V) Pragmatique
développementale
La pragmatique développementale est un nouveau courant
de recherche en psychologie du développement. Elle étudie le
développement de la communication chez les enfants. Elle débute
avec les travaux de Bates (1976), Ervin-Tripp et Mitchell-Kernan (1977) et Ochs
et Shieffelin (1979), qui ont montré le rôle décisif du
contexte dans la compréhension. Pour eux, l'enfant fait l'apprentissage
d'un ensemble de règles et de pratiques pour communiquer avec autrui.
Bernicot (1999) explique que « Dans cette perspective, le langage
n'est pas simplement une grammaire, mais aussi un ensemble de stratégies
utilisées par l'enfant pour structurer son action sociale, pour
contrôler et réaliser son activité
communicative » (p. 349).
1) Connaissances
métapragmatiques
La pragmatique développementale s'est
intéressée au développement des connaissances
métapragmatiques chez les enfants. Les capacités
métapragmatiques sont les capacités de l'enfant à se
représenter et réguler les usages du langage (Gombert, 1990,
Hickmann, 1985).
Bernicot précise que les enfants développent des
connaissances métapragmatiques dès l'âge de 5 ans. Elle
réalise en 1999 une classification des activités
métapragmatiques en 6 niveaux, qui sont les suivants :
Activités
métapragmatiques
Niveau
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Comportement linguistique et communicatif
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1
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Gestion de la production des énoncés, par exemple
corriger son propre langage spontanément et ajuster son langage à
l'âge et au statut de l'interlocuteur. En cas d'échec de la
communication, l'enfant ne reformule pas l'énoncé, au mieux il
répète mécaniquement.
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2
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Examen de l'effet produit par les énoncés, par
exemple déterminer si l'auditeur a compris ou non et si non, reformuler
son énoncé.
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3
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Test face à la réalité :
décider si un énoncé est adéquat et sinon
reformuler.
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4
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Apprentissage délibéré : être
capable de faire des jeux de rôle, c'est-à-dire produire et
reformuler des énoncés en fonction de caractéristiques
attribuées à des personnages à la place desquels se met
l'enfant.
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5
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Prédire les conséquences des
énoncés : juger hors contexte si un énoncé est
adapté à un locuteur donné ou à une situation
donnée, attribuer explicitement un état mental à un
personnage.
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6
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Réflexion sur la production d'un
énoncé : par exemple expliquer pourquoi certains phrases
sont possibles et comment elles doivent être interprétées,
expliquer l'attribution d'un état mental à un personnage
(paradigme de la fausse croyance)
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Tableau 3 : Niveaux de compréhension de
l'état mental de l'interlocuteur (d'après Bernicot, 1999)
Dès la naissance, nous attribuons àl'enfant des
intentions de communication grâce à ses gestes et à ses
vocalisations. Cependant, à cet âge précoce, ces conduites
n'ont pas de valeur communicative. De nombreuses recherches ont
néanmoins démontré qu'il existe une certaine
continuité entre les interactions précoces et les premiers actes
de langage.
Les réactions de l'adulte face aux essais de
communication de l'enfant jouent un rôle important dans leur
compréhension mutuelle. L'enfant est ainsi capable d'adapter son langage
selon son interlocuteur. Une étude de Ryckebusch et Marcos (2000)
réalisée sur des enfants de quinze à vingt-trois mois
montre que les enfants produisent d'avantage d'actes directifs face à
leur père, alors qu'avec leur mère ce sont les actes expressifs
qui dominent.
C'est surtout à partir de deux ans que l'enfant
améliore ses capacités de communications. Il progresse dans la
production et la compréhension des actes de langage et apprend ainsi
à moduler ses intentions communicatives.
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