UNIVERSITE CATHOLIQUE D'AFRIQUE
CENTRALE
INSTITUT CATHOLIQUE DE
YAOUNDÉ
FACULTÉ DE SCIENCES
SOCIALES ET DE GESTION
Association pour la promotion des droits de l'homme
en Afrique centrale
Mémoire présenté et soutenu en vue de
l'obtention du diplôme de Master en droits de l'homme et action
humanitaire
L'HUMANISATION DES LIEUX DE DETENTION AU CAMEROUN
Par
MOUEN MOUEN Vincent Pascal
Diplômé de l'Ecole Nationale Supérieure de
Police
Sous la direction du
Pr. Bernard-Raymond GUIMDO DONGMO
Agrégé des Facultés de droit
Professeur associé à l'UCAC
Année 2009
« Avec beaucoup de sagesse, on a beaucoup de
chagrin et celui qui augmente sa science augmente sa
douleur »
Ecclésiaste 1, 18.
A «Elo'',
MOUEN ELOLONGUE ZETH Emile,
Qui, jusqu'au bout, aura courageusement affronté
ton destin.
Il n'est de jour où mes pensées ne se tournent
vers toi,
Afin de puiser dans la force de ton caractère,
Le courage et l'énergie nécessaires pour mener
les combats de la vie.
REMERCIEMENTS
Comme le disait l'Ecclésiaste si « l'oeil ne
se rassasie pas de voir et l'oreille ne se lasse pas d'entendre »,
c'est parce que l'Homme est en quête perpétuelle du savoir. Ma
gratitude va tout d'abord à l'Inspirateur de l'Ecclésiaste,
l'Eternel DIEU Tout-Puissant qui m'a protégé et
a dirigé mes pas tout au long de cette formation.
Professeur Bernard-Raymond GUIMDO DONGMO,
pour avoir accepté de diriger ce travail, pour être resté
en permanence disponible malgré vos multiples occupations et enfin pour
la patience et la rigueur dont vous n'avez cessé de faire preuve durant
ce parcours que je considère comme initiatique, je vous prie de trouver
dans ces lignes l'expression de toute ma gratitude.
Par la même occasion, je voudrais adresser mes
sincères remerciements au Pr. Jean Didier BOUKONGOU,
directeur de l'APDHAC et à toute son équipe pour
les efforts de promotion et de protection des droits de l'homme dans la sous
région Afrique centrale à travers une formation de qualité
de la jeunesse dans ce domaine.
Qu'il me soit permis d'exprimer ma profonde gratitude à
Mr MOUEN KWAMBE Samuel et Madame pour l'envie, l'amour et
l'attachement à l'école qu'ils m'ont inculqués. La
quête permanente du savoir étant restée pour ce
météorologiste de formation le credo, et les connaissances
acquises, « le seul héritage que nul ne peut
usurper ».
J'exprime également ma reconnaissance à tous
ceux qui m'ont apporté leur soutien dans cette entreprise,
particulièrement à la famille MOUEN, la
famille TCHONANG, le Commissaire de Police MEDOU
Thierry, l'Officier de Police 2ème grade
MATEKE Théodore, et à mon cher ami YANDOU
Rochedieu.
Comment oublier celle qui chaque jour a partagé mes
angoisses et mon anxiété au sujet de cette formation. Celle dont
les sacrifices sont allés au-delà du matériel pour que
cette entreprise soit couronnée de succès. Grâce
Martine MONNY BOKO, à toi je dis Merci, aussi
bien pour tout ton soutien que pour le présent que tu m'as offert :
Raphaël-Anthony MOUEN III.
SIGLES ET ABREVIATIONS
al. Alinéa
AP Administrateur de Prison ou Administration
Pénitentiaire
APDHAC Association pour la Promotion des Droits de
l'Homme en Afrique Centrale
CDJP Commission Diocésaine Justice et
Paix
CIJ Cour Internationale de Justice
CNDHL Commission Nationale des Droits de l'Homme et
des Libertés
DAPEN Direction de l'Administration
Pénitentiaire
DUDH Déclaration Universelle des Droits de
l'Homme
ENAP Ecole Nationale d'Administration des
Prisons
FED Fonds Européen de
Développement
GP Gardien de Prison
GCP Gardien Chef de Prison
IP Intendant de Prison
MINATD Ministère de l'Administration du
Territoire et de la Décentralisation
PACDET Programme d'Amélioration des Conditions
de Détention et du Respect des Droits de l'Homme
PIDCP Pacte International Relatif aux Droits Civils et
Politiques
PIDESC Pacte International Relatif aux Droits
Economiques Sociaux et Culturels
PUF Presses Universitaires de France
TGI Tribunal de Grande Instance
TPI Tribunal de Première Instance
UCAC Université Catholique d'Afrique
Centrale
RESUME
L'observation même furtive des lieux de détention
au Cameroun montre un dysfonctionnement de la structure pénitentiaire
qui se traduit par la dégradation des conditions de détention et
la banalisation de toute sorte de violation des droits des personnes
incarcérées au mépris des règles internationales et
des engagements internationaux de l'Etat camerounais. Les lieux de
détention entendus dans la présente étude comme l'ensemble
des lieux où s'exécutent des mesures légales de privation
de liberté se caractérisent par une dégradation continue
des conditions de détention. L'humanisation des lieux de
détention au Cameroun qui est pourtant appelée de tous les voeux
se heurte ainsi à des obstacles liés pour l'essentiel à la
volonté politique peu affirmée de l'Etat camerounais dans la
protection des intérêts et des droits de la personne privée
de liberté.
Si le contexte économique peut être excipé
comme argument, il ne saurait cependant à lui seul justifier l'absence
d'humanité dans les lieux de détention car dans la lutte pour la
réalisation et la satisfaction permanente des droits fondamentaux des
personnes incarcérées, l'Etat du Cameroun
bénéficie d'un apport non négligeable de la
société civile et des partenaires extérieurs,
malgré les velléités d'instrumentalisation de cette
assistance.
Comme processus devant conduire à terme à
l'amélioration des conditions de détention par la satisfaction et
à la réalisation permanente des droits fondamentaux des personnes
incarcérées, l'humanisation des lieux de détention ne vise
pas l'érection au sein de la société, d'une caste
constituée de délinquants qui jouissent de tous les
privilèges du fait de la protection internationale dont ils
bénéficient. Mais plutôt, il s'agit de susciter en ces
délinquants, par le respect de leur dignité, de la
considération pour soi et autrui. Pour ce faire, le tribut qu'ils paient
à la société à travers la privation de
liberté, au lieu d'en faire des citoyens à part, devrait
plutôt contribuer à leur resocialisation. D'où
l'émergence d'une nouvelle politique pénitentiaire qui
privilégiera les mesures alternatives à l'emprisonnement.
Mots-clés
Lieu de détention - humanisation - peine alternative -
dignité humaine - emprisonnement -droits fondamentaux - détention
- détention préventive - liberté - droits de l'homme
ABSTRACT
A casual observation of prison facilities in Cameroon would
reveal a dysfunctioning of the penitentiary structure which is manifested by
the worsening of prison conditions and the normalization of all sorts of
violations of prisoners' rights which go against international rules and
Cameroon's international engagements. Prison facilities, which in this work
refer to all places where legal measures involving the deprivation of liberty
are executed, are characterized by a continuous worsening of detention
conditions. The humanization of prison facilities in Cameroon, which is highly
wished for, is thus faced with obstacles essentially resulting from very little
expressed political will on the part of the State of Cameroon in the protection
of the rights and interests of persons deprived of their liberty.
Though the economic context can serve as an excuse, it does
not in itself alone completely justify the absence of humanity in prison
facilities. This because Cameroon benefits from substantial support from the
civil society and foreign partners in the fight for the permanent respect of
the fundamental rights of imprisoned persons though this support is at times
instrumentalised.
The humanization of prison facilities, as a process which in
the long run would lead to the permanent respect for the fundamental rights of
the prisoner, is not aimed at creating a caste of delinquents in the society
benefiting from all the privileges accorded to them by the international
protection they enjoy. On the contrary, respecting their dignity would instill
self respect and respect for others in these prisoners. Consequently, the
tribute they pay to society through their loss of liberty, instead of making
them citizens apart, would instead contribute to their resocialisation. This
calls for the emergence of a new penitentiary policy which gives privilege to
other alternatives than imprisonment.
Key words
Detention facilities - humanization - alternative penalty -
human dignity - imprisonment-fundamental rights - detention - préventive
detention - liberty - human rights.
SOMMAIRE
Introduction
générale....................................................................................0
Première partie : L'APPLICATION
LIMITEE DES MESURES EXISTANTES........13
Chapitre 1er :LA MINIMISATION
DES PRINCIPES JURIDIQUES INTERNATIONAUX APPLICABLES AUX PERSONNES
INCARCEREES............15
Section 1 : Une application mitigée des
principes de protection des droits physiques des personnes
détenues.......................................................................................15
Section 2 :Une minoration des garanties
procédurales et des règles
d'incarcération.............................................................................................24
Chapitre 2 : UN CADRE
JUDICIAIRE PEU FAVORABLE A LA PROTECTION DES PERSONNES
INCARCEREES..........................................................................33
Section 1 : L'inadaptation de
l'institution judiciaire à l'exercice des droits processuels des
personnes privées de
liberté.......................................................................33
Section 2 : La timide répression
des atteintes à la dignité humaine dans les lieux de
détention....................................................................................................41
Seconde Partie : L'INNEFICACITE DE LA
POLITIQUE PENITENTIAIRE............49
Chapitre1 :L'INADEQUATION DES RESSOURCES
HUMAINES ET MATERIELLES AUX REALITES DU MILIEU
CARCERAL..............................................................51
Section 1: La déficience des ressources
humaines.................................................51
Section 2 : L'insuffisance des ressources
matérielles allouées au système
pénitentiaire...............................................................................................58
Chapitre 2 : LES ENTRAVES AUX STRATEGIES
DEVELLOPPEES POUR LA PROTECTION ET LA PROMOTION DES DROITS DE L'HOMME EN MILIEU
CARCERAL..............................................................................................65
Section 1 : L'inefficacité des initiatives
locales....................................................65
Section 2 : Le caractère draconien du
partenariat externe....................................74
Conclusion
générale....................................................................................78
Bibliographie.............................................................................................83
Annexes....................................................................................................88
Table des
matières......................................................................................89
INTRODUCTION GENERALE
Introduction générale
« Une société se juge à
l'état de ses prisons ; l'Etat de droit ne doit pas cesser à
la porte des prisons »1(*). La violation des droits des personnes privées
de leur liberté n'est pas un problème nouveau ou
spécifique à une région du globe. Cette
préoccupation a traversé les siècles pour s'imposer aux
Etats dits `'modernes'' comme l'un des critères d'évaluation de
l'Etat de droit. Les prisons, loin d'être des lieux de bagne et de toutes
sortes de frustrations, des lieux de `'non droit'' devraient plutôt
être des espaces clos réservés aux personnes qui ne
respectent pas les normes sociales, avec pour buts de protéger la
société des personnes dangereuses, de décourager la
commission de nouveaux actes délictuels et de rééduquer
les délinquants en vue d'une réinsertion sociale. Pour cela, ces
espaces de privation de liberté devaient rester des modèles dans
lesquels les droits de ceux privés de leur liberté sont
respectés car la violation des droits du prisonnier étant
inadmissible.2(*)
I- Contexte de l'étude
Les Etats- Unis d'Amérique sont l'un des pays reconnus
au sein de la communauté internationale comme un «Etat de droit''.
Cependant, ce pays est en proie aux critiques les plus acerbes en
matière de respect des droits de l'homme à cause de sa prison de
GUANTANAMO. Les traitements infligés aux personnes détenues en
ce lieu non seulement violent les règles de droit international, mais se
démarquent des dispositions des instruments de droit pertinents en la
matière. C'est ce qui vaut à cet espace carcéral
réservé aux terroristes l'appellation de `'prison de la
honte''3(*) donnée
par les organisations de défense des droits de l'homme. En France les
mauvaises conditions de travail ont poussé les fonctionnaires en service
dans les unités pénitentiaires dans la rue.4(*) En reconnaissant une
surpopulation de 230 pour cent des structures pénitentiaires avec un
fort taux de détenus préventifs, un personnel d'encadrement
insuffisant, mal équipé et peu formé; le ministre
camerounais de l'administration territoriale et de la décentralisation,
au cours du conseil de cabinet du 04 décembre 20075(*), aura ainsi avoué
à demi mots, l'absence d'humanité dans le traitement des citoyens
privés de leur liberté au Cameroun. Mener une réflexion
sur l'humanisation des lieux de détention au Cameroun implique la prise
en compte des violations de toutes les générations de droits dans
l'ensemble des lieux de détention du territoire national et depuis la
création de cet Etat. Opération cependant fastidieuse et
nécessitant la mobilisation d'importantes ressources matérielles.
Il importe donc de délimiter le sujet.
II- Délimitation de l'étude
Pour mieux comprendre le sujet objet de la
présente étude, une délimitation matérielle,
spatiale et temporelle est nécessaire.
1- Délimitation matérielle
La présente réflexion s'appesantira, sur les
causes de la persistance des conditions matérielles de détention
inhumaines et sur l'existence des principes juridiques relatifs au traitement
des personnes incarcérées. Les conditions matérielles
intègrent la satisfaction des besoins élémentaires des
personnes privées de liberté tels que un logement décent,
une alimentation suffisante et une santé convenable, codifiés
sous la forme de droits qui sont garantis par le Pacte international relatif
aux droits sociaux économiques et culturels (PIDESC) d'une part et du
respect de l'intégrité physique et corporelle des détenus
garantis par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques
(PIDCP), par la Convention contre la torture et autres peines ou traitements
inhumains ou dégradants d'autre part. Les principes juridiques dont il
est question quand à eux représentant les droits processuels
reconnus aux personnes privées de liberté et qui sont les gages
d'une justice de qualité. Entre autre on peut citer le principe du droit
d'accès au juge, le principe de la présomption d'innocence, le
principe du débat contradictoire et tous les autres principes
codifiés par les textes internationaux et qui permettent à un
individu (même déjà incarcéré) faisant face
à la justice de se défendre valablement.
2- Délimitation spatiale
Même s'il existe quelques spécificités
liées à la culture et au niveau d'émancipation des
populations locales, les conditions de vie dans les structures
carcérales et les chambres de sûreté au Cameroun se
ressemblent, particulièrement en ce qui concerne la pratique de la
détention. La présente étude se limitera donc aux
pratiques qui ont cours dans les lieux de détention dans les
régions camerounaises du Centre et du Littoral6(*) pour de nombreuses
raisons : d'abord parce que ces lieux de détention auront
été les plus accessibles tout au long de ce travail. Ensuite
parce que les Régions du Centre et du Littoral sont celles dans
lesquelles on retrouve les plus grandes métropoles du pays,
où les populations sont le plus émancipées, mais où
paradoxalement les droits des personnes privées de leur liberté
sont le plus violées. Enfin parce que les deux plus grandes prisons du
pays en terme de budget alloué, de nombre de détenus et du
personnel pénitentiaire se trouvent dans les villes de Douala et
Yaoundé respectivement chef lieux des régions du Littoral et du
Centre.
3- Délimitation temporelle
La question de la protection des droits des personnes
légalement privées de leur liberté en Afrique et
particulièrement au Cameroun est plus ancienne que les revendications
sociales et politiques des années 1990. Depuis le milieu des
années 1980, le Cameroun s'était déjà engagé
dans la voie de la protection des droits et libertés en ratifiant les
instruments internationaux qui garantissent les droits humains et
protègent les individus contre les sévices corporels et autres
traitements inhumains et dégradants7(*). Mais c'est à partir des années 1990 que
la protection des personnes privées de leur liberté prend toute
son ampleur à travers la mobilisation des acteurs sociaux nationaux et
des partenaires extérieurs. Il serait donc intéressant de ne
tenir compte que de la période allant de 1990, période à
laquelle commencent à émerger les mouvements de protection des
libertés au Cameroun, à 2009, date de clôture de la
présente étude, pour interroger les politiques mises sur pied par
l'administration camerounaise afin de protéger la catégorie de
personnes objet de la présente étude et garantir ainsi un espace
carcéral plus respectueux des valeurs humaines.
Puisque « le savant doit définir les choses
dont il traite afin que l'on sache bien de quoi il est
question »8(*), il
convient de définir les termes qui constituent le sujet de
manière claire et précise afin d'en permettre une meilleure
compréhension.
III- Définition des concepts
Pour une meilleure compréhension du
sujet, il serait convenable, de distinguer pour mieux les définir les
concepts humanisation et lieux de détention qui
constituent le sujet objet de la présente réflexion.
Ø Le terme humanisation dérive du verbe
humaniser qui signifie traiter quelqu'un avec humanité. Par opposition
à l'animalité que le dictionnaire encyclopédique Petit
Larousse9(*) définit
comme « l'ensemble des caractères propres à
l'animal»10(*),
l'humanité est l'ensemble des caractères propres à
l'être humain. C'est un état que l'on atteint par le processus
d'humanisation. En se référant à l'Arret de la CIJ sur
l'affaire du détroit de Corfou, l'on peut définir
l'humanité par les éléments qui la constituent à
savoir la vie, l'intégrité physique, le bien être
etc...11(*). Par le terme
humanisation, il faudrait donc entendre tout au long de la
présente étude, le processus qui conduit à
l'humanité. C'est-à-dire, à la reconnaissance et la
satisfaction permanente des besoins fondamentaux de l'homme.
Ø Par lieux de
détention, il faut entendre tous les espaces dans
lesquels s'effectuent des mesures de privation de liberté. Pour Emile
Littré une prison ou un pénitencier est un lieu de
détention, et les buts de ceux-ci varient selon les époques et
les sociétés12(*). Cependant, si l'on s'en tient aux buts
assignés aux lieux de détention par Emile Littré, l'on
remarque entre autre la fonction d' « empêcher les
détenus de prendre fuite ou de compromettre leur futur
procès »13(*). Ce qui pourrait justifier la garde à vue dans
les unités des forces de maintien de l'ordre, mais aussi et surtout la
détention préventive. Terme de jurisprudence et de droit
criminel14(*), la
détention est l'« action de détenir, de garder en sa
possession ».15(*) Pour J.C. SOYER, elle consiste en
l'incarcération d'une personne. Cette incarcération étant
susceptible de se prolonger parfois aussi longtemps que l'instruction n'est pas
close ou même que la juridiction de jugement ne s'est pas
prononcée. Dans ce cas, on parlera de détention
préventive.16(*) Bien qu'étant une mesure de privation de
liberté au même titre que l'emprisonnement et la garde à
vue, la peine désignée par le terme détention est
cependant différente des autres mesures de privation de liberté
d'abord parce qu'elle résulte des infractions politiques ensuite parce
que contrairement au détenu, l'emprisonné est astreint au
travail17(*) et enfin
parce que la garde à vue, contrairement à la détention et
à l'emprisonnement ou à l'incarcération, n'est pas une
peine prononcée par une juridiction et elle ne se justifie dans le cadre
de l'enquête préliminaire que par la volonté de
l'enquêteur, d'autre part officier de police judiciaire, de maintenir
à sa disposition, des éléments pouvant concourir à
la manifestation de la vérité.18(*) Toutes Les mesures ci-dessus ont en commun le fait
qu'elles s'effectuent dans des lieux particuliers que le sujet désigne
sous l'expression ''lieux de détention''. Il faut donc entendre
par lieux de détention, tous les espaces officiels dans lesquels
s'exécutent des mesures légales de privation de liberté.
Les lieux de détention tels qu'étudiés dans le cadre de ce
travail regroupent ainsi outre les cellules des commissariats de police et des
brigades de gendarmerie, les chambres de sûreté que l'on retrouve
au niveau des parquets des différents Tribunaux et toutes les structures
pénitentiaires telles que prévues par la loi n° 92/052 du 27
mars 1992 portant régime pénitentiaire au Cameroun.
Le sujet ainsi défini dégage cependant un
intérêt pluriel qu'il convient de relever.
IV- Intérêt du sujet
Bien que déjà abordé
par des auteurs dont les observations, analyses et réflexions sont aussi
pertinentes les unes que les autres, l'étude de l'humanisation des lieux
de détention au Cameroun revêt encore un intérêt
certain aussi bien sur le plan social que scientifique.
1- Intérêt social
Une observation même furtive des lieux de
détention au Cameroun permet de noter qu'au-delà des frustrations
qu'elles endurent au cours de leur incarcération, les personnes
privées de leur liberté éprouvent d'énormes
difficultés à se réinsérer dans la
société après avoir purgé leurs peines. Pour la
société camerounaise dans sa globalité, la présente
étude se veut une contribution qui permettra à l'Etat camerounais
d'identifier à travers les pesanteurs à l'éradication des
comportements inhumains qui se sont enracinés dans l'univers
carcéral camerounais malgré l'encadrement juridique dont jouit la
privation de liberté au Cameroun.
Le présent travail offre également de
précieux renseignements d'une part, sur les droits qui sont reconnus aux
personnes privées de leur liberté par les instruments
internationaux régionaux et locaux, car comme le disent certains
spécialistes du droit, l'on ne peut être sensible qu'à un
droit que l'on connaît. D'autre part, il renseigne sur les
possibilités de recours en cas de violation ou de non respect de ces
droits.
2- Intérêt scientifique
Le respect des droits du prisonnier est synonyme de
l'application de nombreux instruments de droit tant internationaux que
nationaux et relatifs à la protection des droits de cette
catégorie de personnes. Même si de nombreux travaux existent sur
ce sujet, ils sont orientés pour la plupart vers la description des
conditions d'incarcération ou la présentation de l'arsenal
juridique national et supranational qui garantit l'humanisation des lieux de
détention. Cette étude quant à elle, au-delà de ces
aspects, voudrait évaluer l'efficacité des différents
mécanismes de protection des droits de l'homme dans le contexte d'une
privation de liberté.
V- Revue de littérature
Le problème de l'humanisation des lieux de
détention a préoccupé plusieurs auteurs. Monsieur Edmond
ATEMENGUE19(*) , dans son
article «La torture en milieu carcéral : le cas de la
prison centrale de Kondengui-Yaoundé (09 octobre 1985 - 06 octobre
1995)''20(*)
décrit la prison centrale de Kondengui comme « un lieu de
bagne » dans lequel la violence physique et morale est la
règle, dès l'arrivée des prisonniers jusqu'à leur
sortie. En se limitant à un exposé des faits vécus durant
dix années dans cet univers carcéral, l'auteur compare les
violences dont sont victimes les pensionnaires de cette structure à
« un outil de travail » qui
serait « nécessaire et indispensable » pour un
meilleur encadrement des prisonniers. D'après l'auteur, même si
les conditions carcérales à Kondengui connaissent depuis quelques
temps une nette amélioration, « on y retrouve encore quelques
brebis galeuses qui refusent de suivre le nouveau rythme ».
L'auteur s'est limité à une analyse factuelle de
la situation des détenus de Kondengui, sans convoquer aucune source de
droit, même pas le règlement intérieur de la prison qui
reconnaît aux pensionnaires des droits bafoués quotidiennement par
leurs geôliers. Il convient même de relativiser
l'amélioration à laquelle il fait allusion, ce d'autant
plus que ce pénitencier est encore de nos jours réputé
pour les violences que l'on y exerce sur les pensionnaires. Surtout que ces
derniers ignorent la plupart du temps les droits qui leurs sont reconnus ou/et
les mécanismes juridiques et institutionnels existants pour les faire
valoir. De plus, le «léger mieux'' qu'il souligne ne concerne que
les sévices corporels, les frustrations morales étant encore la
règle dans cet univers. Cette analyse de l'auteur qui assimile les
violences sur les pensionnaires de cette prison à un outil de travail
rejoint notre opinion sur les violences et autres brutalités que
subissent les citoyens privés de leur liberté. Faits
vécus sur le terrain et rapportés par de nombreuses associations
de défense des droit de l'homme. Ce qui légitimement pourrait
nous amener à nous interroger sur la pertinence de la violence comme
outil d'encadrement des prisonniers qui possèdent parmi les droits qui
leur sont reconnus, le droit à la protection de
l'intégrité physique et corporelle21(*).
Monsieur Eyike-Vieux, en analysant les droits du
prisonnier22(*), a
passé en revue l'arsenal des textes nationaux et supra nationaux qui
consacrent des droits aux prisonniers. Après avoir fait l'inventaire des
droits dont jouissent tous les prisonniers, il s'est appesanti sur les droits
spécifiques aux mineurs, aux femmes incarcérées aux
aliénés mentaux, aux étrangers et aux gardés
à vue. La pertinence de l'analyse juridique du droit des prisonniers par
l'auteur n'étant plus à démontrer, il aurait cependant
été souhaitable qu'elle soit conciliée avec des faits
réels qui illustrent la difficile protection des droits de cette
catégorie de personnes. Il a conclu en s'interrogeant sur
l'efficacité de la protection accordée aux prisonniers au regard
de la modicité du budget des établissements pénitenciers
et des dysfonctionnements observés dans l'administration en
général, en excluant quelque peu la responsabilité du
personnel de l'administration pénitentiaire dans le non respect des
droits du prisonnier. Analyse certes pertinente, mais qui nous semble peu
réaliste. En effet, la modicité des budgets des
établissements pénitentiaires est il est vrai une sérieuse
entrave au respect des droits de l'homme dans la mesure où ces budgets
ne permettent pas d'assurer la formation et la sensibilisation du personnel
chargé de l'application des lois aux droits de l'homme. Mais cette
raison ne pourrait à elle seule justifier le déficit
d'humanisation observé dans les lieux de détention au Cameroun.
Et c'est précisément sur ce point que nous nous écartons
de l'analyse de l'auteur car la législation en matière de
détention fait elle aussi prospérer les conditions inhumaines
dans les lieux de détention dans le sens où elle ne
prévoit pas les peines alternatives à l'emprisonnement qui
pourraient contribuer significativement à la décongestion des
prisons au Cameroun.
La réflexion du Professeur Bernard-Raymond GUIMDO D.
sur les alternatives à l'emprisonnement23(*) fait état de la multiplicité des
infractions passibles de peines d'emprisonnement, situation qui contribue
à détériorer d'avantage les conditions de détention
dans les structures pénitentiaires par le surpeuplement. Il propose pour
cela une plus grande utilisation des peines alternatives à
l'emprisonnement, les unes étant prévues par le code pénal
et d'autres textes législatifs, les autres envisageables au regard de la
saturation du milieu carcéral et des besoins des collectivités
victimes des méfaits des délinquants à condamner. L'auteur
estime cependant que certaines institutions telles que les institutions
étatiques, la société civile et les collectivités
territoriales décentralisées devraient nécessairement
être impliquées pour un meilleur suivi et une mise en oeuvre
efficiente de ces peines alternatives car « il ne sert à rien
de mettre des gens en prison si cela ne permet pas leur rachat ou leur
réinsertion dans la société et si cela ne profite pas
à la société ».24(*)
Cette analyse renforce nos convictions quand on sait que
l'incarcération, si elle est une mesure punitive, constitue
également une grande humiliation pour ceux des citoyens qui, bien
qu'exemplaires sont malencontreusement ou accidentellement tombés sous
le coup de la loi. De plus, purger une peine d'emprisonnement dans le contexte
camerounais actuel c'est aussi supporter l'abandon de la famille qui
très souvent rompt les liens avec le détenu, rendant ainsi plus
difficile une possible réinsertion. Pourtant le condamné
d'aujourd'hui peut, lorsqu'il est bien accompagné, devenir un
modèle social après avoir payé ses fautes.
Madame Adeline FOUEGOUM,25(*) traitant des institutions judiciaires et
carcérales26(*)
fait dans un premier temps, une présentation des institutions
judiciaires du Cameroun car estime-t-elle, pour mieux se servir d'un
instrument, il faut le connaître. Puis, dans un second temps, elle
analyse le cadre institutionnel de l'administration pénitentiaire
à la lumière du décret présidentiel n° 92/052
du 27 mars 1992 qui classe les centres pénitentiaires, définit
leurs modalités de fonctionnement, prescrit et définit les
règles relatives au traitement des détenus, à leur
santé et à leur incarcération. L'auteur fait remarquer que
« de manière générale, les droits du citoyen
incarcéré sont légalement assez bien
préservés. Mais seulement à l'application les violations
et les abus sont légions »27(*). Elle préconise pour cela la mise sur pied
des structures de contrôle des lieux de détention aptes à
constater les infractions pour une préservation efficiente de la
dignité de ceux qui sont privés de leur liberté.
Au regard du fonctionnement actuel des lieux de
détention, la position de cet auteur rejoint nos préoccupations.
En effet, ceux qui sont privés de leur liberté le sont même
parfois à tort et subissent du même coup comme les autres,
d'affres conditions de vie dans les lieux de détention. Conditions qui,
au lieu de faciliter leur réinsertion et de les encourager à
respecter la loi après avoir recouvré la liberté, les
mettent plutôt en marge de la société au mépris des
dispositions de l'Ensemble des règles minima pour le traitement des
détenus.28(*)Il
nous semble donc pertinent d'envisager, comme l'auteur de cet article, la mise
sur pied des structures de contrôle et de surveillance des lieux de
détention ou la redynamisation de celles déjà
existantes.
La divergence des opinions de ces différents auteurs
suggère un questionnement légitime sur les causes de l'absence
d'humanisation dans les lieux de détention.
VI- Problématique
Le thème objet de la présente étude pose
un problème d'actualité, celui de l'humanisation des lieux de
détention. Les auteurs qui se sont penchés sur la question ont
établis de manière claire et assez évidente que les
conditions de détention au Cameroun violent les normes
internationalement reconnues en matière de privation de liberté.
Cette absence d'humanisation dans les lieux de détention ouvre la voie
à une interrogation somme toute légitime, à savoir
pourquoi le respect des droits de l'homme n'est ni effectif, ni
efficace dans les lieux de détention camerounais malgré la
multiplicité des initiatives visant à améliorer les
conditions d'incarcération tant sur le plan interne
qu'international ? En d'autres termes, il s'agit de voir
pourquoi les personnes privées de leur liberté au Cameroun, ne
parviennent pas à jouir effectivement des conditions de
détention acceptables malgré la multiplicité des
initiatives engagées dans ce sens tant au plan interne
qu'international.
VII- Hypothèse de recherche
Si le respect des droits de l'homme n'est ni effectif, ni
efficace dans les lieux de détention, c'est à cause de
l'application limitée des normes existantes et de l'inefficacité
de la politique pénitentiaire appliquée.
L'hypothèse ainsi présentée, cette
étude s'attellera à la démontrer en se servant d' un
certain nombre de méthodes et techniques de recherches.
VIII- Cadre méthodologique
La recherche des raisons du mal être dans les divers
lieux de privation de liberté au Cameroun ne peut être
menée de manière rigoureuse et avec des règles
scientifiquement admises que si l'on convoque un certain nombre de techniques
et méthodes de recherche.
1. Les méthodes utilisées
Ces méthodes se déclinent en la méthode
juridique, la méthode systémique et la méthode
fonctionnelle.
a- La méthode juridique
Il s'agit de faire l'état du droit sur les conditions
de détention au Cameroun en s'appesantissant sur la
nécessité du respect de la dignité humaine. Si sur le plan
national, il existe une abondante législation sur les conditions de
détention, à l'échelle internationale également, de
nombreux instruments de droit confortent le respect de la dignité
humaine même en situation de privation légale de liberté.
L'analyse juridique qui sera développée s'appuiera donc sur les
instruments internationaux qui protègent et garantissent les droits des
l'homme et particulièrement ceux des personnes privées de leur
liberté d'une part et d'autre part sur la jurisprudence internationale.
Ainsi, tour à tour, seront explorées les dispositions pertinentes
en la matière contenues dans la Déclaration universelle des
droits de l'homme, la Convention contre la torture et les autres traitements
inhumains ou dégradants, l'Ensemble des règles minima pour le
traitement des détenus, les Pactes de 1966, la Charte africaine des
droits de l'homme et des peuples, la loi fondamentale camerounaise, les textes
règlementaires en vigueur et tous les autres instruments pertinents.
Mais également, les occasions données au juge interne de
construire le droit à travers les décisions de justice rendues en
matière de violation des droits des prisonniers seront analysées.
b-La méthode systémique
Elle consiste à étudier la politique de
l'administration camerounaise en matière de prison et des lieux de
détention. Dans la pratique, les informations collectées sur le
terrain remontent jusqu'à un organe de décision qui prend un acte
dans le domaine concerné et en attend l'impact sur les cibles.
Seulement, ni les agents qui remontent les informations, ni les cibles ne sont
associés à la prise de cette décision. C'est la technique
du ''input, output et de la boite noire''. Dans le cadre de notre
étude, Il s'agit surtout d'analyser l'intervention de l'Etat camerounais
en matière de gestion des prisons afin d'y déceler
éventuellement l'origine du manque d'humanité dans les prisons.
Les cibles ici étant les personnes privées de leur
liberté, les agents renseignements, les différentes structures
chargées de l'inspection et de la surveillance des prisons. La
boîte noire quant à elle étant l'administration centrale
chargée des prisons.
c- La méthode fonctionnelle :
C'est une méthode complémentaire à la
méthode systémique en ce sens qu'elle comble les lacunes
crées par la non association des cibles et des agents de renseignement
à la prise de décision. La méthode fonctionnelle consiste
à étudier dans un système la fonction d'un
élément qui entretient avec les autres éléments
du même système, une relation d'interdépendance. Il s'agit
ici d'étudier le fonctionnement des lieux de détention à
partir des fonctions attribuées à ceux-ci afin d'y déceler
les raisons du manque d'humanité.
2. Les techniques de recherche appliquées
La conduite de cette étude nous a amené à
faire recours à diverses techniques permettant de collecter et
d'analyser les informations recueillies sur le terrain afin d'évaluer
les conditions de détention en milieu carcéral camerounais.
A- Les interviews29(*) :
Ce sont des entretiens accordés par les acteurs et les
observateurs du milieu carcéral camerounais. Ils nous auront permis tout
au long de ce travail de nous imprégner de la politique de
l'administration en matière de détention et de gestion des lieux
de détention d'une part, et d'autre part, de comprendre l'action de la
société civile et des autres partenaires de l'administration en
matière de protection des droits des personnes privées de leur
liberté.
B- L'enquête:
C'est un travail de collecte des informations à travers
des témoignages, des entretiens, des auditions et même par la
recherche documentaire. L'enquête vise la manifestation de la
vérité. Les auditions obéissent à des techniques
quelques peu particulières dont le but est d'empêcher une
concentration suffisante de l'enquêté pour que ce dernier ne
construise une réflexion autour de la question qui lui est posée
afin que les réponses qu'il donne reflète le plus possible la
réalité. Entre autres techniques, on peut citer l'entretien
à bâtons rompus, le déplacement latéral des objets
sur une table, la technique de l'enquêteur distrait.
IX- Articulation et justification du plan
Le foisonnement de textes qui régissent le
système pénitentiaire au Cameroun montre bien que la condition du
détenu est au centre des préoccupations des autorités. Les
frasques du personnel chargé de l'application des lois au
détriment des détenus et au mépris des droits humains
légitiment une réflexion sur le système camerounais de
détention dans sa globalité. L'humanisation des lieux de
détention apparaît donc être plus qu'un souhait, une
nécessité. Pour comprendre pourquoi malgré l'encadrement
juridique dont elle bénéficie, la privation de liberté au
Cameroun ne respecte pas les normes internationales en la matière, nous
étudierons dans une première partie, les limites dans
l'application des mesures existantes, puis dans une seconde partie nous
traiterons de l'inadéquation de la politique pénitentiaire
actuellement en vigueur au Cameroun.
PREMIERE PARTIE :
L'APPLICATION LIMITEE DES MESURES EXISTANTES
La volonté de protéger les hommes contre les
actes de barbarie de leurs alter egos a engagé la « famille
humaine »30(*)
dans une logique de protection de la dignité humaine. Ce souci de
protection de l'être humain contre les actes de torture et autres
traitements qui renient la nature humaine de l'homme a conduit la
communauté internationale à se doter de moyens juridiques de
protection contre de tels actes et de mécanismes visant leur
prévention. Les moyens juridiques dont il est question sont
essentiellement constitués de principes internationalement admis et
codifiés par les instruments de droit alors que les mécanismes
auxquels il est fait référence s'entendent comme des
stratégies visant la prévention des atteintes aux droits de
l'homme soit par leur effet de sensibilisation, de dissuasion, ou de
répression. Si le respect des droits fondamentaux de l'homme est
nécessaire à l'épanouissement des membres de la
« famille humaine », la protection de la dignité
humaine est encore plus impérative pour ceux d'entre eux qui sont
privés de leur liberté car l'état de privation de
liberté est un facteur aggravant de vulnérabilité pour
déjà fragilisées par un contexte général de
pauvreté. D'ailleurs la 57ème règle de
l'Ensemble des règles minima pour le traitement des
détenus31(*)
précise que :
«L'emprisonnement et les autres mesures qui ont
pour effet de retrancher un délinquant du monde extérieur sont
afflictives par le fait même qu'elles dépouillent l'individu du
droit de disposer de sa personne en le privant de sa liberté. Sous
réserve des mesures de ségrégation justifiées ou du
maintien de la discipline, le système pénitentiaire ne doit donc
pas aggraver les souffrances inhérentes à une telle
situation ».
En ratifiant un certain nombre d'instruments
internationaux de droit, le Cameroun s'est imposé entre autres devoirs,
celui de faire respecter la dignité des personnes privées de leur
liberté. Cependant, malgré cet encadrement juridique,
l'humanisation des lieux de détention au Cameroun tarde encore à
se concrétiser et à devenir une réalité observable
du fait de la minimisation des principes internationaux de droit (Chapitre I)
et de l'inexistence d'un cadre juridique interne favorable à la
protection des personnes privées de leur liberté (Chapitre
II).
Chapitre 1er : LA MINIMISATION DES PRINCIPES
JURIDIQUES INTERNATIONAUX APPLICABLES AUX PERSONNES INCARCEREES
La nature humaine des personnes privées de
liberté ressort dans la plupart des textes des Nations Unies32(*) qui, bien que n'ayant aucun
caractère contraignant pour certains, réaffirment cependant tous
l'appartenance totale et entière de ces personnes à la
« famille humaine». La privation de liberté, même
lorsqu'elle est légale, n'altère pas la nature humaine de ceux
qui en sont victimes. D'ailleurs le premier principe de l'Ensemble de
principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une
forme quelconque de détention ou d'emprisonnement réitère,
sans être impératif, la nécessité de traiter avec
humanité et respect toute personne privée de sa
liberté.33(*) Ce
texte consacre également des garanties procédurales en termes des
droits de la défense et des conditions physiques de détention.
Membre de la communauté internationale, le Cameroun a également
ratifié la plupart des instruments internationaux ayant un
caractère obligatoire relatifs à la protection de la
dignité humaine et partant, celle des personnes privées de leur
liberté. Il résulte donc de l'engagement international de l'Etat
du Cameroun, un ensemble de principes de droit qui lui sont opposables aussi
bien du point de vue de la protection des droits physiques des personnes
détenues que de celui des garanties procédurales qui leur
assurent un procès équitable. Cependant, l'effectivité de
cette protection se heurte à une application mitigée desdits
principes (section 1) et à la minoration des garanties
procédurales ainsi édictées (section 2).
Section 1 : Une application mitigée des
principes de protection des droits physiques des personnes détenues
La préservation de la
dignité humaine34(*) est l'un des idéaux que la communauté
internationale s'est fixée comme objectif. Pour l'atteindre, le droit
international s'est doté de normes juridiques les unes contraignantes,
les autres permissives, mais qui devraient toutes s'appliquer à tous les
êtres humains sans considération aucune du statut juridique. Ces
normes sont relatives d'une part au respect de l'intégrité de la
personne humaine, et d'autre part à la jouissance des droits
économiques sociaux et culturels. Cependant, la protection des personnes
privées de leur liberté se trouve diluée dans le
caractère épars de ces normes (paragraphe 1) et dans la
permissivité de certains des instruments qui les consacrent (paragraphe
2).
Paragraphe 1er : Le caractère
épars des normes juridiques de protection de la personne détenue
Au Cameroun, la dignité de toute personne humaine en
général et des personnes privées de liberté en
particulier est protégée par des normes internationales,
régionales et locales qui se diluent cependant dans la
multiplicité des instruments de droit (A) et dans le caractère
relatif des interdictions énoncées(B).
A- La dilution de la
protection de la dignité des personnes privées de leur
liberté dans la multiplicité des instruments de droit
La protection de l'intégrité physique de la
personne humaine occupe une place prépondérante dans le droit
international des droits des l'homme. Elle suppose la protection de la partie
charnelle du corps humain contre toutes les atteintes possibles allant des
mauvais traitements à la suppression de la vie en passant par des
mutilations ou actes de torture. Mais cette protection suppose également
la satisfaction des besoins élémentaires de l'être
humain.
Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques
(PIDCP), dans son article 635(*) consacre le droit à la vie et protège
du même coup l'intégrité physique de la personne humaine.
De même, l'article 736(*) de ce texte interdit de manière formelle la
pratique de la torture et des traitements qui avilissent l'être humain.
Cette protection de la dignité humaine s'étend
spécifiquement aux personnes privées de leur liberté dans
l'article 10 alinéa 1 du même texte.37(*)Quant à la Convention
contre la torture, elle fait obligation aux Etats parties entre autre
« d'incorporer le crime de torture dans la législation
nationale et de réprimer les actes de torture par des peines
appropriées (...) ».38(*) La Convention relative aux droits de l'enfant exhorte
les Etats partie à veiller à ce que les enfants soient
protégés contre les actes de torture et les traitements cruels
inhumains et dégradants.39(*)
Au plan régional, la
Charte africaine
des droits de l'homme et des peuples à laquelle le Cameroun est partie
protège également l'intégrité de personne humaine
à travers son article 440(*)
Le Cameroun a pour sa part ratifié les instruments qui
protègent l'intégrité physique de la personne humaine pour
préserver sa crédibilité internationale.41(*) D'où la
pénalisation de la torture à travers l'article 132 bis du code
pénal camerounais.
L'intégrité physique trouve une autre source de
protection juridique à travers le droit civil. En effet, le Code civil
français définit le droit à l'intégrité
physique comme un droit en vertu duquel chacun a droit au respect de son
corps.42(*) Ce droit peut
s'exprimer de façon différente selon que la personne est vivante
ou décédée.43(*)
La satisfaction des besoins fondamentaux de l'homme est elle
aussi garantie par de nombreux instruments internationaux. La Convention
relative aux droits de l'enfant dans ses articles 24 (le droit à la
santé), 26 (le droit à la sécurité sociale), 27 (le
droit à un niveau de vie suffisant), 28 (le droit à
l'éducation), protège les droits relatifs à cette
catégorie sociale. Mais, le principal instrument international
contraignant qui garantit la satisfaction des besoins fondamentaux de la
personne humaine est le Pacte international relatif aux droits
économiques sociaux et culturels (PIDESC).44(*) Il garanti notamment à tous le droit de jouir du
meilleur état de santé physique et mentale possible (article 12),
le droit à un niveau de vie suffisant (article 11). Il érige
« le droit d'être à l'abri de la faim » comme
un droit fondamental (article 11) et pose le principe de l'éducation
primaire obligatoire (article 13 al.2-a). Le PIDESC protège
spécifiquement les mères (article10 al. 2) et les enfants
(article 10 al.3). Le caractère global et général de cette
protection fait qu'elle s'étend aux personnes privées de
liberté. D'ailleurs l'article 2 alinéa 2 précise qu'aucune
situation ne saurait justifier la discrimination dans l'application des droits
qui sont énoncés dans ce texte.45(*)
D'autres instruments bien que non contraignants participent
également à la protection des personnes
incarcérées. Il s'agit pour la plupart des instruments des
droits de l'homme intervenant dans l'administration de la justice. On peut
citer entre autre l'Ensemble des règles minima pour le traitement des
détenus qui visent « à établir, en
s'inspirant des conceptions généralement admises de nos jours et
des éléments essentiels des systèmes contemporains les
plus adéquats, les principes et les règles d'une bonne
organisation pénitentiaire et de la pratique du traitement des
détenus, des principes fondamentaux relatifs au traitement des
détenus »46(*), l'Ensemble des principes pour la protection de
toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention
ou d'emprisonnement et les Principes fondamentaux relatifs au traitement
des détenus.
A la lecture des dispositions de tous ces textes, l'on
remarque que la communauté internationale, dans un souci
d'efficacité a adopté de nombreux instruments contraignants qui
mettent un accent particulier sur la protection de la dignité de la
personne humaine en général. Mais en voulant cette protection
également spécifique aux détenus, les nations unies ont
adoptées de nombreux textes à valeur déclarative,
contribuant ainsi à parsemer davantage les normes de protection de la
personne détenue.
B- La relativité dans la
protection de l'intégrité physique des personnes
détenues
La multiplicité des sources de droit contribue
également de manière assez significative à relativiser le
principe de protection de la dignité humaine pourtant clairement
posé dès le départ dans la Déclaration universelle
des droits de l'homme. En effet, l'article 6 du PIDCP, en disposant
que :
« Le droit à la vie est inhérent
à la personne humaine. Ce droit doit être protégé
par la loi. Nul ne peut être arbitrairement privé de la
vie. »,
supprime de manière à peine voilée le
caractère absolu du droit à la vie. En effet, le terme
«arbitrairement'', laisse croire qu'il peut être
porté atteinte à la vie de manière non arbitraire, au
mépris du caractère sacré de la vie humaine, par exemple
à la suite d'une décision émanant d'une juridiction
légale. Cette voie de sortie qu'offre ce texte est l'un des arguments
utilisé par certaines juridictions nationales pour justifier la pratique
de la peine de mort. Pourtant cette interprétation est manifestement
contraire à la volonté de la communauté internationale qui
entend consacrer l'interdiction absolue de supprimer la vie.
Interdiction déjà posée depuis 1948 par la DUDH et qui
attend d'être reconnue comme une norme contraignante à travers
l'entrée en vigueur du deuxième protocole facultatif du PIDCP
visant l'abolition de la peine de mort.47(*) D'autres textes se prêtent eux aussi à
une interprétation partisane en ce qui concerne la protection de la
dignité humaine. C'est le cas du code civil français. En effet,
l'article 16 alinéa 3 du Code civil français en stipule
que :
« Il ne peut être porté atteinte
à l'intégrité du corps humain qu'en cas de
nécessité médicale pour la personne ou à titre
exceptionnel dans l'intérêt thérapeutique d'autrui. Le
consentement de l'intéressé doit être recueilli
préalablement hors le cas où son état rend
nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il
n'est pas à même de consentir ».
Cette disposition protège l'intégrité
physique en ce sens qu'elle interdit les expériences scientifiques sur
autrui sans son consentement. Seulement, cette interdiction que le PIDCP pose
comme principe absolu à travers l'article 7 se trouve relativisée
d'une part par l'«exceptionnalité de l'intérêt
thérapeutique d'autrui'' et d'autre part par la possibilité
qu'offre le Code Civil de mener sur autrui de telles expériences sans
recueillir au préalable le consentement du sujet en raison de son
incapacité à l'exprimer.
L'instrument global majeur en matière de droits de
l'homme est la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme
(DUDH)48(*). La DUDH est
jugée globale en ce sens qu'elle garantit la dignité humaine
à travers le respect de l'intégrité physique de la
personne humaine et la satisfaction de ses droits sociaux, économiques
et culturels. La reconnaissance dont jouit la DUDH est aujourd'hui à ce
point généralisée qu'elle est considérée
comme obligatoire en vertu du droit coutumier international, alors qu'elle ne
l'est pas à l'origine. Elle énonce les droits de l'homme et les
libertés fondamentales auxquels tous les hommes et les femmes, partout
dans le monde, peuvent prétendre, sans discrimination.
L'intégrité de la personne humaine y est notamment
protégée dans les articles 3 et 5 traitant respectivement du
droit à la vie, et à l'interdiction de la torture et des
traitements dégradants ou inhumains. Les droits fondamentaux de l'homme
quant à eux y sont protégés à travers les articles
22 (droit à la sécurité sociale), article 25 (droit
à un niveau de vie suffisant, droit au logement, droit à la
santé), article 26 (droit à l'éducation).
Contrairement ce que pense Rogatien TEJOZIEM49(*) , la DUDH étend
même de manière assez claire cette protection de la dignité
humaine aux personnes privées de leur liberté en disposant au
premier alinéa de son article 2 :
« Chacun peut se prévaloir de tous les
droits et de toutes les libertés proclamés dans la
présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race,
de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou de toute
autre opinion, d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de
toute autre situation. »
L'expression «sans distinction aucune (...) de toute
autre situation'' est assez révélatrice du caractère
non discriminatoire des dispositions de la DUDH à l'égard des
personnes détenues en ce sens qu'elle fait renter dans le champ
d'application de ce texte toutes les couches sociologiques et les sujets de
tous les statuts juridiques. Si bien qu'en dehors des droits dont une
incarcération légale emporte déchéance, le statut
juridique des prisonniers ne saurait être invoqué comme un motif
d'exclusion de la protection internationale contre les atteintes à la
dignité des personnes détenues. D'ailleurs le
5ème principe fondamental relatif au traitement des
détenus précise que :
« Sauf pour ce qui est des limitations qui sont
évidemment rendues nécessaires par leur incarcération,
tous les détenus doivent continuer à jouir des droits de l'homme
et des libertés fondamentales énoncés dans la
déclaration universelle des droits de l'homme (...) ainsi que tous les
autres droits énoncés dans d'autres pactes des nations
unies. »
Cependant, d'autres instruments protègent
l'intégrité physique des personnes privées de leur
liberté par la satisfaction de leurs besoins fondamentaux. Mais cette
protection est encore marquée du sceau de la permissivité de ces
instruments.
Paragraphe 2 : La permissivité des
instruments spécifiques de protection de la dignité des personnes
incarcérées
La permissivité des
instruments de protection des personnes incarcérées
résulte d'une part, de l'absence de contrainte des instruments de
protection spécifique des personnes incarcérées et d'autre
part, du caractère progressif de la réalisation des droits
économiques sociaux et culturels.
A- L'absence de contrainte des instruments
de protection spécifique des personnes privées de leur
liberté
Le principe du respect de la dignité des personnes
privées de leur liberté est réitéré par de
nombreux instruments internationaux à valeur déclarative. Il
s'agit pour l'essentiel des textes adoptés par l'Assemblée
générale des Nations Unies sous la forme de
résolutions50(*) et
de ceux élaborés et approuvés par les institutions
onusiennes.51(*) Ces
textes protègent spécifiquement les personnes privées de
leur liberté.
L'Ensemble des principes pour la protection de toutes les
personnes soumises à une forme quelconque de détention ou
d'emprisonnement réaffirme, à travers les principes 1,3 et 6,
l'interdiction de la torture et des peines et traitements inhumains, cruels et
dégradants pour cette catégorie de personnes. D'ailleurs le
principe 6 de ce texte dispose clairement que :
« Aucune personne soumise à une forme
quelconque de détention ou d'emprisonnement ne sera soumise à la
torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants. Aucune circonstance quelle qu'elle soit ne peut être
invoquée pour justifier la torture ou toute autre peine ou traitement
cruel inhumain ou dégradant ».
Cependant, le texte précise que
« l'expression «peine ou traitement cruel, inhumain ou
dégradant'' doit être interprété de
façon à assurer une protection aussi large que possible contre
tous les sévices, qu'ils aient un caractère physique ou
mental(...)».52(*)
Les personnes privées de leur liberté jouissent
également de la protection internationale contre l'exploitation de
leurs corps à des fins expérimentales médicales ou
scientifiques. C'est ce qui ressort explicitement du principe 22 de ce texte
qui dispose :
« Aucune personne détenue ou
emprisonnée ne pourra, même si elle y consens, faire l'objet
d'expériences médicales ou scientifiques de nature à nuire
à sa santé. »
Les dispositions de l'Ensemble des principes pour la
protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de
détention ou d'emprisonnement sont renforcées par les Principes
fondamentaux relatifs au traitement des détenus.
Lorsque l'on considère les dates d'adoption de ces deux
textes (1988 et 1990), l'on pourrait imaginer qu'ils ambitionnent de combler
les vides laissés par les instruments de protection de
l'intégrité physique de la personne humaine
précédemment entrés en vigueur. Cependant ne disposant
d'aucune valeur contraignante, leur application dans les Etats dépend de
la volonté de ceux-ci. Cette absence de contrainte est d'ailleurs
marquée par l'utilisation du temps présent et de la voie passive
dans les dispositions pertinentes du droit international qui se veulent
coutumières.53(*)
Le premier principe fondamental relatif au traitement des détenus ne
stipule-t-il pas que :
« Tous les détenus sont
traités avec le respect dû à la
dignité et à la valeur inhérentes à l'être
humain. ».
Cette permissivité transparaît également
dans la protection des personnes privées de leur liberté contre
les diverses atteintes à leurs besoins fondamentaux.
B- La progressivité dans la
réalisation des droits fondamentaux de l'homme
Bien que les droits de l'homme soient indivisibles, les droits
économiques, sociaux et culturels connus comme droits de seconde
génération sont au centre même de l'existence humaine en ce
sens que leur réalisation implique la satisfaction des besoins
fondamentaux de l'homme et son épanouissement. Car comme le faisait
remarquer le Docteur AKONUMBO ATANGCHO,
«If one does not have shelter, he/she would certainly
not be of good health; if one's health is bad, he/she would possibly die; if
one were to be sick or were to die, one would certainly not enjoy or be in a
position to clamour for the enforcement of his/her right to vote, freedom of
expression, right to development, right to self determination, right to
education self determination, right to a clean environment and so on, in short,
his/her right to exist- right to life. In the final therefore, it seems that
some rights-socio-economic-rights such as the right to health and the right to
food, are more equal than other human rights in the sense that they condition
the enjoyment and enforcement of the others, particularly civil and political
rights and some of the third generation rights (solidarity
rights).»54(*)
L'auteur voudrait expliquer ici que les droits
socio-économiques et culturels sont aussi importants que tous les autres
droits notamment les droits civils et politiques car c'est la satisfaction des
premiers qui détermine la jouissance des seconds et donne un sens aux
droits de solidarité. Pourtant leur consécration par les
instruments internationaux semble en faire des droits de seconde zone.
Le principe de la progressivité dans la
réalisation des droits fondamentaux de l'homme est posé par
l'article 2 du PIDESC.55(*) Sa mise en oeuvre doit tenir compte des
disponibilités matérielles de l'Etat. L'utilisation de ce
principe comme conditionnalité de la réalisation des DESC offre
une excuse juridique aux gouvernants qui ne veulent pas s'investir dans la
réalisation de ces droits. Pourtant, la satisfaction des besoins
fondamentaux de l'homme est une obligation des Etats.56(*) Le principe de la
progressivité dans la réalisation des DESC constitue donc un
paravent qui à une échelle assez grande, contribue au
déni même des droits économiques sociaux et culturels
principalement en raison de la difficulté à mesurer ou
évaluer la bonne foi de l'Etat. Et les personnes privées de leur
liberté au Cameroun sont encore plus exposées que les autres
couches sociales. En effet, le contexte camerounais est marqué par la
démission de l'Etat face à son obligation de satisfaction des
besoins fondamentaux des citoyens. Par conséquent, si les citoyens
jouissants de tous leurs droits peinent à se nourrir, se loger, se
soigner et s'éduquer même en travaillant, ceux privés de la
liberté d'aller et venir et déchus sur le plan civique souffrent
encore plus de cette démission de l'Etat. Surtout qu'ils sont le plus
souvent dans l'incapacité matérielle et intellectuelle de faire
valoir ces droits.
Section 2 : La minoration des garanties
procédurales et des règles d'incarcération
L'humanisation des lieux de détention
trouve une autre entrave dans la méconnaissance des principes et des
normes consacrés par les instruments internationaux et qui sont
universellement admis parce que garantissant le respect de la dignité
humaine des personnes incarcérées. Il s'agit des garanties
procédurales (paragraphe 1) et des règles relatives à
l'incarcération (paragraphe 2).
Paragraphe 1er : La
méconnaissance des garanties procédurales
Le respect des droits de l'homme suppose aussi la
reconnaissance et la garantie du respect de tous les droits inhérents
à la personne humaine. La méconnaissance de certains d'entre eux
altère l'essence même de l'homme.57(*) Bien que les textes internationaux aient
codifiés certains droits de l'homme sous la forme de garanties
procédurales judiciaires, le contexte camerounais reste toujours
marqué par « un décalage entre l'intention et les
résultats, entre la théorie et la pratique »58(*). La violation du principe de
la présomption d'innocence et le dénie des droits de la
défense contribue, certes de manière indirecte, mais de
façon significative tout de même, à déshumaniser les
lieux de détention au cameroun.
A- Le non respect du principe de la présomption
d'innocence
La présomption d'innocence est un principe de
droit internationalement59(*) reconnu et en vertu duquel toute personne
soupçonnée d'un chef d'accusation est présumée
innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit légalement
établie au cours d'un procès durant lequel toutes les garanties
nécessaires à sa défense lui seront assurées. C'est
un droit fondamental en matière pénale qui vise à assurer
à l'accusé que sa culpabilité sera prouvée
au-delà de tout doute raisonnable.60(*) A l'échelle internationale, ce principe est
codifié dans l'article 11 de la DUDH61(*) et l'article 14 du PIDCP62(*). La Convention internationale
relative aux droits de l'enfant quant à elle, enjoint aux Etats de
veiller à ce que tout enfant suspecté ou accusé
d'infraction à la loi pénale ait au moins le droit entre autre,
à la garantie de la présomption d'innocence jusqu'à ce que
sa culpabilité soit légalement établie.63(*)
Au niveau national, la présomption d'innocence est un
principe constitutionnel. La Loi n° 96-06 du 18 janvier 1996 portant
révision de la Constitution du 02 juin1972 l'exprime clairement dans son
préambule64(*) en
ces termes :
« Tout prévenu est présumé
innocent jusqu'à ce que sa culpabilité soit établie au
cours d'un procès conduit dans le strict respect des droits de la
défense »
La loi n° 2005/007 du 27 Juillet 2005 portant Code de
procédure pénale réitère ce principe et
précise même la constance de son application tout au long du
procès pénal, c'est-à-dire de la poursuite jusqu'au
jugement en passant par l'instruction.65(*)
La manifestation la plus frappante de la violation du
principe de la présomption d'innocence est la détention
préventive. C'est une mesure privative de liberté prise soit par
le Procureur de la République dans le cadre de la procédure de
flagrant délit, soit par le magistrat instructeur à l'information
judiciaire. Bien que pouvant se justifier par plusieurs raisons liées
pour les unes à l'intérêt social et pour les autres,
à la bonne administration de la justice66(*), le résultat de cette mesure est toujours
effroyable.67(*) C'est
d'ailleurs la principale cause du surpeuplement carcéral au
Cameroun;68(*)
Le PACDET (programme d'amélioration des conditions de
détention et respect des droits de l'homme)69(*) en présentant le
contexte de la mise en oeuvre de la deuxième phase de ce projet dans
l'annexe II de la convention de financement, indique un taux de surpopulation
carcérale de 400 pour cent dans l'ensemble des 70 centres
pénitentiaires que compte le pays, avec un taux de détention
provisoire global de l'ordre de 60 pour cent et 70 pour cent lorsqu'on ne
tient compte que des 10 prisons centrales. Ces statistiques justifient la
réflexion de Rogatien TEJIOZEM qui pense que la détention
préventive est une mesure « attentatoire aux garanties
des droits de la personne devant la justice dans ce sens qu'elle est contraire
à la présomption d'innocence ».70(*) Quand on sait que la privation
de liberté dans la vie d'un individu peut avoir des conséquences
fâcheuses, surtout lorsque après une longue détention
celui-ci est déclaré non coupable, l'on pourrait penser avec cet
auteur que « la détention préventive, utilisée
de manière abusive, constitue une atteinte aux droits de
l'homme».71(*)
Dans sa communication n° 39/90, la Commission africaine
affirme qu'une «détention fondée sur la seule suspicion
qu'un individu pourrait être à l'origine des troubles est une
violation du droit à la présomption
d'innocence.»72(*). En effet, l'intéressé (Abdoulaye
Mazou) qui avait été arrêté et condamné pour
subversion après le coup d'Etat du 06 avril 1984 a été
gardé en détention jusqu'en Mai 1990 alors qu'il devait
être libéré au mois d'Avril de la même année.
L'Etat Camerounais craignant ainsi que la libération de
l'intéressé pourrait entraîner des troubles à
l'ordre public.
Mais la pratique judiciaire au Cameroun se caractérise
aussi par « les habitudes de reniement du principe du droit à
un procès équitable dans un délai
raisonnable».73(*)
B- Le reniement des droits de la défense
Les droits de la défense regroupent un certain nombre
de droits permettant à toute personne de se protéger contre la
menace d'un procès pénal. Le respect des droits de la
défense est un principe de droit international, qui vise la recherche
d'une relation équitable entre l'accusation et la
défense74(*).
L'assistance
et la représentation d'un avocat,
l'impartialité
et l'indépendance du tribunal,
l'obligation
de célérité du tribunal, le caractère raisonnable
des délais de jugement, le débat contradictoire,
l'égalité des armes, l'exercice des recours etc... sont autant de
droits qui rentrent dans le principe du respect des droits de la défense
que les instruments internationaux ont codifié à travers
l'article 14 du PIDCP, l'article 10 de la DUDH, l'article 40 de le Convention
relative aux droits de l'enfant et par les 37ème et
38ème principes de l'Ensemble des principes pour la
protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de
détention ou d'emprisonnement. Au plan interne, le respect des droits de
la défense est dans l'ensemble assez bien protégé dans les
textes depuis l'adoption et l'entrée en vigueur du code de
procédure pénale. Mais dans la pratique, le droit à
un procès équitable qui intègre toutes les garanties
ci-dessus énumérées relève de la pure fiction. Si
la jurisprudence interne est quelque peu timide dans cette matière, la
jurisprudence de la Commission africaine nous offre des situations assez
édifiantes en ce qui concerne le respect des droits de la
défense. Concernant le droit de choisir librement son avocat, la
commission l'érige en un droit « fondamental pour la
garantie d'un procès équitable »75(*). Elle précise
même que « reconnaître au tribunal le droit de veto
sur le choix d'un avocat constitue une violation inacceptable de ce
droit ».76(*) Dans sa résolution relative au droit de
recours et à un procès équitable, la commission en vue de
renforcer le droit à la défense tient à préciser au
paragraphe 2 (e) (i) que : « dans la
détermination des charges retenues contre elle, toute personne a droit
en particulier (i)... à communiquer confidentiellement avec un
avocat de son choix »77(*). Le déni de ce droit constituant une violation
de l'article 7.1 (c).78(*)
Une justice de qualité doit répondre à un
critère fondamental qui est celui de la célérité
des procédures. La durée raisonnable de la procédure
préserve la crédibilité de la justice et témoigne
de son efficacité.79(*) La Commission, statuant sur le temps
écoulé depuis l'arrestation des détenus souligne
que :
« Dans une affaire criminelle,
spécialement, lorsque les accusées sont en détention
préventive, le procès doit se faire le plus rapidement possible,
afin de minimiser les effets néfastes sur la vie d'une personne qui, en
fin de compte, peut être innocent ».80(*)
L'obligation de célérité dans les
procédures pénales est donc en définitive une exigence
d'un procès juste et une garantie des droits de la défense.
Le droit d'être jugé par une juridiction
impartiale concourt à la sauvegarde du droit à un procès
équitable. La Commission africaine des droits de l'homme et des peuples
dans sa résolution sur le Nigéria adoptée à la
17ème session, a indiqué que « la
limitation de l'indépendance du pouvoir judiciaire et la mise sur pied
de tribunaux militaires sans indépendance ni règles de
procédure pour juger les personnes soupçonnées
d'être des opposants du régime militaire »
comptait parmi les graves atteintes ayant cours dans ce pays.81(*)
La méconnaissance des garanties procédurales
contribue donc, à n'en point douter, à la dégradation des
conditions de détention dans ce sens qu'elle accroît la population
carcérale. Le caractère systématique de la
détention provisoire et le reniement des droits de la défense y
contribuant pour une grande part. Pourtant l'Etat camerounais, pour avoir
ratifié les instruments internationaux qui consacrent ces principes
devrait être le garant des droits qui en découlent. Ce qui
légitime la pensée d'Antoinette EKAM d'après qui
« en tant que garant de l'ordre judiciaire, l'Etat est
responsable du mauvais fonctionnement des institutions
judiciaires ». Mais la responsabilité de l'Etat est
aussi engagée dans l'application des règles en matière
d'incarcération.
Paragraphe 2nd : L'inobservation des
règles en matière d'incarcération
La privation de liberté obéit à des
règles bien précises, surtout en matière
d'incarcération. Elle doit prendre en compte la sécurité
des personnes incarcérées et le caractère
vulnérable de certaines couches.
A- La séparation des détenus en fonction
de leur statut juridique
La séparation des personnes privées de leur
liberté en fonction de leur statut juridique vise principalement
à éviter que des personnes suspectes dont la privation de
liberté s'avère pourtant nécessaire pour le besoin de
protéger leur propre vie ou de ne pas entraver la manifestation de la
vérité au cours de l'enquête ne souffrent pas
particulièrement du fait de leur incarcération. Cette mesure
limite les frustrations qui pourraient naître d'une privation de
liberté injuste en ce sens qu'elle prévoit un traitement
spécifique à chaque catégorie de détenus, qu'il
soit prévenu, contraignable ou condamné.
L'article 9 (3) du Code de procédure pénale
camerounais a définit le prévenu comme tout
individu susceptible d'être traduit devant une juridiction pour
répondre d'une contravention ou d'un délit.82(*) Cette définition semble
quelque peu partielle en ce sens que non seulement elle ne prend pas en compte
les détenus provisoires incarcérés pour des cas de crime,
mais elle ne spécifie pas non plus le lieu de la détention. La
84ème règle de l'Ensemble des règles minima
pour le traitement des détenus nous donne une définition plus
exhaustive de la notion de prévenu. Selon ce texte,
« tout individu arrêté ou incarcéré en
raison d'une infraction à la loi pénale qui se trouve
détenu soit dans les locaux de la police soit dans une maison
d'arrêt, mais n'a pas encore été jugé est
qualifié de prévenu»83(*), à la
différence du condamné dont le jugement est
déjà définitif. Le contraignable est
à la base un condamné mais qui, en raison de son
insolvabilité, ne peut satisfaire les mesures de restitution ou les
condamnations pécuniaires ordonnées par une juridiction
répressive contre lui.84(*) La condamnation initialement pécuniaire se mue
donc en une mesure de privation de liberté : c'est la contrainte
par corps. Elle ne s'exerce ni contre les personnes âgées de moins
de 18 ans ou de plus de 60 ans, ni contre les femmes enceintes85(*).
La séparation des détenus est donc un moyen
d'adapter à chaque catégorie de détenu un traitement en
fonction de son statut juridique. La 89ème règle de
l'Ensemble des règles minima pour le traitement des détenus
dispose même à cet égard que :
« Les personnes emprisonnées pour dettes
ou condamnées à une autre forme d'emprisonnement civil doivent
être séparées des détenus pour infraction
pénale »
Le PIDCP souligne dans son article 10 la
nécessité de séparer les condamnés des
prévenus et de traiter ces dernier en tenant compte de leur situation de
personnes non condamnées. Cette mesure est encore plus impérative
en ce qui concerne la séparation des jeunes prévenus des
adultes86(*). D'ailleurs
la Convention relative aux droits de l'enfant précise que
« dans toutes les décisions qui concernent les enfants
(...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une
considération primordiale ». Le principe, de la
séparation des détenus en fonction de leur statut juridique
trouve également un écho favorable dans l'Ensemble des
règles minima pour le traitement des détenus à travers les
règles 8 et 85. Ces règles consacrent la séparation des
détenus « en fonction de leur age, leur sexe, de
leurs antécédents, des motifs de leur incarcération et des
exigences de leur traitement».
Au Cameroun, la sélection et la répartition des
détenus dans les locaux pénitentiaires sont prévues
à l'article 20 du décret N° 92/052 du 27 mars 1992. Ce texte
prévoit la séparation des personnes prévenues des
condamnées, les hommes des femmes, l'affectation de locaux
spéciaux aux condamnés à mort, aux détenus
dangereux, un quartier spécial réservé aux
éléments des forces de maintien de l'ordre. Mais la
surpopulation carcérale a conduit à la fusion de tous ces
référentiels de spécialisation de l'incarcération
des détenus, au point que cet article est soit ignoré, soit
partiellement appliqué87(*). Ce qui pourrait dans une certaine mesure justifier
la réflexion de Thierry Vincent selon laquelle« En
Afrique, la pauvreté et la faiblesse des budgets des Etats,
ajoutées à la prise de conscience relativement récente de
la nécessité de respecter la personne humaine, fut-elle
délinquante ou criminelle, font que la vétusté,
l'insalubrité, et les mauvais traitements sont la règle dans les
centres de détention»88(*).
Le Cameroun ne fait pas exception à ce constat.
L'influence du contexte global de pauvreté est à l'origine de
nombreux dérapages dans les milieux pénitentiaires. Le
défaut d'investissement rendant pratiquement impossible l'application
des mesures internationalement admises et qui lui sont opposables. Les
aménagements de quartiers distincts pour prévenus, contraignables
et condamnés devenant impossible du fait de la surpopulation
carcérale. Pourtant, « Les personnes emprisonnées
pour dettes ou condamnées à une autre forme d'emprisonnement
civil doivent être séparées des détenus pour
infraction pénale ».89(*)
De manière générale, les prisons
camerounaises sont caractérisées par leur étroitesse et
leur engorgement. La plupart d'entre elles sont logées dans de vieilles
bâtisses de récupération héritées de
l'époque coloniale et qui ont subies quelques aménagements. Cette
exiguïté rend impossible l'application des mesures de
sécurité et de stricte séparation des différentes
catégories de détenus. Pour exemple aucun de ces
établissements ne dispose de cellule individuelle. Les détenus
sont logés dans des dortoirs accueillants des dizaines voire des
centaines de personnes. A la prison principale d'Edéa, la plus
hygiénique des cellules accueille 10 personnes dans un réduit
d'environ trois mètres sur cinq. C'est le «HILTON'', du nom d'un
hôtel huppé de la capitale politique. Dans la prison centrale de
Nkodengui, le «KOSOVO'' est un quartier hétéroclite. Les
condamnés, prévenus et contraignables s'y côtoient et sont
logés dans les mêmes dortoirs. Ce qui rend inévitables les
violences des prisonniers sur leurs co-détenus. La séparation en
fonction du type de traitement suivi par les détenus est elle aussi
inopérante à la prison centrale de Nkodengui. Le quartier 3
réservé aux malades accueille des personnes présentant des
symptômes de maladies différentes. Les blessés par armes
à feu y séjournent avec certains tuberculeux, malades de sida et
d'autres personnes potentiellement dangereuses parce qu'atteintes de maladies
contagieuses, au mépris des règles minima pour le traitement des
détenus qui dispose pourtant que :
« Lorsqu'on recourt à des dortoirs, ceux-ci
doivent être occupés par des détenus soigneusement
sélectionnés et reconnus aptes à être logés
dans ces conditions ».90(*)
Certes il existe un quartier de mineurs dans la
quasi-totalité des prisons visitées, mais force est de
reconnaître que la porosité de ses limites ne permet pas de
parler d'une véritable séparation entre mineurs et adultes. Ils
partagent la même cour, les mêmes repas et les mêmes loisirs.
Ce contact permanent et presque incontrôlé des mineurs et des
adultes facilite la corruption de la jeunesse carcérale que les textes
internationaux entendaient protéger. Mais au-delà de l'âge
et du statut juridique, le genre est aussi un facteur de séparation des
détenus.
B- La séparation des détenus en fonction
du genre
Les femmes détenues sont plus vulnérables du
fait même de leur constitution physique plus fragile que celle de l'homme
et de la privation de la jouissance d'une liberté fondamentale qu'est la
liberté d'aller et de venir. La séparation des personnes
privées de leur liberté en fonction du sexe se fonde donc sur un
certain nombre d'instruments internationaux qui ont consacrés des
considérations culturelles universellement reconnues. Le plus expressif
d'entre eux à ce sujet est l'Ensemble des règles minima pour le
traitement des détenus qui dispose que :
« Les hommes et les femmes doivent être
détenus dans la mesure du possible dans des établissements
différents ; dans un établissement recevant à la fois
des hommes et des femmes, l'ensemble des locaux destinés aux femmes doit
être entièrement séparé ».91(*)
L'existence d'une prison spéciale pour femmes à
Mfou et d'un quartier exclusivement réservé aux personnes de ce
sexe dans les prisons centrales de Douala et de Yaoundé occulte quelque
peu la réalité de l'application de ce principe. En règle
générale, dans les différentes prisons camerounaises, la
pratique est tout à fait autre. Bien que l'on y retrouve des dortoirs
pour femmes exclusivement, ces dortoirs côtoient ceux des hommes. Souvent
avec un mur mitoyen. Par conséquent les détenus des deux sexes
partagent le même environnement avec tous les risques inhérents
à cette situation.
Plus grave, dans les commissariats de police et les
unités de gendarmerie, les chambres de sûreté sont
constituées d'une seule pièce. Lorsque privés de
liberté à la suite de l'ouverture d'une enquête, les hommes
et les femmes s'y entremêlent dans une promiscuité indescriptible.
Les cas de viol n'y sont pas rares surtout avec la notion de «chef
de cellule'' qui souvent, à défaut d'argent au moment de
l'entrée en cellule, se fait servir en nature auprès des
gardées à vue. Situation d'autant plus grave que certains
responsables de ces unités préfèrent passer ces cas sous
silence pour préserver leurs carrières professionnelles.
L'application mitigée des principes de protection des
droits physiques des personnes détenues et la méconnaissance des
garanties procédurales et des règles d'incarcération
limitent l'application des mesures existantes visant à humaniser les
conditions de détention au cameroun. Cependant, si « en
Afrique, la pauvreté et la faiblesse des budgets des Etats,
ajoutées à la prise de conscience relativement récente de
la nécessité de respecter la personne humaine, fut-elle
délinquante ou criminelle, font que la vétusté,
l'insalubrité, et les mauvais traitements sont la règle dans les
centres de détention»92(*), le cadre juridique existant ne favorise pas non plus
la protection des droits des personnes appartenant à cette
catégorie sociale.
Chapitre 2 : UNE POLITIQUE JUDICIAIRE PEU
FAVORABLE A LA PROTECTION DES PERSONNES INCARCEREES
L'humanisation des lieux de
détention au Cameroun est une question épineuse mais qui a
pendant très longtemps été exclue du débat public.
Pourtant, ce sujet ne manque pas d'intérêt, soulevant des aspects
relevant de l'intérêt général. En effet, la bonne
administration de la justice permet d'éviter
l'engorgement des prisons. Elle offre aux personnes privées de leur
liberté des moyens de recours contre l'administration en
général en cas de violation de leurs droits en même temps
qu'elle met en place des mécanismes judiciaires permettant aux personnes
incarcérées d'assurer leur défense relativement au motif
de leur incarcération. La protection des personnes sous mains de
justice nécessite donc la mise en place d'un cadre judiciaire
crédible garant des droits relatifs à l'exercice de la justice
pour les personnes détenues, mais aussi d'un cadre répressif
adéquat qui contribuerait à décourager les atteintes aux
droits des personnes incarcérées. Cependant, le cadre judiciaire
camerounais est encore marqué par une timide répression des
atteintes à la dignité humaine dans les lieux de détention
(section 2) et par l'inadaptation de l'institution judiciaire à
l'exercice des droits processuels des personnes privées de leur
liberté (section 1).
Section 1 : L'inadaptation de
l'institution judiciaire à l'exercice des droits processuels des
personnes privées de liberté
« Les droits
processuels sont les droits dont l'exercice est indispensable à
l'individu lorsqu'il fait face à l'appareil judiciaire. Ces
droits concourent à assurer le bon déroulement de la justice et
à garantir à chaque individu le respect de ses droits face au
rouleau compresseur que peut devenir la justice».93(*) Il s'agit des principes qui
garantissent à l'être humain des voies de recours en cas
d'atteinte à ses droits. Ce qui « implique d'une part le
droit de saisir les juridictions compétentes et d'autre part le droit
à un procès équitable par une juridiction
indépendante et impartiale »94(*) en cas de violation d'un de ses droits. Le
statut de personne incarcérée n'emportant pas privation de
l'exercice des droits dits processuels, les personnes privées de leur
liberté se retrouvent pourtant très souvent victimes du
fonctionnement tatillon de l'appareil judiciaire ou même d'une certaine
discrimination relative à leur statut. Ces dysfonctionnements
s'observent à travers un difficile accès à la
(paragraphe1) et certaines pratiques préjudiciables aux détenus
(paragraphe2).
Paragraphe1 : Un difficile
accès à la justice
« L'accès à la justice pour le
justiciable camerounais suppose que ce dernier à non seulement
accès aux tribunaux, mais aussi et surtout qu'il a accès au juge
et au droit.»95(*)
Seulement, si physiquement les tribunaux sont relativement faciles
d'accès, l'administration d'une bonne justice dans un contexte de
privation de liberté quant à elle, reste minée par le
caractère restrictif des voies de recours et l'impossibilité
matérielle pour les détenus d'assurer leur défense.
A- Le caractère restrictif des voies de
recours
L'accès à la justice se manifeste par la
possibilité offerte aux justiciables de saisir les juridictions soit
pour faire appel d'une décision, soit pour alléguer des atteintes
à leurs droits et libertés commises par des tiers ou par
l'administration. La possibilité des recours est garantie aux citoyens
en général par l'article 8 de la DUDH, les articles 9 et 14 du
PIDCP, et aux personnes privées de leur liberté en particulier
par les 35ème et 36ème règles de
l'Ensemble des règles minima pour le traitement des détenus. Mais
dans un cas comme dans l'autre, les recours sont assez bien encadrés et
leur mise en oeuvre obéit à une conditionnalité qui en
limite l'usage et favorise du même coup le surpeuplement carcéral
par leur caractère sélectif. Ainsi, les critères de
compétence de l'institution choisie, la nécessité de
présenter des preuves tangibles des atteintes dénoncées,
les délais de saisine, l'intérêt à agir, et les
contraintes financières, sont tous applicables dans la formulation des
recours internes. Et c'est précisément ces multiples conditions
qui rendent ces recours inopérants, c'est à dire inefficaces et
indisponibles. Pour la Commission africaine des droits de l'homme,
« Un recours est considéré disponible lorsque le
plaignant peut y accéder sans entrave ; il est jugé efficace
s'il offre une chance de succès et si l'on trouve qu'il est capable de
réparer le préjudice ».96(*) Dans l'affaire Jean
SIMBARAKIYE, la Commission précise que :
« L'existence d'une voie de recours interne doit
être à la fois théorique et pratique et, à
défaut de remplir cette condition, la voie de recours en question ne
serait ni disponible ni efficace. Tel est le cas lorsque pour des raisons
objectives le plaignant ne peut pas aller vers les tribunaux de l'Etat mis en
cause dans les conditions lui garantissant un procès
équitable.»97(*)
Au Cameroun, le contexte global de
pauvreté couplé à l'ignorance des populations rend
difficile, la mise en oeuvre des recours. Cette situation est encore plus
criarde dans un contexte de privation de liberté. En effet, très
souvent délaissés par leurs familles, la majorité des
détenus ne survie que grâce aux dons de la société
civile. La défaillance de l'administration pénitentiaire
étant quasiment généralisée. Ne pouvant ni manger
à leur faim, ni se soigner convenablement, ni même s'habiller
décemment, il va de soit que les détenus soient incapables de
s'acquitter des frais parfois exorbitants nécessaires à la mise
en oeuvre des recours surtout lorsqu'il faut faire appel d'une décision
de justice les concernant, de même qu'ils sont incapables de se payer les
services d'un avocat. La conséquence logique de cet état de chose
étant l'expiration des délais de saisine et
l'impossibilité de rassembler les preuves tangibles qui prouvent la
véracité des dénonciations alléguées. Ainsi,
bien que théoriques, les recours sont difficilement mis en oeuvre dans
la réalité quotidienne. Et c'est à juste titre que le
professeur Bernard-Raymond GUIMDO note que les obstacles de fait ou de droit,
matériels, procéduraux, financiers, structurels et temporels
insurmontables ou déraisonnables sont aussi de nature à rendre
inopérantes, les voies de recours pourtant nécessaires à
la protection des droits des personnes incarcérées.98(*) Il préconise pour
pallier cette situation une « proximité
géographique et technique entre le justiciable et le juge,
proximité sans laquelle le droit d'accès au juge ne remplirait
pas toute sa fonction ».99(*)
Les recours internationaux demeurent une option pour les
citoyens dont les droits ont été violés. Cependant, ils
restent subordonnés à l'épuisement des voies de recours
internes, au respect d'un délai raisonnable pour la saisine de
l'instance internationale et à l'interdiction des recours
parallèles. Conditions encore plus contraignantes que celles qui
régissent les recours internes.
B- L'impossibilité
matérielle des détenus à assurer leur défense
Le droit d'accès au juge que Frédéric
FOKA présente également comme le droit à un
tribunal100(*) est
« le premier des droits des individus, indispensable, essentiel,
primordial, à l'effectivité des
droits ».101(*)Il est consacré par les instruments
internationaux à travers l'article 10 de la DUDH, l'article 14 du PIDCP
notamment aux points b, d et e de l'alinéa 2, et la
35ème règle de l'Ensemble des règles minima
pour le traitement des détenus.
Au plan régional, c'est l'article 7 de la Charte
africaine des droits de l'homme et des peuples du qui consacre le droit
d'accès au juge.
A l'échelle nationale, La Constitution de janvier 1996
garantit dans son préambule le droit d'accès au juge en stipulant
que :
« La loi assure à tous les hommes le
droit de se faire rendre justice ».
L'objectif premier des personnes incarcérées est
d'assurer leur défense afin de pouvoir retrouver la liberté le
plus tôt possible. Pour cela, dans le contexte camerounais, un suivi
permanent des dossiers est nécessaire au niveau des juridictions et
même auprès des enquêteurs dans les commissariats de police
et les brigades de gendarmerie. L'exercice du droit d'accès à la
justice est de ce fait limité par l'impossibilité
matérielle des personnes privées de leur liberté de se
défendre en accédant au juge, ou aux informations relatives
à la procédure encourue, avec pour conséquence, un
allongement inutile de la durée de la détention
préventive, l'impossibilité de faire appel et par ricochet, le
surpeuplement carcéral.
Dans les unités de police et de gendarmerie, il n'est
pas rare qu'un gardé à vue soit oublié dans les cellules.
Ne pouvant pas lui-même se manifester auprès de l'enquêteur,
parce que n'ayant pas accès à lui à partir de son lieu
d'incarcération, il est abandonné à lui-même,
surtout si aucun de ses proches ne s'intéresse à cette
procédure. La situation dans les centres pénitentiaires est
encore plus préoccupante. Ces structures d'incarcération ne
disposant pas de service et de personnel affecté à cette
tâche, les personnes incarcérées sont très souvent
oubliées dans leur détresse. A la prison centrale de kondengui
par exemple, une fois dans l'enceinte, les seules informations qu'ont les
pensionnaires sur l'évolution de la procédure ouverte contre eux
se limitent à l'appel que les gardiens de prisons font à leur
retour du parquet chaque jour pour prévenir certains prisonniers de leur
transport vers le tribunal le jour suivant. Au point que même lorsque les
détenus disposent de nouvelles informations susceptibles
d'éclairer les magistrats dans la recherche de la vérité,
celles-ci ne peuvent leur être communiquées. Ce sont les
magistrats qui décident de qui ils voient et quand ils les voient.
La formulation des recours contre les décisions de
justice déjà prononcées est elle aussi un véritable
parcours du combattant que les personnes incarcérées ne peuvent
malheureusement pas engager en raison de leur incarcération, de
l'inaccessibilité des juges et d'une absence d'assistance judiciaire.
Cette situation est d'autant plus grave que la pratique des enquêtes dans
les unités et les juridictions est telle que c'est le mis en cause qui
apporte la preuve de son innocence. Dès lors il est évident que
lorsqu'elle est privée de sa liberté, réunir de telles
preuves devient utopique pour la personne incarcérée surtout
lorsqu'elle ne peut se payer les services d'un avocat et qu'aucun ne lui est
commis d'office. Pourtant, « un avocat constitue un
élément déterminant du droit d'accès au
juge »102(*). En tant que praticien du droit, l'avocat veille
à la régularité de la procédure ouverte contre son
client, lui fournit des informations sur l'évolution de la
procédure, sert d'interface entre la personne incarcérée
et le monde extérieur et peut même formuler des recours dans son
intérêt lorsque les formalités de saisine sont suffisamment
flexibles pour le lui permettre étant entendu que « la
possibilité de relever appel d'une décision de justice devant un
tribunal de juridiction supérieure est l'essence même du droit
d'accès au juge. »103(*)
L'une des entraves à l'humanisation
des lieux de détention au Cameroun est sans nul doute la
difficulté d'accès à la justice, en ce sens que
l'incapacité des détenus à assurer leur défense et
le caractère inopérant des voies de recours contribuent au
surpeuplement carcéral. Pourtant à la suite des textes
internationaux, monsieur Frédéric FOKA pose comme socle de la
protection des droits humains, le droit d'accès au juge ou le droit
à un tribunal,104(*) en même temps que Evelyn ANKUMAH stigmatise
les entraves financières à l'exercice du droit à la
défense compte tenu de la pauvreté et de l'analphabétisme
des masses populaires africaines.105(*)
Si le difficile accès à la justice
témoigne de l'inadaptation de l'institution judiciaire à
l'exercice des droits processuels des citoyens en général et des
personnes incarcérées en particulier, certaines pratiques
judiciaires participent elles aussi au discrédit de cette
institution.
Paragraphe2 : Les pratiques judiciaires
préjudiciables aux détenus
Ce sont des usages qui portent atteinte aux
droits des détenus mais qui sont rendus banals du fait de leur
caractère répétitif. Ces pratiques se déclinent
essentiellement en des lenteurs judiciaires et dans le caractère
systématique de la privation de liberté dans l'administration de
la justice.
A- La systématisation
de la privation de liberté
Le juge d'instruction, le Procureur de la République et
l'officier de police judiciaire disposent des pouvoirs légaux de
privation de liberté. Le code d'instruction criminelle
n'énumère aucun critère objectif dans l'usage de ce
pouvoir discrétionnaire par le Procureur de la République, tout
comme une totale liberté d'appréciation est laissée au
magistrat instructeur lorsqu'une information judiciaire est ouverte.106(*) La détention
préventive se justifie soit par les nécessités de
l'instruction, soit à titre de mesure de sûreté ;
C'est-à-dire, dans le but d'empêcher une concertation frauduleuse
entre les complices, de conserver les preuves, de parvenir à la
manifestation de la vérité ou bien dans le dans le but de mettre
fin à l'infraction, de prévenir son renouvellement ou de
maintenir la personne à la disposition de la justice. En principe donc,
toute personne faisant l'objet d'une information judiciaire ou à
l'encontre de laquelle des mesures de sûreté sont
édictées peut être astreinte à la détention
préventive. Cependant l'article 17 du code d'instruction criminelle y
apporte des restrictions relatives à l'âge en proscrivant des
poursuites contre les mineurs de 14 à 18 ans pour flagrant délit
et par voie de citation directe. Ce qui rend obligatoire l'information
judiciaire pour les délinquants de cette tranche d'age. De plus, le
décret du 30 novembre 1928 instituant les juridictions spéciales
et le régime de liberté surveillée en France exclut toute
forme de détention préventive pour les mineurs de 10 ans, la
tolère pour les mineurs de 10 à 14 ans seulement en cas de crime
de sang, l'admet pour les mineurs de 14 à 18 ans uniquement dans des
circonstances exceptionnelles. Mais dans la pratique, les juges d'instruction y
font systématiquement recours dès lors qu'une information
judiciaire est ouverte au point que l'information judiciaire renvoie
très souvent dans le contexte camerounais à la mise en
détention provisoire. Le comité ad hoc chargé de
l'élaboration d'une nouvelle politique pénitentiaire et de la
réforme du système carcéral dans son document
intitulé «politique pénitentiaire et
stratégie de réforme du système
carcéral'' note bien cette propension à la
systématisation de la privation de liberté dans l'administration
de la justice. Le comité constate que :
« Le recours à la privation de
liberté comme moyen privilégié de garantie d'une bonne
administration de la justice pénale, même pour les infractions
dont les auteurs ne présentent pas toujours de graves menaces pour la
paix publique et la sécurité de la société,
débouche inéluctablement sur la systématisation et le
développement d'une tendance particulièrement répressive
du système pénal camerounais. »107(*)
Comme cela ressort dans le tableau N°1, l'usage de la
détention préventive ou provisoire s'est banalisé à
un tel point que certains auteurs n'ont pas hésité à dire
qu'au Cameroun la détention est le principe et la liberté
l'exception.108(*)
Pourtant, le professeur Adolphe MINKOA SHE soutient qu'« un
système pénal respectueux des droits fondamentaux doit avoir
à coeur de donner à la détention préventive un
caractère exceptionnel, en prévoyant limitativement les cas
où elle est possible et en organisant un contrôle efficace de la
motivation de la décision de mise en
détention.»109(*) Cette propension à l'intensification de
l'usage de la détention préventive est encore plus
prononcée dans les juridictions militaires. Le comité observe
d'ailleurs que :
« Les titres de détention
délivrés par les autorités militaires et qui, dans les
prisons comme Garoua et Bafoussam tout particulièrement conduisent
à de véritables crises dans la gestion des détentions
préventives, traduisent à souhait, la tendance du juge
camerounais à recourir à la privation de liberté comme
mode privilégié de lutte contre la délinquance et partant
de la criminalité. »110(*)
Les commissariats de police et les brigades de gendarmerie ne
sont pas en marge de cette lutte contre la délinquance même
primaire par la privation de liberté. En effet, les officiers de police
judiciaire usent et abusent du pouvoir de garde à vue pourtant
déjà bien encadré par le code de procédure
pénale. Situation d'autant plus grave que leurs victimes ignorent dans
la plupart des cas les dispositions légales qui encadrent les mesures de
garde à vue et par conséquent ne peuvent initier des recours pour
atteinte à leurs droits. C'est ainsi par exemple que la garde à
vue est utilisée comme moyen de pression sur les justiciables pour
régler des affaires relevant des tribunaux civils. Dans son rapport
relatif à la visite des centres de détention de Yaoundé en
décembre 2008, la Commission nationale des droits de l'homme et des
libertés confirme « de nombreux cas de garde à vue
à l'occasion du règlement des affaires purement
civiles » comme c'est le cas au commissariat de
sécurité publique de Mendong.111(*) Les magistrats eux aussi font recours à
cette pratique sinon comment justifier qu'une mineure de 20 ans soit
emprisonnée pour non paiement d'une amende de 20.000frs cfa.112(*) Il en est de même de
telles mesures prises à l'encontre des personnes justifiants d'un
domicile connu, d'un emploi permanent et pour des motifs relevant du domaine de
la contravention ou des délits mineurs.
B- La lenteur des
procédures judiciaires
Selon sa durée, la détention
provisoire apparaît comme un facteur aggravant de la
déshumanisation des lieux de détention en ce sens qu'elle
augmente considérablement la population carcérale. En effet selon
une étude conduite en 2000, 17,7% des prévenus subissent une
détention préventive de moins d'un mois, 45,67% sont
détenus pendant plus de cinq mois parmi lesquels 23,7% pendant plus d'un
an.113(*) Le temps qui
s'écoule entre la délivrance du titre de détention
provisoire et la première rencontre avec le magistrat instructeur est
parfois anormalement long. Dans certains cas, il va même au-delà
de deux ans. Le tableau N° 2 donne une assez bonne lisibilité de la
détention préventive dans les centres pénitentiaires
camerounais. Il révèle un taux de détention
préventive de près de 15% pour une durée comprise entre 12
et 24 mois. Et près de 9% de détention préventive dont la
durée excède 24 mois, donc largement au-delà des
dispositions du code de procédure pénale.114(*)En cause, des renvois
excessifs qui freinent l'évolution des procédures et la non,
exécution des diligences judiciaires.115(*) Le défaut d'expertise, le défaut de
conseil, l'absence de la partie civile sont autant de diligences qui motivent
les renvois. La mission d'évaluation du projet PACDET observe
que« la présence des témoins ou des parties civiles
est aléatoire. Les tribunaux consacrent au moins 3 à 4 audiences
à la citation de la partie civile ou des témoins, ce qui est
excessif, alors que la procédure d'instruction est
écrite. »116(*) La commission nationale des droits de l'homme et des
libertés signale même un cas de trente renvois sans ouverture de
dossier.117(*)Mais les
lenteurs des procédures judiciaires pourraient également
être imputables aux retards dans la transmission des pièces et des
dossiers de procédures. La mission note pour le déplorer que
« les pertes de dossiers sont régulières, les
méthodes de classement étant archaïques et la tenue des
archives rendue difficile par des locaux et du matériel
inadéquat. »118(*) Pourtant les sollicitations de l'institution
judiciaire s'accroissent au fil du temps d'où son inévitable
engorgement.
Tableau n°1 : Détenus selon le type
de titre de détention
Titre de détention
|
effectif
|
%
|
Mandat d'arrêt
|
358
|
1,82
|
Mandat de dépôt
|
18745
|
95,2
|
Garde à vue administrative
|
212
|
1,08
|
Condamnés
|
376
|
1,91
|
Total
|
19 691
|
100
|
Recensement du 31 août 2000.
Source : Document de politique
pénitentiaire et de stratégie de réforme du système
carcéral, décembre 2006.
Tableau n° 2 : Durée de
détention préventive selon le sexe
Durée de la détention préventive
|
Masculin
|
Féminin
|
Ensemble
|
Effectifs
|
%
|
Effectifs
|
%
|
Effectifs
|
%
|
Moins de 01 mois
|
1202
|
17,5
|
44
|
25,43
|
1246
|
17.7
|
De01 mois à 04 mois
|
2528
|
36,81
|
51
|
29,43
|
2579
|
36.63
|
De05 mois à 11 mois
|
1550
|
22,57
|
37
|
21,39
|
1587
|
22.54
|
De 01 an à 02 ans
|
989
|
14,4
|
23
|
13,29
|
1012
|
14.37
|
Plus de 02 ans
|
598
|
8.71
|
18
|
10,4
|
616
|
8.75
|
Ensemble
|
6867
|
100
|
173
|
100
|
7040
|
100
|
Source : Document de politique
pénitentiaire et de stratégie de réforme du système
carcéral, décembre 2006.
L'inefficacité de la politique judiciaire dans la
protection des personnes incarcérées est aussi en partie
imputable à la complaisance observée dans la répression
des atteintes à la dignité humaine des personnes privées
de leur liberté.
Section 2 : La timide répression des
atteintes à la dignité humaine dans les lieux de
détention
L'apparente impunité du personnel chargé de
l'application des lois est l'une des causes des violations des droits de
l'homme dans le milieu carcéral. Ces violations concernent aussi bien
les droits substantiels que les droits processuels des personnes privées
de leur liberté. Pourtant, les textes en vigueur prévoient des
sanctions aussi bien sur le plan administratif que judiciaire contre les agents
publics auteurs ou complices de telles indélicatesses. Mais
l'exemplarité de ces mesures reste mitigée en ce qui concerne les
sanctions administratives (paragraphe1), pendant que les actions judiciaires
engagées peinent à dissuader la commission de tels actes
(paragraphe2).
Paragraphe1 : La faiblesse des mesures disciplinaires
prises à l'encontre des agents indélicats
Dans le contexte spécifique de privation de
liberté, les principes qui gouvernent les actes des fonctionnaires
doivent obéir à l'impératif de protection des droits de
l'homme conformément aux engagements internationaux de l'Etat
camerounais. Le cadre administratif offre à l'encontre des agents
publics, un éventail de sanctions dont la mise en oeuvre demeure
cependant inefficace.
A- L'échelle des sanctions
disciplinaires
« La lutte contre
l'impunité est au coeur du combat pour l'instauration d'une
société plus respectueuse des droits de
l'homme ».119(*) Selon le rapport 2007 sur l'état des
droits de l'homme au Cameroun, certains domaines des droits de l'homme tels que
le droit à la sûreté, le droit à la vie, le droit
à l'intégrité physique, corporelle et morale, le droit
à la protection contre les traitements cruels inhumains et
dégradants méritent une attention particulière et
« les personnels chargés de l'application des lois qui sont
concernés par la violation de ces droits se recrutent essentiellement
parmi les forces de maintien de l'ordre, les autorités administratives
et traditionnelles ainsi que les magistrats ».120(*) Au Cameroun, les
fonctionnaires qui interviennent dans la privation de liberté sont
régis par des statuts spéciaux.
Le décret 2001/065 du 12 mars 2001 portant statut
spécial du corps des fonctionnaires de la sûreté nationale
prévoit dans son article 95 des sanctions disciplinaires contre les
agents indélicats. Ces sanctions vont de la réprimande à
la révocation et sont classées en première,
deuxième et troisième catégorie en fonction de la
gravité de la faute.121(*)
Le règlement de discipline générale dans
les forces de défense122(*), classe les fautes commises par les personnels
militaires et gendarmes en six catégories. Ainsi en fonction de leur
gravité, on distingue, au terme de l'article 103 de ce
règlement :
-les actes tendant à se soustraire aux obligations de
service
-les actes contre la discipline militaire
-les actes constituant des manquements aux consignes
-les actes constituant des négligences et des fautes
professionnelles
-les actes contre l'honneur, le devoir militaire et la
probité
-les actes contre le devoir de tenue, conduite et morale
Ces actes sont sanctionnés par :
1- Des punitions non restrictives de liberté comprenant
l'avertissement, la réprimande et le blâme
2- Des punitions restrictives de liberté
constituées de la consigne, la salle de police, la prison et la cellule,
les arrêts simples, les arrêts de rigueur, la prison militaire
3- Des punitions administratives telles que le rappel à
l'unité, la maintien à la formation, la retenue, suspension ou
suppression de la solde par mesure de discipline, la mutation disciplinaire, la
suspension ou le retrait d'emploi ou de fonction
4- Des punitions statutaires : le renvoi à la
2ème classe, la rétrogradation, la résiliation
de contrat, révocation ou refus de réengagement, la
révocation des personnels officiers etc...123(*)
Le décret N° 92/054 du 12 Mars 1992 portant statut
du personnel de l'administration pénitentiaire prévoit
également différents types de sanctions contre le personnel de
cette administration en cas de violation des règles.
Les textes régissant le corps des magistrats encadre
lui aussi l'action de ces fonctionnaires en prévoyant un éventail
de sanctions contre eux en cas d'indélicatesse
avérée.124(*)
Bien que régissant des corps différents, les
textes ci-dessus cités présentent cependant une constante :
il s'agit des effets néfastes des procédures disciplinaires sur
les carrières des fonctionnaires ainsi incriminés. Pourtant,
l'usage de ces armes administratives ne produit pas toujours les effets
escomptés en ce qui concerne la protection des droits des personnes
privées de leur liberté et ce, en raison de la timidité de
leur application.
B- La timidité de la mise en oeuvre des
sanctions disciplinaires
La mise en oeuvre des sanctions disciplinaires est le fait du
supérieur hiérarchique ou de la haute hiérarchie125(*) du fonctionnaire fautif
suivant le principe selon lequel « qui peut le plus peut le
moins ».126(*)
Sous réserve des poursuites judiciaires et disciplinaires, des mesures
administratives sont souvent prises à l'encontre des fonctionnaires pour
des actes contraires à l'éthique ou qui violent manifestement la
réglementation en vigueur.
Dans la sûreté nationale par exemple le
commissaire de police BEKOM ESSOMBA François Alexandre, alors en service
au commissariat de sécurité publique de Mbalmayo a
été suspendu pour une durée de trois mois en 2007 pour
« usage abusif d'une arme de service ayant occasionné une
mort d'homme». La même mesure a été appliquée
à l'officier de police MONGOLO ONDOUA Guy, aux inspecteurs de police
EVOUNG NDOUM Timothée et NDJOCK NANG Ambroise pour «
inobservation des consignes dans l'exercice de (leurs) fonctions et
indélicatesse grave portant atteinte à la considération de
la sûreté nationale ».127(*)
Si l'inobservation des consignes renvoie au non respect des
instructions de service, l'indélicatesse portant atteinte à la
considération de la sûreté nationale renvoie très
souvent aux abus que les fonctionnaires exercent sur les citoyens. Entre autres
et les plus courantes, on peut noter la confiscation des biens, la pratique des
actes de torture et autres traitements inhumains et dégradants, les
arrestations et séquestrations arbitraires.
Les éléments de la gendarmerie font eux aussi
l'objet de mesures disciplinaires en cas de violation de consignes. Ainsi,
l'adjudant chef EMINI EMINI a fait l'objet de trente (30) jours d'arrêts
de rigueur pour séquestration et abus de fonction en 2007 alors que les
maréchaux de logis Vincent SIGAL NGUTI et NTIEGE John ont fait l'objet
de vingt (20) jours d'arrêts de rigueur pour extorsion de fonds.
Quant à l'administrateur de prison FONGOH Divine,
régisseur de la prison de Mbanga, il a été relevé
de ses fonctions pour abus d'autorité, indélicatesse qui s'est
manifestée par la détention abusive d'une femme en
2007.128(*)
A l'observation de ces sanctions, on note que les mesures
administratives prises à l'encontre des fonctionnaires indélicats
ne tiennent pas compte de la gravité de la faute. Ainsi dans la
sûreté nationale, la suspension d'une durée de trois (03)
mois est la principale sinon la seule mesure administrative utilisée
pendant que la mise aux arrêts de rigueur prédomine à la
gendarmerie. Le recours systématique à des mesures aussi
légères pour des fautes dont la gravité n'est plus
à démontrer au regard du droit international pourrait se
comprendre surtout dans la Sûreté Nationale ou de telles mesures
ne font très souvent suite qu'à une simple plainte qui n'a pas
encore fait l'objet d'une enquête minutieuse. Les faits n'étant
pas encore avérés de telles mesures ne sont prises qu'à
titre de « mesures conservatoires ».Les mesures
disciplinaires proprement dites telles que l'abaissement de grade ou
d'échelon, la révocation la suspension ou la mise à pied
pour ne citer que celles-là restent rares.
Si les mesures conservatoires évoquées plus haut
ont cependant l'avantage de calmer les ardeurs des victimes, et de les soulager
sur le plan psychologique, aucune suite administrative ne leur est souvent
réservée et les bourreaux, à l'expiration de leur
période de suspension ou d'arrêts de rigueur, sont purement et
simplement réintégrés dans leurs fonctions, ou au pire des
cas mutés. Situation d'autant plus grave que les administrations
concernées n'ignorent pas que les victimes sont dans l'incapacité
de mettre en oeuvre des recours judiciaires contre les agents
incriminés, du fait de leur ignorance et ou de leur pauvreté.
Quand bien même de telles actions sont engagées elles restent peu
dissuasives à cause du caractère complaisant des sanctions
pénales prononcées.
Paragraphe2 : Le caractère peu
dissuasif des actions judiciaires engagées contre le personnel
chargé de l'application des lois
La nature peu dissuasive des actions judiciaires entreprises
découle de l'inadaptation des décisions rendues par les
juridictions et du caractère exceptionnel des poursuites judiciaires
engagées.
A- La rareté des poursuites
Le tableau n° 3 donne une idée assez
précise des cas recensés par Commission Nationale des Droits de
l'Homme et des Libertés (CNDHL), il y apparaît clairement qu'en
2007 cette structure a recensé 307 cas de violations
alléguées des droits de l'homme. Cependant, le rapport du
ministère de la justice sur l'état des droits de l'homme au
Cameroun en 2007 ne relève que 96 cas de poursuites judiciaires
enclenchées pour les cas de violation des droits de l'homme.129(*) Ce rapport ne fait
état d'aucun cas de poursuites engagées contre les magistrats,
greffiers et autres fonctionnaires de l'administration de la justice, pourtant
82 cas d'allégations de violations du droit à un procès
équitable ont été rapportés par la CNDHL en 2007.
Le défaut d'initiative de poursuites judiciaires contre les
fonctionnaires ouvre la voie à un régime d'impunité
favorable à la violation des droits humains surtout lorsque les
sanctions prononcées pour clôturer les rares actions judiciaires
entreprises ne reflètent pas la gravité des exactions
commises.
Tableau N°3 : nombre de cas de violations
présumées des droits de l'homme traités en 2007 par la
CNDHL
Typologie des violations
|
Siège (Yaoundé)
|
Antenne du Sud-Ouest
|
Droit à un procès équitable
|
80
|
02
|
Droit à la vie, à l'intégrité
physique et morale
|
88
|
10
|
Droit à la sécurité et à la
sûreté (arrestation et détention arbitraires)
|
46
|
25
|
Abus d'autorité et de pouvoir
|
15
|
14
|
Torture et traitements inhumains et dégradants
|
27
|
00
|
Nombre total de cas recensés
|
256
|
51
|
Source : Rapport 2007 du MINJUSTICE sur
l'état des droits de l'homme au Cameroun
B- La complaisance des sanctions pénales
prononcées contre le personnel chargé de l'application des
lois
Les sanctions pénales prononcées à
l'endroit des fonctionnaires des forces de maintien de l'ordre, si elles
témoignent de la volonté de lutter contre les atteintes aux
droits humains observées dans les lieux de détention ne sont pas
toujours assez dissuasives par leur sévérité. Elles
jettent même un doute sérieux sur l'aptitude de la justice
à éradiquer les atteintes aux droits humains à travers la
lutte contre l'impunité. De nombreux cas illustrent bien cette
situation. Comme celui d'OLAMA Laurent et AMBELLIE Zacharie, fonctionnaires de
police, déclarés coupables de torture par le TPI d'Ebolowa le
18.04.2007 et condamnés seulement à deux ans d'emprisonnement
avec sursis pendant trois ans130(*), des Gardiens de la paix MPACKO DIKOUME et NDIWA
Joseph déclarés coupables de coups mortels par le jugement du
12.12.2006 par le TGI du Wouri et définitivement condamnés
seulement à trois ans d'emprisonnement avec sursis pendant trois ans et
de AMBATA Hermès René et NGOUMBA jean Dejoli Major,
respectivement inspecteur de police et gardien de la paix reconnus coupables
des actes de torture, arrestation et séquestration, coups et blessures
simples par le TPI de Mbanga, mais uniquement condamnés à 50.000
frs cfa d'amende chacun.131(*)
Dans certaines localités, les chefs traditionnels ont
une telle importance que ceux-ci jouent également le rôle de
responsable de maintien de l'ordre, au point d'entretenir une véritable
force de police dans la localité et d'y ériger même les
prisons. Le silence de l'administration ou la tolérance dont elle fait
preuve à l'endroit de ces dépositaires de la tradition est tel
que ces autorités traditionnelles semblent quelque peu au dessus de la
loi. Et les sanctions pénales souvent prises à leur encontre
semblent confirmer leur caractère de citoyen intouchables. C'est ainsi
que les faits d'arrestation et de séquestration dont ils se rendent
coupables sont sanctionnés avec légèreté. Si le cas
de BAINA DEDAIDANDI, chef du village Doré-Tongo, poursuivi pour
arrestation et séquestration, condamné par jugement N°
13/Crim du 16.08.2006 du TGI de la Bénoué condamné
à 10 ans d'emprisonnement ferme132(*) peut être cité comme un exemple
à suivre dans la répression des atteintes au droit à la
sûreté, de tels exemples restent minoritaires. En effet, de
nombreuses affaires témoignent de la complaisance de la justice face
à ce type d'atteintes. C'est le cas de :
-DJAOURO HAMADOU, chef du village Nyassar, condamné
à 06 mois d'emprisonnement avec sursis pendant 03 ans par le TPI de
Ngaoundéré pour les faits d'arrestation et de
séquestration arbitraires.133(*)
-ISSA MAOUNDE alias DJAOURO ISSA, chef traditionnel
déclaré coupable d'arrestation et de séquestration
arbitraires par le jugement n° 89/Cor. Du 29.07.08 du TPI de
Tignère est condamné à un an d'emprisonnement avec sursis
pendant trois ans.134(*)
La complaisance des sanctions prononcées contre le
personnel chargé de l'application des lois et la rareté des
poursuites judiciaires enclenchées contre eux les conforte dans le
sentiment d'impunité en cas d'atteinte aux droits des personnes
privées de leur liberté, encourageant ainsi de manière
implicite la violation des droits reconnus à cette catégorie de
personnes.
La dignité humaine suppose le respect inconditionnel
de tout homme, quelque soit son age, son sexe sa religion, sa condition
sociale, son origine ethnique, ou même son statut juridique.135(*) Elle résulte de la
conjonction du respect de l'intégrité physique et morale de la
personne humaine et de la satisfaction de ses besoins vitaux. Le respect de
l'intégrité physique participe donc du respect de la
dignité humaine, tout comme l'exercice des droits processuels. Si les
textes internationaux auxquels le Cameroun est partie protègent
l'exercice des droits attributs, c'est à dire ceux inhérents
à la personne humaine136(*), la pratique reste minée entre autre par une
application limitée de ces mesures pourtant internalisées dans
les textes nationaux. L'absence d'un cadre juridique propice à la
protection des personnes incarcérées doublée de la
minimisation des principes juridiques internationaux qui leur sont applicables
fait de l'Etat du Cameroun un terreau fertile pour la violation des droits des
personnes privées de liberté avec pour conséquence
directe, la dégradation des conditions de détention.
SECONDE PARTIE :
L'INNEFICACITE DE LA POLITIQUE PENITENTIAIRE
Les institutions pénitentiaires camerounaises laissent
dans l'esprit du visiteur, un sentiment de pitié empreint de
désolation tant les conditions de vie y sont difficiles. La
misère et l'insalubrité y sont la règle, un environnement
acceptable l'exception, et les violences, le mode d'expression par excellence
de tous. Pourtant, le Cameroun a souscrit des engagements internationaux qui
tendent à l'amélioration des conditions de vie dans le contexte
de privation de liberté. Ces engagements se traduisent au plan national
par la définition d'une politique pénitentiaire mise en oeuvre au
travers des ressources humaines et matérielles malheureusement encore
inadéquates (chapitre 1) et des stratégies de protection et
d'amélioration des droits de l'homme en milieu carcéral certes
efficaces, mais encore timides (chapitre2).
Chapitre1er : L'INADEQUATION DES RESSOURCES HUMAINES ET
MATERIELLES AUX REALITES DU MILIEU CARCERAL
Etant sous la responsabilité de l'Etat, les personnes
privées de liberté sont en droit d'attendre de ce dernier des
mesures qui garantissent la jouissance des droits qui sont reconnus aux
personnes de leur statut juridique. Le contexte global de pauvreté
influence de manière significative la vie en milieu carcéral au
Cameroun, alimentant du même coup la polémique née autour
de la nécessité de dépenser l'argent du contribuable
à la construction de cadres luxueux pour les délinquants alors
même que leurs victimes peinent à subvenir à leurs besoins
quotidiens. Pourtant, la privation de liberté n'altère pas la
nature humaine de ceux qui en font l'objet. Les personnes
incarcérées doivent jouir des conditions minimales d'existence
qui leur sont garanties par les normes internationales. Il appartient donc
à l'Etat de définir une politique pénitentiaire
adéquate et de mettre des moyens humains et matériels
nécessaires et suffisants au service de cette politique. Au Cameroun,
l'un des obstacles majeurs à l'humanisation des lieux de
détention est sans nul doute l'inadéquation des ressources mises
à la disposition des administrations intervenant dans le processus de
privation de liberté. Cette inadéquation peut s'observer sous le
prisme d'une déficience qualitative et quantitative des ressources
humaines (section 1) et de l'irréalisme des ressources
matérielles et financières allouées (section 2).
Section 1: La déficience des ressources
humaines
De nombreuses administrations interviennent
dans le processus de privation de liberté et d'encadrement des
détenus137(*).
Mais cette multiplicité d'intervenants ne règle pas pour autant
le problème de l'humanisation des lieux de détention. Pire
même, les carences relevées au sein de l'administration
pénitentiaire semblent même s'étendre à la
sûreté nationale, à la gendarmerie et dans une moindre
mesure au corps des magistrats. Ces carences s'expriment en termes d'effectifs
insuffisants par leur nombre (paragraphe 1), mais aussi par la qualité
relative du personnel (paragraphe 2).
Paragraphe1 : L'insuffisance des effectifs
Le déficit en personnel s'observe aussi bien dans
l'administration pénitentiaire que dans les autres administrations qui
interviennent dans le processus de privation de liberté.
A- Le personnel de l'administration
pénitentiaire
Les chambres de sûreté des unités de
police et de gendarmerie n'étant pas des lieux d'exécution des
peines mais des espèces de «lieux de transit'' pour les mis en
cause, l'effectif le plus important des personnes privées de leur
liberté se retrouve donc dans les prisons. Il va de soi que
l'administration pénitentiaire soit la plus impliquée dans la
gestion et l'encadrement des personnes incarcérées. Pourtant ses
effectifs n'ont pas suivi la courbe de l'évolution de la population
carcérale tel que nous le montre le tableau n°4.
Tableau n° 4 : Etat du déficit des
effectifs du personnel de l'AP par rapport au ratio national d'encadrement
souhaité (1/5) de l'année 2001 à 2005
Année
|
Effectif des détenus
|
Personnel souhaité (ratio1/5) (1)
|
Effectif réel du personnel
(2)
|
Déficit de remplacement des départ à la
retraite (3)
|
Déficit normatif
(1)-(2) + (3)
|
2001
|
19.691
|
3.339
|
3.728
|
49
|
-340
|
2002
|
20.335
|
4.167
|
3.604
|
36
|
599
|
2003
|
21.000
|
4.200
|
3.269
|
198
|
1.129
|
2004
|
21.687
|
2.943
|
2.943
|
240
|
1.634
|
2005
|
22.330
|
4.414
|
2.619
|
-446
|
1.349
|
Source : document de politique
pénitentiaire et stratégie de réforme du système
carcéral, 2006, p.63.
Le tableau montre bien que depuis 2001 jusqu'en 2005, les
effectifs du personnel d'encadrement des détenus n'ont cessé de
diminuer pendant que le nombre de détenus augmentait. le ratio de 1
personnel pour 5 détenus que l' administration camerounaise s'est
fixé comme objectif étant loin d'être atteint à
cause des nombreux départs à la retraite.
L'administration pénitentiaire est en proie depuis de
nombreuses années à un déficit en personnel que le
document de politique pénitentiaire et de stratégie de
réforme du système carcéral qualifie de
« chronique ». Ce déficit s'observe notamment au
niveau de l'encadrement rapproché des détenus
(c'est-à-dire dans les cadres des gardiens de prison et des gardiens
chefs de prison) et c'est lui qui conduit à la surcharge de travail et
par la même occasion à la dégradation de la
sécurité et des conditions de détention. En effet, sur les
2619 fonctionnaires que comptait l'administration pénitentiaire en 2005,
13,3% d'entre eux sont affectés à des taches de supervision donc
n'interviennent pas véritablement dans l'encadrement des détenus.
Il s'agit des fonctionnaires des cadres des administrateurs de prison (2%) et
des intendants de prison (11,3%). Les 715 fonctionnaires de sexe féminin
de grade gardien de prison et gardiens chef de prison s'occupent des 800
détenues de même sexe pour un ratio d'environ 1,1 fonctionnaires
pour une détenue. Mais ce ratio est rompu du fait de l'implication
desdites fonctionnaires dans l'encadrement des détenus de sexe masculin.
D'où le ratio global de 1 fonctionnaire pour 8 détenus tous sexes
confondus. Si l'on ne tient compte que des 1310 fonctionnaires assurant les
tâches d'exécution courantes, ce ratio passe à
1/17.138(*) Les causes
de ce déficit sont à rechercher dans les départs à
la retraite et le non renouvellement des effectifs. Le tableau ci-après
présente les effectifs et les proportions du personnel par cadre et en
fonction de l'âge.
Tableau N°5 : Effectifs et proportions du
personnel de l'administration pénitentiaire par cadre et en fonction de
l'age
Age
|
AP
|
IP
|
GCP
|
GP
|
TOTAL
|
Eff.
|
%
|
Eff.
|
%
|
Eff.
|
%
|
Eff.
|
%
|
Eff.
|
%
|
20-30
|
0
|
0
|
2
|
0,66
|
17
|
4,88
|
446
|
23,44
|
465
|
17,75
|
30-40
|
05
|
7,14
|
15
|
5,01
|
174
|
50
|
528
|
27,76
|
722
|
27,56
|
40-50
|
40
|
57,14
|
156
|
52,17
|
157
|
45,1
|
928
|
48,79
|
1.281
|
48,91
|
50-55
|
25
|
35,71
|
126
|
42,14
|
-
|
|
-
|
|
151
|
5,76
|
Cadre total
|
70
|
100
|
299
|
100
|
348
|
100
|
1902
|
100
|
2619
|
100
|
Source : document de politique
pénitentiaire et stratégie de réforme du système
carcéral, 2006, p 62.
L'on y observe que près de 50% des effectifs de
l'administration pénitentiaire se situe entre 40 et 50 ans,
c'est-à-dire, proche de la retraite.139(*) La plupart de ces fonctionnaires se recrutant dans
les cadres des gardiens de prison et de gardien chef de prison,
c'est-à-dire, le personnel chargé de l'exécution des
taches courantes au sein de la prison.
L'utilisation des personnels peu gradés à
d'autres fins contribue à accroître le déficit
observé. Le document de politique pénitentiaire et
stratégie de réforme du système carcéral
publié par le comité ad hoc chargé de
l'élaboration d'une nouvelle politique pénitentiaire et de la
réforme du système carcéral relève
que :
« Près de 185 personnels de
l'administration pénitentiaire sont utilisés hors des
établissements pénitentiaires en qualité de garde du
corps, chauffeur, gardien de résidence de certaines hautes
personnalités. Ce fait aggrave le déficit du personnel
d'exécution des missions spécialisées et courantes propres
à l'administration pénitentiaire».140(*)
Situation banale vu la pratique ayant cours dans les autres
forces de maintien de l'ordre, mais au regard des effectifs de cette
administration, démobiliser 7% du personnel réduit fortement les
chances d'atteindre le ratio national de 1 fonctionnaire pour 5 détenus.
Ce d'autant plus que même les missions spécifiques en tant normal
dévolues au personnel d'accompagnement (assistants sociaux, conseillers
de jeunesse et animation etc...) doivent être exécutées par
les fonctionnaires de l'administration pénitentiaire.
B- Les autres administrations
. Moins criard dans les forces de maintien de l'ordre
(gendarmerie et police), les problèmes d'effectifs se posent cependant
avec acuité au sein de la magistrature et dans les autres
administrations spécialisées. L'encadrement et l'accompagnement
des personnes détenues nécessitent pourtant des hommes
disponibles.
Si l'on considère que les visites des lieux
d'incarcération par les magistrats du parquet prévues par les
textes font partie de l'encadrement des personnes privées de
liberté141(*),
alors on serait tenté de penser, au regard de la multiplicité des
unités de police et de gendarmerie, que les effectifs des magistrats du
parquet sont assez insuffisants pour assurer un véritable suivi des
personnes incarcérées au niveau de ces unités. Cette
insuffisance des effectifs de la magistrature se traduit par des lenteurs
judiciaires et la surpopulation carcérale préjudiciables aux
personnes privées de leur liberté. En effet, les magistrats du
siège, pour éviter l'amoncellement des dossiers sur leurs tables,
ont recours à des méthodes expéditives telles que la
détention provisoire.
L'accompagnement des détenus pendant leur
détention et pour les besoins de leur réinsertion sociale
nécessite des connaissances et de l'expertise dans des domaines
variés tels que la médecine, l'agriculture, l'élevage,
l'assistance sociale, l'animation etc... De l'aveu même du comité,
« l'administration pénitentiaire compte moins de 300
personnels spécialisés »142(*), soit 11, 45% de l'effectif
total du personnel. Ainsi, si le domaine de la médecine est mieux loti
avec 126 fonctionnaires par rapport aux autres spécialités telles
que l'agriculture qui n'en compte que 16, ces chiffres demeurent encore assez
insuffisants par rapports aux besoins réels en personnels
spécialisés dans les établissements pénitentiaires.
Le soutient des administrations de la santé de la jeunesse, des affaires
sociales reste jusqu'à lors très timide. Certaines prisons
à ce jour ne disposent ni d'un personnel soignant permanent, ni
d'animateurs de jeunesse encore moins d'assistants sociaux ou de psychologue.
Le cas des prisons principales d'Edéa et Yabassi est à cet
égard assez expressif. A la prison d'Edéa par exemple, le seul
personnel soignant est une gardienne de prison qui n'est compétente que
pour des pathologies mineures parce que «aide soignante''. Cette prison ne
dispose pas de local pour la consultation. Tous les cas de maladies
déclarés sont donc référés vers les
hôpitaux classiques à condition que le détenu dispose de
moyens pour se soigner. Le soutient psychologique dans ce centre est
assuré par un assistant social que la délégation
départementale des affaires sociales commet de temps en temps à
cette fin et sur la demande des autorités du pénitencier. Les
visites de psychologues sont rares voire même inexistantes, l'animation
sociale est l'oeuvre des gardiens de prison sans formation préalable
dans ce domaine. Aucun médecin n'est affecté dans ces centres
malgré les multiples demandes formulées dans ce sens. Ce sombre
tableau n'est malheureusement pas une exception dans le paysage des centres
pénitentiaires au Cameroun et affecte gravement les conditions de
détention. Surtout qu'à ce déficit de personnel s'ajoute
une déficience qualitative des acteurs de la privation de
liberté.
Paragraphe2 : La déficience
qualitative du personnel
La qualité du personnel des administrations
intervenant dans le processus de privation de liberté est une
sérieuse entrave à l'humanisation des lieux de détention.
Si dans la police la gendarmerie et la magistrature l'on peut déplorer
le peu d'intérêt accordé à l'enseignement des droits
de l'homme, c'est surtout la sous- qualification du personnel
spécialisé employé dans les centres de détention et
le déphasage de la formation des élèves de l'ENAP qui
accroissent ce déficit qualitatif.
A- Une sous-qualification des personnels
spécialisés
L'on peut noter avec satisfaction la présence effective
d'un bureau des affaires sociales fonctionnel géré par au moins
une assistante sociale dans toutes les unités de police des grands
centres urbains. Mais cela n'est pas le cas des brigades de gendarmerie. De
plus aucune présence de personnel médical n'est observée
dans ces unités.
L'absence de statistiques fiables ne nous a pas permis tout
au long de ce travail de ressortir les effectifs de chaque type de personnel
spécialisé et son niveau de spécialisation. Toutefois,
l'on peut relever que sur les 300 fonctionnaires spécialisés que
compte l'administration pénitentiaire, 126 sont du domaine de la
médecine tous niveaux confondus, 16 de l'agriculture et 108 de la
comptabilité matière. Quelques rares fonctionnaires ont
également suivi la formation des assistants sociaux, de conseiller et de
conseiller principal de jeunesse et animation.143(*)
Pour le domaine spécifique de la santé, pris
globalement, le ratio est de un personnel soignant pour environ 175
détenus. Mais ce rapport traduit mal la réalité
observée sur le terrain d'abord parce que le personnel soignant dont il
est question est en majorité constitué d'infirmiers et d'aides
soignants ensuite parce que les médecins qui en font partie sont pour la
plupart nommés à des postes dans l'administration centrale. C'est
ainsi que les aides soignants et infirmiers sans qualification suffisante se
retrouvent à exercer le rôle de médecin dans les
infirmeries des centres pénitentiaires pour ceux qui en disposent d'une.
Les médecins eux-mêmes se limitant à des visites
ponctuelles dont la fréquence peut atteindre un rythme semestriel pour
les prisons les plus reculées. Mais c'est surtout la formation du
personnel de l'administration pénitentiaire qui est à l'origine
de la plus grande déficience qualitative observée dans
l'encadrement des personnes privées de liberté.
B- Une formation inadaptée des
élèves de l'ENAP
Le texte fondateur de l'ENAP est le décret N°
92-066 du 03 avril 1992 portant création et organisation de ladite
école. Elle est née des cendres du Centre National de Formation
et de Recyclage du personnel de l'administration pénitentiaire avec pour
missions la formation, le perfectionnement et le recyclage des fonctionnaires
du corps de l'administration pénitentiaire.144(*) En tant qu'école
professionnelle, l'ENAP doit former des profils adaptés aux besoins de
l'administration pénitentiaire. Les différentes formations qui
s'y déroulent correspondent ainsi à des profils bien
déterminés pour assurer des emplois précis à des
postes tout aussi précis. Ce profil correspond aussi à une
carrière bien définie. Mais, « l'on constate
cependant que les carrières techniques nécessaires à la
diversification et au renforcement des activités de l'administration ne
sont pas prévus dans le profil actuel de formation à
l'école. C'est par exemple le cas de la préparation des
élèves ou des stagiaires aux métiers de resocialisation,
avec un éventail assez large allant des ingénieurs et techniciens
agricoles pour l'encadrement des fermes pénitentiaires aux artisans
professionnels reconnus pour assurer le compagnonnage de métiers des
détenus en voie de réinsertion
sociale ».145(*)
En ce qui concerne la formation proprement dite, en 2005 elle
était assurée par 56 enseignants dont 46 vacataires et 10
permanents seulement parmi les quels 4 professeurs et 6 instructeurs tous
démotivés parce que considérant leur affectation à
l'ENAP comme une sanction du fait de l'absence d'avantages liés à
leur fonctions.146(*)
Normalement, les vacataires sont nommés par le ministre de la justice
sur proposition du directeur de l'école. Mais au fil des
dernières années, il s'est développé une pratique
qui laisse la latitude au directeur de les recruter lui-même. Ainsi, ils
sont pour la plupart recrutés sur la base de ses relations personnelles
parmi les enseignants de l'université de Buéa147(*) et les autres fonctionnaires
de la ville. Situation d'autant plus préoccupante que ces vacataires qui
varient pratiquement tous les ans assurent la part la plus importante des
enseignements professionnels. Le Comité ad hoc chargé de
l'élaboration d'une nouvelle politique pénitentiaire et de la
réforme du système carcéral note que :
« L'examen des profils des ressources
professorales, en poste à l'ENAP, amène à constater qu'il
existe une inadéquation entre leur qualifications et les enseignements
dispensés ».
Pour ce qui est du perfectionnement et du recyclage, il est
réservé aux fonctionnaires ayant bénéficié
d'un avancement de cadre ou ayant réussi à un concours
professionnel. Cette mise à niveau n'est pas prévue pour les
gardiens de prison qui pourtant constituent la frange la plus importante des
fonctionnaires de cette administration et qui assurent l'exécution des
taches courantes d'encadrement des personnes incarcérées.
De tout ce qui précède, il s'en suit une
diminution logique de la qualité des programmes qui s'explique par
l'instabilité des professeurs, la mobilité et
l'irrationalité des affectations du personnel pénitentiaire de
l'ENAP et par voie de conséquence, la diminution de la qualité
des produits de cette structure. Mais cette situation est aussi en partie
imputable à l'insuffisance des ressources matérielles.
Section 2 : L'insuffisance des
ressources matérielles allouées au système
pénitentiaire
Le système pénitentiaire
dispose de deux types de revenus : ceux provenant de main d'oeuvre
pénale ou de la vente des produits agro pastoraux ou artisanaux et ceux
provenant des allocations budgétaires. Mais au terme du décret
n° 92/052 du 27 mars 1992 portant régime pénitentiaire au
Cameroun, les revenus provenant de la cession de la main d'oeuvre
pénale et autre sont directement reversés au trésor
public. Donc seules les allocations budgétaires constituent les
ressources propres de l'administration pénitentiaire. Pourtant, les
ressources matérielles disponibles pour le système
pénitentiaire restent insuffisantes du fait de l'irréalisme dans
la répartition du budget et de la rareté des actions
caritatives.
Paragraphe 1 : L'irréalisme
des allocations budgétaires
Les ressources budgétaires ne sont pas l'objet d'un
budget autonome. Elles proviennent d'une dotation forfaitaire à partir
du budget du ministère de la justice (ministère de
l'administration territoriale avant le décret 2004/320 du 08
décembre 2004) et concernent aussi bien le fonctionnement du
système pénitentiaire que les investissements dont il a
besoin.
A- La faiblesse et
l'irrégularité du budget de fonctionnement
Les engagements internationaux de l'Etat camerounais
l'obligent à prendre en charge les personnes privées de leur
liberté. Cet engagement ressort également dans l'article 122 du
code de procédure pénale, du moins en ce qui concerne
l'alimentation. Il y est stipulé que « l'Etat
assure l'alimentation des personnes gardées à
vue ».148(*) Mais le financement des structures
pénitentiaires reste irrégulier et faible pour ce qui est de leur
fonctionnement. Entre 2001 et 2005, le budget de fonctionnement du
système pénitentiaire en général a continuellement
régressé en dépit d'une légère hausse en
2004 pendant que le budget d'investissement de ce ministère progressait
de plus de 04 milliards, soit de 1,25%.
Le tableau ci-dessous donne une idée assez claire de la
part réservée au système pénitentiaire entre 2001
et 2005 en ce qui concerne le budget de fonctionnement
Tableau N°6 : part réservée au
système pénitentiaire entre 2001 et 2005 en ce qui concerne le
budget de fonctionnement (en millions de fcfa).
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
MINATD
|
19.080
|
20.254
|
11.317
|
22.916
|
23.628
|
%
|
100
|
100
|
100
|
100
|
100
|
ENAP
|
123
|
123
|
61
|
135
|
123
|
%par rapport au MINATD
|
0,64
|
0,60
|
0,53
|
0,58
|
0,52
|
DAPEN
|
285
|
305
|
144
|
340
|
319
|
%par rapport au MINATD
|
1,49
|
1,50
|
1,27
|
1,48
|
1,35
|
PRISONS
|
1241
|
1242
|
639
|
1248
|
1294
|
%par rapport au MINATD
|
6,5
|
6,1
|
5,64
|
5,44
|
5,5
|
TOTAL
|
1649
|
1670
|
844
|
1723
|
1736
|
%total du système
pénitentiaire
|
8,64
|
8,25
|
7,46
|
7,52
|
7,35
|
Source : données recueillies dans le
document de politique pénitentiaire et stratégie de
réforme du système carcéral, 2006, p.30
Si l'on ne considère que la part du budget
allouée au fonctionnement des prisons, on se rend compte qu'elle
régresse, allant de 6.5% à 5,5% du budget du ministère
tout entier entre 2001 et 2005. Ce qui est tout à fait dérisoire,
lorsqu'on considère uniquement les besoins d'alimentation de la
population carcérale au Cameroun évaluée en 2005 à
22096 détenus. En effet, si à chaque détenu était
consacré la moitié d'un dollar chaque jour (ce qui est
très en deçà des standards internationaux), en 2005, le
budget de fonctionnement des prisons serait de l'ordre de 8,5% du budget du
ministère de tutelle pourtant, le budget cumulé de tout le
système pénitentiaire en 2005 n'a été que 7,35% du
budget du ministère de tutelle. A l'observation du tableau N°6, on
se rend compte que le ministère de tutelle ne consacre qu'une infime
partie de son budget généralement comprise entre 0,64% et 0.52%
à la formation du personnel pénitentiaire. L'on comprend donc
mieux au regard de ces statistiques la qualité relative du
personnel formé à l'ENAP. La prise en charge quotidienne d'un
détenu comprend son alimentation, son entretien et ses
médicaments. L'absence de rationalité dans la répartition
du budget du ministère de tutelle fait que toutes ces exigences ne sont
pas prises en compte. Il en résulte donc une dégradation des
conditions de détention du fait de l'irrégularité et de la
faiblesse des budgets de fonctionnement. Mais le sort des investissements dans
le système pénitentiaire n'est guère reluisant.
B- La modestie du budget d'investissement de
l'administration pénitentiaire
Les besoins réels d'investissement, et de modernisation
du système pénitentiaire sont rarement pris en compte dans la
répartition des ressources budgétaires. Pourtant, l'état
de délabrement des centres pénitentiaires au Cameroun est
très avancé. La description que fait Rogatien TEJIOZEM est
à ce sujet assez édifiante :
« La caractéristique principale de ces
établissements pénitentiaires est qu'ils sont, pour la plupart,
logés dans de vieilles bâtisses de récupération
héritées de l'époque coloniale et ayant subi quelques
aménagements. Leur exiguïté fait en sorte qu'ils ne
permettent pas de répondre positivement aux exigences de
sécurité et de stricte séparation des différentes
catégories des détenus, ni de traitement humain de ces derniers.
Aucun de ces établissements pénitentiaires ne dispose de cellules
individuelles, les locaux de détention étant constitués
des dortoirs accueillants des dizaines voire des centaines de détenus.
De même, les locaux administratifs sont insuffisants, exigus, mal
entretenus, n'offrant pas au personnel les possibilités et les
commodités nécessaires pour l'accomplissement de sa tache
administrative ».149(*)
L'investissement dans le système pénitentiaire
est quasi inexistant. Le Comité ad hoc chargé de
l'élaboration d'une nouvelle politique pénitentiaire et de la
réforme du système carcéral, note que
« les lits et les matelas sont en nombre insuffisants et dans
certaines prisons comme celle de Guider, ils sont inexistants. A Douala,
près de la moitié des détenus dorment dehors dans ce
qu'ils appellent «Kito'' et parfois à même le
sol ».150(*)
Le tableau N° 7 présente en millions de frs cfa,
le budget d'investissement des différentes composantes du
système pénitentiaire et leur pourcentage par rapport au budget
du ministère de tutelle.
Tableau n° 7 :
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
MINATD
|
2.106
|
2.100
|
900
|
2200
|
1500
|
%
|
100
|
100
|
100
|
100
|
100
|
ENAP
|
-
|
46
|
10
|
80
|
33
|
%par rapport au budget MINATD
|
-
|
2,19
|
1,11
|
3,63
|
2,22
|
DAPEN
|
0
|
0
|
0
|
0
|
20
|
% par rapport au budget MINATD
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1,33
|
PRISONS
|
540
|
400
|
74
|
221
|
75
|
% par rapport au budget MINATD
|
25,64
|
19,04
|
8,22
|
10,04
|
5
|
Total du système
pénitentiaire
|
540
|
446
|
84
|
301
|
128
|
%totaldu système
pénitentiaire
|
25,64
|
21,23
|
9,33
|
13,68
|
8,53
|
Source : données recueillies dans le
document de politique pénitentiaire et stratégie de
réforme du système carcéral, 2006, p. 30.
Il se dégage au regard du tableau ci-dessus, que le
budget réservé à l'investissement au MINADT reste
très faible. Au cours de la période 2001- 2002, le budget
d'investissement du système pénitentiaire était en
moyenne de 23,41% du budget du ministère de tutelle. Mais entre 2002 et
2005, ce budget a connu une forte réduction pour atteindre une moyenne
de 10,5% du budget d'investissement de la tutelle, soit un retrait de
moitié par rapport au budget 2001-2002. On comprend donc aisément
que « la tendance de la dotation financière du
système pénitentiaire n'est pas celle de la réforme
(investissement), ni du renforcement du fonctionnement de ce système
(entretiens prioritaires et amélioration des conditions des
détenus)».151(*) Les cas particuliers des prisons et de l'ENAP
permettent de conclure au manque d'intérêt de l'administration
pour le système pénitentiaire. En effet, le budget
d'investissement des prisons a régressé entre 2001 et 2005
passant de 25,64 à 5 % du budget d'investissement de la tutelle pendant
que celui de l'ENAP restait dérisoire avec une moyenne de l'ordre de
2,2% du budget d'investissement de la tutelle. Ce qui justifie bien la
réflexion selon laquelle « les dotations
(budgétaires) ne tiennent pas compte des exigences d'humanisation des
conditions de détention ni celles liées à la
réhabilitation des infrastructures
d'incarcération ».152(*) La modicité des allocations
budgétaires rend donc l'institution carcérale fortement
dépendante des actions caritatives.
Paragraphe 2 : La rareté des actions
caritatives dans les lieux de détention
La grande misère qui sévit
dans les lieux de détention a suscité la sympathie de certains
acteurs de la société civile camerounaise. En dehors des
associations religieuses qui oeuvrent en permanence dans les prisons, les
actions caritatives en faveur des pensionnaires de ces structures demeurent
rares à cause d'une faible médiatisation des conditions
carcérales et du manque d'orthodoxie dans la gestion des dons
octroyés.
A- La faible médiatisation des conditions
carcérales au Cameroun
Qualifié de «11ème
province''153(*),
pour la grande majorité de la population, les établissements
pénitentiaires constituent un lieu d'abandon des délinquants.
Cette situation s'explique par le fait que les autorités des structures
pénitentiaires communiquent très peu sur les conditions de
détentions de leurs de pensionnaires, mais aussi par le manque
d'intérêt de la société.
L'accès dans les pénitenciers est une
véritable épreuve de nerfs. Si certaines mesures
sécuritaires peuvent se justifier en raison du caractère
dangereux de ces institutions, d'autres par contre sont destinées
à décourager ceux qui voudraient accéder aux
détenus soit pour des besoins d'information du grand public soit pour
les besoins scientifiques. Dans certaines prisons se succèdent une
dizaine de rencontres avec les responsables pour avoir accès aux
détenus. La technique est de faire subir à
l'intéressé un interrogatoire informel à chacun des
rendez-vous que le personnel administratif multiplie sans cesse afin de
susciter le découragement. Cette prudence des autorités
pénitentiaires peut se comprendre lorsqu'on sait que la publicité
des dramatiques conditions de détention peut coûter aux
responsables des pénitenciers leurs postes. Situation cependant
paradoxale car à en croire les gestionnaires de ces structures, la
dégradation des conditions de vie dans les lieux de détention
n'est imputable qu'à l'administration centrale qui ne dégage pas
des budgets conséquents par rapport aux missions confiées.
Pourtant, même avec une autorisation des responsables de l'administration
centrale, l'accès aux pensionnaires des prisons reste une vraie gageure.
La publicité des conditions de détention pouvait cependant
contribuer à la sensibilisation de l'opinion nationale et internationale
sur le drame humain qui se déroule en toute impunité dans les
structures carcérales camerounaises et engager ainsi la
responsabilité internationale de l'Etat camerounais pour toutes ces
violations des droits de l'homme.
Egalement, parce que victime des méfaits de certains
délinquants, la société dans sa grande majorité
affiche une indifférence totale vis-à-vis du milieu
pénitentiaire, au point même d'y abandonner ceux des membres de
leur famille qui s'y sont retrouvés quelque soit la raison. Ceux-ci
deviennent donc tributaires des associations caritatives dont l'aide est
malheureusement très souvent détournée de ses objectifs
initiaux.
B- Le défaut d'orthodoxie dans la gestion des
dons
La gestion des dons est un sujet tabou pour les
autorités pénitentiaires qui ne donnent aucune information ni sur
la quantité des dons qui leur sont octroyés, ni sur la nature de
ces dons. Pourtant, même si l'on ne peut pas uniquement se fier aux
déclarations des prisonniers, il reste constant que la gestion de ces
dons en nature ne respecte aucun processus participatif. Au cours des
entretiens, certains détenus nous confiaient que
« même lorsqu'on vient de remettre la nourriture nous ne
mangeons que du mais mélangé au haricot tous les
jours ». Preuve qu'ils ne sont associés ni de
près, ni de loin à la gestion des denrées qui leur sont
gracieusement offerts.
La démission de l'administration centrale dans la
gestion des dons ouvre la voie à des maladresses de toutes sortes,
surtout en ce qui concerne les dons en espèces. En effet, bien que
relevant du domaine juridique des fonds publics, les dons en espèces
offerts aux structures pénitentiaires ne connaissent encore que
très peu de contrôle et parfois même aucun. Et dans un
contexte de prévarication et d'enrichissement illicite comme celui qui
prévaut au Cameroun actuellement, il n'est pas exclu que ces fonds
soient utilisés à des fins personnels au détriment des
personnes incarcérées.
Le déficit qualitatif et quantitatif des ressources
humaines intervenant dans la privation de liberté, la faiblesse des
allocations budgétaires aussi bien pour le fonctionnement que pour
l'investissement dans le système pénitentiaire, constituent de
sérieuses entraves à l'humanisation des lieux de détention
surtout que les politiques mises en oeuvre, si elles suscitent beaucoup
d'espoir chez les défenseurs des droits des personnes détenues,
elles ne semblent pas encore prouver leur efficacité.
Chapitre 2 : LES ENTRAVES AUX STRATEGIES
DEVELLOPPEES POUR LA PROTECTION ET LA PROMOTION DES DROITS DE L'HOMME EN MILIEU
CARCERAL.
La situation des droits de l'homme dans les
lieux de détention soulève non seulement un problème de
management des établissements pénitentiaires, mais
également elle nécessite une politique clairement
énoncée et expressément définie, qui intègre
en même temps les actions des structures locales, gouvernementales et
celle de la société civile d'une part et d'autre part
l'assistance extérieure apportée par les partenaires au
développement. Les entraves aux stratégies
développées pour la protection et la promotion des droits de
l'homme en milieu carcéral s'identifient donc sous la forme de
pesanteurs à l'efficacité des initiatives locales (Section 1) et
du caractère draconien du partenariat externe (Section 2).
Section 1 : L'inefficacité des
initiatives locales
La volonté des pouvoirs publics et de la
société civile d'améliorer le quotidien des personnes
incarcérées s'analyse mieux à travers les initiatives de
la Commission nationale des droits de l'homme et du Service national justice et
paix de l'Eglise catholique romaine car ces structures sont de loin les plus
actives dans les pénitenciers. Cependant si les initiatives de ces
structures pèchent par la non participation des
bénéficiaires à l'élaboration et la mise en oeuvre
des projets concernant ces derniers, l'inutilisation des mesures alternatives
à l'emprisonnement prévues par les textes législatifs pour
certaines et recommandées par des instruments internationaux pour
d'autres constitue également une entrave à l'effectivité
des initiatives locales visant à humaniser les lieux de
détention.
Paragraphe 1er : Les initiatives
internes d'humanisation des lieux de détention
L'inefficacité des initiatives
internes d'humanisation des lieux de détention résulte de
l'absence de pragmatisme dans les actions entreprises par la CNDHL et le
défaut d'association des détenus et personnel
pénitentiaire dans les actions du service national justice et paix.
A- L'absence de pragmatisme dans les initiatives de
la CNDHL
Emanation de la loi n° 2004/016 du 22 juillet 2004, la
Commission nationale des droits de l'homme et des libertés (CNDHL)
remplace le comité des droits de l'homme et des libertés
institué par le décret n° 90/1459 du 08 novembre 1990. Elle
est « une institution indépendante de consultation
d'observation, d'évaluation, de dialogue, de concertation, de promotion
et de protection en matière des droits de l'homme».154(*) Dans le cadre de
l'accomplissement de ses missions, la Commission traite des requêtes sur
les violations des droits de l'homme sur le territoire national, elle
mène des investigations sur les cas flagrants de violation,
éduque et sensibilise les populations sur les droits de l'homme et les
libertés, donne son point de vue et fait des rapports sur les questions
de droits de l'homme.
Les initiatives de la Commission nationale des droits de
l'homme et des libertés en faveur des lieux de détention, se
limite à l'observation et la production de rapports sur les
réalités du milieu carcéral et à l'intention des
autorités compétentes. En effet, dans son article 2, la loi
n° 2004/016 du 22 juillet 2004 stipule que :
« (la commission) procède, en tant que de
besoin, aux visites des établissements pénitentiaires, des
commissariats de police et des brigades de gendarmerie, en présence du
Procureur de la république compétent ou de son
représentant ; ces visites peuvent donner lieu à
rédaction d'un rapport adressé aux autorités
compétentes ».
S'il est vrai que parmi ses moyens d'action, la commission
dispose du pouvoir d' « intervenir en tout état de
cause pour participer à la défense des intérêts des
victimes des violations des droits de l'homme»155(*), le rôle de cette
structure reste assez caricatural quant à l'amélioration des
conditions de détention dans les lieux de privation de liberté.
Au cours des années 2007 et 2008, la CNDHL a
organisé avec l'appui de ses différents partenaires, des
activités de vulgarisation et de sensibilisation à la protection
et la promotion des droits de l'homme. C'est le cas des séminaires et
ateliers animés par les experts nationaux et internationaux des droits
de l'homme, des causeries éducatives organisées dans le but
d'imprégner les différentes franges sociales des objectifs et des
missions de la CNDHL, et de les familiariser avec les outils de protection des
droits de l'homme, la diffusion hebdomadaire sur les ondes des médias
publics des émissions visant à améliorer la
visibilité de la CNDHL, la production et la diffusion des bulletins
d'information gratuits sur les mécanismes de recours en cas de violation
des droits de l'homme. Bien que pertinentes, ces actions n'influencent
cependant pas véritablement les conditions de détention ce
d'autant plus que les constations de la CNDHL à l'issue des visites des
pénitenciers n'ont aucune force contraignante pour faire cesser ou
réparer les atteintes aux droits humains observés. Elle peut tout
au plus convoquer les auteurs de ces violations à l'effet de
procéder à leur audition, émettre les réquisitions
pour attester de l'authenticité des allégations de violations des
droits de l'homme ou interpeller les administrations accusées pour faire
cesser les faits incriminés. Elle ne dispose donc d'aucun pouvoir de
coercition à l'endroit des auteurs des violations des droits de l'homme.
Cependant elle peut invoquer devant les juridictions pénales l'article
R370 du code pénal contre ceux qui refusent de déférer
à ses convocations.156(*)Mais la Commission se limite surtout à
formuler les recommandations, émettre des avis et dresser des
rapports.157(*) C'est ce
caractère abstrait de l'action de la Commission qui est
dénoncé dans son implication pour l'amélioration des
conditions de détention. En définitive, bien que compatible avec
les Principes de Paris158(*), le fonctionnement de la CNDHL et les missions qui
lui ont été assignées par la loi du 22 juillet 2004 font
que l'action de cette structure dans l'humanisation des lieux de
détention au Cameroun reste quelque peu abstraite. Le contexte social
camerounais étant tel que seule la capacité de répression
que peut développer une telle structure est capable de dissuader la
commission de certaines infractions.
L'absence d'actions concrètes de la CNDHL en faveur de
l'amélioration des conditions de détention constitue donc une
sérieuse entrave à l'humanisation des lieux de détention
tout comme le défaut d'un mécanisme de participation des
détenus et du personnel pénitentiaire dans la mise en oeuvre des
projets d'amélioration des conditions de vie dans le milieu
carcéral.
B- Le déficit de participation des
détenus dans la mise en oeuvre des projets du Service National Justice
et Paix
Parmi les principes de la doctrine sociale de l'église,
le principe de l'option préférentielle pour les pauvres est celui
qui anime plus profondément la mission évangélisatrice de
l'Eglise. Selon le Compendium de la doctrine sociale de l'Eglise, c'est
« (...) une option ou une forme spéciale de priorité
dans la pratique de la charité chrétienne dont témoigne
toute la tradition de l'Eglise »159(*). C'est cette option préférentielle qui
pousse à pratiquer la charité et à oeuvrer en faveur de la
justice sociale pour les pauvres. Le fondement de l'action du Service
National Justice et Paix se trouve dans les Evangiles qui inspirent
l'amour de l'Eglise pour les pauvres. Et c'est fidèle à ses
enseignements que l'Eglise intervient en prison pour rencontrer les personnes
incarcérées dans leurs joies, leurs angoisses, leurs espoirs, et
leurs tristesses, parce que ce sont les joies et les tristesses, les espoirs et
les angoisses des préférés du Christ.160(*) Le ministère de
l'Eglise en prison revêt ainsi un certain nombre de
caractéristiques parmi lesquels la présence gratuite,
l'écoute, la consolation, la compassion, l'évangélisation,
et la réconciliation.161(*) Bien que gardant son indépendance
vis-à- vis de la communauté politique,162(*) l'Eglise et L'Etat sont
cependant appelés à collaborer. Pour cela le Service
National Justice et Paix de l'Eglise catholique exerce son action dans
le respect des normes en vigueur dans les structures pénitentiaires.
Mais lorsque cela est rendu nécessaire, pour la défense des
droits fondamentaux d'un détenu, l'Eglise peut être amenée
à exprimer un jugement moral sur la réalité
pénitentiaire. En ce qui concerne le volet humain, pour la seule
première moitié de l'année 2008, la Commission
Diocésaine Justice et Paix de yaoundé a suivi dans la prison
centrale de NKONDENGUI, 418 dossiers. 58 d'entre eux ont été
confiés aux avocats, 58 personnes libérées suite aux
interventions de la Commission elle même ou des avocats, 15 personnes ont
bénéficié d'une ordonnance de non lieu, 4 personnes ont pu
être placées en liberté provisoire, 72 dossiers ont pu
être mis en l'état et enrôlés, 16 cas de
réinsertion sociale d'ex détenus ont été
réussis, 37 cas de contacts renoués avec la famille, 164 dossiers
en cours de suivi. La Commission Diocésaine Justice et Paix a
particulièrement oeuvré pour l'humanisation des conditions de
détention à la prison centrale de Yaoundé. Entre autre, en
1989 elle a ressuscité l'école du centre éducatif du
quartier des mineurs fermée depuis 1978. en 1995, elle a permis
l'aménagement d'un terrain de sport où peu se pratiquer du
volley-ball, du lawn tennis, du football, du hand ball. En 2002, grâce
à l'intervention de la commission auprès de la coopération
française, l'école des mineurs a reçu une dotation en
fournitures d'un montant de 1.750.000 frs cfa. En 2002, grâce à la
même coopération, une bibliothèque moderne a
été construite à Nkondengui pour un montant total de
6.000.000 frs cfa et un don de fournitures d'un montant de 3.750.000 frs cfa a
été octroyé aux cycles primaires et secondaires toutes les
classes confondues.
La pastorale en milieu carcéral comporte donc deux
volets : un volet humain et un volet spirituel. L'intervention du service
national justice et paix se décline en deux types d'actions : les
actions menées à long terme et les actions menées à
court terme. Les actions à court terme concernent surtout
l'écoute des détenus et leur orientation vers les structures
administratives ou des organisations compétentes susceptibles de les
aider. Les actions à long terme quant à elles s'inscrivent dans
un processus de resocialisation.
Cependant les initiatives entreprises ne tiennent pas toujours
compte des priorités des pensionnaires des structures carcérales.
En effet, bien que l'on ne puisse reprocher au service national justice et paix
son intervention en faveur de l'éducation dans le milieu
carcéral, ou même le suivi des dossiers des détenus au
niveau de l'administration judiciaire, on peut tout de même interroger
l'opportunité de ces investissements quand on sait que la famine et la
maladie sont les premiers adversaires des détenus. Le comité ad
hoc chargé de l'élaboration d'une nouvelle politique
pénitentiaire et de la réforme du système carcéral
le confirme en ces termes :
«Dans la quasi-totalité des prisons,
l'alimentation est insuffisante et de mauvaise qualité. Le repas
donné une fois par jour est de quantité et de qualité
insuffisantes (...). Ainsi alors que la norme internationale prévoit
2000 à 2400 kilos calories par jour et par détenu, la ration
alimentaire actuelle dans nos pénitenciers est évaluée
à 1000 kilos calories en moyenne par jour. L'on comprend que la sous
alimentation chronique des détenus justifie presque à elle seule
la totalité des pathologies et des décès
enregistrés dans les établissements
pénitentiaires».163(*)
Dans un contexte où les détenus peinent à
manger et à se soigner, il est évident qu'ils ne sauraient se
consacrer aux études malgré les importants investissements dont
bénéficie ce secteur dans le milieu carcéral. En
réalité, ces investissements, loin d'être inutiles auraient
pu servir à d'autres secteurs plus prioritaires que l'éducation
et sauver ainsi la vie des centaines de détenus qui meurent tous les ans
de la malnutrition et de la maladie dans les prisons. C'est le défaut de
participation des détenus dans l'élaboration de la politique de
l'aide qui leur est accordée qui conduit à de tels
dysfonctionnements causés par le caractère unilatéral de
cette aide. D'ailleurs, en dévoilant sa feuille de route pour 2008, la
commission diocésaine justice et paix de l'archidiocèse de
Yaoundé ne fait mention à aucun moment d'une quelconque action
visant à satisfaire durablement les besoins élémentaires
des détenus.164(*)
Paragraphe 2nd : Le faible recours aux
mesures alternatives à « l'enferment »165(*)
En raison du risque psychologique que représentait
l'emprisonnement, de nombreuses mesures alternatives sont
proposées. Celles prévues par le Code pénal et les autres
textes législatifs restent hélas très peu utilisées
alors et les autres envisageables au regard de la saturation des prisons
camerounaises tardent à être codifiées.166(*)
A- L'inutilisation des mesures législatives de
substitution existantes
Afin d'assurer le caractère exceptionnel de la
détention le nouveau code de procédure pénale a
adopté une gamme variée de mesures qui tendent à
éviter le recours systématique à l'incarcération ou
à en limiter la durée. La surveillance judiciaire ou
contrôle judiciaire prévue aux articles 246 à 250
du code de procédure pénal constitue à cet un effet un
substitut à la détention provisoire. Il s'agit d'une mesure par
laquelle le juge d'instruction soumet l'inculpé à un certain
nombre d'obligations visant à assurer la mainmise permanente de la
justice sur le bénéficiaire de la mesure(ne pas sortir des
limites territoriales déterminées par le juge d'instruction,
répondre aux convocations de toute autorité chargée de la
mission de surveillance et d'assistance ou de toute autre autorité
désignée par le juge d'instruction, assurer sa
représentation en justice soit par un cautionnement ou une garantie
morale...). Ces obligations tendent aussi à limiter les risques de
récidive, la dissimulation des preuves ou une concertation
frauduleuse(ne pas se rendre en des lieux déterminés, s'abstenir
de recevoir certaines personnes désignées par le juge
d'instruction ainsi que de communiquer avec elles de quelque façon que
ce soit, ne pas exercer certaines activités professionnelles lorsque
l'infraction a été commise à l'occasion ou dans l'exercice
de celles-ci...). La surveillance judiciaire peut également intervenir
après la clôture de l'information par une ordonnance de renvoi.
Il en est de même pour la Cour d'appel réunie en Chambre de
contrôle.
La mise en liberté sous caution est
aussi une mesure alternative à l'emprisonnement. Ce mécanisme de
substitution dont seuls les détenus provisoires peuvent être
bénéficiaires, n'est opérationnel que lorsque la peine
encourue n'est pas l'emprisonnement à vie ou la condamnation à
mort. C'est une mesure prise par le juge d'instruction pour substituer la
détention provisoire à la liberté. Elle est cependant
subordonnée au versement par son bénéficiaire d'une
caution qui garantit la représentation de l'inculpé à
tous les actes de la procédure et éventuellement, le paiement des
condamnations pécuniaires prononcées contre lui. Ce sont les
articles 224 à 235 du code de procédure pénale qui
garantissent cette mesure alternative à l'emprisonnement. Mais les
personnes définitivement condamnées peuvent elles aussi
prétendre, sous réserve de conditions bien définies,
à une autre forme de liberté : la liberté
conditionnelle.
Ce sont les articles 691 à 694 du code de
procédure pénale qui traitent de la libération
conditionnelle. Elle est «la mise en liberté
anticipée du condamné à une peine privative de
liberté ou soumis par la décision de condamnation à une
mesure de sûreté de même nature».167(*) Elle n'est pas une mesure de
substitution à la privation de liberté à proprement parler
parce que seuls des condamnés ayant purgé une partie de leur
peine y ont droit. Mais cependant, elle s'inscrit dans une logique de
resocialisation de la personne incarcérée en ce sens qu'elle
tient compte des efforts d'amendement du bénéficiaire tout au
long de son séjour dans le pénitencier.168(*)
Pourtant déjà bien prévus et
encadrés par le code pénal, ces différentes mesures n'ont
jusqu'à lors fait l'objet que d'une application bien restreinte. Ce sont
des dispositions qui renforcent les mesures pourtant déjà
édictées par le code pénal dans ses articles 40 à
42 (pour la surveillance judiciaire), 61 à 64 (pour la libération
conditionnelle), mais qui malheureusement sont jusque là restées
d'application très restreinte ou consciemment ignorées par les
détenteurs de ce pouvoir, contribuant ainsi au surpeuplement du milieu
carcéral et entraînant du même coup la dégradation
des conditions d'existence des personnes privées de liberté. La
nouvelle politique pénitentiaire telle que définie par le
Comité ad hoc chargé de l'élaboration d'une nouvelle
politique pénitentiaire et de la réforme du système
carcéral prône pourtant la refondation des peines autour des
idéaux de vie démocratique sans délégitimer la
prison.169(*) Elle
explique bien que « (la prison) n'est pas la peine en tant que
telle. La peine est la privation de liberté »170(*) et définit la prison
comme « un dispositif de surveillance du délinquant soumis
à une peine privative de liberté».171(*) La liberté est donc
la règle et l'emprisonnement l'exception. Une exception que consacrent
la déclaration de Kampala sur la promotion et l'utilisation des mesures
alternatives à la privation de liberté.
B- Les autres mesures envisageables
L'utilisation des mesures alternatives à l'enfermement
pourrait devenir une arme efficace dans la lutte contre la surpopulation
carcérale surtout dans un contexte où les magistrats ont
systématiquement recours à la détention préventive,
même pour des délits mineurs.
Le travail d'intérêt
général (TIG) est sans doute le substitut le plus
efficace aux courtes peines d'emprisonnement. Il consiste pour le
condamné à accomplir pendant une durée bien
déterminée (comprise entre 40 et 140 heures dans le droit
français), un travail non rémunéré au profit d'une
personne morale de droit public ou d'une association habilitée. Le
TIG a deux aspects très positifs : d'abord il oblige à faire
quelque chose plutôt que de subir l'emprisonnement, ensuite il introduit
une notion nouvelle, celle d'adhésion. En effet, le condamné doit
être présent lors du prononcé de cette peine et avoir
donné son accord préalable du fait de la prohibition des travaux
forcés. Cela signifie que le condamné reconnaît sa faute et
choisit sa sanction. En France par exemple depuis 1983, date d'application de
cette mesure, les associations et les collectivités locales ont
répondu très favorablement.172(*) Les TIG vont des travaux d'entretien des parcs et
jardins à l'initiation à une formation pour les
délinquants qui n'ont aucune qualification en passant par des travaux
qui requièrent une compétence précise et que la
société a tout intérêt à faire
exécuter au délinquant. Or il faut pour que cette peine soit
acceptée qu'elle soit effective, il faut donc une décision
politique d'investissement afin de se doter d'une infrastructure correcte
d'exécution des peines en milieu ouvert, cette décision
appartient à l'Etat. Et c'est précisément pour cette
raison que le Professeur Bernard-Raymond GUIMDO suggère un encadrement
strict de l'application de cette mesure et un suivi de tout instant des
délinquants dans l'exécution de la peine décidée
afin que le TIG ne soit pas une simple formalité judiciaire173(*), mais que son application,
tout en respectant les règles de TOKYO174(*), promeuve une nouvelle approche de la peine en
même temps qu'elle dissuade la commission de nouvelles infractions. C'est
pour cette raison que, prenant en compte l'efficacité limitée de
l'incarcération, en particulier pour les détenus purgeant de
courtes peines, ainsi que le coût de l'emprisonnement pour l'ensemble de
la société, Les participants au Séminaire international
sur les conditions de détention dans les prisons en Afrique, tenu
à Kampala du 19 au 21 septembre 1996, ont recommandé
que: « Que le travail d'intérêt
général et autres mesures non privatives de liberté soient
autant que possible, préférés à
l'incarcération ».175(*)
Peu réaliste dans le contexte africain,
l'arrêt domiciliaire sous surveillance électronique (ou
bracelet électronique), prévu par les lois
françaises du 19 décembre 1997 et du 15 juin 2000, est en place
à titre expérimental depuis septembre 2000. Il place le
condamné sous surveillance électronique via un bracelet
émetteur signalant au service chargé de la surveillance tout
dépassement d'un rayon d'action fixé par le Juge d'application
des peines. Son principal avantage étant de ne pas couper le
condamné de tout lien social ce qui est inestimable. Au 1er octobre
2002, 393 mesures avaient été prononcées avec un taux
d'échec très faible.176(*) Le bracelet électronique constitue donc une
alternative pertinente à l'emprisonnement et une modalité du
contrôle judiciaire de nature à limiter le nombre de
détentions provisoires.
Le suivi socio judiciaire177(*) est une peine
destinée aux personnes condamnées pour une infraction sexuelle.
L'objectif poursuivi est de prévenir la récidive des
délinquants sexuels, notamment en les « incitant »
fortement à suivre un traitement. Le suivi socio judiciaire est
prononcé par le tribunal ou la Cour en complément ou à la
place de la peine de prison. Il implique que le condamné devra se
soumettre, immédiatement ou à sa sortie de sa prison s'il est
incarcéré, à un suivi judiciaire, social et
éventuellement médical. S'il ne se conforme pas à ses
obligations, le condamné devra exécuter une peine de prison
supplémentaire. Le défaut de codification de ces mesures en
droit interne les rend inopérantes dans le contexte camerounais et
contribue ainsi à l'augmentation de la population carcérale.
D'où la préoccupation de la FIACAT (Fédération
Internationale de l'Action des Chrétiens pour l'Abolition de la Torture)
qui recommande à l'Etat camerounais de « prendre des
mesures urgentes pour lutter contre la surpopulation carcérale en
privilégiant les mesures alternatives à la détention des
personnes, particulièrement en ce qui concerne les personnes
condamnées pour des délits mineurs ou pour les personnes en
détention préventive depuis de nombreuses années ainsi
qu'en construisant de nouvelles prisons répondants aux
normes ».178(*) Mais la mise en route des réformes
escomptées nécessite, compte tenu des contraintes socio
économiques du Cameroun, une assistance technique et financière
extérieure pour établir les bases d'une nouvelle politique
pénitentiaire arrimée aux normes internationales et donc, plus
respectueuse des droits de l'homme.
Section 2 : Le caractère draconien
du partenariat externe
L'intérêt et l'attention des partenaires au
développement se sont traduits par des interventions multiformes en
faveur de l'amélioration des conditions de détention au cameroun.
Les projets mis en oeuvre ont connus des fortunes diverses du fait de
l'implication timide de certains partenaires et des desseins pour le moins
inavouées des autres. Les stratégies développées en
partenariat avec les acteurs extérieurs souffrent de
l'inadéquation du cadre de coopération et du dévoiement
de l'aide extérieure.
Paragraphe 1er :
L'inadéquation du cadre de coopération avec les partenaires au
développement.
Le partenariat externe nécessite la mise sur pied d'un
cadre de coopération adéquat pour un accomplissement heureux des
objectifs fixés. Mais la complexité des règles de
procédure des partenaires extérieurs et le non respect des
engagements de la partie nationale contribuent très souvent à
retarder ou même à empêcher la réalisation de ces
objectifs.
A- La complexité des règles de
procédure des partenaires extérieurs
Les règles de procédures sont une réelle
pesanteur à une coopération efficace entre le Cameroun et ses
partenaires extérieurs. Pour la plupart du temps, les lenteurs
observées dans l'exécution des programmes d'assistance sont dues
au déblocage tardif des moyens financiers par les partenaires, mais
aussi à un mécanisme complexe de mise en oeuvre des projets et
programmes d'amélioration des conditions d'incarcération. Pour le
cas du projet PACDET179(*), rendu actuellement à sa deuxième
phase et qui est le projet phare de l'amélioration des conditions de
détention au Cameroun, c'est à l'unité de gestion du
programme (UGP) que revient la charge de procéder à
l'identification des activités à financer, d'arrêter le
budget et le chronogramme de mise en oeuvre du projet. Le projet de
devis-programme ainsi arrêté est soumis tour à tour
à l'approbation du ministère technique compétent qui pour
le cas d'espèce est le Ministère de la Justice qui assure
également le rôle de maître d'oeuvre à travers la
Direction de l'Administration Pénitentiaire, de l'ordonnateur national
du FED (Fonds Européen de Développement) pour lequel travaille
l'UGP, de la Délégation de la Commission Européenne qui
fonctionne comme une ambassade parce que bras technique de mise en oeuvre du
projet qui est couplé à l'organe politique. Puis c'est au tour du
Comité de Pilotage180(*) de procéder à l'approbation dudit
projet avant de le soumettre à la signature du MINEPAT181(*), du MINJUSTICE et à
la Délégation de l'Union Européenne. Le devis-programme
qui en résulte peut alors rentrer dans sa phase de mise en oeuvre. Ces
différentes étapes qui d'ailleurs ne sont pas les seules
alourdissent considérablement le processus de mise en oeuvre du projet.
Surtout que le déblocage des fonds alloués au projet ne va pas de
soi. A titre d'exemple, la mission d'évaluation du programme
d'amélioration des conditions de détention et du respect des
droits de l'homme note que les 210.870 Euros sur lesquels portait le
devis-programme de démarrage (1er juillet au 31
décembre 2002) n'ont été utilisés qu'à
hauteur de 28%.182(*) Si l'on peut comprendre la
nécessité de sécuriser les financements destinés
aux investissements surtout dans une société camerounaise
fortement empreinte de malversations financières de toutes sortes, l'on
peut cependant regretter que cette politique de gestion prenne le pas sur les
objectifs d'amélioration des conditions de vie dans le milieu
carcéral, contribuant de ce fait à retarder l'atteinte des
objectifs, ou même à décourager les partenaires nationaux
qui se sentent infantilisés et humiliés par le manque de
confiance des partenaires extérieurs.
B- Le non-respect des engagements de coopération
par l'administration camerounaise
L'incapacité technique de l'administration
pénitentiaire camerounaise à répondre aux attentes
constituant les contre parties inhérentes aux projets de
coopération et à profiter durablement des opportunités
offertes a généralement hypothéqué le bon
déroulement de ceux-ci et rendu les partenaires extérieurs
sceptiques quant à la poursuite de leur soutient. Si le PACDET reste un
bel exemple de coopération nord-sud. De nombreux programmes de
coopération, s'ils n'ont pas connu une interruption brusque du fait du
non respect par la partie camerounaise des engagements contractés, ont
cependant marqués négativement les bailleurs extérieurs
qui n'ont pas jugé utile d'en reconduire certains, d'en étendre
d'autres ou d'en envisager de nouveaux. C'est le cas du projet d'appui aux
droits de l'homme et au développement d'une culture démocratique
au Cameroun développé par la France, le
projet de réhabilitation et /ou l'équipement de certains
établissements pénitentiaires et la formation du
personnel pénitentiaire que soutenait la Grande
Bretagne, le projet d'appui à la formation
continue des personnels de l'administration pénitentiaire
initié par le Canada. « La
méfiance à l'égard des Etats prédateurs africains
incite les donateurs à contourner l'échelon étatique, au
risque de se cantonner dans des actions locales »183(*).
Il parait dès lors urgent de mettre en place un cadre
approprié de coopération dépouillé de toutes les
pesanteurs, un cadre qui rassure les partenaires et favorise le
développement des projets conjointement adoptés dans le strict
respect des conventions de financement et sans velléités
hégémonistes.
Paragraphe 2nd :
L'instrumentalisation de l'aide extérieure destinée à
l'humanisation des conditions de détention
La coopération internationale doit se mettre au service
du développement, pour cela les relations entre bailleurs
extérieurs et Etats doivent passer de l'assistanat à une
réelle approche partenariale. Mais l'aide extérieure se trouve
très souvent dénaturée du fait des velléités
hégémonistes et des calculs stratégiques qui poussent les
partenaires extérieurs à imposer des conditions qui ne cadrent
pas avec les objectifs des projets envisagés. Le partenariat se trouve
ainsi dénaturé surtout lorsque les conditions posées sont
susceptibles d'enfreindre la souveraineté des Etats
bénéficiaires. En s'essayant à un bilan de l'aide au
développement en Afrique, le Docteur Mamadou Diouf, Président du
Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en
Afrique (CODESRIA) affirme que :
« Le continent africain a reçu un volume
d'aide extraordinaire. Mais quand on rapproche les financements perçus
des actions envisagées et des résultats obtenus, il est clair que
l'on n'a pas atteint les objectifs globaux qui avaient été
fixés. Les réussites ne concernent que des actions très
précises. On peut d'ailleurs se demander si les interventions de
coopération ont été bien choisies ».
L'ONG Refonder l'Etat en Afrique estime
à ce sujet que :
« Tant que les pays riches continueront de faire
de l'aide au développement, avant tout un de leurs instruments de
politique et d'influence dans le domaine diplomatique et commercial, l'esprit
de cette aide continuera d'être dévoyé, corrompu par des
considérations qui n'ont rien à voir avec les motivations
exprimées et les finalités déclarées. Il est
possible d'établir entre tous les partenaires des cadres et des
mécanismes de convergence de l'aide au développement, qui
rationalisent celui-ci et le rendent plus efficace. Dans cette perspective,
l'on doit, par exemple, accepter que les partenaires nationaux,
bénéficiaires de cette aide, définissent les orientations
et fixent les priorités et non l'inverse ».184(*)
La dénaturation de l'aide apportée par les
partenaires extérieurs dessert donc les intérêts de la
communauté carcérale en ce sens qu'elle suscite au sein de
l'administration bénéficiaire des blocages dus au fait que
certaines conditions imposées sont de nature à créer une
situation d'ingérence. Les exigences de la bonne gouvernance commandent
certainement l'amélioration des pratiques de gestion cependant, ces
exigences à elles seules ne sauraient justifier le contournement par les
partenaires extérieurs, d'une administration souveraine dans la mise en
oeuvre des projets fussent-ils au bénéfice de ses populations.
CONCLUSION GENERALE
L'humanisation des lieux de détention au Cameroun se
heurte à de nombreux obstacles. Le caractère épars des
normes juridiques de protection des personnes incarcérées et la
minoration des garanties procédurales contribuent à la
minimisation des principes juridiques internationaux applicables aux personnes
incarcérées pendant que l'inadaptation de l'institution
judiciaire à l'exercice des droits processuels des personnes
privées de liberté et la timide répression des atteintes
à la dignité humaine dans les lieux de détention ne
favorisent pas la protection de cette catégorie de personnes. Les
limites ainsi observées dans l'application des mesures existantes en
matière de privation de liberté se posent donc comme un frein
à l'amélioration des conditions de détention.
Comprendre pourquoi malgré les textes et
mécanismes existants, les conditions de détention au Cameroun ne
respectent pas les normes internationalement admises exige d'interroger
également la politique pénitentiaire. Cet exercice
révèle ainsi que la déficience des ressources humaines et
l'insuffisance des ressources matérielles affecte qualitativement et
quantitativement les services et la protection que les personnes
privées de liberté sont en droit d'attendre de l'Etat du fait de
leur statut juridique. De même, l'inefficacité des initiatives
internes d'humanisation des lieux de détention et l'instrumentalisation
de l'aide extérieure à l'amélioration des conditions de
détention au Cameroun contribuent à maintenir les détenus
dans un leur état de marginalisation.
Le contexte global de pauvreté constitue pour les
autorités un paravent pouvant justifier les restrictions voire
même les atteintes aux droits des personnes privées de
liberté. Pourtant l'être humain, du fait seulement de sa nature
humaine jouit d'une certaine dignité à laquelle sont
rattachés un certain nombre de droits dits fondamentaux.185(*) C'est le cas du droit
à un procès équitable, du droit d'être
protégé contre la torture et autres traitements inhumains et
dégradants, du droit d'accès au juge, du droit à
l'alimentation, du droit à la santé et du droit à un
environnement sain. Le non respect de ces droits pouvant engager la
responsabilité de l'Etat du Cameroun. Cependant, les cas de saisine des
instances internationales ou régionales par des personnes
incarcérées pour atteinte ou violation de ces droits fondamentaux
restent rares, voire même inexistants malgré la
disponibilité de ces instances. Pourtant, au plan universel, le
Comité des droits de l'homme, le Comité des droits
économiques sociaux et culturels, le Comité contre la torture,
sont autant d'instances compétentes pour connaître respectivement
des cas de violation des droits civils et politiques, des droits
économiques sociaux et culturels et des cas de torture et des
traitements inhumains et/ou dégradants. Au plan régional la
commission africaine a exercé sa compétence pour connaître
de nombreux cas de violation des droits de l'homme186(*). Au plan national,
même si la crédibilité des instances judiciaires fait
encore problème, ces structures demeurent un préalable
nécessaire pour la mise en mouvement des instances internationales et
régionales. Les recours intentés par les personnes
incarcérées pour violation des droits de l'homme sont donc
possibles aussi bien contre le personnel chargé de l'application des
lois, que contre l'Etat parce que ce dernier n'a pas respecté ses
engagements internationaux envers les personnes privées de
liberté.
Ce n'est pourtant pas faute de pertinence que les cas de
violation des droits des détenus ne sont pas soumis aux instances
internationales. En effet, les visites effectuées dans les lieux de
détention ont permis de constater que les rapports des organisations de
défense des droits de l'homme n'ont nullement dramatisé la
réalité du milieu carcéral camerounais. Au contraire, le
souci de neutralité, d'impartialité de certaines d'entre elles et
les exigences de la diplomatie seraient à l'origine des rapports
édulcorés. Mais la disponibilité de ces recours reste
à démontrer au regard du caractère élitiste de
ceux-ci. En effet, les conditions relatives à la saisine de ces
instances aussi bien au plan régional qu'au plan universel
présentent des similitudes liées pour la plupart
« à la difficulté des justiciables des pays en voie de
développement à recourir à ces instances, non seulement en
raison de leur pauvreté, mais aussi et surtout eu égard à
ce que le maniement de la procédure contentieuse exige la maîtrise
d'un minimum juridique »187(*). Le Docteur Alain Didier Olinga relève
à ce sujet que :
« Les auteurs des communications sont donc pour
l'essentiel, des personnes possédant des ressources intellectuelles,
matérielles et autres susceptibles d'être mobilisées, par
elles-mêmes ou par des institutions vouées à la protection
des droits et qui souhaitent évoluer dans une logique
d'exemplarité et de médiatisation. Dans le cas singulier du
Cameroun, on constate qu'est vérifié le caractère
élitiste du contentieux africain devant les instances internationales de
contrôle... ».188(*)
L'humanisation des lieux de détention exige certes le
respect de la dignité humaine, mais elle doit également prendre
en considération les réalités propres à chaque Etat
et qui sont pratiquement les mêmes pour les pays africains. Il convient
de relever cependant qu'il ne s'agit pas pour l'Etat, de sacrifier les
honnêtes citoyens sur l'autel de ses engagements internationaux envers
les délinquants par la construction de centres huppés au
bénéfice des malfaiteurs et avec l'argent de leurs victimes.
Au final, l'humanisation des lieux de détention reste
un processus dont le but est l'épanouissement des personnes
privées de liberté mais qui se décline en plusieurs
étapes et qui requiert de la part des cadres et du système qu'ils
animent de l'ingéniosité pour les premiers et de la
maturité pour le second. Le système pénitentiaire en
Afrique, tout en respectant les principes internationaux, peut trouver dans les
valeurs propres à ce continent des solutions à certaines
situations qui contribuent à la dégradation des conditions de
détention. La palabre typiquement africaine reste un modèle de
résolution des litiges qui se solde dans la plupart des cas par un
arrangement à l'amiable et une forme de réconciliation des
parties dont seules les sociétés traditionnelles ont le secret.
Au pire des cas, la mise à l'écart de la communauté peut
être envisagée avec la possibilité pour le mis en cause de
réintégrer la communauté après des excuses
publiques et son amendement. Si de telles pratiques s'appliquent tel quel
difficilement dans un Etat moderne, elles peuvent cependant constituer une
parade à l'emprisonnement pour les délits mineurs dans certaines
communautés ou l'autorité traditionnelle jouit encore d'un grand
prestige, à charge pour l'administration d'effectuer le contrôle
nécessaire pour éviter les dérives. L'on peut donc
conclure avec Mamadou Diouf, président du conseil pour le
développement et de la recherche en sciences sociales en Afrique,
que :
« Les Africains instruits sont nombreux, mais
leur éducation est souvent totalement inadaptée aux besoins de la
société. Elle ne leur permet pas de comprendre les
problèmes de l'Afrique, de saisir sa complexité et de proposer
des solutions internes. Or pour construire l'avenir des sociétés
africaines, il faut puiser dans la tradition et non dans la pensée
moderne. »189(*)
BIBLIOGRAPHIE
I- Manuels, recueils, dictionnaires
A- Recueils
-Recueil africain des décisions des droits Humains,
centre for Human Rights et l'Institut pour les Droits Humains et le
Développement en Afrique, Pretoria University Law Press, 2000, 369 p
-MIAMBANZILA (E.M. F.), le travail
d'intérêt général : une alternative à
l'emprisonnement et à ses méfaits, veille documentaire, sous la
direction de Jean Michel CHUEZ,université de Nantes,UFR droit et science
politique,2005, 67 p
B- Dictionnaire
-Dictionnaire encyclopédique de langue
française petit Larousse, édition 1992, 1740 p.
-Dictionnaire Littré en ligne,
http//www.françoisgannaz.free.fr/Littré/xmlittré.php
- Lexique des termes juridiques, 13ème
édition, Dalloz, 2001, 592 p.
-Encyclopédie libre wikipédia,
http://www.fr.wikipédia.org/wiki/prison, consulté le 12
juillet 2008
II- Ouvrages
-FOKA (F.), Le contentieux
africain des droits de l'homme et des peuples, 3ft, Yaoundé, 2008,
180 p.
-GHIGLIONE et
MATALON, Les enquêtes sociologiques, théories et
pratiques, Armand Collin, Paris, 1991,.....p .
-GRAWITZ (M.), Méthodes
des sciences sociales, 6ème éd., Dalloz, Paris,
1984, ... p.
-MINKOA SHE (A.), Droits de l'homme
et droit pénal au Cameroun, coll. La vie du droit en Afrique,
Ed.Economia, 1999, 321 p.
-SOYER (J. C.), Droit
pénal général et procédure pénale,
Paris LGDJ, 13ème édition, année
III- Thèses et mémoires
-ETOUNDI (J.),
L'administration pénitentiaire camerounaise et la protection des
droits de l'homme : le cas de la maison d'arrêt de Kondengui
à Yaoundé, Mémoire de Master en droits de l'homme et
action humanitaire Université Catholique d'Afrique Centrale,
année 200, 106 p.
-OUMBA (P.), La CIJ et la
problématique des droits de l'homme, Mémoire de Master,
Université Catholique d'Afrique Centrale, année 2004,
mémoire on-line,
http://www.memoireonline.com/12/05/19/cij-problematique-droits-de-l-homme.html,
consulté le 22 juin 2007
-NGONO MVOGO (J. A.), La police
camerounaise et l'interdiction de la torture, Mémoire de Master en
droit de l'homme et action humanitaire, Université Catholique d'Afrique
Centrale, année 2004, 97 p.
-NGWAFOR TANGYE (W.), Les conditions de
vie et le respect des droits de du détenu au Cameroun,
Mémoire de Master en droits de l'homme et action humanitaire
Université Catholique d'Afrique Centrale, année 2003, 67 p.
-TEJIOZEM (R.), La détention
préventive et les droits de l'homme au Cameroun, Mémoire de
Master en droits de l'homme et action humanitaire Université Catholique
d'Afrique Centrale, année 2005, 88 p.
IV-Articles
-ATEMENGUE (E.),
«La torture en milieu carcéral : le cas de la prison centrale
de Kondengui-Yaoundé (09 octobre 1985-06 octobre 1995)'', in
Intégrité physique et dignité humaine, Cahier
africain des droits de l'homme n°1, Novenbre1998, Etudes et documents de
l'apdhac, Presses de l'ucac, Pp.53-63
-BREARD (M.), «Guantanamo
Bay : la prison de la honte''
http://www.quebecoislibre.org,
consulté le 12 juillet 2008.
-ETOUNDI ONANA (F.) , «Analyse
des décisions de justice et fonctionnement de l'institution
carcérale'', in Presse et droits de l'homme en Afrique
centrale, cahier africain des droits de l'homme n°5,
Etude et documents de l'apdhac, Presses de l'ucac, Octobre 2000 ,
Pp121-125.
-Eyike-Vieux, Les droits du
prisonnier, in Intégrité physique et dignité
humaine, Cahier africain des droits de l'homme n°1, Novenbre1998,
Etudes et documents de l'apdhac, Presses de l'ucac, Pp 65-87
-FOUEGOUM (A.), «Institutions
judiciaires et carcérales'', in Presse et droits de l'homme en
Afrique centrale, cahier africain des droits de l'homme
n°5, Etude et documents de l'apdhac, Presses de l'ucac, Octobre 2000, Pp
111-118.
-GIUMDO (B.-R.), «Les
alternatives à l'emprisonnement dans des contextes de
surpeuplement carcéral : le cas du Cameroun'', in Juridis
périodique n° 60, Edition Presses universitaires d'Afrique,
Décembre 2004, Pp 77-85.
-GIUMDO (B.-R.), «Droit au
developpement et dignité humaine'', in Actualité
Scientifique, (dir.) Jacques-Yvan Morin, AUPELF-UREF, Bruylant, 1997,
Bruxelles, pp 73-89.
-MPIGA KOUMA, Il faut
préserver la dignité du séropositif, http//
amic.refer.ga
-TCHAKOUA (J. M.), «Les droits de
l'homme au village'', in Justice et Paix en Afrique Centrale, presses
de l'UCAC, septembre 1995
V- Documents
A- Documents officiels
1- Textes juridiques internationaux
-La Déclaration universelle des
droits de l'homme du 10 décembre 1948
-Le Pacte international relatif aux droits
économiques sociaux et culturels du 16 décembre 1966
-Le Pacte international relatif aux droits
civils et politiques du 16 décembre 1966
-Le Code de conduite du personnel chargé de
l'application des lois du 17 décembre 1979
-L'ensemble des règles minima pour le
traitement des détenus Adopté par le premier Congrès des
Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des
délinquants, tenu à Genève en 1955 et approuvé
par le Conseil économique et social dans ses résolutions 663 C
(XXIV) du 31 juillet 1957 et 2076 (LXII) du 13 mai 1977
-La Déclaration de Kampala sur les conditions de
détention en Afrique du 21 septembre 1996
-La Déclaration de Moscou sur la santé en
prison et santé publique du 24 octobre 2003
-La Convention contre la torture et son protocole du 10
décembre 1984
2- Textes juridiques nationaux
-Arrêté n° 0080 du 10 mai 1983 du
ministre de l'administration territoriale portant sur le statut du personnel de
l'administration pénitentiaire
-Décret 2001/065 du 12 Mars 2001 portant statut
spécial du corps des fonctionnaires de la Sûreté
Nationale
-La Constitution du 18 janvier 1996
-Le Code de procédure pénale
-La loi n° 92/052 du 27 mars 1992 portant
régime pénitentiaire au Cameroun
B- Jurisprudence
-Amnesty International et autres c/
Etat du Soudan, Commission africaine, com. n° 48/90, 50/91,89/93.
-Annette PAGNOULE c/ Etat du Cameroun,
Commission africaine, com. n°39/90
-Centre for free speech c/Etat du Nigeria, Commission
africaine, com. n°206/97
-Constitutionnal rights project c/ Etat du Nigeria,
Commission africaine, com. n°153/96
-Law office of Ghazi c/ Etat du Soudan, Commission
africaine, com. n°222 /98,229/99
C- Les rapports
-Rapport d'étape de la mission
d'évaluation du PACDET, Paris-Bruxelles-Yaoundé, 2004
-Rapport 2006 du comité ad hoc chargé de
l'élaboration d'une nouvelle politique pénitentiaire et de la
réforme du système carcéral.
-Rapport 2006 du Ministère de la
justice sur l'état des droits de l'homme au Cameroun
-Rapport 2007 du Ministère de la
justice sur l'état des droits de l'homme au Cameroun
-Rapport 2007 de la Commission Nationale des Droits de
l'Homme et des Libertés sur l'état des droits de l'homme au
Cameroun
-Rapport général 2008 sur la visite des
centres de détention de Yaoundé par la CNDHL, Décembre
2008.
D- Autres documents
- Cameroun Tribune N° 08991/5190 du 05
décembre 2007
ANNEXES
TABLE DES MATIERES
Dédicaces................................................................................................i
Remerciements.........................................................................................ii
Sigles et
abréviations..................................................................................iii
Résumé/mots
clés.......................................................................................iv
Abstract/ key
words....................................................................................v
Sommaire................................................................................................vi
Introduction
générale..................................................................................1
I- Contexte de
l'étude..................................................................................1
II- Délimitation de
l'étude............................................................................2
1-Délimitation
matérielle..........................................................................2
2-Délimitation
spatiale............................................................................2
3-Délimitation
temporelle.........................................................................3
III- Définition des
concepts..........................................................................4
IV- Intérêt du
sujet....................................................................................5
1-Intérêt
social.....................................................................................5
2-Intérêt
scientifique..............................................................................6
V- Revue de
littérature..............................................................................6
VI-
Problématique..............................................................................
.....9
VII- Hypothèses de
recherche......................................................................10
VIII- Cadre
méthodologique.......................................................................10
1-Les méthodes
utilisées.......................................................................10
a- La méthode
juridique................................................................10
b- La méthode
systémique..............................................................11
c- La méthode
fonctionnelle............................................................11
2- Les techniques de recherche
appliquées..............................................11
a- Les
interviews.........................................................................11
b-L'enquête...............................................................................11
IX- Articulation et justification du
plan.........................................................12
Première partie : L'APPLICATION
LIMITEE DES MESURES EXISTANTES......13
Chapitre 1er : LA MINIMISATION
DES PRINCIPES JURIDIQUES INTERNATIONAUX APPLICABLES AUX PERSONNES
INCARCEREES........... 15
Section 1 : Une application mitigée des
principes de protection des droits physiques des personnes
détenues.....................................................................................15
Paragraphe 1er : Le
caractère épars des normes juridiques de protection de la
personne
détenue.....................................................................................................16
A- La dilution de la protection de la
dignité des personnes privées de leur liberté dans la
multiplicité des instruments de droit
.............................................................16
B- La relativité de la protection de
l'intégrité physique des personnes détenues.....18
Paragraphe 2nd : La
permissivité des instruments spécifiques de protection de la
dignité des personnes
incarcérées...............................................................................21
A- L'absence de contrainte des instruments de
protection spécifique des personnes privées de
liberté...........................................................................................21
B-La progressivité dans la
réalisation des droits fondamentaux de l'homme...........22
Section 2 :Une minoration des garanties
procédurales et des règles
d'incarcération.............................................................................................24
Paragraphe 1er : La méconnaissance des
garanties procédurales........................... ..24
A- Le non respect du principe de la
présomption d'innocence ............................24
B- Le reniement des droits de la
défense.......................................................26
Paragraphe 2nd : L'inobservation des
règles en matière d'incarcération
.................. 28
A- La séparation des détenus en
fonction de leur statut juridique.......................28
B- La séparation des détenus en fonction du
genre.........................................31
Chapitre 2 : UNE CADRE
JUDICIAIRE PEU FAVORABLE A LA PROTECTION DES PERSONNES
INCARCEREES...............................................................33
Section 1 : L'inadaptation de
l'institution judiciaire à l'exercice des droits processuels des
personnes privées de
liberté.....................................................................33
Paragraphe1 : Un difficile accès à
la justice......................................................34
A- Le caractère restrictif des voies de
recours ..............................................34
B- L'impossibilité matérielle des
détenus à assurer leur défense
........................35
Paragraphe2 : Les pratiques judiciaires
préjudiciables aux détenus........................37
A- La systématisation de la privation de
liberté ..........................................37
B- La lenteur des procédures
judiciaires....................................................40
Section 2 : La timide répression
des atteintes à la dignité humaine dans les lieux de
détention...................................................................................................41
Paragraphe1 :La faiblesse des mesures et
disciplinaires prises à l'encontre les agents
indélicats...................................................................................................42
A- L'échelle des sanctions
disciplinaires....................................................42
B- La timidité de la mise en oeuvre des
sanctions disciplinaires.........................44
Paragraphe2 : Le caractère peu
dissuasif des actions judiciaires engagées contre le personnel
chargé de l'application des
lois...........................................................45
A- La rareté des
poursuites.....................................................................45
B- La complaisance des sanctions
pénales prononcées contre le personnel chargé de
l'application des
lois....................................................................................46
Seconde Partie : L'INNEFICACITE DE LA
POLITIQUE PENITENTIAIRE...........49
Chapitre1 :L'INADEQUATION DES RESSOURCES
HUMAINES ET MATERIELLES AUX REALITES DU MILIEU
CARCERAL...............................51
Section 1: La déficience des ressources
humaines................................................51
Paragraphe1 : L'insuffisance des
effectifs..........................................................51
A- Le personnel de l'administration
pénitentiaire............................................52
B- Les autres
administrations....................................................................54
Paragraphe2 : La déficience qualitative du
personnel..........................................56
A- Une sous-qualification des personnels
spécialisés.......................................56
B- Une formation inadaptée des
élèves de l'ENAP..........................................57
Section 2 : L'insuffisance des ressources
matérielles allouées au système
pénitentiaire.............................................................................................58
Paragraphe 1 : L'irréalisme des
allocations budgétaires ......................................58
A- La faiblesse et l'irrégularité du
budget de fonctionnement...........................58
B- La modestie du budget d'investissement de
l'administration pénitentiaire.........59
Paragraphe 2 : La rareté des actions
caritatives dans les lieux de détention................62
A- La faible médiatisation des conditions
carcérales au Cameroun....................61
B- Un défaut d'orthodoxie dans la gestion
des dons ......................................62
Chapitre 2 : LES ENTRAVES AUX STRATEGIES
DEVELLOPPEES POUR LA PROTECTION ET LA PROMOTION DES DROITS DE L'HOMME EN MILIEU
CARCERAL.............................................................................................65
Section 1 : L'inefficacité des initiatives
locales....................................................65
Paragraphe 1er : Les
initiatives internes d'humanisation des lieux de détention
...............................................................................................................65
A- L'absence de pragmatisme dans les initiatives
de la CNDHL.......................65
B- Le déficit de participation des
détenus dans la mise en oeuvre des projets du Service National Justice
et
Paix......................................................................68
Paragraphe 2nd : Le faible recours aux mesures
alternatives à « l'enferment »...........70
A- L'inutilisation des mesures
législatives de substitution existantes.................70
B- Les autres mesures
envisageables........................................................72
Section 2 : Le caractère draconien du
partenariat externe....................................74
Paragraphe 1er :
L'inadéquation du cadre de coopération avec les partenaires au
développement..........................................................................................74
A- La complexité des règles de
procédure des partenaires extérieurs..............74
B- Le non-respect des engagements de
coopération par l'administration
camerounaise............................................................................................76
Paragraphe 2nd :
L'instrumentalisation de l'aide extérieure destinée à
l'humanisation des conditions de
détention............................................................................76
Conclusion
générale....................................................................................78
Bibliographie.............................................................................................83
Annexes
...................................................................................................88
Table des matières
.......................................................................................89
* 1CAMUS (Albert),
cité par l'encyclopédie libre wikipédia,
http://www.fr.wikipédia.org/wiki/prison, consulté le 12
juillet 2008.
* 2 MPIGA KOUMA, Il faut
préserver la dignité du séropositif, http//
amic.refer.ga, consulté le 22 janvier 2008.
* 3 BREARD (Mathieu),
Guantanamo Bay : La prison de la honte,
http://www.quebecoislibre.org,
consulté le 12 juillet 2008.
* 4 Une mobilisation
nationale à l'appel des trois principales organisations syndicales
réunies en entente syndicale, a perturbé les prisons
françaises en mai 2009. Les surveillants pénitentiaires ont
entamé un "blocage progressif" des prisons : ils
dénonçaient notamment les effets de la surpopulation
carcérale sur leurs conditions de travail : "de plus en plus de
violence, de suicides aussi, des agressions entre détenus, envers le
personnel". Ce mouvement relayé en Guadeloupe et en Martinique a eu
pour conséquence, d'empêcher les extractions et les entrées
dans les prisons.
* 5 Cameroun tribune n°
08991/5190 du mercredi 05 décembre 2007.
* 6 Les
«Régions'' sont instituées par le décret n°
2008/376 du 12 novembre 2008 portant organisation administrative de la
République du Cameroun qui a abrogé les dispositions du
décret n° 72/349 du 14 juillet 1972 portant organisation
administrative de la République Unie du Cameroun ensemble ses divers
modificatifs ayant mis en place les provinces.
* 7 Il s'agit de la
convention contre la torture et autres formes de traitements inhumains ou
dégradants ratifiée par le Cameroun le 19 décembre 1986,
et des Pactes de 1966 ratifiés le 27 juin 1984.
* 8GRAWITZ (Madeleine),
Méthodes des sciences sociales, Paris, Dalloz,
6ème éd., 1984, p345.
* 9 Bien que ne constituant
pas une référence scientifique en terme de définitions, ce
dictionnaire donne tout de même du verbe humaniser
une définition assez explicite et qui correspond
parfaitement à l'idée que nous nous faisons des lieux de
détention, à savoir pas un lieu de villégiature, mais un
milieu dans lequel le délinquant est soumis à des contraintes
supportables et qui ne bafouent en aucun cas sa dignité.
* 10 Dictionnaire
encyclopédique Petit Larousse.
* 11OUMBA (Parfait),
La Cour Internationale de justice et la problématique des
droits de l'homme, mémoire de Master, Université Catholique
d'Afrique Centrale, année, 2004, mémoire on-line,
http://www.memoireonline.com/12/05/19/cij-problematique-droits-de-l-homme.html,
consulté le 22.06.2007.
* 12 Dictionnaire
Littré en ligne, http//www. François
gannaz.free.fr/Littré/xmlittré.php, consulté le
12.05.2008.
* 13 Ibid.
* 14 Ibidem.
* 15 Ibidem.
* 16 SOYER (Jean
Claude), Droit pénal général et procédure
pénale, Paris, LGDJ, 13ème édition, p
333.
* 17 Article 24 du code
pénal camerounais.
* 18 Article 118 de la loi
N° 2005/7 du 27 juillet 2005 portant code de procédure
pénale.
* 19 Ancien détenu
à la prison centrale de Kondengui de 1985 à 1995.
* 20ATEMENGUE (Edmond),
« La torture en milieu carcéral : le cas de la prison
centrale de Kodengui-Yaoundé (09 octobre 1985-06 octobre
1995) » ,in Intégrité physique
et dignité humaine, Cahier africain des droits de l'homme n°1,
novenbre1998, études et documents de l'APDHAC, presses de l'UCAC, pp
53-63.
* 21 Il s'agit là
d'un droit consacré par l'article 4 al. 1 de la convention contre la
torture, de l'article5 de la Déclaration universelle des droits de
l'homme, de l'article 7 de Pacte international relatif aux droits civils et
politiques, des articles 4 et 5 de la charte africaine des droits de l'homme
et des peuples, et de l'article 31 de l'ensemble des règles minima pour
le traitement des détenus.
* 22EYIKE (Vieux),
« Les droits du prisonnier » in intégrité
physique et dignité humaine, Cahier africain des droits de l'homme
n°1, op. Cit. pp 65-87.
* 23GUIMDO
(Bernard-Raymond), « Les alternatives à
l'emprisonnement dans des contextes de surpeuplement carcéral : le
cas du Cameroun », in Juridis périodique n° 60,
Décembre 2004, pp 77-85.
* 24 Ibid.
* 25 Avocat
* 26FOUEGOUM(Adeline),
« Institutions judiciaires et
carcérale », in Presse et droits de
l'homme en Afrique centrale, Cahier africain des droits
de l'homme n°5, Presses de l'UCAC, octobre 2000, pp 111-118.
* 27 Op. cit. Pp
117-118
* 28L'article 65 de
l'Ensemble des règles minima pour le traitement des détenus
stipule que : « le traitement des individus condamnés
à une peine privative de liberté doit avoir pour but, autant que
la durée de la condamnation le permet, de créer en eux la
volonté et les aptitudes qui les mettent à même,
après leur libération de vivre en respectant la loi et de
subvenir à leurs besoins. Ce traitement doit être de nature
à encourager le respect d'eux-mêmes et à développer
leur sens de responsabilité ».
* 29 Voir le guide d'entretien
en annexe n°1.
* 30 Notion consacrée
par le premier considérant de la Déclaration universelle des
droits de l'homme du 10 décembre 1948 et reprise par le plus grand
nombre de conventions internationales relatives aux droits de l'homme.
Cependant, il faut noter que la Conférence mondiale sur les droits de
l'homme de 1993 dont est issue la Déclaration de Vienne oublie
volontairement ou mieux éclipse la notion de « famille
humaine » au profit de celle moins controversée de le
« communauté internationale ».
* 31 Texte adopté lors
du 1er congrès des Nations Unies pour la prévention du
crime et le traitement des délinquants tenu à Genève en
1955. Il est approuvé par le Conseil Economique et Social dans ses
résolutions 663C (XXIV) du 31 juillet 1957 et 2076 (LXII) du 13 mai
1977.
* 32 Il s'agit des,
principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus et de
l'ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises
à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement
adoptés par l'Assemblée générale des Nations Unies
respectivement dans ses résolutions 42/111 du 14 décembre 1990
et 43/173 du 9 décembre 1988.
* 33 Principe 1er
de l'ensemble de principes pour la protection de toutes les
personnes soumises à une forme quelconque de détention ou
d'emprisonnement : « toute personne soumise à
une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement est traitée
avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente
à la personne humaine ».
* 34 La notion de
dignité fait référence à une qualité
liée à l'être même de chaque homme. Ce qui explique
qu'elle soit la même pour tous et qu'elle n'admette pas de degrés.
Même si la DUDH n'en détermine ni sa signification ni son contenu,
cette notion se voit accorder dans ce texte la préséance sur les
droits. Ce qui en fait « une notion centrale des doits de
l'homme ». (Lire le Pr. Bernard-Raymond GUIMDO, « Droit au
développement et dignité humaine », in Les droits
Fondamentaux, Actualité Scientifique, (dir.) Jacques-Yvan Morin,
Bruylant, AUPELF-UREF Bruxelles, 1997, pp. 73-89.
* 35 L'article 6 al.1 du
Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16
décembre 1966 stipule que : « le droit à la
vie est inhérent à la personne humaine. Ce droit doit être
protégé par la loi. Nul ne peut être arbitrairement
privé de la vie».
* 36L'article 7 du
PIDCP : « nul ne sera soumis à la torture ni à des
peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. En particulier,
il est interdit de soumettre une personne sans son libre consentement à
une expérience médicale ou scientifique »
* 37 L'article 10 du PIDCP dans
son alinéa 1 précise : « toute personne
privée de sa liberté est traitée avec le respect et la
dignité inhérente à la personne humaine ».
* 38Nations
Unies, « Droits de l'homme : combattre la
torture », fiche d'information n°4, (Rev.1), Genève,
2003, p. 10.
* 39 Article 37 de la
Convention relative aux droits de l'enfant
* 40L'article 4 de la Charte
africaine des droits de l'homme et des peuples dispose
que : « la personne humaine est inviolable, tout
être humain a droit au respect de sa vie et à
l'intégrité physique et morale de sa personne : nul ne peut
être privé arbitrairement de ce droit ».
* 41 NGONO MVOGO (Josiane
Appolonie), La police camerounaise et l'interdiction de la torture,
Mémoire de Master droits de l'homme et action humanitaire, APDHAC/UCAC,
année 2003-2004.
* 42
http://playmendroit.free.fr/droit_civil/le_droit_a_l_integrite_physique.htm,
consulté le 01.04.09.
* 43 Ibid.
* 44 Adopté le 10
décembre 1966, et entré en vigueur le 3 janvier 1976
conformément aux dispositions de l'article 27, ce texte avait pour
objectif de garantir l'épanouissement de l'être humain à
travers la satisfaction de certains de ses droits tels que le droit à
une alimentation suffisante, le droit au logement, le droit à la
santé, etc....la jurisprudence internationale en se basant sur d'autre
instruments, à également protégée un certain nombre
de droits qui n'étaient explicitement garantis par ce texte : c'est
la protection par ricochet.
* 45 L'alinéa 2 de
l'article 2 du PIDESC stipule que : « Les Etats parties au
présent Pacte s'engagent à garantir que les droits qui y sont
énoncés seront exercés sans discrimination aucune
fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion,
l'opinion politique ou toute autre opinion, l'origine nationale ou sociale, la
fortune, la naissance ou toute autre situation.».
* 46 1ère
règle de l'Ensemble des règles minima pour le traitement des
détenus.
* 47 La communauté
internationale dans sa majorité soutient la suppression de la peine de
mort. Selon Amnesty international, en 2007, 100 pays dans le monde ont aboli la
peine de mort dans leur législation, 29 pays ne la pratiquent plus
depuis 1848, mais 81 pays continuent de procéder à des
exécutions (la peine de mort,
http://www.senat.fr/evenement/archives/D22/abolition.htm
consulté le 01.04.09). Le deuxième Protocole facultatif se
rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques
visant à abolir la peine de mort, s'il entre en vigueur scellera
définitivement l'interdiction absolue de supprimer la vie.
* 48 Adoptée et
proclamée le 10 décembre 1948 par l'Assemblée
générale des Nations Unies dans sa résolution 217A(III)
.
* 49 Cet auteur pense que la
DUDH est muette en ce qui concerne le sort des personnes privées de leur
liberté parce qu'elle ne fait pas allusion explicitement à eux.
(Lire le mémoire de l'auteur sur, La détention
préventive et les droits de l'homme au Cameroun, Mémoire de
Master en Droit de l'Homme et Action Humanitaire, Université catholique
d'Afrique centrale, octobre 2005, p 17).
* 50 Il s'agit des,
Principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus et de
l'Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises
à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement
adoptés par l'Assemblée générale des Nations Unies
respectivement dans ses résolutions 42/111 du 14 décembre 1990
et 43/173 du 9 décembre 1988.
* 51 Il s'agit de l'Ensemble
des règles minima pour le traitement des détenus qui est
adopté en 1955 par le 1er Congrès des Nations Unies
pour la prévention du crime et le traitement des délinquants tenu
à Genève et qui a été approuvé par le
Conseil économique et social dans ses résolutions 663 (XXIV) du
31.07.1957 et 2076(LXII) du 13.05.1977
* 52 Recueil d'instruments
internationaux, vol.1, Ière partie, Centre pour les droits
de l'homme de Genève, p. 268, 1994.
* 53L'interdiction de la
torture et des châtiments corporels est un principe du droit
international qui se veut coutumier car accepté et reconnu comme tel par
l'immense majorité de la communauté internationale
* 54ATANGCHOAKONUMBO,
« Biens publics mondiaux », Cours de Master droits de
l'homme et action humanitaire 2008-2009, APDHAC, Université catholique
d'Afrique centrale, p.12, inédit.
* 55« Chacun des
Etats parties au présent Pacte s'engage à agir, tant par son
effort propre que par l'assistance et la coopération internationales,
notamment sur les plans économique et technique, au maximum de ses
ressources disponibles, en vue d'assurer progressivement le plein exercice des
droits reconnus dans le présent Pacte par tous les moyens
appropriés, y compris en particulier l'adoption de mesures
législatives.».
* 56L'observation
générale n°12 du comité des droit économiques
sociaux et culturels fait obligation aux Etats de subvenir aux besoins
alimentaires des population en rendant la nourriture disponible, suffisante, et
accessible.
* 57 TEJIOZEM (Rogatien),
La détention préventive et les droits de l'homme au
Cameroun, Mémoire de Master en droit de l'homme et action
humanitaire, Université catholique d'Afrique centrale, p.6, octobre
2005.
* 58 Ibid.
* 59 Le caractère
international de la présomption d'innocence découle de la
consécration de ce principe par un certains nombre d'instruments
internationaux tels que la DUDH article 11 et le PIDCP article 14.
* 60 FOKA (F.), Le
contentieux africain des droits de l'homme et des peuples, 3ft, septembre
2008, p. 63. La notion de doute raisonnable en droit pénal doit toujours
profiter à l'accusé. Elle vise à protéger ce
dernier contre les erreurs judiciaires en écartant tout
préjugé susceptible de provenir de la part du juge.
* 61 L'alinéa
1er de l'article 11 de la DUDH stipule
que : « toute personne accusée d'un acte
délictueux est présumée innocente jusqu'à ce que sa
culpabilité ait été légalement établie au
cours d'un procès public où toutes les garanties
nécessaires à sa défense lui auront été
assurées ».
* 62 L'alinéa 2 de
l'article 14 de la DUDH stipule que : « toute personne
accusée d'une infraction pénale est présumée
innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été
légalement établie ».
* 63 Article 40 alinéa
2
* 64 L'article 65 de la
constitution affirme que : « le préambule fait
partie de la constitution ».
* 65 L'article 8
alinéa 2 précise que la présomption d'innocence s'applique
au suspect, à l'inculpé, au prévenu et à
l'accusé. Ces qualificatifs correspondent aux appellations des mis en
cause aux différentes phases du procès pénal. Le suspect
correspondant à la phase de poursuites (enquête de police),
l'inculpé à la phase d'instruction, le prévenu et
l'accusé à la phase de jugement. (cf. article 9 du code de
procédure pénale).
* 66 NGWAFOR TANGYYIE
(Walters), Les conditions de vie et le respect des droits du détenu
au Cameroun, Mémoire de master en droit de l'homme et action
humanitaire, Université catholique d'Afrique centrale, p 27, 2003.
* 67 TCHAKOUA
(J.M.), « les droits de l'homme au village », in
Justice et paix en Afrique centrale, presses de l'UCAC, septembre
1995, P12.
* 68 TEJIOZEM (Rogatien),
op. cit.
* 69 C'est un programme
financé en grande partie par la communauté européenne et
qui entend améliorer les conditions de détention au cameroun. Il
a été conçu suite à une mission menée en
mars 2001 par Me Eric Plouvier et Julie Godin qui a relevé une
série de dysfonctionnements de la chaîne pénale et plus
particulièrement de la détention préventive.
* 70 TEJIOZEM (Rogatien), op.
cit. p. 4.
* 71 Ibid.
* 72 Communication n°
39/90, Annette PAGNOULE (pour le compte de Abdoulaye MAZOU) c/
Etat du Cameroun, paragraphe 19.
* 73 NGWAFOR TANGYYIE
(Walters), op. cit p. iii
* 74ACI- cabinet d'avocats,
Les droits de la défense,
http://www.cabinetaci.com/les-droits-de-la-defense.html,
consulté le 04.04.2009.
* 75 Com. 48/90, 50/91, 52/91,
89/93, Amnesty International & autres c/ Etat du Soudan.
* 76 Ibid.
* 77 Lire FOKA
Frédéric, op. cit. p 67.
* 78 Com.206/97, centre for
free speech c/ Nigeria.
* 79 SUDRE
(Frédéric), Droit international et européen des droits
de l'homme, 4ème édition, Paris, PUF, 1999, p
237.
* 80 Com. 153/96,
Constitutional Rights Project c/Nigeria.
* 81 Com. 222/98 et 229/99,
Law Ofiice of Ghazi Suleiman c/ Soudan.
* 82 L'article 9 (3) du Code
de procédure pénale camerounais définit le prévenu
comme « Toute personne qui doit comparaître devant une
juridiction de jugement pour répondre d'une infraction qualifiée
contravention ou délit. ».
* 83 Règle 84 de
l'Ensemble des règles minima pour le traitement des détenus.
* 84 L'article557 du Code de
procédure pénale camerounais.
* 85 Article 565 du Code de
procédure pénale camerounais.
* 86 Article 10 al 2 du
PIDCP.
* 87 TEJIOZEM (Rogatien),
op. cit. p. 70
* 88 VINCENT
(Thierry), « Justice : alerte dans les prisons
africaines », Cameroun Tribune n°5973 du 14 novembre 1995,
p.8.
* 89 Règle 8 c de
l'Ensemble des règles minima pour le traitement des détenus.
* 90 Règle 9 (2) de
l'Ensemble des règles minima pour la traitement des détenus.
* 91 Règle 8 (a) de
l'Ensemble des règles minima pour le traitement des détenus.
* 92 VINCENT
Thierry, op. cit., p.8.
* 93FOKA
(Frédéric), op. Cit. p 57.
* 94BOUKONGOU (Jean Didier),
« Le système africain de protection des droits de
l'homme » in Jean Didier BOUKONGOU (dir.), Protection des
droits de l'homme en Afrique, Yaoundé, presses de l'UCAC, 2007,
p128
* 95 ETOUNDI (Jean),
L'administration pénitentiaire camerounaise et la protection des
droits de l'homme : cas de la maison d'arrêt de kondengui,
mémoire de master en droit de l'homme et action humanitaire,
UCAC/APDHAC, année 2002-2003, p48.
* 96 Com.228/99, Law
officeof Ghazi Suleiman c/ Soudan et Com. 147/95 et 149/96 Sir Dawda
K.Jawara c/Gambie.
* 97 Com. 247/2002, aff.
Jean SIMBARAKIYE
* 98 GUIMDO DONGMO
(Bernard-Raymond), « Le droit d'accès à la justice
administrative au Cameroun. Contribution à l'étude d'un droit
fondamental », op. cit. P. 457.
* 99 Ibid.
* 100 FOKA
(Frédéric), op. Cit. p 58.
* 101GUIMDO DONGMO
(Bernard-Raymond), « Le droit d'accès à la justice
administrative au Cameroun. Contribution à l'étude d'un droit
fondamental » in Revue de la Recherche Juridique, Droit
positif, n°XXXIII-121 (33ème année,
121ème numéro), 2008-1, PUAM, P. 453-454.
* 102ibid, p.
474.
* 103FOKA
(Frédéric), op. Cit. p 61.
* 104 FOKA
(Frédéric), op. cit., p 58.
* 105ANKUMAH
(Evelyn), « La commission africaine des droits de l'homme et des
peuples ; pratiques et procédures »,
société africaine du droit international et comparé,
Londres, p.142.
* 106 L'information judiciaire
est obligatoire pour les crimes et dans les affaires impliquant des mineurs,
facultative pour les délits et exceptionnelle, voire inopportune pour
les contraventions
* 107Comité ad hoc
chargé de l'élaboration d'une nouvelle politique
pénitentiaire et de la réforme du système carcéral,
« politique pénitentiaire et stratégie de
réforme du système carcéral »,
Yaoundé, décembre 2006, p.41
* 108MESSINA BELINGA,
Réflexion sur l'état actuel de la présomption
d'innocence en droit positif camerounais, Mémoire de
Maîtrise, Université de Ngaoundéré, 1998-1999.
* 109 MINKOA SHE (Adolphe),
Droit de l'homme et droit pénal au Cameroun, coll. La vie du
droit en Afrique, éd. Economia, Paris, 1999.
* 110Comité ad hoc
chargé de l'élaboration d'une nouvelle politique
pénitentiaire et de la réforme du système
carcéral, op. cit. p 41.
* 111 Rapport
général de la visite des centres de détention de
Yaoundé, CHDHL, décembre 2008, p. 15.
* 112Ibid., p.26.
* 113Source :
Document de politique pénitentiaire et de stratégie de
réforme du système carcéral, 2006, p 42.
* 114 Dans son article 221
le code de procédure pénale précise que la durée de
la détention provisoire ne peut excéder 06 mois. Mais elle peut
être prorogée par ordonnance motivée au plus pour 12 mois
en cas de crime et 06 mois en cas de délit.
* 115 EKAM TANDJEU
(Antoinette), Les incidences de la pratique actuelle de la détention
préventive au Cameroun : cas de la juridiction de
Yaoundé, Mémoire de Maîtrise en Sciences Sociales,
Faculté des Sciences sociales et de Gestion, UCAC, Yaoundé, 1999,
pp 53-54.
* 116 Rapport d'étape
de la mission d'évaluation du PACDET, Paris- Bruxelles- Yaoundé,
mai 2004, A.R.S. Progetti S.r.l., p 10.
* 117 Rapport
général de la visite des centres de détention de
Yaoundé, CHDHL, décembre 2008, p. 25.
* 118Rapport d'étrape
de la mission d'évaluation du PACDET, op. cit.
* 119 Rapport 2007 sur
l'état des droits de l'homme au Cameroun, p. 33
* 120 Ibid.
* 121 Article 95 du
décret 2001
L'échelle de sanctions disciplinaires comporte par
ordre de gravité croissante, trois catégories :
-Première catégorie : la
réprimande ; le tour de service supplémentaire ; la
consigne ; la cellule ; la mise aux arrêts de rigueur ; la
mise à pied sans traitement pour une durée de 1 à 7
jours.
-Deuxième catégorie : l'avertissement
écrit ; le blâme avec inscription au dossier ; la mise
à pied sans traitement pour une durée de 8 à 20
jours ; la radiation du tableau d'avancement ou de la liste
d'aptitude ; le retard à l'avancement d'une durée d'un
an.
-Troisième catégorie : l'exclusion
temporaire du service pour une durée de trois mois à un
an ;l'abaissement d'échelon ;l'abaissement de grade ;la
révocation avec suspension des droits à la pension, la
révocation sans suspension des droit à pension ; la
révocation avec suppression des droits à pension.
* 122 Décret
n°2007/199 du 07 juillet 2007 portant règlement de discipline
générale dans les forces de défense.
* 123 Articles 112 à
134 du décret n°2007/199 du 07 juillet 2007 portant
règlement de discipline générale dans les forces de
défense.
* 124 (Voir philiipe Nsoa)
* 125 La Haute
hiérarchie est entendue ici comme toutes les autorités au dessus
du supérieur hiérarchique direct du fonctionnaire.
* 126Il s'agit d'un
principe suivant lequel la haute hiérarchie peut prendre des mesures en
faveur ou contre un fonctionnaire dans le cas où son supérieur
hiérarchique direct hésite à la faire.
* 127 Rapport 2007 du
MINJUSTICE sur l'état des droits de l'homme au Cameroun, op cit p.37
* 128 Rapport 2006 sur
l'état des droits de l'homme au Cameroun p. 15.
* 129 Rapport sur
l'état des droits de l'homme au Cameroun, pp 39-50.
* 130 Rapport du MINJUSTICE
sur l'état des droits de l'homme au Cameroun en 2007, p.44.
* 131 Rapport 2006 sur
l'état des droits de l'homme au Cameroun, MINJUSTICE, p. 11.
* 132 Ibid.
* 133 Rapport 2006 sur
l'état des droits de l'homme au Cameroun, MINJUSTICE, p. 13.
* 134 Rapport du MINJUSTICE
sur l'état des droits de l'homme au Cameroun en 2007, op. cit p. 40.
* 135 Encyclopédie
wikipedia,
http://fr.wikipedia.org/wiki/Dignité,
consulté le 12.11.2008
* 136 Lire GUIMDO
(Bernard-Raymond), « Le droit d'accès à la justice
administrative au Cameroun. Contribution à l'étude d'un droit
fondamental », op. cit. P. 457.
* 137 La police, la
gendarmerie, la magistrature et l'administration pénitentiaire
elle-même sont directement impliquées dans la gestion des
personnes privées de liberté.
* 138Comité ad hoc
chargé de l'élaboration d'une nouvelle politique
pénitentiaire et de la réforme du système carcéral,
document de politique pénitentiaire et stratégie de
réforme du système carcéral,
* 139 L'âge
d'admission à la retraite est de 55 ans pour les intendants et les
administrateurs de prison et de 45 ans pour les autres cadres, cf.
décret n° 92/054 du 12 mars 1992 portant statut spécial du
personnel de l'administration pénitentiaire.
* 140Comité ad hoc
chargé de l'élaboration d'une nouvelle politique
pénitentiaire et de la réforme du système carcéral,
op. cit, p. 64.
* 141L'article 137 al.2
stipule que : « il (le procureur) peut, à tout
moment se transporter dans les locaux de police ou de gendarmerie pour
procéder au contrôle de la garde à vue... ».
* 142Comité ad hoc
chargé de l'élaboration d'une nouvelle politique
pénitentiaire et de la réforme du système carcéral
Op. cit p.63.
* 143 Comité ad hoc
chargé de l'élaboration d'une nouvelle politique
pénitentiaire et de la réforme du système carcéral,
op. cit pp 63-64.
* 144 Article du décret
n° 92-066 du 03 avril 1992 portant création et organisation de
l'ENAP.
* 145 Comité ad hoc
chargé de l'élaboration d'une nouvelle politique
pénitentiaire et de la réforme du système carcéral,
pp. 70-71.
* 146 Op.cit.
p.72.
* 147 Chef lieu de la
région du sud-ouest où est située l'ENAP.
* 148 Article 122
alinéa 4 du code de procédure pénale camerounais.
* 149 TEJIOZEM (Rogatien),
op.cit.pp72-73.
* 150 Comité ad hoc
chargé de l'élaboration d'une nouvelle politique
pénitentiaire et de la réforme du système carcéral,
op cit. p. 32.
* 151 Comité ad hoc
chargé de l'élaboration d'une nouvelle politique
pénitentiaire et de la réforme du système carcéral,
op. cit. p.31.
* 152 Comité ad hoc
chargé de l'élaboration d'une nouvelle politique
pénitentiaire et de la réforme du système carcéral,
op. cit. p.29.
* 153 Le Cameroun ne compte
que 10 régions. Cette expression signifie que les détenus
appartiennent à un monde à part formant la
11ème province, qui bien que faisant partie du Cameroun,
n'est peuplé que de délinquants, d'où leur
marginalisation. Au regard du décret 2008/376 du 12 novembre 2008
portant organisation administrative de la République du Cameroun, cette
appellation pourrait bien devenir «11ème
région''.
* 154 Article 1er
alinéa 2 de la loi 2004/016 du 22 juillet 2004 portant création,
organisation et fonctionnement de la commission nationale des droits de l'homme
et des libertés.
* 155Article 3 de la loi
2004/016 du 22 juillet 2004 portant création, organisation et
fonctionnement de la commission nationale des droits de l'homme et des
libertés.
* 156 Cet article stipule
que : « sont punis d'une amende de 4000 à 25000
frs cfa et d'un emprisonnement de cinq à dix jours ou de l'une de ces
peines seulement :
(...)
6-ceux qui par tous autres moyens que ceux
prévus aux articles 157 et 158 du code pénal empêchent
quiconque agissant pour l'exécution des lois, des règlements ,
des décisions judiciaires ou ordres légitimes, d'accomplir la
mission dont il est légalement chargé.
7- ceux qui sans motif légitime, refusent ou
négligent d'effectuer un service ou de prêter une assistance
requise par l'autorité compétente soit en cas de crime ou
délit flagrants, soit en vue d'assurer l'exécution d'une
décision judiciaire (...). »
* 157Article 19 de la loi
2004/016 du 22 juillet 2004 portant création, organisation et
fonctionnement de la commission nationale des droits de l'homme et des
libertés.
* 158Ce sont des principes
concernant le statut et le fonctionnement des institutions nationales pour la
protection et la promotion des droits de l'homme. Ils ont été
adoptés en 1991 sur l'initiative du Centre pour les droits de l'homme
qui a réuni des représentants d'institutions nationales, d'Etats,
de l'Organisation des Nations Unies et des institutions
spécialisées, ainsi que d'organisations intergouvernementales et
non gouvernementales. Les recommandations issues de ce séminaire ont
été approuvées par la Commission des droits de l'homme en
mars 1992, (résolution 1992/54) et par l'Assemblée
générale (résolution A/RES/48/134 du 20 décembre
1993).
* 159Conseil Pontifical
Justice et Paix, Compendium de la doctrine sociale de l'Eglise
,1ère édition, Paris, Bayard, Cerfs, Fleurus Marne,
2005, p.101.
* 160 Constitution pastorale,
Gaudium et Spes n °1.
* 161Voir les actes du
séminaire tenu à LIMBE sur la justice réparatrice du 05 au
12 avril 2008. lire particulièrement les communication de Philippe
Landenne « modèle des
aumôneries », « le ministère de la
présence ».
* 162 Conseil Pontifical
Justice et Paix, op. Cit.
* 163 Comité ad hoc
chargé de l'élaboration d'une nouvelle politique
pénitentiaire et de la réforme du système carcéral,
op. cit p.50.
* 164 ATAMENGUE (Edmond) et
TSIMI ABOMO (Rémy), discours d'ouverture du séminaire de
............
* 165 C'est vers la fin des
années 1970 que certains intellectuels tels que FOUCAULT ont entrepris
de réfléchir sur les mesures alternatives à
« l'enferment » connues aujourd'hui sous l'expression
« peines en milieu ouvert ».
* 166Lire GUIMDO (B-R),
« Les alternatives à l'emprisonnement dans les contextes de
surpeuplement carcéral : le cas du Cameroun »,
op.cit.
* 167 Article691 alinéa
1 du code de procédure pénale
* 168 AHMADOU OUMAROU,
Code de lois pénales, Presses Universitaires d'Afrique, 1998,
p.55, article 61.D1.
* 169Le Comité ad
hoc chargé de l'élaboration d'une nouvelle politique
pénitentiaire et de la réforme du système carcéral,
op. cit., p.86.
* 170 Op.cit. p.83.
* 171 Ibid.
* 172 Les peines
alternatives à la prison et l'aménagement des peines, une
solution pour vider les prisons ?
http://www.eleves.ens.fr/pollens/seminaire/seances/prisons/alternatives_amenagement.html
* 173 GUIMDO (B-R),
« Les alternatives à l'emprisonnement dans les contextes de
surpeuplement carcéral : le cas du Cameroun », op.cit.
* 174 Règles minima
des Nations Unies pour l'élaboration de mesures non privatives de
liberté Adoptées par l'Assemblée générale
dans sa résolution 45/110 du 14 décembre 199
* 175 La déclaration de
Kampala sur les conditions de détention en Afrique, 21 septembre
1996.
* 176Les peines
alternatives à la prison et l'aménagement des peines, une
solution pour vider les prisons ?
http://www.eleves.ens.fr/pollens/seminaire/seances/prisons/alternatives_amenagement.html,
consulté le 01.05.2009.
* 177 Cette mesure est
surtout utilisée lorsque la juridiction saisie estime que l'infraction
commise résulte d'une défaillance psychologique du
délinquant.
* 178
http://lib.ohchr.org/HRBodies/UPR/Documents/Session4/CM/ACAT_FIACAT_CMR_UPR_S4_2009_ACATCameroun_FederationInternationaledelActiondesChretienspourlAbolitiondelaTorture_FR_JOINT.pdf,
consulté le 01.05.2009.
* 179Dans le cadre du
2ème protocole financier de la Convention de Lomé IV,
le Cameroun et la Commission Européenne ont signé un programme
indicatif national (PIN) pour le 8ème FED de 133 millions
d'euros dont le premier programme relatif aux droits de l'homme est le
PACDET.
* 180Le
Comité de Pilotage est constitué du maître
d'ouvrage qui est l'ordonnateur national du FED, du maître d'oeuvre qui
est le ministère de la justice, de la délégation de la
commission européenne en tant qu'observateur, de l'UGP, des
ministères techniques compétents et de la société
civile.
* 181 Ministère de
l'Economie, de la Planification et de l'Aménagement du Territoire
* 182Rapport d'étape
de la mission d'évaluation du PACDET, Paris-Bruxelles-Yaoundé,
10 mai 2004, ARS Progetti S. r. l., p. 16.
* 183Afrique, l'aide et l'Etat : inconciliables,
indissociables, Courrier de la planète, entretien avec Mamadou Diouf,
(Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en
Afrique - CODESRIA)
http://www.euforic.org/planete/33diouf.htm?&username=guest@euforic.org&password=9999&groups=EUFORIC&workgroup=,
consulté le 07.05.09.
* 184Refonder l'Etat en
Afrique : Proposition 06,
http://www.afrique-gouvernance.net/fiches/bipint/fiche-bipint-207.html,
consulté le 07.05.09.
* 185 GUIMDO
(Bernard-Raymond), « Droit au développement et dignité
humaine », in Les droits fondamentaux, actualité
scientifique, dir. Jacques Morin, Bruylant, 1997, AUPELF-UREF, Bruxelles,
pp 73-89.
* 186 Lire FOKA
Frédéric, Le contentieux africain des droits de l'homme et
des peuples, 3ft, septembre 2008.
* 187 TEJIOZEM (Rogatien),
La détention préventive et le respect des droits de l'homme
au Cameroun, Mémoire de Master en droit de l'homme et action
humanitaire, UCAC,octobre 2005, p. 63.
* 188 Cité par NGONO
(Solange), Le procès pénal camerounais au regard des
exigences de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples,
éd. L'Harmattan, 2002p. 128.
* 189Afrique, l'aide et l'Etat : inconciliables,
indissociables, Courrier de la planète, entretien avec Mamadou Diouf,
(Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en
Afrique - CODESRIA)
http://www.euforic.org/planete/33diouf.htm?&username=guest@euforic.org&password=9999&groups=EUFORIC&workgroup=,
consulté le 07.05.09.
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