 P. Delbecque, droit maritime, 13ème ed.,
n°81
23 J. Latty, Droit maritime appliqué, l'école
supérieure du génie maritime, 1952
12
Au regard des critères retenus, on peut donc avancer
que les divers dispositifs EMR existants, en fonction ou à l'état
de projets, ne peuvent pas être qualifiés de navires. Les
éoliennes en mer traditionnelles, implantées dans le fond marin,
sont en effet des immeubles, tandis que les dispositifs « flottants
», puisqu'ils ne sont pas affectés à la navigation, doivent
pouvoir être qualifiés d'engins flottants. On peut en revanche
légitimement penser qu'au fur et à mesure de l'installation
d'éoliennes en haute mer, celles-ci seront de plus en plus
exposées aux risques de la mer.
En outre, un jet-ski ayant été qualifié
de navire par la jurisprudence française24, il est difficile
d'imaginer comment un engin offshore destiné à être
implanté continuellement en haute mer serait moins apte à endurer
les risques de mer.
Les dispositifs de production d'énergie maritime ne
pouvant néanmoins s'apparenter à des navires en l'état
actuel du droit et de la technologie, il ressort donc qu'à défaut
de statut spécifique, il faille les considérer comme des engins
flottants. Il est néanmoins intéressant de se tourner vers le
statut juridique des plates-formes pétrolières, qui
présentent de nombreux points communs avec les engins EMR.
II. Un rapprochement possible entre les engins EMR et les
plates-formes pétrolières
Les analogies entre ces infrastructures industrielles (1),
l'une destinée à extraire, l'autre à produire de
l'énergie électrique en mer, conduisent à
s'intéresser aux plates-formes de forage, dont la qualification
juridique a posé les mêmes problèmes (2). Le régime
juridique des installations pétrolières en mer a en effet
déjà fait l'objet dans les années 70 de débats
similaires à ceux portant aujourd'hui sur les EMR.
A. Similitudes technologiques
Au même titre que pour les installations EMR
déjà existantes, en expérimentation ou en conception, il
existe une grande diversité d'installations pétrolières en
mer. Cette diversité pose des difficultés pour dégager une
définition unique des plates-formes.
Parmi les différentes plates-formes existantes, on
distingue d'une part les plates-formes fixes, dont la structure en acier repose
sur le fond marin, ainsi que les plates-formes
24
Cass. Com, 3 juillet 2012,
n°11-22429
13
gravitaires, immergées par ballastage mais non
destinées à être déplacées. Les parcs
éoliens installés en mer du nord (London Array, BARD offshore,
Horns Rev etc) présentent cette caractéristique d'être
également fixés au fond marin.
Les plates-formes semi-submersibles, remorquées ou
autopropulsées, restent en état de flottaison en étant
soit rattachées au sol par des ancres ou par un réseau de lignes
tendues, soit maintenues en place par une force de propulsion couplée
à un repérage par satellite25. Leur conception se
rapproche, du moins concernant les engins ancrés, des éoliennes
flottantes telles que l'éolienne prototype Windfloat au
Portugal ou le projet de parc éolien flottant Vertiwind
prévu pour 2017 au large de Fos-sur-mer. Les plates-formes
semi-submersibles se distinguent des éoliennes flottantes en ce qu'elles
disposent d'un poste de commandement, d'un équipage, d'un pavillon et
d'un port d'attache26. Il n'est cependant pas impossible de voir
émerger dans les prochaines décennies des parcs
autopropulsés disposant d'une vraie passerelle d'équipage : les
EMR flottantes n'étant pour l'instant qu'au stade de l'embryon, tous les
projets sont envisageables.
Enfin, les navires de forage sont également des
structures pétrolières à analyser, ceux-ci ayant la
particularité de ne plus naviguer puisque positionnés au sol par
une tige. On s'éloigne ici de l'éolienne flottante, mais le cas
est intéressant à traiter dans la mesure où ces engins
sont assurément capables de naviguer tout en étant
destinés au forage des fonds marins à un point fixe.
B. Qualification juridique des plates-formes de forage
Tout comme pour la technologie EMR, donner un statut à
des plates-formes de forage présentant chacune des
caractéristiques différentes est mal aisé. C'est pourquoi
le plus simple est dans un premier temps d'énumérer ce que ces
installations ne sont pas, à défaut de définition
claire.
Il semble tout d'abord impossible d'envisager les
installations en mer comme des îles au sens de l'article 121 de la
Convention de Montego Bay de 1982, tout comme il est impossible de les
assimiler à des îles artificielles, cette même Convention
distinguant en son article 60 les « îles artificielles »
(aéroport de Chubu au Japon, île de Yas aux Emirats Arabes
Unis...) des « autres installations ». Les plates-formes en haute
mer
25 JC Transports, « engins off shore », fasc.
1055, 3
26 Droits maritimes, 3e éd., 751.13
14
n'ont donc aucune influence quant au tracé des mers
territoriales, des zones économiques exclusives ou du plateau
continental27.
De même, une installation pétrolière en
mer ne peut acquérir le statut de navire car elles sont exclues
expressément du domaine de la Convention de 1976 sur la limitation de
responsabilité (« La présente Convention ne s'applique pas
aux plates-formes flottantes destinées à l'exploration ou
l'exploitation des ressources naturelles des fonds marins et de leur sous-sol
»)28. Enfin, la Convention SOLAS de 1974 sur la sauvegarde de
la vie humaine en mer exclue les plates-formes de ses dispositions, celle-ci ne
s'appliquant que pour les navires effectuant des voyages internationaux. C'est
ainsi que l'OMI a du élaborer un texte spécial en matière
d'installations offshore pétrolières, appelé
« Mobil offshore drilling unit code », afin d'étendre les
dispositions SOLAS aux installations pétrolières. En revanche, la
convention MARPOL de 1973 et 1978 pour la prévention de la pollution par
les navires, intègre les plates-formes, qui sont assimilées, pour
la circonstance, à des navires. De plus, les plates-formes
semi-submersibles, durant leurs déplacements, sont
considérées comme des navires, tandis que les navires de forages
seront toujours qualifiés de navires, même lorsque la tige est
reliée au fond marin.
En réalité, les plates-formes se sont vues
définies par les conventions internationales sur la base du pragmatisme
afin d'adapter leur statut - et les règles en découlant - aux
situations envisagées. A l'image des débats portant sur le statut
des plates-formes de forage dans les années 70, il serait opportun de
dire, concernant les EMR, qu'il vaut mieux « renoncer à toute
classification a priori, et pour déterminer le statut des installations,
rechercher à propos de chaque règle utile aux navires si son
adaptation est ici opportune29 ». Il était
déjà fait remarqué à l'époque qu'il
était plus important de retenir que l'engin évoluait en mer,
qu'il pouvait porter des hommes et qu'il était de grand prix. Dès
lors, les caractéristiques physiques ou la fonction de l'installation
importent peu, tout comme sa dénomination, pourvu que des règles
pertinentes lui soient appliquées.
Si l'on ne peut réellement se détacher
totalement de la destination des installations EMR (il serait absurde
d'appliquer les règles de la navigation à une éolienne
inapte à naviguer), il convient néanmoins d'analyser quelles
règles du droit maritime leur seraient applicables, ou devraient leur
être appliquées, afin de permettre au mieux
27 Convention de Montego Bay, art. 60.8
28 Conv. 1976 sur la limitation de responsabilité en
matière de créances maritimes, art. 15.5
29 M. Remond-Guilloud, « quelques remarques sur le
statut des installations pétrolières en mer », DMF
1977, p.675
l'insertion de cette technologie terrestre dans le milieu
maritime.
Chapitre II : les règles applicables aux
installations EMR en matière d'évènements de mer
Les installations EMR ayant pour but d'être
posées en mer, celles-ci seront nécessairement confrontées
aux risques spécifiques du milieu marin. C'est ici que vont devoir
s'articuler les règles du droit commun et celles du droit maritime, avec
lesquelles tout industriel devra composer, de l'installation jusqu'au
démantèlement des engins EMR. Il est d'autant plus important de
déterminer quel sera le droit applicable que le droit maritime est
dérogatoire au droit commun. Il entraîne par conséquent des
raisonnements amenant à des solutions différentes non
négligeables compte tenu des enjeux financiers. Il sera uniquement
traité ici des évènements de mer les plus fréquents
par soucis de clarté, à savoir l'abordage (I) ainsi que les
limitations de responsabilités qu'il génère (II), et le
sauvetage (III). Si l'avarie commune représente un
évènement souvent étudié du fait de sa place
importante en droit maritime, elle est spécifique au transport maritime
et ne sera donc pas approfondie. Le sauvetage ne sera pas non plus
évoqué en ce qu'il concerne, soit le sauvetage de personnes, or
les engins EMR ne seront pas a priori destinés à
accueillir des personnes, soit le sauvetage d'épaves abandonnées,
mais les propriétaires de tels engins, au vu de leur valeur,
manifesteront toujours leur volonté de les conserver.
I. L'abordage
L'abordage est un fait matériel supposant la collision
entre deux navires. Si ces évènements ont considérablement
été réduits au fur et à mesure des
évolutions qui ont facilité la navigation, l'homme n'a pas pour
autant réussi à parfaitement maîtriser la mer. De plus,
l'augmentation de la vitesse des navires, cumulée avec leur taille et
leur valeur, font de chaque abordage un sinistre aux montants très
élevés. En cela, les éoliennes en mer et les technologies
équivalentes se rapprochent des navires (le coût moyen d'une
éolienne sur le parc de London Array est de 12 millions d'euros et le
montant total du projet d'éolienne flottante Vertiwind est de 16,8
millions d'euros). En outre, les EMR étant des technologies
récentes voir totalement novatrices selon les cas, leur
résistance à la mer n'est pas encore assurée. Leur
installation va très vraisemblablement aboutir, un jour ou l'autre,
à la collision entre un engin et un navire.
15
16
Il parait donc nécessaire de connaître les
conséquences d'un tel évènement, à la fois au
regard du droit international (A) et du droit interne (B).
A. Les engins EMR, exclus des règles de
l'abordage en droit international
Même si l'hypothèse semble encore lointaine, il
est possible que des éoliennes flottantes ou autres engins EMR soient
installés en haute mer ou viennent à y dériver. Dans ce
cas les conventions internationales s'appliquent en priorité (1),
excepté si la collision intervient avec un engin offshore
n'ayant pas la qualité de navire (2).
1) Nécessité d'un abordage entre
navires
Il convient de se référer à la
Convention internationale pour l'unification de certaines règles en
matière d'abordage du 23 septembre 1910 pour connaître le
régime international de l'abordage. Elle dispose en son article 2 qu'en
cas d'abordage fortuit, les dommages causés sont supportés par
ceux qui les ont éprouvés. L'article 3 dispose qu'en cas
d'abordage causé par la faute d'un des navires, le fautif devra
réparer l'intégralité des dommages. Enfin, l'article 3
dispose qu'en cas de faute commune, la responsabilité est
proportionnelle à la gravité des fautes de chacun.
Il faut cependant noter que cette Convention est applicable
uniquement lorsque l'abordage est survenu entre deux navires30. La
convention étant ancienne, aucune définition du navire n'y
apparaît : rien ne dit alors qu'un engin offshore puisse ou non
être qualifié comme tel. La Convention de 1972 pour
prévenir les abordages en mer, dite Colreg, apporte la solution dans sa
règle 3-a disposant que le navire « désigne tout engin ou
tout appareil de quelque nature que ce soit, y compris les engins sans tirant
d'eau, les navions et les hydravions, utilisé ou susceptible
d'être utilisé comme moyen de transport sur l'eau ». Les
installations EMR n'étant pas destinées au transport, les
règles de l'abordage telles que prévues par le droit
international sont inapplicables.
2) Loi applicable en cas d'abordage entre un navire
et un engin flottant en haute mer
Selon la loi française des conflits de lois et le
règlement Rome II, les obligations extra-
30 Art. 1 Conv. Bruxelles 1910 : « En cas d'abordage
survenu entre navires de mer ou autres navires de mer et bateaux de navigation
intérieure, les indemnités dues à raison des dommages
causés aux navires, aux choses ou personnes se trouvant à bord
sont réglées conformément aux dispositions suivantes, sans
qu'il y ait à tenir compte des eaux où l'abordage s'est produit
».
17
contractuelles sont régies par la loi du lieu où
est survenu le fait qui leur a donné naissance, quelle que soit la
nationalité des parties en cause31, ce qui est inapplicable
en haute mer. La loi du pavillon n'est pas non plus applicable dès lors
que les bâtiments ne possèdent pas le pavillon du même
État, celle-ci devant être respectée seulement lorsque les
deux bâtiments battent le même pavillon32. Dans cette
situation, lorsque l'abordage en haute mer est exclu du champ des conventions
et en l'absence de règles de conflit en la matière, la
jurisprudence a tranché en faveur de la loi du for qui a une «
compétence subsidiaire générale33 ».
Les abordages en haute mer avec des engins EMR étant
exclus des conventions internationales, la loi française doit prendre le
relais.
B. Les engins EMR, aux frontières entre les
règles de l'abordage et du droit commun en droit français
De par leur diversité, les EMR évoluent entre le
régime de l'abordage et du droit commun. S'ils présentent des
similitudes, ces régimes conservent leurs particularités qui
nécessitent d'être dégagées (1). L'abordage en droit
interne a de plus un champ d'application plus large qu'en droit international,
ce qui permet d'assimiler certains engins à des navires (2). Les
particularités des EMR requièrent enfin de s'intéresser
à la question de la faute du propriétaire des engins offshore
(3).
1) Le régime de l'abordage, exclusif du droit
commun
La confusion des régimes, causée en partie par
la rédaction de la loi du 7 juillet 1967 sur les
évènements de mer34, et les différences que ces
régimes provoquent dans l'indemnisation des tiers, ont
régulièrement amené la Cour de cassation à censurer
les décisions relatives à l'abordage faisant
référence aux article 1382 et 138435.
Le droit de l'abordage se base sur le principe de la faute
prouvée. L'article L5131-3, al. 1er dispose que « si l'abordage est
causé par la faute de l'un des navires, la réparation des
dommages incombe à celui qui l'a commise ». C'est en substance ce
que prévoit
31 CA Caen, 12 septembre 1991, DMF 1993 p.523
32 CJUE 30 septembre 2003, C-47/02
33 Cass. 9 mars 1966, DMF 1966 p.408 ; JC Transports, fasc. 1055,
41
34
Cass. com, 5 octobre 2010, DMF 2010, obs.
P. Bonassies p.907
35 Cass. Civ. 2e, 1er avril 1999, DMF 2000 p.315
18
l'article 1382 du Code civil ; les règles sont les
mêmes. L'article L5131-3, al. 2 ajoute que « si l'abordage est
fortuit, s'il est dû à un cas de force majeure ou s'il y a doute
sur les causes de l'accident, les dommages sont supportés par ceux qui
les ont éprouvés ». Ici encore, les règles de
l'abordage sont à rapprocher des règles du droit commun
concernant le cas fortuit et la force majeure, ce dernier prévoyant que
la responsabilité ne peut être détruite que par la preuve
d'un cas fortuit ou de force majeure ou d'une cause étrangère qui
ne lui soit pas imputable36.
Toutefois, le droit commun se distingue de l'abordage en ce
que la présomption de responsabilité ne peut être
écartée par le simple fait que la cause du fait dommageable est
inconnue. Or, le Code des transports traite de la même manière
« force majeure » et « doutes sur les causes de l'accident
». En droit commun, le jeu de la présomption intervertit les
réparations en cas d'abordage douteux tandis qu'en droit de l'abordage,
chacun supporte ses propres dommages. Enfin, les deux régimes se
distinguent dans l'hypothèse des fautes communes, lorsqu'un tiers subit
un dommage découlant de la collision. En droit commun, le tiers qui a
subi le préjudice peut en effet demander à l'un des deux
bâtiments de mer la réparation de l'intégralité du
dommage, à charge pour le payeur d'exercer une action subrogatoire
contre le coresponsable37. A l'inverse, les règles de
l'abordage excluent cette solidarité pour les dommages
matériels38.
La question qui se pose désormais est celle de savoir
à quel régime les engins EMR seront rattachés.
2) L'abordage, applicable aux engins EMR selon la
technologie utilisée
a) Extension des règles de l'abordage aux
engins flottants non amarrés à poste fixe
Les règles de l'abordage en droit français ne
s'appliquent pas uniquement aux navires. Contrairement au droit international,
la loi du 7 juillet 1967 relative aux évènements de mer a
marqué une rupture, son article 1, alinéa 2, disposant que «
tous engins flottants, à l'exception de ceux amarrés à
poste fixe, sont assimilés selon le cas, soit aux navires de mer, soit
aux bateaux de navigation intérieure39 ». Cet
alinéa concerne particulièrement
36 Civ. 2e, 15 mars 2001 : « Attendu
que le fait d'un tiers non identifié n'exonère le gardien de la
chose instrument du dommage de la présomption de responsabilité
pesant sur lui que s'il présente les caractères de la force
majeure ».
37 Jurisclasseur Civil, fasc. 220, 140 sur l'obligation
au tout des coauteurs.
38 Art. L5131-4, al. 3 C. des Transports
39 Art. 1 loi n°67-545 du 7 juillet 1967, aujourd'hui art.
L5131-1 du C. des Transports.
19
les technologies EMR puisque selon les cas, elles seront soit
fixées au sol, soit flottantes mais reliées au fond marin, soit
autopropulsées et reliées au fond par des câbles
transmettant l'énergie produite aux centrales. Le premier cas ne pose
pas de difficultés dans la mesure où l'engin n'est pas flottant
et ne peut donc se voir appliquer la loi de 1967. Reste à savoir ce que
la loi entend précisément par « amarrés à
poste fixe ».
La jurisprudence a pu se prononcer à plusieurs reprises
sur cette situation, jugeant notamment qu'un pont flottant amarré
à poste fixe ne pouvait bénéficier du régime de
l'abordage40, de même qu'un bachot amarré servant de
support d'échafaudage au moment de l'abordage41. Dans les cas
présents, le régime de la responsabilité de droit commun
s'applique, mais la notion d'amarre n'est pas précisée.
Une amarre se définit comme un câble ou un lien
destiné à maintenir en place un navire42. De ce
constat, les canalisations ou gaines de servitudes qui relieraient l'engin
flottant à un bâtiment terrestre ne suffiraient pas à
qualifier l'engin d'amarré à poste fixe, un câble de
communication ne servant jamais à maintenir en position l'engin
flottant. Un engin EMR dont les câbles communiqueraient avec une
centrale, terrestre ou fixée au fond marin, garderait donc la
qualification de navire au regard de la loi de 1967. A l'opposé, un
navire ancré de longue date à un quai bénéficie des
règles de l'abordage lorsqu'il est heurté par un
engin43, tout comme un navire de forage relié au fond marin
par la tige de forage.
La distinction entre les engins flottants amarrés
à poste fixe et ceux non amarrés présente donc des
inconvénients puisqu'elle entraîne une diversification des
régimes. Ce point avait déjà été
remarqué concernant les installations pétrolières de type
semi-submersibles, pour lesquelles il faut différencier selon que la
plate-forme est en déplacement vers un point de forage ou qu'elle est en
phase de forage et ancrée, ou encore qu'elle est en phase de forage tout
en étant stabilisée par des propulseurs44. Il est
fortement envisageable que les engins EMR présentent des
caractéristiques semblables à celles des installations
pétrolières, et que ce dépeçage s'adapte mal
à la prolifération d'engins flottants amarrés (et par
conséquent à la multiplication des accidents relatifs à
leur exploitation). Un régime commun de l'abordage applicable aux EMR
flottantes est donc souhaitable.
40 CA Paris, 7e ch., 24 sept. 1997 : JurisData
n°1997-022804
41 CA Rouen, 2e ch., 27 nov. 1997 : JurisData
n°1997-056454
42 Jurisclasseur Transports, fasc. 1055, 25,
préc.
43 CA Aix-en-Provence, 2e ch., 26 mai 1993 :
JurisData n°1993-044423, à propos d'une barge ayant
heurté une péniche.
44 M. Remond-Gouilloud, DMF 1977, p.675, préc.
20
b) Le cas de la rupture des amarres
Qu'advient-il de la situation où l'engin flottant
amarré à poste fixe rompt ses amarres ? Doit-il être
considéré comme un navire soumis aux règles de l'abordage
?
Il semblerait logique que ce soit le cas, l'assimilation des
engins flottants à des navires excluant la destination de l'engin pour
le qualifier de navire : l'engin n'est pas un navire parce qu'il est
affecté au transport, ou qu'il destiné à naviguer, ou
qu'il dispose de moyens de propulsion (une barge étant un engin flottant
non amarré soumis à la loi de 196745), mais parce
qu'il affronte les périls de la mer. Dès lors, l'aléa
causé par les forces de la mer justifie d'appliquer les règles de
l'abordage.
Les tribunaux français semblent ne jamais avoir eu
à se prononcer sur la question, qui doit être cependant
envisagée au vu du nombre d'engins flottants type EMR qui pourront
être installés le long des côtes françaises. Si
l'incorporation des engins flottants dans les règles de l'abordage est
une exception ne pouvant faire l'objet d'une extension en vertu de la
règle de l'interprétation stricte, le pragmatisme voudrait que
les engins flottants dont les amarres auraient lâché soient
assimilés à des navires.
3) Circulation en mer et faute du
propriétaire de l'installation EMR en cas de collision
Le dernier point relatif à l'abordage concerne la
circulation en mer, que ce soit dans les champs éoliens ou simplement
à l'approche d'un engin EMR. Peut-il être reproché au
propriétaire d'engins EMR d'être à l'origine de la
collision entre un engin et un navire en raison des difficultés de
circulation causés par la présence de champs éoliens en
mer ? Les nouveaux utilisateurs de la mer tels que les exploitants d'EMR
peuvent en effet être perçus comme des sources d'obstacles
permanents à la navigation par les utilisateurs traditionnels de la
mer46.
La question a rapidement été
réglée dans les parcs existants, à l'image du site de
London Array : dans sa « Notice of Operations », le site
prévoit une interdiction d'approcher à moins de 50 mètres
de chaque appareil, tandis qu'il interdit l'approche d'un appareil
endommagé à moins de 500 mètres47. La
circulation près du parc est donc inspirée de celle applicable
aux plates-formes pétrolières, interdisant toute circulation
à
45 CA Aix-en-Provence 14 avril 1987
46 F. Laffoucrière, «les EMR et les conflits d'usage
de la mer», journée Ripert 2013
47 «Notice of operations at London Array offshore wind
farm»
21
moins de 500 mètres de l'installation. Il est
ajouté dans la notice que tout navire désirant naviguer à
travers le parc doit impérativement se brancher sur le canal 16 de la
bande marine VHF, correspondant à la fréquence internationale de
détresse, et de contacter avant toute entrée les navires en
charge de la sécurité du site.Dans son procès-verbal de
réunion du 20 juin 2007, la Grande Commission nautique a pris des
mesures similaires concernant le projet de parc offshore au large de Veulettes
sur mer48, ajoutant interdire la navigation des bâtiments de
plus de 30 mètres ainsi que le chalutage dans un périmètre
d'un quart de mille49. Sur le site de Nysted au Danemark, le
chalutage est également interdit, et la navigation possible uniquement
via un chenal, tandis que toute forme de pêche est interdite sur le site
de Thornton Bank en Belgique50.
Ces mesures, accompagnées de celles prévues par
la convention Colreg sur la prévention des abordages, permettent au
propriétaire des engins EMR de s'exonérer de sa
responsabilité en cas de collision. Le navire qui n'aura pas
respecté ces règles aura commis une faute. Les dommages
engendrés par la collision devront donc être réparés
par le navire, que l'action soit fondée sur le droit commun ou celui de
l'abordage.
Dès lors qu'il est traité de l'abordage, la
limitation de responsabilité applicable à tout
propriétaire de navire doit être envisagée : est-elle
applicable aux propriétaires d'engins offshore ?
II. Le jeu des limitations de responsabilité
appliqué aux engins EMR
La limitation de responsabilité, dont il convient de
rappeler le régime (A), suppose d'être analysée sous deux
angles : d'une part, la responsabilité du propriétaire pendant
l'exploitation de l'engin (B), d'autre part, la responsabilité durant
l'acheminement de l'engin vers son lieu d'exploitation (C).
A. Régime de la limitation
Le Code des transports, abrogeant la loi du 3 janvier 1967,
dispose en son article 5121-3 que la limitation de responsabilité est
applicable « si les dommages se sont produits à bord du navire ou
s'ils sont en relation directe avec la navigation ou l'utilisation du navire
». L'alinéa 3 de l'article précise que la limitation sera
écartée « s'il est prouvé que
48 Procès-verbal n°012 SHOM/GCN/NP
49 S. Michalak, « Energies marines : un droit en
construction », mémoire 2010
50 Colloque international « les énergies marines
renouvelables », Campus de la mer, 2013
22
le dommage résulte de leur fait ou de leur omission
personnels et qu'il a été commis avec l'intention de provoquer un
tel dommage ou commis témérairement et avec conscience qu'un tel
dommage en résulterait probablement », ce qui correspond aux
conditions de la faute inexcusable telle que définie en droit des
transports51.
L'article L5121-5 renvoie aux conditions établies par
la Convention de Londres du 19 novembre 1976 sur la responsabilité en
matière de créances maritimes, disposant, après
révision des montants par l'OMI, que la limitation est de 1,51 million
de DTS pour les navires dont la jauge est inférieure ou égale
à 2000 tonneaux. Elle ajoute que jusqu'à 30 000 tonneaux, la
limitation doit être augmentée de 604 DTS par tonneau
supplémentaire ; au-delà de 30 000, 453 DTS et au-delà de
70 000, 302 DTS. La limitation s'exprimant en tonneaux, elle apparaît mal
adaptée aux installations EMR, celles-ci n'ayant pas vocation à
disposer d'une capacité de charge. Cette unité de mesure
s'explique, entre autres, par l'article L5121-2 disposant que la limitation
s'applique essentiellement à l'armateur et à l'affréteur
du navire uniquement. Il n'y a en principe aucune assimilation avec les engins
flottants.
B. La limitation de responsabilité durant
l'exploitation des engins EMR
Comme précisé en supra, un engin flottant,
même amarré à poste fixe, affrontera les périls de
la mer, en particulier s'il est éloigné des côtes,
où les conditions sont plus difficiles. Cela justifierait pleinement
l'application de la limitation de responsabilité normalement applicable
aux propriétaires et affréteurs de navires. Le droit
français exclue pourtant les engins EMR de la limitation (1) tandis que
le droit international est plus mitigé (2).
1) Les engins EMR, exclus des règles de
limitation en droit français
A la lecture de l'article L5121-3 du Code des transports, rien
ne laisse supposer une extension de la limitation aux EMR, et aux engins
offshore en général. La cour de cassation a pu le
confirmer en jugeant que la limitation de responsabilité n'était
pas conditionnée à l'exposition aux aléas de la
mer52. La seule condition permettant de bénéficier de
la limitation est d'être propriétaire d'un navire. Or, dès
lors que la limitation s'applique dans la majorité des cas à la
suite d'un abordage, cette règle rentre
51
C.Com, art. L133-7 : « est inexcusable
la faute délibérée qui implique la conscience de
probabilité du dommage et son acceptation téméraire sans
raison valable ».
52
Cass. com, 18 nov. 1980 : « attendu,
cependant, que la faculté, pour l'armateur et le capitaine, de limiter
leur responsabilité, n'étant pas subordonnée à
l'exigence d'un risque de mer ».
23
en contradiction avec le principe de l'abordage en droit
français, pour lequel l'engin flottant non amarré et le navire
sont confondus. La logique voudrait donc que la limitation soit étendue
aux engins flottants non amarrés à poste fixe. Pourtant, la Cour
de cassation a jugé que celle-ci devait être refusée
à tout propriétaire d'un engin qui ne possède pas les
caractéristiques d'un navire53. Si les réponses sont
non équivoques, le régime des engins EMR s'en retrouve
complexifié.
Mais comme nous l'avons vu, certaines installations EMR
pourront éventuellement être qualifiées de navire. Sauf
à leur donner un statut particulier, à l'image des installations
de forage, ou à interpréter strictement la notion de navire
l'application de la limitation au propriétaire d'un engin EMR qui
possède les caractéristiques d'un navire devrait être
possible.
2) Les indécisions en droit
international
Le droit international n'a pas pris en compte l'apparition de
bâtiments tels que les installations EMR dans la rédaction des
textes. La Convention de Londres du 19 novembre 1976 relative à la
limitation en matière de créances maritimes ne fait pas
exception, son article 15 excluant simplement le droit à la limitation
« aux navires construits ou adaptés pour les opérations de
forage » (art. 15-4) et « aux plates-formes destinées à
l'exploration des ressources naturelles des fonds marins et de leur sous-sol
» (art. 15-5).
Ce texte laisse deux interprétations possibles : soit
la convention s'applique à tous les engins à l'exception de ceux
cités, auquel cas les propriétaires d'engins EMR peuvent
bénéficier de la limitation de responsabilité, soit la
convention exclue tout type d'engins flottants, y compris les EMR. On constate
cependant qu'avec une interprétation stricte de la loi française
comme de de la Convention de Londres, l'une exclue les engins flottants de la
limitation (Code des transports, article L5121-3), et l'autre les inclue
(Convention de Londres, article 15-5), ce qui est absurde.
Dans le doute, les contrats interdisent toute action en
responsabilité afin de faciliter la détermination des montants de
garantie des contrats d'assurance54. Cette solution, que l'on
espère temporaire dans l'attente de la création d'un
régime clair portant sur les engins EMR, ne règle pas la question
de la limitation de responsabilité à l'égard des tiers. De
plus, la question de la limitation de responsabilité se pose
également durant l'acheminement des engins EMR.
53
Cass. com, 6 déc. 1976, DMF 1977
p.513
54 JC Transports, fasc. 1055, 177, préc.
24
C. Les limitations de responsabilité dans la
phase d'acheminement des engins EMR
Avant d'être opérationnels, les engins devront
être acheminés depuis les sites de construction jusqu'à
leur lieu d'exploitation. Pour la partie maritime, ils seront soit
remorqués (1), soit transportés (2).
1) Le remorquage de l'engin EMR
Le remorquage s'analyse comme « l'assistance au
déplacement d'un navire, d'un appareil de forage, d'une plate-forme ou
d'une bouée »55. Cette manière de procéder
semble la plus sûre puisque l'assemblage des pièces se fait sur
terre et non en mer. Elle sera donc probablement la plus utilisée
concernant les EMR flottantes, comme le prévoient les projets
Bilboquet, Winflo ou encore
Vertiwind56.
Durant la phase de remorquage, il est envisageable que le
l'engin heurte un navire tiers. Si le navire remorqueur bénéficie
de la limitation de responsabilité, est-elle applicable à l'engin
remorqué ? Il semblerait que non, à partir du moment où
l'engin n'a pas la qualité de navire. Le tiers lésé
actionnera donc de préférence le propriétaire de l'engin,
responsable de l'intégralité du dommage en vertu du droit commun
et ne pouvant invoquer de limitation.
Dans les relations contractuelles, la loi du 3 janvier 1969
relative à l'armement et aux ventes maritimes, désormais
codifiée dans le Code des transports, remplace les règles du
droit commun ou de l'abordage par celles du remorquage, en opérant une
distinction entre remorquage portuaire et remorquage en haute mer. Dans le
premier cas, le remorquage est effectué sous la direction du capitaine
du navire. Aussi, tous les dommages causés sont à sa
charge57. A l'inverse, le remorquage en haute mer s'effectue sous la
direction du remorqueur, qui en assume l'entière
responsabilité58.
La situation se complique lorsque l'engin n'a pas la
qualité de navire, la loi de 1969 n'étant pas applicable. Dans ce
cas, seules les clauses du contrat permettront de définir le
régime de responsabilité. Des exclusions de responsabilité
seront préférables, l'engin remorqué étant
pénalisé sous l'empire de la loi de 1969 (sa
responsabilité étant intégrale lors du remorquage
portuaire tandis que le remorqueur peut lui opposer sa limitation de
55 CJCE, 11 janvier 2007, n°C-251/04
56 V. sur ce point : pôle mer Bretagne et pôle mer
Méditerranée
57 C. Transports, art. L5342-1
58 C. Transports, art. L5342-4
25
responsabilité en haute mer).
2) Le transport de l'engin EMR
Le contrat de transport va se distinguer du contrat de
remorquage en ce que ce dernier « n'est pas un transport direct de
passager ou de marchandises » mais consiste plutôt « en
l'assistance au déplacement ». Le transport, dans le cas des EMR,
suppose donc le déplacement d'un engin sur un navire, incapable de
flotter, assemblé ou non. Si les éoliennes flottantes peuvent,
par définition, flotter, ce n'est pas le cas de tous les engins EMR,
à l'image des éoliennes fixées au fond marin,
assemblées et montées en mer. Celles-ci font l'objet d'un contrat
de transport.
L'engin EMR étant la marchandise objet du contrat de
transport, le transporteur pourra opposer à son propriétaire les
limitations de responsabilité que lui accorde son activité, soit
2,5 DTS par kilo59. Si l'on se réfère au poids moyen
d'une turbine sur le parc de London Array (650t), combiné à son
prix moyen (12 millions d'euros), on aboutit à une indemnisation
maximale d'environ 2,1 millions d'euros. Ceci explique en partie que l'une des
conditions essentielles dans les appels d'offres présentés par le
ministère de l'écologie, du développement durable et de
l'énergie, soit la grande capacité financière du
soumissionnaire.
Les règles de l'abordage et les limitations de
responsabilité qu'il induit ayant été vues, il convient de
s'intéresser aux particularités du sauvetage appliqué aux
EMR.
III. L'application de l'assistance maritime aux engins EMR
flottants
Les règles de l'assistance ont un champ d'application
plus large que l'abordage puisqu'elles s'appliquent à tous les engins
flottants (A). Aussi, son régime doit être défini (B).
A. L'assistance, applicable à tous les engins
flottants
La loi du 7 juillet 1967, dans son article 9, aujourd'hui
article L5132-1-V du Code des transports, dispose que « le terme `navire'
désigne le navire ou le bateau ou, conformément au dernier
alinéa du I, tout engin flottant qui lui est assimilé ».
On constate de cet article que l'un des critères de
l'assistance est la flottabilité, qui
59 Conv. Hambourg de 1978, art. 6-1 a)
26
permet de distinguer l'assistance du sauvetage, prévu
par le décret du 26 décembre 1961 : c'est parce que l'engin
flottant ne peut plus flotter (et qu'il est abandonné) que les
règles du sauvetage vont s'appliquer.
Pour autant, qu'en est-il des engins « amarrés
à poste fixe » ? De la loi de 1967 peut être retenue une
interprétation restrictive par laquelle l'engin, en ce qu'il est
relié au fond marin, n'affronte pas réellement les forces de la
mer et, de ce fait, ne peut être qualifié de « flottant
». Selon cette hypothèse, l'engin ne pourrait donc pas
bénéficier de l'assistance en mer.
Une conception extensive voudrait qu'en l'absence de
précision, tout engin, dès lors qu'il est susceptible de flotter,
doit se voir appliquer les règles de l'assistance. Cette
interprétation est la plus pertinente dans la mesure où c'est
cette même loi du 7 juillet 1967 qui, en matière d'abordage,
mentionne le terme « amarré à poste fixe »60
. Le fait qu'elle ne le réutilise pas dans son article 9 n'est donc pas
anodin : l'assistance maritime s'applique à tous les engins flottants,
sans exceptions.
Même s'il est regrettable que le décret
d'application de la Convention de Londres de 1989 sur l'assistance
maritime61 ne parle pas expressément de la notion d'engin
flottant, ceux-ci restent soumis aux règles de l'assistance, l'article
19 du décret définissant l'assistance comme tout acte entrepris
pour assister « un navire ou tout autre bien en danger ».
L'assistance en mer étant applicable aux engins EMR
flottants, il convient d'en étudier le régime.
B. Régime de l'assistance maritime des engins
EMR
L'assistance maritime présente un régime
particulier qui traduit à la fois une solidarité maritime (1)
tout en recouvrant une dimension commerciale à travers l'indemnisation
de l'assistant (2).
1) Une opération de secours
L'assistance se définit comme une opération de
secours, dont les règles interviennent à la condition que le
navire, ou l'engin, soit en danger62. C'est cette condition,
relevant
60 Loi n°67-545 du 7 juillet 1967, art.1
61 Décret n°2002-645 du 23 avril 2002
62 Droits maritimes, 3e ed., 362.11, préc.
27
d'une situation exceptionnelle, qui va permettre de
différencier l'assistance du remorquage. Le législateur, dans
l'article L5132-5, expose clairement que « les services du remorqueur ne
sont rémunérés pour l'assistance du navire qu'il a
remorqué ou de sa cargaison que lorsqu'il s'agit de services
exceptionnels ne pouvant être considérés comme
l'accomplissement du contrat de remorquage ».
Un contrat de remorquage peut dès lors être
requalifié par le juge en contrat d'assistance si celui-ci comporte un
service exceptionnel lié au danger causé par
l'élément marin. Le législateur, comme la cour de
cassation, se sont refusés à donner une définition du
danger, laissant le soin aux juges du fond de constater son existence ou
non63. Il est régulièrement admis que le risque doit
être réel mais pas nécessairement imminent64.
L'opération d'assistance, si elle est obligatoire
lorsque des personnes sont en péril65, ne prévoit
d'obligation de sauvetage aux biens qu'en cas d'abordage, l'article 8 de la
Convention de 1910 disposant que « le capitaine de chacun des navires
entrés en collision est tenu, autant qu'il peut le faire sans danger
sérieux pour son navire, son équipage et ses passagers, de
prêter assistance à l'autre bâtiment ». Pour le reste,
l'assistance par un navire tiers doit être acceptée, de
manière expresse ou tacite, par le capitaine du navire ou le
propriétaire de l'engin. Le Code des transports66 dispose en
effet que « Les services rendus malgré la défense expresse
et raisonnable du propriétaire ou du capitaine du navire ou du
propriétaire de tout autre bien qui n'est pas ou n'a pas
été à bord du navire ne donnent pas droit à
rémunération ». On en déduit de ce texte que
l'assistance peut être imposée en cas de refus
déraisonnable du secours. Elle l'est encore en cas de risque de
pollution des littoraux67, ce qui a priori ne devrait pas concerner
les EMR.
D'une manière générale, ce droit au refus
du recours à l'assistance est dû à la
rémunération qu'elle induit.
2) Une opération sujette à
rémunération
Bien que des contrats d'assistance existent, aucun ne
prévoit le montant de la rémunération, qui sera
fixée ultérieurement par arbitrage ou, le plus souvent, par
accord amiable. L'assisté étant dans une position de faiblesse,
le juge peut annuler ou modifier
63
Cass. com, 20 nov. 1963, DMF 1964,
p.152
64 Traité de droit maritime, Bonassies-Scapel,
2e ed., 496
65 Convention SOLAS 1974, chap.5, règle 10
66 C. des Transports, art. L5132-3 II
67 Loi n°76-655 du 16 juillet 1976
28
la convention d'assistance abusive68.
L'intérêt de la convention pour l'assistant
réside dans la rémunération qui, en raison du risque pour
l'assisté de voir tous ses biens détruits, est plus
élevée que pour le remorquage. Ainsi, les circonstances de
l'assistance vont servir de base de calcul à la détermination de
l'indemnisation. Seront notamment pris en compte les risques encourus par
l'assisté, le temps employé, les frais et dommages subis
etc69. La deuxième base de calcul se fonde sur un pourcentage
de la valeur des biens sauvés, le pourcentage étant en
général plus faible pour les biens de grande valeur70,
comme c'est le cas pour les engins EMR.
A préciser qu'en vertu du principe no cure no
pay, seules les opérations d'assistance ayant eu un résultat
utile peuvent donner droit à une indemnisation71. Dans la
mesure où le succès de l'opération est soumis
systématiquement un fort aléa, cet adage a tendance à
décourager les assistants, qui y voient de faibles chances de
rémunération. Bien que des réformes soient en
préparation afin de dépasser cet inconvénient dans le but
d'éviter les risques dus aux pollutions éventuellement
engendrées par l'inaction, il serait intéressant d'étendre
les discussions aux EMR : si les risques de pollution engendrés par leur
naufrage est infime, leur fonction environnementale répond à un
intérêt général au même titre que la
prévention des pollutions côtières par les
pétroliers.
La notion d'engin EMR ayant été vue autant d'un
point de vue notionnel que fonctionnel, il convient, pour clôturer cette
partie relative aux règles de droit maritime privé applicables
aux EMR, de se pencher sur le droit social.
Chapitre III : les règles de droit social en mer
résultant de l'implantation d'EMR
Les parcs en mer étant plus efficaces lorsqu'ils
regroupent un grand nombre de turbines, leur création suppose un travail
d'installation titanesque. Le parc de London Array, composé de 175
turbines installées sur une superficie de 100 km2, a ainsi
réuni pas moins de 1000 employés et 60 navires. La phase de
construction sur le site offshore a, à elle seule,
nécessité l'équivalent de 5,5 millions d'heures de travail
entre 2011 et 2012. Ce type de parcs doit de plus être pensé comme
une énorme industrie, fonctionnant 24h chaque jour de la semaine, et
dont la durée de vie est estimée à au moins 20 ans. Il
68 Art. 15 loi du 7 juillet 1967
69 Art. 16 loi du 7 juillet 1967
70 Sent. arb, 10 mars 1952, DMF 1952 p.427
71 Art. 5132-3 C. Transports
29
nécessite donc constamment la présence
d'équipes sur le site afin d'assurer la maintenance, mais aussi la
régulation du trafic maritime lorsque celui-ci est autorisé. Il
est donc nécessaire de se pencher sur le droit social applicable aux
travailleurs en charge des installations EMR. Pour cela, leur statut en France
doit être déterminé (I), ainsi que les règles de
droit international qui leur sont applicables (II).
I. Le statut des travailleurs opérant sur les sites
EMR
La particularité des travaux effectués sur les
sites amène à analyser successivement le statut des gens de mer
(A) et du personnel occasionnel à bord (B).
A. Une assimilation possible aux gens de mer
La définition des gens de mer, marins ou non,
résulte essentiellement d'un décret de 1967 (1) et de la
Convention du travail maritime de l'OIT de 2006 (2).
1) Les travailleurs qualifiés de marins selon
le décret de 1967
Le marin était défini par le décret du 7
août 1967 comme étant « toute personne engagée pour
occuper à bord d'un navire français un emploi permanent relatif
à la marche, à la conduite, à l'entretien et à
l'exploitation du navire72 ». Cette définition a
été reprise par la cour de cassation à
l'identique73, ajoutant néanmoins que tout employé est
marin dès lors qu'il s'engage, envers l'armateur ou son
représentant, à servir à bord d'un navire. Il est
précisé qu'un armateur s'entend de « tout particulier, toute
société, tout service public, pour le compte desquels le navire
est armé ».
On observe de cette définition que le marin doit
occuper un poste permanent. Le salarié embauché pour quelques
semaines pour la réalisation d'une tâche précise et
temporaire ne serait donc pas un marin. Il est également
précisé dans le décret de 1967 que le navire correspond
à « tous les bâtiments de mer quels qu'ils soient, y compris
les engins flottants, qui effectuent une navigation dans les eaux maritimes
».
Enfin, le décret de 1967 supprime la distinction
établie entre les marins participant directement à la marche, la
conduite ou l'entretien du navire, et les agents du service
général, affectés aux autres tâches sur le
navire74.
72 Décret n°67-690 du 7 août 1967
73 Cass. Soc, 26 sept. 2007, n°06-43998
74 Droit maritime, Bonassies-Scapel, 2e éd.,
301, préc.
30
Dans le cas des installations EMR, le personnel constituant la
flotte chargée d'emmener les techniciens sur le site et d'en assurer la
sécurité devrait être qualifié de marin. En
revanche, le personnel chargé de l'entretien des installations ne
pourraient être qualifié comme tel en ce que son travail consiste
essentiellement à être emmené depuis la terre ferme
jusqu'au site afin d'opérer sur les engins. Il n'effectuerait donc
aucunes tâches particulières à bord des navires, qu'elles
concernent leur marche, conduite et entretien, ou non.
De plus, il est envisageable, à plus ou moins long
terme, de voir des parcs se développer dans lesquels des équipes
d'ouvriers travailleraient continuellement, à l'image des plates-formes
pétrolières. Ceux-ci ne pourraient pas non plus obtenir la
qualité de marin, puisque ce dernier opère sur un bâtiment
effectuant une navigation maritime.
2) Gens de mer marins et gens de mer non
marins
Le Code des transports définit les gens de mer comme
« tout marin ou toute autre personne exerçant, à bord d'un
navire, une activité professionnelle liée à son
exploitation75 ». Un marin doit être
considéré comme tel dès lors qu'il remplit « les
conditions mentionnées à l'article L. 5521-1, qui contracte un
engagement envers un armateur ou s'embarque pour son propre compte, en vue
d'occuper à bord d'un navire un emploi relatif à la marche,
à la conduite, à l'entretien et au fonctionnement du
navire76 ».
Une distinction est donc opérée entre les gens
de mer marins et les autres. Cela résulte de la convention du travail
maritime adoptée par l'OIT le 23 février 2006, disposant que les
gens de mer, désignent les personnes travaillant « à quelque
titre que ce soit à bord d'un navire77 ». Dans sa
transposition en France par la loi du 16 juillet 201378, il est
indiqué que le terme « marin » regroupe les gens de mer,
salariés ou non, exerçant une activité « directement
liée à l'exploitation du navire79 ». Les gens de
mer non marins ne participent donc qu'indirectement à l'exploitation du
navire.
Encore une fois, les techniciens opérant sur les
installations ne sont pas concernés par ce statut puisqu'ils ne
participent aucunement, de manière directe ou indirecte, à
l'exploitation du navire. Il faut donc rechercher leur statut ailleurs.
75 C. Transports, art. L5511-1
76 C. Transports, art. L5511-1, 3°
77 Conv. du travail maritime 2006, art. II-f
78 Loi n°2013-619 du 16 juillet 2013
79 C. Transports, art. L5511-1 3°
31
B. Le personnel occasionnel à bord
Ce terme, apparu récemment en droit français,
nécessite d'être délimité (1), ce qui permettra de
lui définir un régime (2).
1) Notion de personnel à bord
Selon l'article 5511-1 du Code des transports, « un
décret en Conseil d'État, pris après avis des
organisations les plus représentatives d'armateurs et de gens de mer
intéressées, détermine les catégories de personnels
ne relevant pas, selon le cas, du 3° ou du 4°, en fonction du
caractère occasionnel de leur activité à bord, de la
nature ou de la durée de leur embarquement ». Si l'existence de
personnes travaillant en mer, ne pouvant rentrer ni dans la catégorie
des gens de mer marins, ni des gens de mer non marins, est
reconnue80, leur régime n'est pas pour autant défini.
Il semblerait que les employés chargés de l'installation et
l'entretien des engins EMR relèveraient du décret du 23 avril
201581, codifié à l'article R5511-5 5° du Code
des transports. Celui-ci dispose que ne sont pas des gens de mer les «
personnels ouvriers, techniciens ou ingénieurs à bord des navires
affectés à des activités d'exploration ou d'exploitation
mentionnés à l'article R. 5511-3 », à savoir les
installations et constructions d'unités de production sous-marines, le
forage de puits, champs pétroliers ou gaziers, les plates-formes, les
îles artificielles, mais surtout les « ouvrages ou installations en
mer », ce qui nous intéresse en l'espèce en matière
d'EMR.
2) Une absence de régime attribué au
personnel occasionnel à bord
Puisque ce personnel ne fait pas partie des gens de mer, on
pourrait en déduire qu'il est soumis au droit commun du travail, les
définissant alors de « personnel terrestre en mer ». Cette
qualification absurde amène à souhaiter que le personnel
occasionnel à bord bénéficie de certaines règles
applicables aux gens de mer82. Les phases de construction des
installations EMR conduiront en effet les techniciens à travailler la
journée entière en milieu marin, avec les risques que cela
comporte. A ce titre, un décret de 2006 a déjà
défini les règles applicables aux personnels n'exerçant
pas la profession de marins embarqués à bord des navires de
recherche océanographique ou halieutique83, inscrits à
l'article R5511-5 4° du Code des transports.
80 C. Transports, art. R5511-1 et suiv.
81 Décret 2015-454 du 23 avril 2015 relatif à la
qualification de gens de mer et de marins
82 DMF 2014, note P. Chaumette p.754
83 Décret 2006-1064 du 25 août 2006
32
Les temps de travail et de repos ont ainsi été
adaptés aux contraintes liées à la vie à bord d'un
navire et plus largement aux contraintes de la mer (conditions
météorologiques, sauvetage, assistance...84), de
même que des documents de contrôle des heures travaillées
ont été imposés pour faciliter les contrôles par
l'inspection du travail85.
Il est donc impératif de fixer par décret le
régime applicable à chaque catégorie de personnels exclue
des gens de mer, en particulier ceux travaillant à l'exploitation
d'installations en mer. Des parcs éoliens devant se construire en France
à court terme (inférieur à 5 ans), toute
ambiguïté doit être levée. On devrait s'attendre
à voir s'appliquer au personnel occasionnel les exigences d'aptitudes
physiques nécessaire au travail à bord d'un navire, tout comme la
modification des temps de travail et de repos par rapport à ceux
applicables sur terre. Le privilège du rapatriement aux frais du
navire86 et le régime de la maladie ou accident à bord
devraient également pouvoir s'appliquer87.
Le statut des travailleurs exerçant leur
activité sur les installations en mer n'est pas le seul problème
qui se pose. La nature de ces opérations soulève des
questionnements de droit social international qu'il convient
d'étudier.
II. Les règles de droit social international
applicables aux travailleurs opérant sur les installations EMR
Des questionnements de droit social international vont
nécessairement se poser au fur et à mesure du
développement de parcs EMR. Si la France dispose d'ingénieurs et
de techniciens capables de construire et d'installer les turbines d'un parc
éolien, elle ne dispose pas de toute la flotte nécessaire
à la réalisation de ses projets. Certains navires devront
certainement être affrétés et armés par nos voisins
d'outre-manche. A l'inverse, il est possible que certains pays désireux
d'installer des parcs EMR requièrent les compétences
françaises (l'éolienne flottante Windfloat au large des
côtes portugaises a été installée par Bourbon
Offshore). Enfin, il est envisageable que les technologies EMR soient
progressivement installées en haute mer. Le droit applicable aux
travailleurs détachés sera donc une des interrogations
récurrentes, au regard du droit européen (A), et
éventuellement au regard du droit des plates-formes de forage (B).
84 Art. 5 décret 25 août 2006
85 Chap. IV décret 25 août 2006
86 C. du travail maritime, art. 87
87 C. du travail maritime, art. 79
33
A. Loi applicable au contrat de travail des
salariés détachés
La question des travailleurs détachés est
réglée en droit européen par le Règlement dit Rome
188, qui permet d'aborder la situation des travailleurs
français à l'étranger (1), des travailleurs
étrangers en France (2) et des travailleurs en haute mer (3).
1) La situation des travailleurs français
à l'étranger
Le travailleur détaché s'entend, selon le droit
européen, de toute personne travaillant dans un Etat membre de l'UE
parce que son employeur l'envoie provisoirement poursuivre ses fonctions dans
un autre Etat membre89.
L'article 8.1 du Règlement dispose que « le
contrat individuel de travail est régi par la loi choisie par les
parties conformément à l'article 3 », ce choix ne pouvant
toutefois avoir pour résultat de « priver le travailleur de la
protection que lui assurent les dispositions auxquelles il ne peut être
dérogé par accord en vertu de la loi qui, à défaut
de choix aurait été applicable ». Le paragraphe 2 dispose
que les règles plus favorables applicables sont celles de « la loi
du pays dans lequel ou, à défaut, à partir duquel le
travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son
travail ». Il est ajouté que le pays « dans lequel le travail
est habituellement accompli n'est pas réputé changer lorsque le
travailleur accomplit son travail de façon temporaire dans un autre pays
». Il faut en déduire que le travailleur français qui irait
travailler sur un site offshore à l'étranger peut
être soumis à un contrat de droit français ou
étranger, mais que celui-ci ne pourra jamais être moins favorable
qu'un contrat soumis au lieu où il est exécuté. Cependant,
les travailleurs envoyés sur les sites EMR seront très
probablement sur des sites étrangers pour des missions de courte
durée, consistant en la réalisation d'un tâche
précise réclament un haut niveau de compétences.
Dès lors, le droit applicable restera le droit français,
même si le travailleur exerce son activité dans des eaux
étrangères en vertu de l'article 8.1 §2.
2) Situation des travailleurs étrangers en
France
L'article 9.2 du Règlement Rome 1 prévoit que
« les dispositions du présent règlement ne pourront porter
atteinte à l'application des lois de police du juge saisi »,
étant précisé qu'une loi de police « est une
disposition impérative dont le respect est jugé crucial par
88 Règ. CE n°593/2008 du 17 juin 2008
89 Dir. 96/71/CE du Parlement et du Conseil européens, 16
décembre 1996
34
un pays pour la sauvegarde de ses intérêts
publics, tels que son organisation politique, sociale ou économique, au
point d'en exiger l'application à toute situation entrant dans son champ
d'application, quelle que soit par ailleurs la loi applicable au contrat
d'après le présent règlement90 ».
Or, le Conseil d'État a pu juger que les dispositions
françaises relatives aux relations collectives sont des lois de
police91. Cette position a été confirmée par la
Cour de cassation, déclarant que « les lois relatives à la
représentation des salariés et à la défense de
leurs droits et intérêts sont des lois de police s'imposant
à toutes les entreprises et organismes assimilés qui exercent
leur activité en France92 ».
Les travailleurs étrangers détachés sur
des sites français (on pense en particulier aux anglais, ceux-ci ayant
une avance considérable en matière d'EMR) pourront donc
bénéficier de ces droits, tout en étant embauchés
par une entreprise de droit anglais.93
3) Le cas des travailleurs en haute
mer
En imaginant que des parcs éoliens puissent se
développer en haute mer, il convient de se demander à quelle loi
sera soumis le contrat de travail des personnels chargés de
l'installation et de l'entretien des parcs.
Tout comme pour les travailleurs détachés, la
loi du contrat sera applicable en vertu de l'article 8.1, tandis que l'article
8.2 sera inapplicable : le travailleur exerçant en haute mer n'accomplit
son travail habituellement dans aucun pays. L'article 8.3 va remédier
à ce problème en disposant que si le lieu d'exécution
habituelle est indéterminable, il convient de se référer
à la loi du pays de l'établissement d'embauche, sauf si le
contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays
(8.4).
Un travailleur français, travaillant en haute mer pour
une entreprise étrangère, et sous contrat de droit
étranger, bénéficiera donc des avantages du droit social
français si son contrat présente des liens plus proches avec la
France qu'avec le pays de son établissement d'embauche.
B. Application éventuelle du droit social issu
des plates-formes d'exploration ou d'exploitation
90 Règlement Rome 1, art. 9.1
91 CE 29 juin 1973, « Syndicat général du
personnel de la Compagnie des wagons-lits c/ La Compagnie des wagons-lits
»
92 Cass. soc, 3 mars 1988, n°86-60507
93 Ass. plénière, 10 juillet 1992,
n°99-60.355
35
Comme il a été vu précédemment,
les plates-formes de forage présentent de nombreuses similitudes avec
les technologies EMR. Ces dernières n'ayant pas encore de statut qui
leur est propre, on peut légitimement se demander si le
droit social qui leur est applicable doit être étendu aux
travailleurs participant à la construction et à l'entretien des
installations EMR, tant du point de vue de leur contrat de travail (1) que de
leur sécurité sociale (2).
1) Droit applicable au contrat de
travail
Le régime applicable découle d'un arrêt
de la Cour de justice en application de la Convention de Bruxelles du 27
septembre 1968 sur la compétence juridictionnelle. Elle a ainsi
jugé « qu'un travail accompli par un salarié sur des
installations fixes ou flottantes situées sur ou au-dessus du plateau
continental adjacent à un État contractant, dans le cadre de
l'exploration et/ou de l'exploitation de ses ressources naturelles, doit
être considéré comme un travail accompli sur le territoire
dudit État94 ». Cette jurisprudence s'applique plus
largement aux personnes embarquées à bord d'un navire battant
pavillon d'un Etat membre, mais n'appartenant pas à l'équipage,
comme ce sera le cas pour les salariés chargés de la construction
et l'entretien des installations EMR. Cependant, l'arrêt ne concernant
que l'exploration ou l'exploitation du plateau continental, c'est-à-dire
« la partie du sol marin et du tréfonds de celui-ci qui est
située sous la mer » (point 10 de l'arrêt), il semble
inapplicable aux EMR, destinées à exploiter les ressources du
vent et de la mer, non de son sol.
Avec l'apparition de problèmes concrets sur
l'exploitation des EMR dans les prochaines années, l'avenir nous dira si
une interprétation extensive de la jurisprudence européenne devra
être réalisée.
2) Sécurité sociale
applicable
La question de la sécurité sociale applicable
aux travailleurs détachés ne se pose pas en en temps normal, les
parties signant le formulaire E 101/A1 attestant que les cotisations n'ont pas
à être versées dans l'État où est
exercée l'activité professionnelle du travailleur.
En revanche, il résulte d'un arrêt de la Cour de
justice que « l'article 13, paragraphe 2,
94 CJCE, 27 février 2002, n°37/00, DMF
2002, note P. Chaumette p.640
sous a), du règlement no 1408/71 et
l'article 39 CE doivent être interprétés en ce sens qu'ils
s'opposent à ce qu'un travailleur qui exerce les activités
professionnelles sur une installation fixe située sur le plateau
continental adjacent à un État membre ne soit pas
assuré à titre obligatoire dans cet État
membre en vertu de la législation nationale d'assurances sociales, au
seul motif qu'il réside non pas dans celui-ci mais dans un autre
État membre95 ».
La Cour ne parle ici que d'installation fixe en mer, ce qui
permet a priori d'exclure le personnel travaillant sur les sites EMR. Ceux-ci
ne sont pas en effet destinés, pour le moment, à accueillir des
personnes sur plusieurs jours ou semaines. Le personnel de ces installations
alternerait entre des trajets en mer jusqu'au site et des phases d'entretien
sur les turbines, ce qui rend le régime du droit de l'État
côtier applicable aux plates-formes inapplicable aux EMR.
36
95 CJUE, 17 janvier 2012, n°347/10
37
PARTIE 2 : Un droit public contraignant responsable du
retard de la France dans le développement des EMR
Le rapport de la mission d'études sur les
énergies marines renouvelables, réalisé à
l'initiative du Ministère de l'écologie et du Ministère
des finances, le dit lui-même : « les projets EMR sont soumis
à un ensemble complexe de règles juridiques, source probable de
retards sinon de contentieux. Ce cadre législatif et
réglementaire mériterait donc d'être simplifié, tout
en conservant un niveau élevé de protection de
l'environnement96 ». On constate en effet en France un nombre
élevé de barrières administratives freinant l'installation
de parcs EMR (Chap. I), cumulé à une volonté politique de
préservation de l'environnement, contraignante pour l'implantation des
projets EMR en France (Chap. II).
Chapitre I : les contraintes administratives relatives
aux énergies marines renouvelables
Il existe de nombreux textes en droit français traitant
des installations en milieu marin, lui permettant de disposer d'une
procédure détaillée qui devrait en principe favoriser
l'implantation de parcs EMR le long des littoraux français. Bien au
contraire, le droit français a créé un système
d'autorisations administratives stratifié et peu lisible, source de
désintérêt des investisseurs pour les énergies
marines renouvelables. Les candidats à l'exploitation d'EMR doivent en
effet remplir plusieurs conditions pour pouvoir exploiter des EMR (I), tandis
que la nature des zones où sont exploitées les installations EMR
nécessite l'obtention d'autorisations supplémentaires (II).
I. Les conditions à remplir par les candidats pour
exploiter des énergies marines renouvelables
Les candidats sont en premier lieu sélectionnés
suite à un appel d'offres (A) et doivent ensuite obtenir une
autorisation d'exploitation (B).
A. Le choix des candidats par procédure d'appel
d'offres
Chaque candidat est mis en concurrence au travers d'un appel
d'offres (1) défini par un
96 Rapport de la mission d'étude sur les énergies
marines renouvelables, mars 2013, p.4
38
cahier des charges (2) aboutissant à l'attribution de
sites dans lesquels seront construits les parcs EMR (3).
1) Procédure applicable aux appels d'offre
a) Textes applicables
Le système d'appel d'offres trouve son origine dans
une directive européenne de 1996 disposant en son article 4 que les
États membres peuvent choisir entre un système d'autorisations
et/ou d'appel d'offres concernant toutes les nouvelles installations de
production (Directive 96/92/CE du parlement européen et du conseil du 19
décembre 1996 concernant des règles communes pour le
marché intérieur de l'électricité). La directive a
été retranscrite dans le droit français par la loi du 10
février 2000 relative à la modernisation et au
développement du service public de
l'électricité97. Celle-ci prévoit que
l'autorisation d'exploiter doit être délivrée par le
ministre chargé de l'énergie (article 7) et que « lorsque
les capacités de production ne répondent pas aux objectifs de la
programmation pluriannuelle des investissements », le ministre
chargé de l'énergie peut recourir à la procédure
d'appel d'offres. Enfin, le décret de 4 décembre
200298 relatif à la procédure d'appel d'offres pour
les installations de production d'électricité, modifié par
le décret du 28 juin 201199, charge la Commission de
Régulation de l'Énergie (CRE) de mettre en oeuvre la
procédure d'appel d'offres.
b) Contenu des appels d'offres
Le décret de 2002 tel que modifié par le
décret de 2011 prévoit en premier lieu que le ministre
chargé de l'énergie doit transmettre à la CRE les
conditions d'appel d'offres qu'il a définies. Celles-ci sont
constituées des caractéristiques techniques des installations,
des conditions et de la durée d'exploitation, la coexistence des
installations avec d'autres activités économiques ainsi que de la
prise en compte de la protection de l'environnement (article 1). Ces conditions
donnent lieu en retour à la transmission par la CRE d'un projet cahier
des charges relatif à l'appel dans les 6 mois (article 2). Ce cahier
arrête toutes les conditions auxquelles les candidats doivent souscrire.
Lorsque l'installation est destinée à être mise en service
sur le domaine public maritime, une concession d'occupation du domaine public
maritime doit être délivrée (article 7-2). Il
97 Loi n°2000-108 du 10 février 2000
98 Décret n°2002-1434 du 4 décembre 2002
99 Décret n°2011-757 du 28 juin 2011
39
est précisé que l'appel d'offre doit être
transmis à l'Office des publications de l'Union Européenne pour
publication au Journal Officiel européen (article 5). La CRE classe
ensuite par ordre de préférence les candidats sous deux mois, qui
sont ensuite choisis par le ministre de l'énergie (article 16-3).
2) Contenu des cahiers des charges applicables aux
appels d'offres
Chaque appel d'offres est mis en oeuvre par un cahier des
charges répondant aux volontés exprimées par le ministre
de l'énergie. Les cahiers des charges prévoient chacun des
dispositions relatives à l'obligation de conformité des
installations aux normes existantes, l'obligation pour le candidat de fournir
un plan de sécurisation industrielle, un plan de gestion du risque, un
plan d'emploi et de formation, un plan de gestion des activités
déjà existantes, une évaluation des impacts
environnementaux ainsi qu'une évaluation précise du prix de
revente de l'électricité. Un exposé devra de plus
être fourni par le candidat garantissant sa solidité technique et
financière, celui-ci devant disposer de fonds propres d'un montant au
moins égal à 20% du coût total du projet. Il est
également pris en compte la capacité financière du
candidat à démanteler les installations. Enfin, il est
précisé que le candidat « s'engage à mettre en
service au moins 20% de la puissance totale de l'installation de production au
plus tard 6 ans après la notification de la décision par les
ministres compétents », porté à 50% de la puissance
sous 7 ans, et enfin la totalité de la puissance au plus tard 8 ans
après la notification.
Au regard de toutes ces conditions, les cahiers des charges
prévoient que les candidats seront choisis selon 3
critères100 : la note finale dépendra à 40% du
prix d'achat de l'électricité, à 40% de la qualité
du projet industriel et à 20% de la prise en compte des activités
existantes et de l'environnement.
3) Chronologie des appels d'offres lancés en
France
Le premier appel d'offres en matière d'éolien
offshore a été lancé en 2004,
sélectionnant la société Enertag, parmi 10 autres projets,
pour la construction d'une ferme éolienne de 21 turbines au large des
côtes de Veulette-sur-mer, en Normandie, pour une puissance totale de 105
MW. Cependant, 11 ans après, rien n'a encore été construit
en raison des difficultés administratives causées par de telles
installations en mer. Les avancées
100 Article 5.2 cahier des charges : « pondération
des critères »
40
technologiques cumulées aux contraintes
écologiques grandissantes ayant provoqué un regain
d'intérêt pour l'éolien offshore, un
deuxième appel d'offres a été lancé en 2011, de
plus grande envergure puisque destiné à installer des parcs
éoliens sur 5 sites (Fécamp, Courseulles-sur-mer, Saint-Nazaire,
Saint-Brieuc, Le Tréport), pour un total de 3000 MW101.
Celui-ci s'est traduit par l'attribution, le 6 avril 2012, des trois premiers
sites à Eolien Maritime France (EMF), dont les principaux actionnaires
sont EDF Énergies nouvelles, WPD et Dong Energie, et du site de
Saint-Brieuc au consortium européen composé d'Iberdrola et de la
filiale française d'Eole-RES. Seul le site du Tréport n'a pas
été attribué. Celui-ci n'ayant pas fait l'objet d'une
concurrence suffisante, il a abouti à une proposition de vente du prix
de l'électricité trop élevée comparée aux
autres sites. L'appel d'offre lancé en 2012 était destiné
à remédier à ce problème puisqu'il se cantonnait,
dans les mêmes conditions que le cahier des charges 2011, à
trouver des candidats sérieux sur le site du Tréport ainsi sur le
site de l'Ile d'Yeux-Noirmoutier (total : 1000 MW).
Si les projets de 6 sites éoliens ont bien
été lancés, ils ont déjà accumulé du
retard dans leur installation et ne représentent aujourd'hui que la
moitié de la puissance électrique produite attendue des
éoliennes en mer d'ici 2020, conformément aux engagements de la
France pris lors du Grenelle de l'environnement. Il est néanmoins
prévu qu'un appel d'offre pour l'éolien posé, ainsi qu'un
appel à manifestation d'intérêt pour l'éolien
flottant soit lancé en 2015, d'après la ministre de
l'écologie Ségolène Royal.
B. Une obligation pour les exploitants de disposer
d'une autorisation d'exploiter
Les EMR étant des unités de production
d'énergie, elles sont soumises à une autorisation d'exploiter.
L'article 1 du décret du 7 septembre 2000 relatif à
l'autorisation d'exploiter des installations de production
d'énergie102 dispose à ce titre que toute installation
de production d'électricité utilisant l'énergie
mécanique du vent, ayant une puissance supérieure ou égale
à 30 MW, doit faire l'objet d'une autorisation. Une turbine
n'étant pas, en l'état actuel de la technologie, capable
d'atteindre de telles puissances, on pourrait estimer qu'elles sont
réputées autorisées. Pourtant, la puissance doit
être analysée au regard de la puissance totale du parc. Ces
derniers étant destinés à disposer d'une puissance d'au
moins 500 MW, ils sont soumis à autorisation.
101Cahier des charges de l'appel d'offres n° 2011/S
126-208873 portant sur des installations éoliennes de production
d'électricité en mer en France métropolitaine
102 Décret n°2000-877 du 7 septembre 2000
41
Le décret ne parle pas en revanche des autres
technologies EMR telles que les énergies houlomotrices ou utilisant la
force thermique. Celles-ci étant pareillement destinées à
constituer des parcs d'envergure, elles devraient faire l'objet d'une
réglementation lorsque ces projets auront mûris.
L'autorisation d'exploiter est délivrée, tout
comme pour les appels d'offres, par le ministre chargé de
l'énergie dans les 4 mois à compter du dépôt de la
demande. Le candidat doit, à nouveau, fournir une note renseignant sur
ses capacités techniques, économiques et financières,
accompagnée d'une note sur l'incidence du projet sur la
sûreté des réseaux publics d'électricité
ainsi que les dispositions environnementales susceptibles d'être
appliquées sur le site.
L'article L311-16 punit d'un an d'emprisonnement et 150.000
€ d'amende le fait d'exploiter une installation de production
d'électricité sans être titulaire de l'autorisation
mentionnée. Toutefois, il est précisé dans le cahier des
charges des appels d'offres que « le fait pour le candidat d'être
retenu lui donne droit à la délivrance d'une autorisation
d'exploiter », ce qui signifie que l'autorisation est attribuée
automatiquement aux candidats retenus.
L'article L. 311-5, dernier paragraphe, du Code de
l'énergie, ajoute que « l'autorisation est nominative et
incessible. En cas de changement d'exploitant, l'autorisation ne peut
être transférée au nouvel exploitant que par
décision de l'autorité administrative ». Or, l'apparition
des EMR a permis le développement d'un marché dans lequel des
sociétés se spécialisent dans l'élaboration de
projets EMR. Celles-ci se chargent d'obtenir les documents nécessaires
à la délivrance de l'autorisation, pour ensuite revendre le
projet, moyennant une plus-value, à des exploitants assurés de
disposer d'un parc opérationnel et dont le prix d'achat
d'électricité a déjà été
négocié103. Cet article instituant
l'incessibilité des autorisations diminue donc l'intérêt
des investisseurs pour les projets EMR, entrainant par ce biais une baisse des
candidats aux appels d'offres. Il serait donc intéressant
économiquement, pour le commanditaire comme pour le soumissionnaire de
l'appel d'offres, de s'affranchir d'une règle aussi contraignante.
Il est à noter que depuis la loi Grenelle II portant
engagement national pour l'environnement104, l'article R421-8-1 du
Code de l'urbanisme dispose que « sont dispensées de toute
formalité au titre du présent code, en raison de leur nature et
de leur
103 F. Faurisson, « Le cadre juridique de l'éolien
offshore », Bull. du droit de l'environnement industriel, 2012
104 Art. 12, loi n°2010-788 du 12 juillet 2010
42
implantation sur le domaine public maritime immergé
au-delà de la laisse de la basse mer, les installations de production
d'électricité à partir de sources d'énergie
renouvelable, y compris leurs ouvrages de raccordement aux réseaux
publics d'électricité, notamment les éoliennes, les
hydroliennes, les installations houlomotrices et marémotrices ainsi que
celles utilisant l'énergie thermique des mers ». Cette
dérogation permet d'éluder une autorisation supplémentaire
de taille qui constituait un frein au développement des EMR.
De plus, à défaut de produire un régime
administratif simplifié pour les EMR, les pouvoirs publics ont
imposé aux distributeurs d'électricité non
nationalisés (EDF principalement) l'obligation de conclure des contrats
de rachat d'électricité avec les producteurs
intéressés qui en font la demande105. Par ce biais,
les exploitants de parcs EMR sont assurés de trouver un
débouché rentable à leur production
d'électricité106.
Les autorisations d'installation et d'exploitation d'EMR ne sont
pas les seuls problèmes que vont rencontrer les personnes
désireuses d'exploiter des parcs en mer. Le principe de l'exploitation
de ressources naturelles en mer par un opérateur privé pose en
effet la question du caractère public de l'espace maritime.
II. L'installation d'EMR confrontée au domaine
public de la mer
L'exploitant d'EMR, en tant qu'opérateur privé,
va se retrouver confronté aux eaux territoriales, régies par
« le principe fondamental et ancien du libre usage par le public pour la
promenade, la baignade, la pêche, ou l'échouage des
bateaux107 ». La zone économique exclusive, quant
à elle, est une manifestation de la souveraineté de l'État
riverain, tout comme le plateau continental, dans une moindre mesure. Enfin, la
haute mer se caractérise comme étant un espace de liberté.
Si la Convention de Montego Bay prône la liberté d'y construire
des îles artificielles ou des installations, cela reste l'apanage des
États, dans les conditions fixées par le droit
international108. Doivent donc
être successivement analysées les autorisations
nécessaires aux installations d'EMR par des opérateurs
privés dans les eaux territoriales (A) et hors des eaux territoriales
(B).
105 Art. 10, loi n°2000-108 relative à la
modernisation et au développement du service public de
l'électricité, préc.
106 S. Michalak, « énergies marines : un droit en
construction », mémoire 2010, préc.
107 Instr. 22 oct. 1991, 2.1
108 Art. 87 Conv. Montego Bay du 10 déc. 1982
43
A. Les autorisations nécessaires à
l'installation d'EMR dans les eaux territoriales
Il est inscrit à l'article L2111-4 du Code
général de la propriété des personnes publiques
(CGPPP) que les sols et sous-sols de la mer territoriale, outre les rivages et
les lais et relais de la mer, appartiennent au domaine public maritime. La mer
territoriale s'entend de celle qui ne s'étend pas au-delà des
côtes de plus de 12 milles marins109. La construction
d'installations privées suppose donc la délivrance
d'autorisations (1) qui apparaissent insuffisantes à la garantie les
droits des exploitants (2).
1) Une superposition des autorisations liées
à l'occupation privative du domaine public maritime
a) Diversité des éléments
contrôlés
Le domaine public maritime est régi par les principes
d'inaliénabilité et d'imprescriptibilité du domaine, ce
que rappelle l'article L2122-1 du CGPPP en disposant que « nul ne peut,
sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du
domaine public ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage
qui appartient à tous ». Le décret du 29 mars 2004 relatif
aux concessions d'utilisation du domaine public maritime110
précise dans son article 1 que le domaine public maritime peut faire
« l'objet de concessions d'utilisation en vue de leur affectation à
l'usage du public, à un service public ou à une opération
d'intérêt général ». L'occupation privative du
domaine public maritime ne rentre donc pas en contradiction avec
l'inaliénabilité du domaine puisque les concessions ne sont pas
translatives de propriété, ni à
l'imprescriptibilité du domaine puisque les concessions ont une
durée ne pouvant excéder 30 ans (article 1 du décret) et
sont révocables par l'administration (article 9). Le motif
d'intérêt général ne semble pas poser de
problème en l'espèce puisque la circulaire du 20 janvier 2012 sur
la gestion durable et intégrée du domaine public naturel,
adressée aux préfets, considère que le DPM répond
à la nécessité de « favoriser les activités
liées à la mer et qui ne peuvent se développer ailleurs
» (article 2.1).
Ce ne sont cependant pas les seuls contrôles
réalisés avant d'accorder la concession de DPM. Le décret
de 2004 précise, tout comme pour les appels d'offres, que la demande
109 Art. 3 CMB
110 Décret n°2004-308 du 29 mars 2004
44
de concession doit comporter, en substance, la nature des
travaux et leur coût, un calendrier de réalisation des
constructions, l'impact des installations sur l'environnement et les ressources
naturelles ainsi qu'un projet de remise en état du site en fin
d'utilisation. L'article L2124-1 du CGPPP ajoute que « les
décisions d'utilisation du DPM tiennent compte de la vocation des zones
concernées et de celles des espaces terrestres avoisinants, ainsi que
les impératifs de préservation des sites et paysages du littoral
et des ressources biologiques ».
b) Diversité des avis nécessaires
à l'autorisation de concession
L'article 2 du décret de 2004 dispose que la demande de
concession est soumise au préfet. Ce n'est pas la seule personne
à décider de l'attribution de la concession. Il est en effet
prévu que le service gestionnaire du DPM conduit une instruction
administrative aux fins de consulter les administrations civiles et les
autorités militaires intéressées. Le service doit ensuite
recueillir l'avis du directeur des services fiscaux ainsi que celui de la
commission nautique locale ou de la grande commission nautique. L'avis des
communes et établissements publics de coopération intercommunale
intéressées doit également être recueilli. Une
enquête publique menée dans les formes prévues par le Code
de l'expropriation doit enfin être menée avant avis final du
préfet.
2) Des garanties insuffisantes apportées par
les textes aux investisseurs
Outre la lourdeur administrative, il ressort des textes que
deux éléments peuvent repousser les investisseurs désirant
exploiter des parcs EMR sur les littoraux français. D'une part, le
décret de 2004 prévoit, en son article 9, la possibilité
pour l'État de résilier le contrat de manière
anticipée pour motif d'intérêt général. Il
est alors prévu que le contrat de concession peut comporter « une
clause d'indemnisation des investissements non encore amortis ». Sans
même relever la rapidité avec laquelle le décret envisage
le sujet, il est surprenant que l'État dispose d'un droit de
révocation dès lors qu'il dispose de nombreux moyens de
contrôle durant toute l'élaboration du projet. Ce droit
apparaît comme disproportionné au regard de la
sécurité juridique que doivent comporter ces projets, même
si l'on peut supposer que l'État ne l'utilisera qu'en ultime recours.
D'autre part, le décret de 2004 et la circulaire de
2012 précisent tous deux que « la concession n'est pas constitutive
de droits réels au sens des articles L2122-5 à L2122-14
45
du CGPPP », le régime des droits réels
n'étant pas applicable au domaine public maritime. Cependant, cela
voudrait dire que le titulaire d'un « titre d'occupation » ne
pourrait être propriétaire des installations immobilières
qu'il réalise pour l'exercice de l'activité autorisée par
le titre111. Cela semble improbable au vu des projets éoliens
en phase d'élaboration. De plus, le domaine d'exclusion semble concerner
les titres d'occupation temporaires (valables seulement 5 ans) et les biens
immobiliers. Doit-on en déduire que les concessions de 30 ans
d'installations flottantes, qui devraient pouvoir être qualifiées
de meubles, ne sont pas concernées ? Encore une fois, une harmonisation
législative doit être opérée avec l'arrivée
de projets EMR à grande échelle, faute de quoi la France
continuera à repousser les investisseurs.
La procédure française ayant été
vue, il convient de s'intéresser aux dispositions internationales prises
au sujet de l'occupation du domaine maritime.
B. Les autorisations nécessaires à
l'installation d'EMR hors des eaux territoriales
Le domaine public maritime s'arrêtant aux eaux
territoriales, la question se posera de savoir quel droit s'appliquera lorsque
des parcs EMR seront installés dans la zone économique exclusive
(ZEE), le plateau continental (PC) voir la haute mer. Il convient pour cela de
se tourner vers les dispositions prises par le droit international (1), puis
par le droit français (2).
1) Dispositions de droit international
Si les différentes zones relevant du droit de la mer
ont été codifiées par la Convention des Nations Unies sur
le droit de la mer, dite Convention de Montego Bay (CMB), celle-ci ne
prévoit rien en ce qui concerne les installations EMR. L'ONU s'est
cependant penchée récemment sur le sujet. Le secrétariat
général de l'ONU a en effet rendu en 2012 un rapport sur les
océans et le droit de la mer appliqué aux EMR, précisant
que la CMB « définit le cadre juridique dans lequel doivent
être entreprises toutes les activités intéressant les mers
et les océans. En conséquence, ses dispositions et le cadre
juridique qu'elle établit s'appliquent également à la mise
en valeur et à l'exploitation des énergies marines
renouvelables112 ». Si la CMB n'a pas envisagé le cas
des EMR, elle doit néanmoins leur être applicable.
Or, l'article 60-1 dispose que « dans la zone
économique exclusive, l'État côtier a le
111 Art. L2122-6 CGPPP
112 L. Bordereaux, C. Roche, DMF 2012, p.1049
46
droit exclusif de procéder à la construction et
d'autoriser et réglementer la construction, l'exploitation et
l'utilisation d'îles artificielles, d'installations et d'ouvrages ».
La Convention interdit seulement la construction d'installations EMR «
lorsque cela risque d'entraver l'utilisation de voies de circulation reconnues
essentielles pour la navigation internationale » (article 60-7). Pour le
reste, seul le droit interne s'applique, à l'exception du droit de
l'environnement (voir infra).
En revanche, dans le cas d'installations en haute mer, dans
laquelle le droit interne n'a pas vocation à s'appliquer, la Convention
ne traite que des libertés accordées. Rien ne permet donc de
déterminer le régime des EMR dans cette zone. Le compte-rendu de
la treizième réunion du processus consultatif officieux ouvert
à tous sur les océans et le droit de la mer, organisé par
l'ONU, a toutefois ouvert des portes concernant l'extension de la portée
et de la juridiction de l'Autorité internationale des fonds marins
(AIFM) au-delà de sa portée actuelle sur l'extraction
minière, pour couvrir également les ressources
bio-dérivées. Le compte-rendu parle de plus d'un régime
international de contrôle et de réglementation des EMR dans les
zones situées au-delà des limites de la juridiction
nationale113.
2) Dispositions de droit interne
Avant 2013, la France ne disposait d'aucun texte
spécifique aux installations d'EMR en ZEE et sur le plateau continental.
Seule la loi du 16 juillet 1976 relative à la zone économique et
à la zone de protection écologique au large des côtes du
territoire de la République prévoyait que « la
République exerce, dans la zone économique pouvant
s'étendre depuis la limite des eaux territoriales jusqu'à 188
milles marins au-delà de cette limite, des droits souverains en ce qui
concerne l'exploration et l'exploitation des ressources naturelles, biologiques
ou non biologiques, du fond de la mer, de son sous-sol et des eaux
surjacentes114 ».
Pour parer aux difficultés futures causées par
la concrétisation des projets EMR en France, un décret relatif
« à la réglementation applicable aux îles
artificielles, aux installations, aux ouvrages et à leurs installations
connexes sur le plateau continental et dans la zone économique et la
zone de protection écologique ainsi qu'au tracé des câbles
et pipelines sous-marins » a été adopté le 10 juillet
2013115. Celui-ci se calque sur le décret 2004-308 relatif
aux concessions (voir supra) pour déterminer la procédure
113 « Compte-rendu de la treizième réunion du
processus consultatif officieux ouvert à tous sur les océans et
le droit de la mer », 29 mai-1er juin 2012
114 Loi n°76-655 du 16 juillet 1976, art. 1
115 Décret n°2013-611 du 10 juillet 2013
47
applicable à l'installation d'EMR en ZEE et sur le
plateau continental.
C'est ainsi que le préfet demeure l'autorité
compétente pour délivrer cette autorisation après avis des
autorités locales et consultation du public, et que le candidat doit
être compatible avec les activités économiques existantes
ainsi que les objectifs environnementaux du plan d'action pour le milieu marin.
L'autorisation est en outre donnée pour 30 ans et précise que le
titulaire doit avoir la capacité financière de démanteler
les installations à la fin de leur exploitation.
Le décret aborde enfin la question des câbles et
pipelines sous-marins, qui devront nécessairement être
installés en matière d'énergies marines. Dans un article
succinct, il est indiqué que le tracé des câbles doit
obligatoirement être notifié au préfet 6 mois au moins
avant le début de la pose (article 19).
Les autorisations administratives ne sont pas les seules
contraintes s'élevant contre l'implantation d'installations EMR en
France. La protection de l'environnement dresse également de nombreuses
barrières.
Chapitre II : Les énergies marines renouvelables
face aux contraintes environnementales
L'intérêt pour les énergies marines
renouvelables est apparu en France suite au PNA2E du 6 décembre 2000,
prévoyant d'accélérer le développement des
énergies renouvelables. Il a depuis pris en ampleur avec la directive du
23 avril 2009116 visant à porter à 20% à
l'horizon 2020 la part de l'énergie provenant de sources renouvelables.
Si les projets EMR proviennent tous d'initiatives à vocation
environnementale, ils demeurent néanmoins des instruments de
préservation de l'environnement qui dénaturent l'espace maritime
naturel. Leur installation va donc impliquer de prendre en compte certaines
règles environnementales préexistantes relatives au milieu marin
(I). Devront également être comptabilisés les nouveaux
risques environnementaux créés par l'exploitation des EMR
(II).
116 Dir. N°2009/28 du 23 avril 2009, préc.
48
I. L'existence de zones marines protégées
restreignant l'implantation des EMR
L'intégralité du littoral français fait
l'objet d'une protection très stricte (A) tandis que certaines zones
naturelles sous juridiction françaises bénéficient
également d'un régime particulier (B).
A. Protection du littoral
1) Principe d'interdiction des EMR sur la bande
littorale
Le littoral est une notion relativement floue qui peut
s'entendre comme une ligne départageant la mer de la terre. Pour autant,
cette ligne n'est pas fixe et sa dimension n'est pas définie. On peut
simplement retenir un arrêt du Conseil d'État du 5 juillet 1999
retenant qu'une concession de sable marin située à 4 miles et
demi du rivage ne se situe pas sur le littoral117. La loi du 3
janvier 1986, dite loi littoral, lui a attribué un statut bien
particulier, principalement gouverné par des motifs
d'intérêt général. L'article 1 de la loi,
aujourd'hui codifié à l'article L321-1 du Code de
l'environnement, dispose en effet que « le littoral est une entité
géographique qui appelle une politique spécifique
d'aménagement, de protection et de mise en valeur », qu'il
nécessite dès lors une « politique d'intérêt
général » ayant pour objet « la protection des
équilibres biologiques et écologiques, la lutte contre
l'érosion, la préservation des sites et paysages et du patrimoine
». L'article 146-6 du Code de l'urbanisme va dans le même sens en
ajoutant que le littoral est doté d'un « patrimoine naturel et
culturel ». En conséquence, la loi littoral interdit strictement
les constructions ou installations sur une bande littorale de cent
mètres à compter de la limite haute du rivage118.
L'article L321-1 du Code de l'environnement pose des
exceptions à cette interdiction, disposant que le littoral peut
être aménagé pour la préservation et le
développement de la pêche, les cultures marines, les
activités portuaires, la construction et la réparation navale,
les transports ainsi que « le maintien ou le développement des
activités agricoles, de l'industrie, de l'artisanat et du tourisme
». L'article est à rapprocher avec l'article L2124-2 du CGPPP
disposant qu'il « ne peut être porté atteinte à
l'état naturel du rivage de la mer », « sous réserve de
l'exécution des opérations de défense contre la mer et de
la réalisation des ouvrages et installations nécessaires à
la sécurité maritime, à la défense nationale,
à la pêche maritime ».
117 CE 5 juillet 1999, n°197287
118 Art. 146-4 III C. de l'urbanisme
49
Dans chaque situation, l'exploitation EMR n'est pas
mentionnée, ce qui a priori l'exclue des dérogations
à la préservation du littoral. Pour autant, il est difficile de
ne pas considérer l'énergie marine comme une industrie, ce qui
pourrait l'inclure dans les exceptions prévues par le Code de
l'environnement. De même, l'article L2124-2 du CGPPP apporte une
dernière dérogation à l'état naturel du littoral
« pour des ouvrages ou installations liés à l'exercice d'un
service public ou l'exécution d'un travail public dont la localisation
au bord de mer s'impose pour des raisons topographiques ou techniques
impératives et qui ont donné lieu à une déclaration
d'utilité publique ». Or, il a été vu
précédemment que le développement des EMR pouvait
être vu comme répondant à un motif d'intérêt
général. De plus, en raison de la configuration des côtes
françaises atteignant rapidement des profondeurs élevées,
les projets éoliens posés seront souvent amenés à
ne pouvoir être installés qu'en zone littorale119.
Mais dès lors qu'il peut y avoir des énergies
marines renouvelables ailleurs que sur la zone littorale, l'argument
d'impératif est discutable.
2) Autorisation d'installation de câbles de
raccordement dans la zone littorale
Bien que les EMR puissent être installées en
dehors des zones littorales, leur présence en mer implique leur
raccordement à des centrales pour redistribution de
l'électricité sur terre. Pour ce faire, des câbles
traversant la zone littorale doivent être posés. Même s'ils
sont enterrés, ils constituent une atteinte à l'état
naturel du rivage et du littoral non comprise par les exceptions des textes.
La loi Grenelle II est venue répondre à cette
problématique en ajoutant à l'article L1464 III que
l'interdiction de construction sur la bande littorale ne s'applique pas aux
constructions ou installations nécessaires à des services publics
ou à des activités économiques exigeant la
proximité immédiate de l'eau, « et notamment aux ouvrages de
raccordement aux réseaux publics de transport ou de distribution
d'électricité des installations marines utilisant les
énergies renouvelables ».
La loi du 15 avril 2013 dite « transition
énergétique »120 est venue définitivement
clore le débat, ajoutant à l'article L146-6 que « peuvent
être également autorisées les canalisations du
réseau public de transport ou de distribution
d'électricité visant à promouvoir l'utilisation des
énergies renouvelables », à la condition que « les
techniques utilisées pour la réalisation de ces ouvrages sont
souterraines et toujours celles de
119 C. Augris, P. Clabaut, « Cartographie géologique
des fonds marins côtiers », Ifremer, 2001
120 Loi n°2013-312 du 13 avril 2013
50
moindre impact environnemental ».
Malgré de nombreuses dérogations, les
aménagements de la bande littorale font l'objet d'un contrôle
très strict. Ce n'est cependant pas la seule zone maritime soumise
à une protection particulière.
B. Les autres espaces protégés de la
mer
1) Parcs nationaux et parcs naturels marins
Des parcs nationaux peuvent être créés en
France, en milieu terrestre ou marin, lorsque le milieu naturel présente
« un intérêt spécial et qu'il importe d'en assurer la
protection en les préservant des dégradations et des atteintes
susceptibles d'en altérer la diversité, la composition, l'aspect
et l'évolution121 ». Le parc national est composé
d'un ou plusieurs coeurs qui constituent les espaces terrestres ou maritimes
à protéger.
La loi du 14 avril 2006122 intègre dans le
Code de l'environnement les parcs naturels marins, l'article L331-14 I
disposant que « dans les espaces maritimes compris dans le coeur d'un parc
national, les travaux et installations sont interdits, sauf autorisation
spéciale de l'établissement public du parc, à l'exception
de la pose de câbles sous-marins et des travaux nécessités
par les impératifs de la défense nationale ». On retrouve
donc ici les mêmes exceptions que celles s'appliquant la bande littorale,
à la différence que les parcs naturels marins ont un champ
d'application bien plus étendu puisqu'ils « peuvent être
créés dans les eaux placées sous la souveraineté ou
la juridiction de l'Etat, ainsi que sur les espaces appartenant au domaine
public maritime, pour contribuer à la connaissance du patrimoine marin
ainsi qu'à la protection et au développement durable du milieu
marin123 ». Les parcs naturels marins ont donc vocation
à s'étendre du littoral jusqu'au plateau continental. A terme, il
est prévu en France que ces zones protégées couvrent
près de 10% des mers sous juridiction nationale124.
Il est prévu au III de l'article L331-14 que
l'autorisation des activités susceptibles d'altérer les parcs
naturels marins doit être soumise à avis conformes de
l'établissement public du parc national après consultation de son
conseil scientifique. Il est ajouté dans la partie réglementaire
que doivent être consultés l'Agence maritime des aires marines
protégées, du comité national des pêches maritimes,
le préfet maritime et le préfet de région.
121 Art. L331-1 C. de l'environnement
122 Loi n° 2006-436 du 14 avril 2006
123 Art. 334-3 C. de l'environnement
124 Droits Maritimes, 522.21, préc.
51
2) Zones Natura 2000
Les zones dites Natura 2000 sont composées des zones de
protection spéciale (ZPS) comprenant les parties naturelles des sites
classés ou inscrits ainsi que les réserves naturelles, et les
sites d'importance communautaire (SIC) retenus par la Commission
européenne. Elles sont destinées « à conserver ou
à rétablir dans un état favorable à leur maintien
à long terme les habitats naturels et les populations des espèces
de faune et de flore sauvages qui ont justifié leur
délimitation125 ».
A ce titre, les projets d'implantation EMR doit faire l'objet,
dès lors qu'ils affectent de manière significative le site, d'une
évaluation de leurs incidences au regard des objectifs de conservation
du site sur décision de l'autorité administrative. Un projet
altérant me site pourra néanmoins aboutir « pour des raisons
d'intérêt public majeur » et « en l'absence de solution
alternative ».
Dans les autres situations, un opérateur installant un
projet sur une zone Natura 2000 sans fournir un document d'évaluation
des incidences éventuellement provoquées encourt une amende de 30
000 € et 6 mois d'emprisonnement.
Les spécificités techniques des EMR ont de plus
engrangé de nouveaux risques environnementaux.
II. La prise en compte de l'impact des EMR sur
l'environnement marin
Comme bien souvent en matière environnementale, les
études lancées sur le sujet ont d'abord été
lancées sous l'impulsion de Conventions internationales (A) pour ensuite
être reprises et complétées au niveau national (B).
A. Mesures européennes prenant en compte l'impact
environnemental des éoliennes en mer
Les États ont très tôt compris que
l'installation d'éoliennes en mer était susceptible d'avoir une
empreinte environnementale. Les conventions de Paris (1) et de Berne (2) ont
été à ce titre des instruments efficaces de
prévention des risques.
125 Art. L414-1 V C. de l'environnement
52
1) Convention de OSPAR
La Convention d'Oslo-Paris des 21 et 22 septembre 1992 (dite
convention OSPAR) prévoit en son annexe 5 que les États doivent
prendre « les mesures nécessaires à la protection de la zone
maritime contre les effets préjudiciables des activités humaines,
de manière à sauvegarder la santé de l'homme et à
préserver les écosystèmes marins et, lorsque cela est
possible, de rétablir les zones marines qui ont subi ces effets
préjudiciables » (article 2). Pour cela, il est recommandé
aux Etats de coopérer afin de rassembler et étudier les
informations sur les activités humaines, permettant ainsi d'opter pour
« les meilleures techniques disponibles », c'est à dire les
techniques d'exploitation les moins productrices de déchets possibles au
regard de leurs performances.
Bien que cette annexe ne devait entrer en vigueur qu'en 2003,
la Commission de Paris, instance décisionnelle de la Convention, a
inscrit en 2001 à son programme d'action l'énergie
éolienne offshore et lancé un programme de travail sur
les impacts environnementaux des parcs éoliens offshore. Ses
travaux ont abouti à la production de plusieurs rapports, dont le
dernier en date a annulé et remplacé ceux existants. Cet accord a
pour objectif de donner des recommandations, non contraignantes, sur
l'opportunité des installations éoliennes en mer, en fonction des
activités humaines existantes et en l'état actuel des
connaissances sur l'impact environnemental de tels projets. Les rapports sont
accompagnés de nombreuses mises à jour à travers
l'organisation régulière de réunions sur des sujets plus
précis tels que les problèmes relatifs aux ondes sous-marines
générées par les activités humaines (Copenhague, 30
septembre 2015) ou sur les aires marines protégées (Lisbonne, 15
octobre 2015).
La Convention a pour avantage majeur de regrouper plusieurs
pays européens, tout en étant en relations étroites avec
d'autres organisations maritimes (à commencer par l'OMI), ce qui lui
octroie un rayonnement plus large permettant la coordination de nombreux pays
sur la politique éolienne à suivre. Les rapports ont par ce biais
permis la mise en place par divers Etats de mesures destinées à
réduire le bruit produit par le battage des pieux (Royaume-Uni) tout en
construisant les parcs éoliens en dehors des périodes de
reproduction de certaines espèces (Pays-Bas).
On pourra cependant reprocher à la Commission Ospar un
certain manque de transparence, la quasi-totalité des comptes-rendus de
réunions étant à diffusion restreinte126.
126
ospar.org
53
2) Convention de Berne
La Convention de Berne du 19 septembre 1979 avait à
l'origine comme but d'assurer la préservation de la vie sauvage et du
milieu naturel de l'Europe. C'est dans cet objectif que le Comité
permanent de la Convention a été saisi en 2001 de l'impact des
éoliennes en mer sur la vie sauvage. En vertu de l'article 14 de la
Convention, le Comité a rendu en 2004 une recommandation destinée
aux parties signataires et appliquant le principe de précaution aux
parcs offshore. Cette recommandation reconnaît en effet que les
éoliennes en mer représentent une technologie d'avenir allant en
faveur de la lutte contre le réchauffement climatique, mais elle admet
également « qu'il faut procéder à une étude
approfondie de l'impact sur l'environnement avant de choisir les lieux de
construction appropriés et avant de délivrer des permis de
construction pour éviter la détérioration de zones d'une
valeur écologique particulière ». Elle invite de ce fait les
États à « mettre en place un suivi qui puisse permettre
l'amélioration des connaissances relatives à l'impact des
éoliennes et, par ce moyen, de faciliter au public des informations
dignes de confiance ». C'est précisément ce que fait la
France aujourd'hui en imposant une enquête publique systématique
lorsqu'un projet industriel est susceptible d'affecter l'environnement.
B. Le constat français de l'impact des EMR sur
l'environnement
Les contraintes environnementales causées par les parcs
énergétiques en mer ont fait l'objet de nombreuses études
étrangères durant les dernières années. Suite aux
appels d'offres débutés en 2011, la France a également
lancé des recherches sur le sujet, qui ont fait l'objet d'un premier
rapport très détaillé (360 pages) du ministère de
l'écologie, du développement durable et de l'énergie en
2012127. Il a été complété le 25 mars
2015 par un rapport de l'Agence de l'environnement spécifique aux
impacts des éoliennes sur le site de Courseulles-sur-mer. Il ressort de
ces documents que les effets des EMR sur l'environnement ne sont pas les
mêmes selon qu'elles sont en phase d'installation (1) ou d'exploitation
(2).
1) Impact lors de l'installation des
EMR
Un constat unanime a été fait concernant les effets
néfastes relatifs au bruit causé par
127 « Energies marines renouvelables : étude
méthodologique des impacts environnementaux et socio-économiques
», ministère de l'écologie, 2012
54
l'installation des EMR, en particulier en ce qui concerne les
éoliennes posées. Il a été relevé que le
battage des pieux, permettant de fixer celles-ci au fond marin, atteignait
à 1 mètre de l'éolienne 150 dB, à raison de 30
coups par minutes pendant plusieurs heures
pour l'installation de chaque éolienne. Les
études ont relevé que de tels travaux influaient sur le
comportement des espèces marines, parfois jusqu'à 30 km autour du
site, et étaient perçues par elles dans les 100 km à la
ronde. De plus, le battage causerait des blessures auditives pouvant
entraîner la mort jusqu'à 3 km de distance.
Il est en outre avéré que la majeure partie des
espèces marines ont recours constamment aux fréquences
sous-marines pour communiquer, s'alimenter et se repérer. Les travaux
sur le site de Horns Rev I ayant duré 6 mois, l'équilibre
environnemental existant pourrait s'en trouver fortement bouleversé de
manière durable, au détriment, notamment, de la pêche.
L'installation des éoliennes flottantes serait en
revanche moins perturbatrice, leur rattachement à un point fixe
étant équivalent en termes de décibels au passage d'un
navire. Elles n'ajouteraient donc qu'un bruit supplémentaire dans un
environnement sonore marin déjà passablement surchargé.
Quant aux autres installations EMR, des analyses plus approfondies devront
être réalisées à l'avenir, celles-ci n'étant
encore qu'au stade de prototypes.
2) Impact en phase d'exploitation
Le sujet le plus discuté concerne les effets de
l'implantation d'éoliennes sur les oiseaux. L'impact est difficilement
quantifiable dans la mesure où chaque espèce réagit
différemment, certaines évitant les parcs, d'autres s'y
engouffrant. Si, d'après les études, 99% en moyenne des oiseaux
parviennent à éviter la collision avec les éléments
dynamiques des éoliennes, ce sujet à été l'un des
principaux motifs avancés en 2014 pour justifier l'abandon de la
deuxième phase de construction du site de London Array, qui
prévoyait l'installation de plus de 200 turbines
supplémentaires.
Les éoliennes en mer, lorsqu'elles sont
exploitées, produisent également un bruit. Si les risques de
blessures causées par le bruit d'une éolienne est nul, la faune
marine peut néanmoins le percevoir dans un rayon de plusieurs centaines
de mètres voir plusieurs dizaines de kilomètres selon les
espèces. Les éoliennes auront donc pour effet de les faire fuir
vers le large. Cela aura pour conséquence de provoquer une perte d'aire
d'alimentation pour les oiseaux, ce qui, selon l'Agence de l'environnement, est
une
donnée au moins aussi importante que le risque de
collision avec les rotors. En effet, les oiseaux devront aller plus loin vers
le large pour s'alimenter, ce qui représentera une dépense
supplémentaire mettant en danger les plus faibles.
Enfin, la production d'électricité est
également source d'ondes électromagnétiques. Si celles-ci
ne semblent pas affecter la faune marine, bien que les connaissances sur le
sujets soient encore faibles, elles provoquent assurément des
perturbations sur l'environnement humain les ondes provoquent de nombreux
problèmes sur le traitement des données radar, le mouvement des
pales entraînant la génération de faux échos. Sont
notamment concernés les radars CROSS sur le sauvetage en mer ainsi que
les radars de navigation dans les ports et les voies navigables.
Ces études restent majoritairement limitées aux
éoliennes et délimitent encore avec imprécision les effets
des EMR sur l'environnement. Elles seront donc complétées et
affinées avec la multiplication des parcs et l'utilisation de nouvelles
technologies.
CONCLUSION
Plusieurs choses sont à dégager des
énergies marines renouvelables en France. Tout d'abord, s'il n'existe
encore aucune installation en fonctionnement, tous les éléments
tendent à accélérer leur installation : le
réchauffement climatique, les catastrophes industrielles
consécutives (Deepwater Horizon, Fukushima) ainsi que les
réglementations internationales et internes, ont eu pour effet
d'espérer que les premières installations soient
opérationnelles dans les prochaines années.
Ensuite, si le droit maritime privé n'a pas
expressément prévu de statut spécifique aux EMR, il repose
sur des acquis suffisamment anciens et constants qu'il est d'ores et
déjà possible de dégager une ossature juridique applicable
aux EMR. Il en ressort que tous ces engins, quelles que soient les technologies
dont ils disposent, ont peu d'espoirs d'être qualifiés de navire,
ce qui permet de simplifier leur régime. A l'image des plates-formes
pétrolières, le plus simple reste donc de les définir par
la négative, car c'est moins leur dénomination que les
règles maritimes qui leur sont applicables qui importe. Au regard de
leurs caractéristiques techniques, on peut écarter
l'éolien posé de la majorité des dispositions faisant
exception au droit commun, tandis que les autres engins seront plus facilement
soumis au droit maritime. C'est indubitablement le cas pour l'assistance
maritime, tandis que l'application de l'abordage et de la limitation de
responsabilité des armateurs dépendra du type d'engins flottants
employés. De même, les travailleurs opérant sur les sites
pourront être qualifiés de marins s'ils opèrent à
bord des navires, ou
55
56
bien de personnel occasionnel à bord si leur rôle
consiste en la maintenance des installations EMR. S'il y a bien un socle
juridique qui assure une certaine sécurité dans le
développement des EMR en France, la non prise en compte par les
autorités de la question des énergies marines sur le plan du
droit privé fait ressortir de nombreuses lacunes qu'il est
impératif d'effacer avant leur installation en mer. La prochaine
étape serait donc d'intégrer les EMR dans les Codes
concernés afin de disposer d'un régime, sinon clair, au moins
adapté aux problèmes que leur exploitation va susciter. Ce
régime pourrait s'inspirer en grande partie de celui applicable aux
plates-formes pétrolières.
Du côté du droit public, la situation est plus
avancée, mais la prise en compte de la question éolienne a dans
un premier temps compliqué à l'extrême les projets EMR. Les
barrières administratives à l'entrée n'ont commencé
à être gommées que récemment face aux
échéances imposées par l'Union Européenne. Il a par
ailleurs été fait remarqué, dans le rapport de la mission
d'étude sur les énergies marines renouvelables
l'opportunité, qu'il fallait encore simplifier le volet administratif en
créant dans le Code de l'énergie un chapitre spécifique
aux EMR regroupant toutes les procédures existantes, tout en installant
un guichet unique pour le suivi des projets. Mais il est fort probable que
l'administratif gagnera en simplicité ce que l'environnemental perdra en
clarté : avec la découverte progressive de l'impact réel
des EMR sur la faune et la flore marine, des mesures contraignantes seront
probablement prises, complexifiant de ce fait les procédures liée
à leur construction. Si l'initiative est louable, la préservation
du milieu naturel local au détriment d'une source d'énergie
« propre » à fort potentiel devra néanmoins être
soupesée, faute de quoi l'engagement français de porter la
production d'électricité issue de sources renouvelables à
23% pour 2020, déjà guère crédible, sera
définitivement inenvisageable.
57
BIBLIOGRAPHIE
I. Ouvrages juridiques
- BEURIER Jean-Pierre, Droits Maritimes, Dalloz, 3e
édition, 2015-2016, 1793 p.
- BONASSIES Pierre, SCAPEL Christian, Traité de droit
maritime, 2e édition, 2010 Lextenso, 946 p.
- DELBECQUE Philippe, Droit Maritime, Dalloz, 13e
édition, 2014, 896 p.
- LATTY Jean, Droit maritime appliqué, l'école
supérieure du génie maritime, 1952 - SIRONNEAU Jacques, Lamy
Environnement, L'eau
II Codes, Textes, Colloques
A. Codes
- Code civil
- Code des douanes
- Code de l'énergie
- Code de l'environnement
- Code de l'expropriation
- Code général de la propriété des
personnes publiques
- Code des transports
- Code de l'urbanisme
B. Textes
1. Internationaux
- Convention de Berne du 19 septembre 1979 - Convention de
Bruxelles du 23 septembre 1910 - Convention de Bruxelles du 25 août 1924
- Convention de Bruxelles du 10 mai 1952 - Convention de Bruxelles du 27
septembre 1968 - Convention de Bruxelles du 29 novembre 1969 - Convention
Colreg du 20 octobre 1972
58
- Convention de Londres du 19 novembre 1976
- Convention de Londres du 28 avril 1989
- Convention MARPOL de 1973-1978
- Convention de Montego Bay du 10 décembre 1982
- Convention des Nations unies du 7 février 1986
- Convention OSPAR des 21 et 22 septembre 1992
- Convention SOLAS du 1er novembre 1974
- Convention du travail maritime du 7 février 2006
2. Communautaires
Règlements :
- Règlement Rome I du 17 juin 2008 sur la loi applicable
aux obligations contractuelles. - Règlement Rome II du 11 juillet 2007
sur la loi applicable aux obligations non contractuelles.
- Règlement no 1408/71 du 14 juin 1971 relatif
à l'application des régimes de sécurité sociale.
Directives :
- Directive 96/92/CE du parlement européen et du conseil
du 19 décembre 1996 concernant des règles communes pour le
marché intérieur de l'électricité.
- Directive 2001/77/CE du Parlement européen et du Conseil
du 27 septembre 2001 relative à la promotion de
l'électricité produite à partir de sources
d'énergie renouvelables sur le marché intérieur de
l'électricité.
- Directive électricité 2009/72/CE du 13 juillet
2009.
3. Nationaux
Lois :
- Loi n°67-545 du 7 juillet 1967 relative aux
évènements de mer.
- Loi n°76-655 du 16 juillet 1976 relative à la zone
économique et à la zone de protection écologique au large
des côtes du territoire de la République.
- Loi n°2000-108 du 10 février 2000 relative à
la modernisation et au développement du
59
service public de l'électricité.
- Loi n° 2006-436 du 14 avril 2006 relative
aux parcs nationaux, aux parcs naturels marins et aux parcs naturels
régionaux.
- Loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement
national pour l'environnement, dite Grenelle II.
- Loi n°2013-312 du 13 avril 2013 visant
à préparer la transition vers un système
énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la
tarification de l'eau et sur les éoliennes.
- Loi n°2013-619 du 16 juillet 2013 portant diverses
dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine
du développement durable.
Décrets :
- Décret n°2002-645 du 23 avril 2002 portant
publication de la Convention internationale de 1989 sur l'assistance.
- Décret n°67-690 du 7 août 1967 relatif aux
conditions d'exercice de la profession de marin.
- Décret 2015-454 du 23 avril 2015 relatif à la
qualification de gens de mer et de marins.
- Décret 2006-1064 du 25 août 2006 relatif à
l'organisation du travail des personnels n'exerçant pas la profession de
marin embarqués à bord des navires de recherche
océanographique ou halieutique.
- Décret n°2002-1434 du 4 décembre 2002
relatif à la procédure d'appel d'offres pour les installations de
production d'électricité.
- Décret n°2011-757 du 28 juin 2011 relatif à
la procédure d'appel d'offres pour les installations de production
d'électricité.
- Décret n°2000-877 du 7 septembre 2000 relatif
à l'autorisation d'exploiter les installations de production
d'électricité.
- Décret n°2004-308 du 29 mars 2004 relatif aux
concessions d'utilisation du domaine public maritime en dehors des ports.
- Décret n°2013-611 du 10 juillet 2013 relatif
à la réglementation applicable aux îles artificielles, aux
installations, aux ouvrages et à leurs installations connexes sur le
plateau continental et dans la zone économique et la zone de protection
écologique ainsi qu'au tracé des câbles et pipelines
sous-marins.
60
Circulaire :
- Circulaire du 20 janvier 2012 relative à la gestion
durable et intégrée du domaine public maritime naturel.
Procès-verbal :
- Procès-verbal n° 3 SHOM/GCN/NP des travaux de la
grande commission nautique.
Divers :
- Cahier des charges de l'appel d'offres n° 2011/S
126-208873 portant sur les installations éoliennes de production
d'électricité en mer en France métropolitaine.
III. Jurisprudence
Cassation
- Chambre des requêtes, 4 janv. 1898
- Chambre des requêtes, 13 janvier 1919
- Assemblée plénière, 10 juillet 1992,
n°99-60.355
- 2e chambre civile, 1er avril 1999, DMF 2000
p.315
- 2e chambre civile, 15 mars 2001
- Chambre commerciale, 20 nov. 1963, DMF 1964, p.152
- Chambre commerciale, 9 mars 1966, DMF 1966 p.408
- Chambre commerciale, 6 déc. 1976, DMF 1977
p.513
- Chambre commerciale, 18 novembre 1980
- Chambre commerciale, 19 juin 2007, n°06-14544
- Chambre commerciale, 5 octobre 2010, DMF 2010 p.907
- Chambre commerciale, 3 juillet 2012, n°11-22429
- Chambre sociale, 3 mars 1988, n°86-60507
- Chambre sociale, 26 sept. 2007, n°06-43998
Cours d'appel :
- Aix-en-Provence, 14 avril 1987
- Aix-en-Provence, 2e ch., 26 mai 1993 : JurisData
n°1993-044423 - Caen, 12 septembre 1991, DMF 1993 p.523
61
- Paris, 7e ch., 24 sept. 1997 : JurisData
n°1997-022804 - Rennes, 18 décembre 1956, DMF 1957,
p.538
- Rouen, 2e ch., 27 nov. 1997 : JurisData
n°1997-056454 - Rouen, 30 novembre 2000
- Paris, 7e ch., 24 sept. 1997 : JurisData
n°1997-022804
Conseil d'Etat :
- CE 22 avril 1988, 6e et 2e s-sections
Sentence arbitrale :
- 10 mars 1952, DMF 1952 p.427
IV. Colloques, rapports
- Avis délibéré 2015-003 de
l'Autorité environnementale sur le projet de parc éolien en mer
de Courseulles-sur-Mer et son raccordement électrique.
- Compte-rendu de la treizième réunion du processus
consultatif officieux ouvert à tous sur les océans et le droit de
la mer, 29 mai-1er juin 2012.
- Colloque international « les énergies
marines renouvelables », Campus de la mer, 2013.
- « Energies marines renouvelables : étude
méthodologique des impacts environnementaux et socio-économiques
», Ministère de l'écologie, du Développement durable
et de l'Energie, 2012.
- Groupe de travail du CMF sur les EMR, 8 avril 2015
- Journée Ripert, 2013.
- Salon Thetis 2015.
IV. Articles
Articles de doctrine :
- BONASSIES Pierre, « De la faute prouvée, seul
fondement de la responsabilité pour abordage », DMF 2010,
p.907
62
- BORDEREAUX Laurent , ROCHE Catherine, «Du droit du
littoral au droit de la mer : quelques questions autour des énergies
marines renouvelables», DMF 2012, p.1049 - CHAUMETTE Patrick,
« El Convenio de Trabajo Maritimo - OIT 2006 » DMF 2014,
p.60
- CORBIER Isabelle, « Navire et autres bâtiments de
mer », Jurisclasseur Transport vol.4, facs. 1045
- DAGORNE Jean-Pierre, « Les éoliennes en mer »,
DMF 2011, p.847
- De LA BOUILLERIE Pauline, MARTROR Boris, « Projets
éoliens offshore : un nouveau souffle électrique en mer »,
La semaine Juridique Entreprise et Affaires, n°16, 22 avril
2010
- DELBECQUE Philippe, La semaine juridique Edition
Générale n°5, 30 janvier 1985, II 20334
- DELBECQUE Philippe, Revue de droit des transports,
2010
- DE CET BERTIN Cécile, « Le remorquage n'est pas une
opération de transport maritime », DMF 2008, p.64
- FAURISSON Florent, « Le cadre juridique de l'éolien
offshore », Bulletin du droit de l'environnement industriel,
2012
- LE CORRE Laurent, « régime juridique des
éoliennes », Jurisclasseur environnement et dévelopement
durable, fasc. 4420
- LUQUIAU Antoine, « Navire et autres bâtiments de mer
», Jurisclasseur Transport vol.4, facs. 1055
- REMOND-GUILLOU Martine, « quelques remarques sur le statut
des installations pétrolières en mer », DMF 1977,
p.675
- CORBIER Isabelle, Jurisclasseur Transport vol.4, facs.
1045
Articles de presse :
- « 6 projets innovants pour exploiter les énergies
marines renouvelables », Industrie & Technologie, 29 octobre
2014
- « L'énergie éolienne en mer »,
France Energies Marines, 25 février 2013
- « Le marché de l'éolien en mer atteint le
cap des 3 000 turbines en Europe », Les Echos, 19 août
2015
- « Eolien en mer : pas si simple de réaliser les
études d'impact », Actu-environnement, 27 mars 2015
63
Sites internet :
- ADEME :
ademe.fr
- American Wind Energy Association:
awea.org
- Armateurs de France :
armateursdefrance.org
- Bourbon Offshore :
bourbonoffshore.com
- Campus de la mer :
campusdelamer.fr
- Cluster maritime français :
cluster-maritime.fr
- Commission de régulation de l'énergie :
cre.fr
- Commission OSPAR :
ospar.org
- Groupe DCNS :
dcnsgroup.com
- Legifrance :
legifrance.gouv.fr
- Le portail de l'Union européenne :
europa.eu
- Marine Renewable Energy Group :
marine-renewable-energy.com
- Ministère de l'écologie :
developpement-durable.gouv.fr
- Nations Unies :
un.org
- Organisation maritime internationale :
imo.org
- Parc éolien Cape Wind (Etats-Unis) :
capewind.org
- Projet WindFloat :
principlepowerinc.com
- Pôle Mer Bretagne :
pole-mer-bretagne-atlantique.com
- Pôle Mer Méditerranée :
polemermediterranee.com
- Salon Thetis :
thetis-emr.com
64
TABLE DES MATIERES
- Sommaire
- Introduction 1
PARTIE 1 : L'incorporation des énergies marines
renouvelables dans les règles organisant les
rapports privés en mer 7
CHAPITRE I : La difficulté d'attribuer un statut juridique
aux engins EMR 7
I. Les installations EMR, navires ou engins flottants ? 7
A. Le navire en droit international 7
B. Une définition des engins flottants découlant
de la qualification du navire en droit français 9
1) Le navire au regard de la loi 9
2) Le navire au regard du juge français 10
3) Le navire au regard de la doctrine 11
II. Un rapprochement possible entre les engins EMR et les
plates-formes pétrolières 12
A. Similitudes technologiques 12
B. Qualification juridique des plates-formes de forage 13
CHAPITRE II : les règles applicables aux installations EMR
en matière d'évènements de mer
15
I. L'abordage 15
A. Les engins EMR, exclus des règles de l'abordage en
droit international 16
1) Nécessité d'un abordage entre navires 16
2) Loi applicable en cas d'abordage entre un navire et un engin
flottant en haute mer 16
B. Les engins EMR, aux frontières entre les règles
de l'abordage et du droit commun en droit
français 17
1) Le régime de l'abordage, exclusif du droit commun 17
2) L'abordage, applicable aux engins EMR selon la technologie
utilisée 18
a) Extension des règles de l'abordage aux engins
flottants non amarrés à poste fixe 18
b) Le cas de la rupture des amarres 20
3) Circulation en mer et faute du propriétaire de
l'installation EMR en cas de collision 20
II. Le jeu des limitations de responsabilité
appliqué aux engins EMR 21
65
A. Régime de la limitation 21
B. La limitation de responsabilité durant l'exploitation
des engins EMR 22
1) Les engins EMR, exclus des règles de limitation en
droit français 22
2) Les indécisions en droit international 23
C. Les limitations de responsabilité dans la phase
d'acheminement des engins EMR 24
1) Le remorquage de l'engin EMR 24
2) Le transport de l'engin EMR 25
III. L'application de l'assistance maritime aux engins EMR
flottants 25
A. L'assistance, applicable à tous les engins flottants
25
B. Régime de l'assistance maritime applicable aux engins
EMR 26
1) Une opération de secours 26
2) Une opération sujette à
rémunération 27
CHAPITRE III : les règles de droit social en mer
résultant de l'implantation d'EMR 28
I. Le statut des travailleurs opérant sur les sites EMR
29
A. Une assimilation possible aux gens de mer 29
1) Les travailleurs qualifiés de marins selon le
décret de 1967 29
2) Gens de mer marins et gens de mer non marins 30
B. Le personnel occasionnel à bord 31
1) Notion de personnel à bord 31
2) Une absence de régime attribué au personnel
occasionnel à bord 31
II. Les règles de droit social international applicables
aux travailleurs opérant sur les
installations EMR 32
A. Loi applicable au contrat de travail des salariés
détachés 33
1) La situation des travailleurs français à
l'étranger 33
2) Situation de travailleurs étrangers en France 33
3) Le cas des travailleurs en haute mer 34
B. Application éventuelle du droit social issu des
plates-formes d'exploration ou
d'exploitation 34
1) Droit applicable au contrat de travail 35
2) Sécurité sociale applicable 35
PARTIE 2 : Un droit public contraignant responsable du retard de
la France dans le développement des EMR
37
66
CHAPITRE I : les contraintes administratives relatives aux
énergies marines renouvelables
37
I. Les conditions à remplir par les candidats pour
exploiter des énergies marines renouvelables
37
A. Le choix des candidats par procédure d'appel
d'offres 37
1) Procédure applicable aux appels d'offre 38
a) Textes applicables 38
b) Contenu des appels d'offres 38
2) Contenu des cahiers des charges applicables aux appels
d'offres 39
3) Chronologie des appels d'offres lancés en France
39
B. Une obligation pour les exploitants de disposer d'une
autorisation d'exploiter 40
II. L'installation d'EMR confrontée au domaine public
de la mer 42
A. Les autorisations nécessaires à
l'installation d'EMR dans les eaux territoriales 43
1) Une superposition des autorisations liées à
l'occupation privative du domaine public
maritime 43
a) Diversité des éléments
contrôlés 43
b) Diversité des avis nécessaires à
l'autorisation de concession 44
2) Des garanties insuffisantes apportées par les textes
aux investisseurs 44
B. Les autorisations nécessaires à
l'installation d'EMR hors des eaux territoriales 45
1) Dispositions de droit international 45
2) Dispositions de droit interne 46
CHAPITRE II : Les énergies marines renouvelables face
aux contraintes environnementales
47
I. L'existence de zones marines protégées
restreignant l'implantation des EMR 48
A. Protection du littoral 48
1) Principe d'interdiction des EMR sur la bande littorale
48
2) Autorisation d'installation de câbles de
raccordement dans la zone littorale 49
B. Les autres espaces protégés de la mer 50
1) Parcs nationaux et parcs naturels marins 50
2) Zones Natura 2000 51
II. La prise en compte de l'impact des EMR sur l'environnement
marin 51
A. Mesures européennes prenant en compte l'impact
environnemental des éoliennes 51
1) Convention de OSPAR 52
67
2) Convention de Berne 53
B. Le constat français de l'impact des EMR sur
l'environnement 53
1) Impact lors de l'installation des EMR 53
2) Impact en phase d'exploitation 54
CONCLUSION 55
BIBLIOGRAPHIE 57
TABLE DES MATIERES 64
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