Les défis du terrorisme au Sahel. Aqmi,une menace stratégique?( Télécharger le fichier original )par Rodrigue NANA NGASSAM Université de Douala - Cameroun - Master II en science politique- option : études internationales 2013 |
PARAGRAPHE II : L'INCONTOURNABLE MISE EN PLACE D'UN SYSTEME JUDICIAIRE RIGOUREUX DE LUTTE CONTRE LE TERRORISMELe terrorisme doit être traité comme un crime et doit faire l'objet de poursuite judiciaire. A ce titre, l'harmonisation du système juridique et judiciaire entre pays de la région sahélienne (A) et le renforcement des capacités judiciaires régionales (B) est nécessaire pour mieux coordonner les efforts dans la lutte contre le terrorisme au sahel et en Afrique. A- L'harmonisation du système judiciaire et juridique entre pays de la régionL'importance de la mise en oeuvre d'un instrument régional en matière de terrorisme (1) et l'établissement d'un mandat d'arrêt africain pour les activités relevant de cette terreur (2) doivent permettre aux Etats du sahel et à l'Afrique tout entière d'éliminer les menaces émanant du terrorisme et de la criminalité organisée. 1- L'importance de la mise en oeuvre d'un instrument régional en matière de lutte contre le terrorisme La lutte contre le terrorisme appel à la création en Afrique d'un environnement législatif adéquat et adapté aux standards continentaux et universels. Le terrorisme doit être traité comme un crime et doit faire l'objet de poursuites judiciaires. A ce titre, pour mieux coordonner les efforts de coopération, l'harmonisation des lois existantes au sahel et en Afrique, ainsi que la promotion de l'échange, entre les Etats, de connaissances sur leurs lois est nécessaire. De plus, la création d'un instrument régional à des fins d'assistance mutuelle et d'extradition est une obligation dans la lutte antiterroriste. Un organe judiciaire spécialisé à compétence étendue doit permettre non seulement la répression mais aussi la dé-radicalisation de ceux qui ont, à un moment ou un autre, adopté les doctrines djihadistes et extrémistes violentes. Cette institution judiciaire pourrait également jouer un rôle très important dans la prévention et la répression de l'acte terroriste en conformité avec les principes et règles de l'état de droit. Pour renforcer cet instrument judiciaire et la doté d'une grande capacité en termes de pouvoir, des accords d'extradition doivent être signés à l'échelle régional, africaine et même au-delà. Le terrorisme est un fléau transnational et pour cela, une coopération judiciaire internationale, une solidarité répressive, serait intéressante afin que la lutte soit plus efficiente. La répression serait une chose vaine, écrivait Jean-André Roux, si la poursuite aboutissait à une condamnation seulement par contumace. Pour être efficace, la peine doit être effective, c'est-à-dire causer une exécution sensible, réelle451(*) Tous les pays du sahel disposent déjà d'une législation nationale qui criminalise les actes terroristes ainsi que d'un cadre juridique de coopération. A côté de cela, on compte douze conventions des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme que certains Etats ont ratifié. Il existe également d'autres cadres juridiques de coopération (UA, Organisation de la Conférence Islamique etc.) qui permettent l'extradition. Mais, l'observation faite, est que ces différents mécanismes juridiques et judiciaires ont échoué dans la lutte contre le terrorisme au sahel. L'échec est amère et la note salée, car les groupes terroristes et les narcotrafiquants présents au sahel ont prospéré sans jamais être inquiétés par les juridictions nationales desdits Etats sahéliens, ni régionales et encore moins internationales. C'est pourquoi, une organisation judiciaire régionale et pourquoi pas continentale en matière de terrorisme et criminalité organisée est indispensable pour contribuer efficacement à la lutte contre le terrorisme en Afrique. Il est clair que l'existence d'une telle institution unique permettrait de surpasser les difficultés rencontrées par les Etats et faciliterait les procédures relatives à l'enquête et l'arrestation des personnes soupçonnées, accusées, recherchées ou reconnues coupables d'actes de terrorisme, en conformité avec la législation nationale de chaque Etat. Conscients de l'existence de graves problèmes d'insécurité en Afrique, l'urgence de mettre sur pied un instrument judiciaire qui aurait un rôle central dans la lutte antiterroriste et qui aurait pour mission de délivrer un mandat d'arrêt africain contre des terroristes est un défi majeur auquel le continent est à appeler à répondre s'il veut faire face aux nouvelles menaces qui bafouent son sol. 2- L'établissement d'un mandat d'arrêt africain pour les activités relevant du terrorisme Concernant le mandat d'arrêt africain pour les activités liées au terrorisme, sa mise en place permettrait de s'attaquer directement contre les personnes accusées ou reconnues coupables d'actes terroristes. Les lois existantes et nouvelles relatif à la lutte antiterroriste doivent être appuyées par la possibilité de toucher les terroristes partout où ils se trouvent. Ainsi, la grande nouveauté résiderait dans la mise en place d'une procédure d'extradition exclusivement judiciaire, fondée sur le principe de reconnaissance mutuelle des décisions de justice, sans que le dernier mot puisse revenir au pouvoir politique. Cela viserait à accélérer les procédures et proclamerait la fin, hautement symbolique, du refus d'extradition des personnes soupçonnées de terrorisme entre Etats membres de l'UA. La mise en oeuvre d'un mandat d'arrêt africain contre le terrorisme s'inscrit dans un double souci d'efficacité opérationnelle et de promotion d'un instrument de liberté, de sécurité et de justice. Entre Etats membres de l'UA, le mandat d'arrêt africain s'imposerait à chaque autorité judiciaire nationale de reconnaître, ipso facto et moyennant des contrôles minimums, la demande de remise d'une personne formulée par l'autorité judiciaire d'un autre Etat membre. Cette remise ne pourra être refusée qu'en cas d'amnistie, de jugement déjà rendu dans un autre Etat ou si la personne concernée ne peut pas être considérée responsable par l'Etat membre d'exécution en raison de certaines modalités que les Etats africains pourront eux-mêmes appréciées. Longtemps envisagé au cours des Sommets, Ateliers d'échange452(*), celui-ci n'a jamais vu le jour. Cependant, il faut noter que la Commission de l'UA a déjà engagée des discussions avec le Comité contre le Terrorisme de l'ONU et l'Office des Nations Unies contre la Drogue et le Crime pour aider à élaborer les cadres, les procédures et les mesures nécessaires à même de créer les conditions essentielles pour la mise en oeuvre effective du Mandat d'arrêt africain et la stratégie pour promouvoir la mise en oeuvre d'un tel outil. Dépassant largement les moyens pouvant être mobilisés dans le cadre d'une réponse militaire et de renseignement, la lutte contre le terrorisme au sahel appelle à l'évidence une réponse plus globale. Le renforcement des capacités judiciaires régionales constituent l'une des premières initiatives que les Etats du sahel doivent réalisés. * 451 Jean-André ROUX, « L'entraide des Etats dans la lutte contre la criminalité », RCADI, 1931-II, T.36, p. 117. * 452 C'est le cas de l'Atelier sur « le Renforcement de la capacité de réponse des systèmes juridiques nationaux des pays du sahel et de l'Afrique du Nord à lutter contre le terrorisme », organisé à Alger du 03 au 05 juin 2012 au cours duquel, un projet de création d'un Mandat d'arrêt africain a été évoqué. |
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