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Stratégies de sortie de crise pour le coton africain à Â  l'OMC et au-delà Â . Défis actuels et futurs

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par Hadi Honoré YONLI
Global Business School, Tarragona (Espagne) - Master en relations internationales 2013
  

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II.2. Reformes internes du secteur coton dans les pays du C_4

Le rythme et l'ampleur des réformes dans le secteur cotonnier du C_4 varient d'un pays à l'autre. D'autres facteurs, notamment les prix internationaux du coton, ont également eu des effets importants sur la production. Trois des pays du C_4 (Bénin, Burkina Faso et Mali) font partie de la même Union économique et monétaire (UEMOA). Cette organisation régionale a engagé un plan stratégique commun pour stimuler la compétitivité du coton, la Stratégie coton-textile de l'UEMOA26.

Il ya lieu de mentionner que la mise en place en 2003 de l'« Agenda coton-textile » avec pour objectif principal de parvenir à terme à la transformation de 25% de la production de fibre coton de l'espace communautaire a été révisé en novembre 2010 pour le rendre plus opérationnel au contexte international. L'espace UEMOA

26 L'Agenda pour la compétitivité de la filière coton textile de l'UEMOA a pour objectif central la transformation du quart de la fibre produite annuellement dans l'UEMOA à l'horizon 2020.

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s'est-il doté donc en novembre 2010 de la stratégie coton-textile avec comme vision globale de transformer d'ici à 2020, 25% de la production annuelle de coton fibre, en y apportant plus de valeur ajoutée et en créant par la même occasion 50.000 emplois industriels.

II.2.1. Aperçu du système à circuit unique dans les pays du C-4 avant les réformes actuelles

Avant la réforme, le secteur cotonnier était intégré verticalement dans chacun des pays du C_4, une entreprise nationale se chargeant de promouvoir la production, de fournir conseils et intrants agricoles aux cultivateurs, d'acheter la totalité du coton graine à des prix fixes et garantis à chaque campagne, d'assurer le transport et l'égrenage du coton graine et d'écouler le coton graine et la fibre. Tous les producteurs de coton appartenaient à des organisations agricoles villageoises, qui étaient chargées de distribuer les intrants aux agriculteurs et de collecter le coton graine dans les villages. Leurs organisations de tutelle aux niveaux régional et national jouaient un rôle important dans la formulation des politiques au sein des filières cotonnières. Un prix d'achat garanti pour le coton graine était annoncé dans chaque pays avant la plantation sur la base du cours mondial attendu du coton. Le prix garanti était appliqué à l'échelle du pays et pour toute la campagne. Une ristourne était versée à la fin de chaque campagne de commercialisation si le prix moyen sur le marché était plus élevé que le prix d'achat27.

Plusieurs pays du C_4 ont commencé à réorganiser leur secteur cotonnier au milieu des années 1990 et ont adopté des politiques visant à encourager la privatisation dans le cadre des programmes d'ajustement structurel lancés par le FMI et la Banque mondiale. Des tentatives ont été faites pour renforcer les organisations de producteurs afin qu'elles participent plus activement aux décisions essentielles touchant le secteur. Les réformes étaient censées transférer des fonctions de gestion de la chaîne d'approvisionnement des gouvernements aux entreprises et aux groupements de producteurs28.

Dans le cadre des programmes de réforme, les pays du C_4 ont élaboré chacun leur propre modèle pour surmonter les différentes crises subies par leurs filières respectives et devenir compétitifs dans l'économie mondiale de la fibre.

II.2.1.1. Réformes dans le secteur du coton au Burkina Faso

Avant la réforme de 2004, le secteur fonctionnait selon un système à circuit unique, la société paraétatique SOFITEX détenant le monopole de la collecte, du traitement et de la commercialisation des graines, fibres et semences de coton. Dans de nombreuses régions, la SOFITEX était le seul fournisseur d'intrants et de services de vulgarisation. En 2004, le secteur a abandonné son système à circuit unique pour passer à un système de monopole local. La SOFITEX s'est retirée de deux zones géographiques, dont l'exploitation a été concédée à titre exclusif à deux nouvelles sociétés cotonnières privées. La coordination du secteur a été confiée à une

27 Levrat, Régine, 'Le coton dans la zone franc depuis 1950 : Un succès remis en cause', Paris, Éditions l'Harmattan, 2009, pages 105 à 123.

28 Levrat, Régine, ibid., page 159.

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association interprofessionnelle composée des associations nationales d'agriculteurs et d'égreneurs.

En outre, le Burkina Faso a officiellement approuvé l'utilisation commerciale du coton biotechnologique en 2009/10. Des variétés Bt (résistantes aux vers du cotonnier) ont été plantées sur 59 pour cent de la superficie totale en 2011/12. Toutefois, une grave sécheresse a limité la production à 141 000 tonnes en 2010/11, et les pluies sont restées inférieures à la moyenne en 2011/12. La production totale de coton graine du Burkina Faso a été de 449 641 tonnes pour 2012/13 et la la production de fibre a été de 151 000 tonnes. Les objectifs assignés permettent de s'inscrire, respectivement dans des prévisions de l'ordre de 730 000 tonnes graine pour la campagne 2013-2014.

II.2.1.1.1. Processus de réforme au Burkina Faso

Les réformes du secteur du coton au Burkina Faso visaient à consolider les organisations de producteurs et à libéraliser le secteur tout en préservant les avantages de l'intégration.

En 1996, la SOFITEX a commencé à créer de nouveaux de groupements de producteurs de coton (GPC) au niveau des villages pour remplacer les groupements villageois, devenus insolvables en 1992. Des unions départementales et provinciales des GPC ont été créées en 1997, et l'Union nationale des producteurs de coton du Burkina (UNPCB), qui représente au niveau national l'ensemble des unions locales, a été établie en 1998.

L'État a cédé à crédit 30 pour cent du capital de la SOFITEX à l'UNPCB (ramenant ainsi sa participation à 35 pour cent) et a transféré la responsabilité de la coordination/gestion du secteur du coton aux parties prenantes par la voie d'un accord interprofessionnel entre l'UNPCB et la SOFITEX et de la création d'un comité de gestion du secteur du coton.

La dernière étape de la libéralisation a été la cession par l'État de certains actifs de la SOFITEX à des investisseurs privés, sélectionnés par voie d'appel d'offres. Les nouvelles sociétés, FASO COTON (groupe Aga Khan et Paul Reinhart) et SOCOMA (groupe GEOCOTON), ont démarré leur activité en 2004 dans le cadre de contrats de huit ans leur accordant un droit exclusif d'achat du coton graine, respectivement dans le centre et l'est de la ceinture cotonnière burkinabé. Ces zones représentaient 15 pour cent de la production nationale. L'UNPCB possède 10 pour cent des parts de FASO COTON et 13 pour cent des parts de la SOCOMA.

En conséquence, trois sociétés cotonnières se partagent actuellement le contrôle de la production de coton au Burkina Faso :

- la SOFITEX (Société des fibres textiles du Burkina) dans l'ouest avec 20 provinces ;

- la SOCOMA (Société cotonnière du Gourma) dans l'est avec six provinces;

- FASO COTON dans le centre avec 12 provinces.

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Ces trois sociétés disposent au total d'un parc de 18 usines d'égrenage d'une capacité journalière cumulée d'environ 6 500 tonnes de coton graine et de deux usines de délitage pour la production et le traitement de la semence.

II.2.1.1.2. Organisation actuelle du secteur cotonnier au Burkina Faso

Afin de défendre leurs intérêts et de fédérer leurs efforts, ces trois sociétés ont créé en 2006 une association professionnelle des sociétés cotonnières du Burkina (APROCOB). Il en est de même pour les cotonculteurs qui, dans le souci de gérer au mieux leurs activités, se sont regroupés au sein de l'Union nationale des producteurs de coton du Burkina (UNPCB). Actuellement, la filière cotonnière du Burkina est gérée par l'Association interprofessionnelle du coton du Burkina Faso (AICB), qui est le regroupement de l'APROCOB et de l'UNPCB. Les producteurs de coton détiennent des parts du capital de chacune des trois sociétés (SOFITEX, SOCOMA et FASO COTON) et font partie, en tant qu'actionnaires, du Conseil d'administration de l'AICB, ce qui leur permet de mieux comprendre les difficultés rencontrées par la filière.

La réorganisation du secteur a comporté la création d'un mécanisme novateur de gestion du risque prix grâce à la mise en place d'un fonds de stabilisation des prix du coton fibre (Fonds de lissage). Selon ce mécanisme, le prix d'achat du coton graine est calculé à chaque campagne en fonction d'une moyenne mobile sur cinq ans de l'indice A de Cotlook, qui sert d'indicateur des prix internationaux moyens du coton.

Lorsque les prix d'une campagne sont supérieurs à la moyenne mobile, le Fonds conserve les recettes des trois sociétés cotonnières et lorsqu'ils sont inférieurs, le Fonds verse de l'argent aux trois sociétés pour leur permettre de maintenir le prix d'achat annoncé du coton graine. Le Fonds possède actuellement un important excédent dû aux prix élevés encaissés au cours des récentes campagnes.

Le gouvernement burkinabé envisage de céder à des investisseurs privés sa participation majoritaire dans la SOFITEX, de redéfinir les limites des trois zones de production et de vendre certaines usines d'égrenage pour réduire les déséquilibres entre la taille de la SOFITEX, de la SOCOMA et de FASO COTON.

Avec le désengagement effectif de l'État, l'AICB est devenue l'organe essentiel de gestion de la filière. Elle a pour missions principales de gérer l'Accord interprofessionnel afin d'assurer son application, y compris la fixation du prix d'achat et des standards du coton graine, de déterminer les conditions de cession des intrants agricoles aux producteurs et de gérer les fonctions communes, y compris la recherche, la question des intrants, le classement de la fibre et l'entretien des pistes des zones de production29. Les cultivateurs de coton, qui jouent un rôle administratif dans les sociétés, détiennent des parts dans chacune d'elles : 30,14 pour cent dans la SOFITEX, 13 pour cent dans la SOCOMA et 12,62 pour cent dans FASO COTON.

29 AICB, exposé sur la filière coton au Burkina Faso, 2012.

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III.2.1.1. 3. Situation actuelle et perspectives de la filière en 2012/13

Les filatures burkinabé ne transforment que 3 500 tonnes de coton par an, dont l'essentiel dans une seule entreprise dénommée FILSAH. La production est exportée à raison de 95 pour cent vers l'Asie, 2,7 pour cent vers l'Europe, 0,5 pour cent vers les États-Unis et 1,8 pour cent vers l'Afrique. La production de 2012/13 a été 172 000 tonnes de fibres et de 630 000 tonnes de coton graine.

Le secrétariat du CCIC observe que les réformes sectorielles ont donné de meilleurs résultats au Burkina Faso que dans les autres pays, même s'il n'y a pas de preuve tangible des gains d'efficacité générés par la privatisation de l'égrenage. Ce succès est dû à l'association d'une bonne gouvernance et d'une situation géographique singulière caractérisée par trois zones de production distinctes, ce qui débouche naturellement sur un triple système de fourniture des intrants et d'achat du coton graine.

La stabilisation du paysage institutionnel, la responsabilité des parties prenantes dans la gouvernance du secteur, l'utilisation de meilleures technologies et l'adoption de pratiques efficaces sont des facteurs clés de réussite de la filière au Burkina Faso.

Néanmoins, le cadre consultatif consensuel est souvent perturbé. C'est le cas en mars 2011 ou les agriculteurs à travers des manifestations souvent violentes exigeaient des prix plus élevés et une baisse du prix des intrants.

En mars 2011, les prix internationaux du coton ont atteint un niveau sans précédent avec près de 2,20 dollars EU la livre, que les cultivateurs de nombreux pays ont interprété comme un prix moyen dont ils souhaitaient bénéficier directement, sans ajustement pour les frais de transport ou d'égrenage. Bien que le prix d'achat réel de 274 CFA soit autour de 0,5 dollars par kilogramme ait été supérieur d'environ un tiers à celui des années précédentes, de nombreux cultivateurs étaient déçus. Les protestations ont causé d'importants dégâts matériels et entraîné un changement de direction à la SOFITEX.

II.2.1.2. Réformes dans le secteur du coton au Bénin

Au Bénin, la culture du coton occupe 150 000 foyers, dont les exploitations varient en moyenne de 2,5 hectares dans le sud à 5 hectares dans le nord. Il y a 18 usines d'égrenage qui ont une capacité totale d'environ 600 000 tonnes de coton graine par an. Après un record de 171 000 tonnes de coton fibre en 2004/05, la production a chuté bien au-dessous des 100 000 tonnes ces dernières années. Elle a été d'environ 77 000 tonnes de coton fibre et de 226.000 tonnes de coton graine au cours de la campagne 2012-2013.

III.2.1.2.1. Processus de réforme au Bénin

Avant les réformes, la Société nationale pour la promotion agricole (SONAPRA) avait le monopole de l'achat du coton graine, de la vente de coton fibre et de la livraison des intrants achetés à crédit par les cultivateurs. Dans le cadre du

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programme d'ajustement structurel, le gouvernement s'est retiré de la production de coton en 1991 et a commencé à libéraliser le secteur. La plupart des réformes ont été mises en oeuvre entre 1993 et 2000 :

- Les fonctions d'approvisionnement en intrants ont été progressivement

transférées au secteur privé, et la SONAPRA s'est retirée de cette activité en 2000.

- Huit entreprises d'égrenage privées ont obtenu une licence entre 1995 et 1998

(ce qui s'est traduit par une surcapacité d'égrenage) et chacune s'est vu attribuer un quota de coton graine par la SONAPRA jusqu'en 2000.

- Le monopole de la SONAPRA pour la commercialisation du coton graine a été supprimé en 2000.

- Des associations professionnelles nationales d'égreneurs et d'importateurs/de distributeurs d'intrants ont été créées.

- Après la Conférence nationale des forces vives en 1990, qui a prôné le désengagement de l'État de toutes les activités économiques, les Groupements révolutionnaires à vocation coopérative (GRVC) se sont structurés en organisations de tutelle sous-préfectorales, départementales et nationales. Une réforme adoptée en 2010 a remplacé les GVPC par des Coopératives villageoises de producteurs de coton (CVPC), dotées d'un agrément officiel pour la mise en place de leurs organisations de tutelle aux niveaux communal, départemental et national.

- Des organismes interprofessionnels, notamment la centrale de sécurisation des paiements et de recouvrement (CSPR) a été créée pour assurer le recouvrement de tous les crédits

La création de l'Association interprofessionnelle du coton (AIC) le

19 octobre 2000 était destinée à faciliter le passage en douceur de la gestion étatique de la filière coton à la privatisation complète. L'AIC est composée de trois familles professionnelles : le Conseil national des égreneurs de coton (CNEC), le Conseil national des importateurs et distributeurs d'intrants coton (CNIDIC) et le Comité consultatif national transitoire des producteurs de coton (CCNPC).

Les réformes ont entraîné la privatisation de l'approvisionnement en intrants, l'introduction d'entreprises d'égrenage privées et la création d'organismes interprofessionnels chargés de reprendre la gestion du secteur en appliquant un système très réglementé qui empêche la concurrence entre égreneurs. Dans la filière réformée, les organismes interprofessionnels répartissent le coton graine entre les entreprises selon leur capacité d'égrenage, tandis que les prix du coton graine restent fixes et uniformes dans tout le pays. La politique de réforme a été actualisée en 2001, 2008 et 2010 dont l'objectif étant d'établir une chaîne d'approvisionnement du coton privée mais intégrée à l'échelon national et d'en transférer la gestion de l'État à l'organisme interprofessionnel.

La complexité des mécanismes réglementant la distribution des intrants aux agriculteurs et la collecte du coton graine en fonction des quantités attribuées en rendait l'application difficile. Les versements faits aux agriculteurs pour le coton graine sont devenus irréguliers, ce qui a entraîné une chute de la production.

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Avec la privatisation fin 2008 de la principale société cotonnière, la SONAPRA, le secteur s'est concentré, de sorte qu'un opérateur privé contrôle toutes les usines d'égrenage sauf une, l'approvisionnement en intrants, le transport et une part importante de l'industrie de l'huile de coton et de l'industrie textile.

II.2.1.2.2. Réglementation de la filière coton et suspension de l'accord-cadre

Depuis juin 2012, la filière coton béninoise est de nouveau dans la tourmente. Les réformes n'ont pas donné les résultats escomptés, et la production a fortement baissé durant la période 2006-2010. Dans un communiqué de presse du

29 avril 2012, le Conseil des Ministres avait cependant annoncé la création d'une autorité/d'un organe national de surveillance et de contrôle de la filière, avec le rétablissement de l'ancienne société publique, la SONAPRA, pour remplacer les structures de gestion créées à l'issue d'accords entre l'État et l'AIC. Cette décision faisait suite au rapport remis par la Commission d'enquête internationale instituée par le gouvernement le 10 avril 2012 pour évaluer la campagne cotonnière 2011/12. Ce rapport soulignait les nombreux dysfonctionnements des structures responsables de la gestion de la filière, l'AIC et la Centrale de sécurisation des paiements et de recouvrement (CSPR).

L'organisation de la filière coton béninoise n'a cessé d'être en proie à des conflits entre partenaires publics et privés.

Le secrétariat du CCIC observe que les réformes n'ont pas entraîné d'amélioration des résultats de la filière coton, de gains d'efficacité, de hausse de la production ni de diminution des frais d'exploitation dans les secteurs de l'égrenage et du transport.

Le processus de privatisation a causé dans un premier temps la

désorganisation du secteur, qui s'est ensuite réorganisé dans une situation quasi monopolistique, une société détenant environ 90 pour cent de la capacité d'égrenage nationale.

II.2.1.3. Réformes dans le secteur du coton au Mali

Le secteur du coton au Mali a affiché la plus forte croissance de l'Afrique de l'Ouest durant la décennie qui a suivi la dévaluation du franc CFA en janvier 1994. La production est passée d'environ 169 000 tonnes de fibres en 1995/96 à un record de 260 000 tonnes en 2003/04. Ensuite, elle n'a cessé de décliner, car les prix du coton en CFA ont baissé et les producteurs n'ont pas été payés dans les délais pendant plusieurs années de suite en raison des difficultés financières de la Compagnie malienne pour le développement des textiles (CMDT). La production a atteint son plus bas niveau en 20 ans avec 85 000 tonnes en 2008/09, malgré un prix attractif à la production de 200 CFA soit environ 0,4 dollars par kilogramme.

Avec la remontée des prix internationaux du coton amorcée en 2009/10, la CMDT a commencé à combler ses arriérés de paiements aux producteurs, et le gouvernement malien a décidé de subventionner les engrais. Certains agriculteurs

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qui s'étaient détournés du coton ont alors repris la culture. La production est passée à 99 000 tonnes en 2009/10, puis à 103 000 tonnes en 2010/11 et de

185 000 tonnes pour 2011/12.

Pour la campagne 2012/13, la production de coton graine a été de 449 641 tonnes et les prévisions pour la campagne 2013-2014 sont estimée à 522 000 tonnes de coton graine.

II.2.1.3.1. Processus de réforme et les projets de réglementation du secteur au Mali

Des réformes ont été mises en oeuvre à partir de 1998/99 pour redresser la situation financière catastrophique de la société cotonnière nationale, et préparer la privatisation prévue. Elles étaient axées sur plusieurs objectifs :

- renforcement des capacités des organisations villageoises et régionales de producteurs,

- restructuration de la CMDT et recentrage de ses activités sur le secteur cotonnier,

- révision du mécanisme des prix aux producteurs et création d'un fonds de soutien des prix, détenu par les producteurs,

- création de l'Interprofession du coton (IPC) et d'un Office central de classement (OCC),

- recapitalisation de la CMDT et scission en quatre filiales régionales à capitaux entièrement privés (Ouest, Centre, Nord-Est et Sud).

Il semble que le processus de réforme soit entré dans une phase décisive avant la crise politique actuelle. La CMDT s'est d'abord diversifiée en septembre 2009 avec la création de quatre filiales et d'une holding. Le gouvernement a également épongé la majeure partie des dettes des coopératives cotonnières en préparation de leur privatisation.

Après une série d'appels d'offres infructueux, la filiale de la CMDT chargée du triturage des graines de coton, Huicoma, a été vendue à l'État, puis rachetée en 2005 par un groupe d'investisseurs locaux.

L'appel d'offres pour la privatisation des filiales de la CMDT au moyen de la cession de blocs d'actions majoritaires par la société de holding a été publié en février 2010 et six sociétés ont été sélectionnées pour y participer. Les premières sélections provisoires ont été faites à partir d'une analyse des paquets techniques et financiers.

Les investisseurs privés détiendront 61 pour cent du capital. Les producteurs agricoles et les salariés de l'entreprise en détiendront respectivement 20 pour cent et 2 pour cent, et les 17 pour cent restants seront conservés par l'État. Les entreprises privées auront un monopole régional sur l'achat, l'égrenage et la vente du coton dans leurs zones d'exclusivité, comme au Burkina Faso.

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La restructuration des associations de producteurs s'est achevée avec la création de l'Union nationale des sociétés coopératives de producteurs de coton du Mali (UNSCPC), qui fédère les différents niveaux régionaux, sectoriels et communaux regroupant 7 000 sociétés coopératives de producteurs de coton.

L'Inter-association professionnelle du coton (IPC), créée le 3 février 2009, réunit l'UNSCPC et l'Association professionnelle des sociétés cotonnières du Mali (APROSCOM), mais le secrétariat du CCIC observe qu'elle reste entravée par des dysfonctionnements. L'IPC est censée veiller à ce que les différents groupements professionnels de la filière coton gèrent ensemble les fonctions essentielles et discutent des questions d'intérêt commun telles que la mise en place d'un système d'information sur les performances de chaque filiale, les plans de campagne, la recherche agricole, les semences, les routes rurales, etc. La création d'un Office de classement du coton (détenu à 100 pour cent par la CMDT) complète le dispositif institutionnel.

La création d'une autorité de régulation du secteur coton (ARSC) a également été examinée (le projet de loi a été adopté en Conseil des Ministres le 9 février 2011 et transmis à l'Assemblée nationale pour examen).

Enfin, un cadre stratégique de développement du secteur coton et une lettre de politique de soutien au secteur coton ont été adoptés en 2010, confirmant la volonté politique de l'État de continuer à participer à la réglementation du secteur. Ils ont notamment pour objectif d'accroître la productivité, la compétitivité et la durabilité du secteur, d'améliorer sa gestion grâce à des consultations et d'établir des mesures de protection contre les fluctuations des prix mondiaux. Une tentative de privatisation de la filiale ouest de la CDMT a toutefois échoué, car l'unique offre présentée a été jugée trop basse.

II.2.1.3.2. Et maintenant?

Au Mali, la mise en oeuvre des réformes institutionnelles dans le secteur du coton, qui était attendue par les partenaires financiers du pays, a été perturbée par le coup d'État de mars 2012. Les autorités actuelles commencent à reprendre les choses en main.

II.2.1.4. Réformes dans le secteur du coton au Tchad

Bien qu'au Tchad le secteur primaire soit dominé depuis 2003 par les exportations de pétrole brut (64,6 pour cent de la valeur ajoutée du secteur), l'agriculture et le coton restent importants pour l'économie nationale. Dans les zones de culture du coton (la production est localisée au sud du pays), 80 pour cent des producteurs pratiquent la culture pluviale sur de petites exploitations de

1 à 2 hectares en moyenne. Malgré son isolement, le Tchad était le premier producteur de coton de la zone franc africaine jusqu'à la fin des années 1970. n 1985, le coton représentait 80 pour cent des exportations du pays et 25 pour cent

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des recettes publiques. En 1997, il représentait encore 65 pour cent des exportations de marchandises30.

Depuis cette période, le Tchad a vu sa production fondre de manière spectaculaire, notamment durant les années 2000. La situation financière de la COTONTCHAD était en fait catastrophique. La société avait payé au prix fort le manque d'investissement et d'entretien. En raison de la faiblesse des prix, la production s'est effondrée, tombant d'un niveau record de 103 000 tonnes de fibre en 1997/98 à 14 000 tonnes en 2009/10, son niveau le plus bas depuis 50 ans. En 2009/10, malgré un prix attractif à la production de 180 CFA soit environ 0.4 dollars le kilogramme de coton graine, la production a enregistré un recul en raison du manque d'intérêt des producteurs qui subissaient des retards de paiement31. La production en 2010/11 s'est élevée à 22 000 tonnes et celle de 2012/13 a été de 102 000 tonnes de coton graine et les prévisions de la campagne 2013/14 sont de 153 334 tonnes de coton graine pour le Tchad.

En décembre 1999, le gouvernement a adopté un programme de réforme du secteur coton appuyé par la Banque mondiale, dont l'objectif était d'améliorer les revenus des cultivateurs et de rendre plus rentable la production grâce à la libéralisation du secteur, y compris la privatisation de la société paraétatique COTONTCHAD et le renforcement des capacités des organisations de producteurs.

Ayant tiré les enseignements des difficultés de mise en oeuvre des autres programmes de réforme du secteur du coton, le Tchad a décidé d'accorder une attention particulière à l'édification d'un consensus entre toutes les parties prenantes tout au long de la réforme. Le choix d'un scénario de privatisation des activités d'égrenage de la COTONTCHAD devait notamment tenir compte de l'avis des organisations de producteurs.

III.2.1.4.1. Processus de réforme au Tchad

La politique de réforme a été approuvée à l'issue d'un processus très long. Elle a abouti à la création en 1997 de l'Observatoire du coton, une unité de soutien technique chargée d'aider le Comité de réflexion et de suivi de la filière coton. En 1999, ce comité est devenu le Comité technique chargé de la réforme cotonnière. La stratégie de désengagement de l'État a été autorisée par le décret n° 541 du

19 décembre 1999. Ce décret a marqué le début officiel du processus de privatisation, avec un plan de réforme qui s'articule autour de deux grands axes:

- le désengagement de l'État du capital et de l'administration de la société cotonnière (la COTONTCHAD) et la libéralisation de la filière; et

- la mise en oeuvre de mesures d'accompagnement au bénéfice des producteurs de coton, afin de renforcer les capacités des organisations

30 Au Tchad, le processus de réforme de la filière cotonnière se trouve dans une impasse", K. Djondang, M. Fok, B. Wampfler et N. Tordina, Conférence internationale de l'ISSCRI, "Justifications et évolutions des politiques cotonnières", Montpellier, 13 au 17 mai 2008.

31 http://www.lesafriques.com/ "Mahamat Adoun Ismaël, Président directeur général de COTONTCHAD".

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de producteurs, de façon qu'elles puissent jouer un rôle accru dans le fonctionnement de la filière.

Bien que l'État ait accepté de se désengager du secteur, son contrôle reste très puissant. Le débat sur le lancement d'un processus de privatisation a été retardé par le différentiel de rentabilité des zones ou des usines. Un accord a fini par être conclu sur la privatisation des usines d'égrenage en tant que paquet unique. Le

gouvernement a avancé lentement, hésitant entre deux scénarios : la vente d'actions ou la vente d'actifs. Mais cette lenteur dans la mise en oeuvre du plan a contribué au déclin du secteur.

II.2.1.4.2. Création de la COTONTCHAD SN

Une décision relative à la restructuration de la COTONTCHAD a été adoptée en janvier 2012. Afin de relancer la production de coton, les autorités tchadiennes ont décidé d'apurer les dettes de la société nationale. Fin décembre 2011, la direction du Conseil d'administration réunie en assemblée extraordinaire a adopté un plan stratégique prévoyant la création d'une nouvelle société, la COTONTCHAD Société nouvelle (COTONTCHAD SN). La participation de l'État dans cette nouvelle société est de 51 pour cent et sera ensuite ramenée à 33 pour cent. L'objectif est de rassurer les investisseurs privés afin de relancer le processus de privatisation de la société. Depuis le 25 janvier 2012, tous les engagements contractés par la COTONTCHAD ont été transférés à la COTONTCHAD SN.

Avec la création de la COTONTCHAD SN, la production de coton pourrait redémarrer. Le plan de la société prévoit la réintégration progressive des organisations de producteurs dans la gestion du secteur, avec comme objectif de porter la production à 300 000 tonnes de coton graine (120 000 tonnes de coton fibre) en 2016.

II.2.1.4.3. Réformes entravées par des hésitations

Les incertitudes relatives au rythme et à l'orientation de la réforme au Tchad ont entraîné un désastre financier pour la société cotonnière et un effondrement de la production. En raison de la résistance aux réformes prônées par la Banque mondiale et de l'absence de consensus sur la marche à suivre, la filière s'est trouvée privée d'orientations claires, et la COTONTCHAD n'a pas reçu les ressources nécessaires pour maintenir le secteur. La création de la COTONTCHAD SN laisse espérer une relance de la filière.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams