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Les défis du terrorisme au Sahel. Aqmi,une menace stratégique?

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par Rodrigue NANA NGASSAM
Université de Douala - Cameroun - Master II en science politique- option : études internationales 2013
  

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PARAGRAPHE II : LE SAHEL, NOUVEAU FOYER DU MILITANTISME ISLAMIQUE EN AFRIQUE

Par « militantisme islamique », on entend ici des groupes et mouvements musulmans qui, se fondant sur des préférences religieuses, cherchent à faire appliquer des normes religieuses, sociales et politiques par la violence317(*). Ces préférences religieuses considérées à leur tour par ceux qui les interprètent sont celles devant faire autorité. Les récents événements survenus au Mali, notamment la prise de plusieurs villes importantes par des groupes islamistes, viennent souligner que cette menace islamiste qui a trouvé un foyer de prolifération en Afrique noire menace plus que jamais la paix et la sécurité internationale. Un bref rappel historique de la présence islamique radicale dans la zone sahélienne (A) et les premiers signes de sa manifestation permettraient d'y voir un peu plus clair dans quel carcan s'est laissé prendre le sahel (B).

A- Historique de la présence de l'islam radical dans la région sahélienne

La montée du militantisme islamique dans certaines parties du sahel et dans la corne de l'Afrique est un facteur dangereux pour la stabilité régionale. L'attrait de ce mouvement provient de sa capacité à puiser dans les communautés abandonnées, notamment les plus exposées que sont les jeunes, pour les convaincre qu'il est possible de répondre à leurs doléances en établissant une culture islamique plus pure. Ainsi, la guerre civile en Algérie et l'émergence du terrorisme armé (1) combinés avec la descente des groupes armés au Sahara et au sahel (2) peuvent être analysés comme des facteurs initiateurs et à l'origine dans une certaine mesure de cette poussée islamique au sahel.

1- La guerre civile en Algérie et l'émergence du terrorisme armé (GIA)

L'islam au Sud du Sahara concerne environ 150 millions de personnes, ou, si l'on veut, un africain noir sur trois318(*). Cette communauté représente le huitième de la « Umma » (communauté musulmane) dans le monde. L'islam africain est, historiquement, l'héritier, depuis le moyen âge, des échanges commerciaux à travers le Sahara et l'océan Indien. Cet héritage explique la disposition géographique de l'Afrique noir islamisée : une bande de territoires soudano-sahéliens qui traverse en écharpe le continent africain, entre le Sénégal et la corne de l'Afrique, avec un prolongement le long de la côte de l'océan Indien319(*). Depuis, on assiste, avec le surgissement de nouvelles générations et de nouveaux cadres, à des phénomènes d'affirmation islamique et de réislamisation. La vieille grille d'analyse qui faisait de l'islam africain le domaine des confréries, c'est-à-dire des structures de patronage religieux contrôlant leurs fidèles et naturellement enclins aux compromis avec les pouvoirs, ne suffisent plus à rendre compte des réalités sociales nouvelles320(*). Comment en est on arrivé là ? Que s'est-il passé ?321(*)

Difficile d'aborder la question du terrorisme au sahel sans évoquer d'abord l'Algérie, d'où sont originaires AQMI et une bonne partie des leaders djihadistes de la région. L'Algérie se trouve entre 1991 et 2005 en plein conflit dans ce que certains ont qualifié de décennie noire, « guerre civile algérienne », « décennie du terrorisme » ou encore « années de braise » selon Hamit BOZARSLAN322(*). C'est dans ce contexte que l'on verra naître dans ce conflit armé aux multiples facettes plusieurs groupes terroristes dont le Groupe Islamique Armé (GIA) dans la grande banlieue d'Alger. Liess BOUKRAA écrit : « La naissance du GIA est donc proclamée en octobre 1992, à la suite de l'échec de la réunion de Tamesguida (les 31 août et 1er septembre 1992), qui visait à unifier toutes les organisations terroristes sous l'autorité de Abdelkader CHABOUTI »323(*). Le GIA est une organisation non centralisée et morcelée en deux clans dont les djazaristes qui cherchent à prendre le pouvoir en Algérie et les salafistes qui cherchent à mettre au point une révolution islamique mondiale. Si le GIA a longtemps été identifié au DRS (Département du Renseignement et de la Sécurité algérienne), la secte victorieuse telle qu'elle se faisait appeler assurait plusieurs fonctions : terroriser par des crimes injustifiables une population largement acquise à l'opposition islamiste, se substituer à la véritable rébellion armée pour la discréditer (FIS) et provoquer des dissensions internes, pousser à l'armement de la population civile pour combattre le « terrorisme », justifier la « guerre totale » contre les civils, faire accepter les mesures antisociales draconiennes, bénéficier du soutien international324(*) . Sans compter les exhibitions musclées et les provocations menées par les foules endoctrinées lors des manifestations, scandant les slogans du « pourchas du mal et la prédication du bien ». Ainsi, animés par un esprit vindicatif et d'une haine viscérale contre l'Etat et contre leurs propres acolytes, munis de brevets de légitimation de la violence que leur offraient les Fatwa de leurs pairs les autorisant à interpréter la charia comme bon leur semblait, les GIA se sont lancés dans une guerre sans répit et contre tout le monde.

2- La descente des groupes armés au Sahara et au Sahel

Dans `'A Season in Hell-My 130 Days in Sahara with Al-Qaeda''325(*), Robert R. FOWLER, diplomate Canadien aujourd'hui à la retraite et kidnappé le 14 décembre 2008 au Niger par AQMI, revenait sur le danger sans cesse croissant que représentait cette mouvance islamiste radicale en Afrique sub-saharienne. La fragilité des pays sahéliens est structurelle, et donc inquiétante car à proximité directe de plusieurs Etats sensibles, considérés comme des foyers potentiels ou actifs de l'islam radical : Soudan, Libye, Nord du Nigéria et Algérie. Les zones septentrionales des pays sahéliens sont des zones de repli pour certains groupes terroristes algériens, comme l'actuel AQMI. AQMI a bénéficié, du moins dans un premier temps, des facilités au Mali et, plus tardivement, en Mauritanie. Ses hommes pouvaient pénétrés les territoires des deux Etats à condition de ne se livrer à aucune violence et d'éviter les accrochages avec les forces armées locales326(*). D'autres indices montrent qu'Al-Qaïda aurait tenté de mettre sur pied dans la zone sahélo-Saharienne une véritable ambassade, pour recruter des sympathisants et les organiser en cellule. Le yéménite Imad ABD AL-WALID AHMED ALWAN s'est ainsi déplacé en 2002 depuis l'Afghanistan pour venir en Mauritanie, au Niger, au Tchad et au Nigéria. Cet homme connu également sous son nom de guerre, Abou MOHAMMED, aurait été envoyé dans la région par Ben Laden et sera abattu en 2002 par les forces de sécurité algérienne.

Ceci étant, le véritable déploiement de l'AQMI au sahel date, en fait, de l'été 2003. En effet, durant toute la décennie de la guerre civile algérienne, de 1992 à 2002, le Sud algérien a été essentiellement utilisé comme zone de passage par les trafiquants d'armes, mais aussi par les terroristes islamistes algériens cherchant à fuir leur pays327(*). En 2005, un Rapport de l'International Crisis Group (ICG)328(*) révélait que les ONG et les associations caritatives islamiques des pays du golfe pouvaient facilement financés et contribués à la radicalisation des groupes violents au sahel. Aujourd'hui, le théâtre sahélien semble faire l'objet d'une nouvelle poussée de l'islam politique, voir extrémiste. Dans ce cadre, toutes les grandes sources de l'islam radical se positionnent peu à peu au sein des pays de la région en s'appuyant sur leur légitimité spirituelle et historique. Par ailleurs, ces nouvelles forces, tout en étant de nature trans-étatique, sont pilotées par les Etats moteurs de l'islamisme radical (Arabie Saoudite, Pakistan, Iran et Soudan) et interagissent avec les forces islamiques et groupes terroristes autochtones, les confréries et ceci, de manière propre à chaque pays. Le fait que le gouvernement malien n'ait pas su investir systématiquement et maintenir une forte présence de L'Etat dans le Nord, par exemple, a instauré un climat propice à l'essor du militantisme islamique et à l'escalade de la violence dans cette région329(*). Ces dernières décennies, certaines tendances au sein du Salafisme ont appelé de façon croissante à l'établissement d'un ordre politique islamique pour qu'aboutisse cette quête de pureté religieuse.

Ces influences sont très bien visibles au sein d'AL-SHABAAB en Somalie et de BOKO HARAM au Nigéria et chez les terroristes sahéliens. Plus particulièrement, d'aucuns ont l'impression que l'islam est menacé par des forces de contamination, et qu'il est impossible de protéger la pureté religieuse dans des systèmes politiques non musulmans et que le recours à la force est la seule issue. AL-SHABAAB et les militants maliens sont parvenus à s'assurer une emprise territoriale, si fragile qu'il soit à cette fin. En mettant sur pied des règles strictes visant à instaurer un environnement pieux, ils ont détruit les sanctuaires Soufis, des livres, parchemins et antiques sacrés, et réprimés des activités « immorales » telles que l'usage du tabac, de l'alcool et du `'Khat'' par l'application de la charia et de sanctions `'hudud'' (restrictions) telles que la peine capitale, l'amputation ou la flagellation, sans oublier les campagnes d'endoctrinement330(*) et de recrutement auxquelles se sont livrées les groupes djihadistes (AQMI et MUJAO) opérant dans la région et spécialement au Nord-Mali. Dans ces conditions, la résurgence d'un islamisme radical au sein de la bande sahélienne doit être pris au sérieux tant les prémisses avaient déjà vu le jour avec le phénomène des prises d'otages.

* 317 Terje OSTEBO, « Le Militantisme Islamique en Afrique », Bulletin de la Sécurité Africaine, une publication du Centre d'Etudes Stratégiques de l'Afrique, n° 23, novembre 2012, p. 1.

* 318 Jean Pierre RAISON, « Les Religions en Afrique », Institut d'Etudes Africaines d'Aix-en-Provence, décembre 2012, p. 1.

* 319 Jean Pierre RAISON, ibid., p. 1.

* 320 Jean Pierre RAISON, op.cit., p. 2.

* 321 Bernard LEWIS, What Went Wrong? Western impact and Middle Eastern response, New York, Oxford University Press, 2001. (Traduction Française, Que s'est-il passé? L'Islam, l'Occident et la Modernité, Paris, Gallimard, 2002.

* 322 Hamit BOZARSLAN, Cents Mots pour dire la violence dans le monde musulman, Maisonneuve et Larose, 2005, p. 141.

* 323 Liess BOUKRAA, La Terreur sacrée, Favre, Genève, 2002, p. 245.

* 324 François GEZE et Salima MELLAH, « Al-Qaïda au Maghreb », ou la très étrange histoire du GSPC algérien, Algéria-Watch, 22 septembre 2007, p. 10.

* 325 Robert R. FOWLER, A Season In Hell-My 130 Days in Sahara with Al Qaeda, Toronto, Harper Collins, 2011.

* 326 Alain ANTIL, « L'Afrique et la `'guerre contre la terreur'' », Institut Français des relations Internationales/Politique Etrangère, Automne 2006, p. 6.

* 327 Djallil LOUNNAS, « AQMI et la crise malienne », Sécurité Globale, ETE 2012, p. 44.

* 328 `'Islamist Terrorism in the Sahel: Fact or Fiction?'', International Crisis Group, «Africa Report», n° 92, 31 Mars 2005.

* 329 Terje OSTEBO, « Le Militantisme Islamique en Afrique », Bulletin de la Sécurité Africaine, une publication du Centre d'Etudes Stratégiques de l'Afrique, n° 23, novembre 2012, p. 4.

* 330 Jemal OUMAR, « AQMI lance une campagne d'endoctrinement le long de la frontière Mauritano-Malienne », Magharebia, 5 août 2011.

http://www.magharebia.com/cocoon/awi/xhtml1/fr/features/awi/features/2011/08/features01.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery