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Le gouvernement et le processus législatif en Tunisie (avant la révolution de 2011)

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par Héla Boujneh
Faculté de Droit et des sciences Politiques de Sousse - Mastère en Droit Public 2010
  

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Conclusion

L'efficacité du processus de consultation en Tunisie pourrait être améliorée par des processus de consultation plus transparents et plus systématiques mais surtout par des instances plus indépendantes et légitimement élues et exprimant une vraie souveraineté populaire.

D'autre part il serait plus judicieux de permettre à d'autres acteurs de saisir le Conseil constitutionnel, en plus du président de la République et ce avant la phase parlementaire c'est-à-dire avant le vote de la loi.

Jean Bodin définissait la souveraineté comme la puissance de donner la loi, la souveraineté du peuple est désormais écrasée par la souveraineté du gouvernement et l'administration qui ont dépassé les organes représentatifs du souverain dans l'exercice de la fonction législative.

La qualification des acteurs des organes consultatifs est de taille. Il faut chercher un nouveau profil «  des élus, socioprofessionnels, des techniciens, des leaders d'opinion, scientifiques...ce nouveau profil s'élaborait à partir d'un apprentissage politique que les acteurs sont amenés à faire de manière permanente sur leurs rôles et normes d'actions268(*) »

Il faudrait penser à l'instar de la France, à créer un comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Ve République, quant à lui, recommande l'institution d'une procédure d'encadrement du pouvoir de nomination, qui serait notamment applicable à toutes les nominations au Conseil Constitutionnel.

Cependant il ne faut pas tomber dans l'excès inverse qui consisterait à conduire la société dans une espèce d'ouverture politique institutionnel démesurée. Il est, en effet, indispensable de se préserver l'essence et les principes intrinsèques de nos valeurs arabo-musulmanes, d'introduire dans la loi fondamentale des améliorations souhaitables et même requises susceptibles de l'enrichir, de la compléter, de la rendre plus efficiente et plus efficace par rapport aux objectifs que l'on veut atteindre et conformément à la volonté du peuple.

Conclusion Générale

Nous sommes arrivés au terme d'une longue analyse. Le sujet est d'une actualité brûlante et concerne au premier le rôle joué par le gouvernement dans la production normative et les réformes à apporter pour rationnaliser la loi.

La capacité de l'Etat de droit d'influencer le cours de la société ne saurait dépendre d'un type unique et exclusif d'outils, mais bien d'un arrangement adéquat d'instruments divers qui, pour provoquer une synergie, doivent être combinés entre eux dans une perspective plus globale. Il est donc plus que jamais nécessaire de développer des mécanismes et des méthodes capables d'assurer la coordination et l'évolution de l'ensemble des instruments d'action de l'Etat tout en garantissant la normativité de la loi.

Aujourd'hui il ne suffit pas d'invoquer la loi pour résoudre la totalité des problèmes de société.

Une loi si nécessaire donc, mais pas nécessairement une loi !

La réforme 269(*)doit se baser sur un repositionnement des institutions existantes et les compétences et qualifications exigées des acteurs au sein de ces institutions, sur un processus d'émergence de nouveaux acteurs ainsi que d'un processus de renouvellement des normes d'action.

Elle doit toucher, impérativement, à la fois le statut des pouvoirs et leurs attributions respectives.

L'amélioration du processus de préparation et d'étude des textes législatifs est essentielle ainsi que la mise en oeuvre des dispositions applicables aux études d'impact et d'options

Les textes peuvent être mieux préparés, mieux communiqués aux usagers, mieux suivis et mieux évalués au stade de leur application.

Quelque soit l'intention du Gouvernement de s'engager par ailleurs sur un effort global de méthode, l'encouragement des initiatives concrètes est sollicité dans le cadre du travail quotidien des administrations est nécessaire

« Une chose qui change est que le fossé entre le gouvernement et le Parlement semble s'accroître et cela crée des frustrations de tous les côtés; `les ministres tendent à retraiter ...; le travail des parlementaires devient alors assez étroit de perspectives en tentant de faire de la partisannerie et même de l'obstruction systématique; le contrôle réel exercé par les comités parlementaires a décru et les parlementaires en conçoivent de la frustration270(*) ».

 La réforme engagée par le gouvernement doit être conduite dans la transparence, le débat et la concertation la plus large, renforçant les fonctions stratégiques de l'Etat central conférant à l'Administration, les fonctions opérationnelles, à travers les tâches de gestion et de prestation de services.

Finalement le principe de séparation des pouvoirs devient presque obsolète et sans échos, la séparation entre exécutif et législatif est tellement fragilisée et « fatiguée271(*) », que sa consécration dans une constitution ou son adoption en tant que principe fondateur de l`Etat de droit devient mensongère et dépassée.

C'est le moment crucial dans l'histoire de la Tunisie afin de remettre le droit et la loi à leur place, réorganiser les institutions, exprimer plus de pragmatisme, lucidité et bonne foi en légiférant et redonner aux institutions leurs vraies fonctions et valeurs.

Le processus législatif ne peut qu'être le reflet du bon fonctionnement de l'Etat, le reflet des attentes des citoyens et leur expression, garder une marge de manoeuvre au pouvoir exécutif n'exclut pas l'importance du rôle parlementaire et celui du député en tant que détenteurs originels du pouvoir législatif.

Car un État démocratique, la souveraineté du pouvoir exécutif est limitée par l'intervention d'un pouvoir législatif, l'action du gouvernement ainsi que celle du chef d'Etat est soumise au contrôle d'une instance intermédiaire, d'une institution essentielle à l'exercice de la démocratie moderne, qui est l'assemblée législative. Il ne saurait exister de régime démocratique sans cette institution, sans une telle institution, la démocratie est inconcevable dans un État.

A l'instar de l'Assemblée constituante de 1957, celle issue de la volonté du peuple tunisien exprimée par les élections du 23 Octobre 2011, va élaborer La Constitution qu'on espère être le reflet des attentes exprimées.

Cela dit à la lumière de la loi constituante numéro 6 datant du 16 décembre 2011 et portant organisation provisoire des pouvoirs publics272(*), nommée notamment «  la petite constitution », et eu égard à ses différentes dispositions, on ne peut à priori que rester vigilent, car la lecture du contenu de cette loi n'est pas aussi réconfortante ni par rapport à la forme , c'est-à-dire la qualité de la rédaction ni par rapport au fond , c'est-à-dire la répartition des pouvoirs entre les différentes institutions.

* 268Teisserenc (P.). Les développeurs dans la négociation politique, Actes de colloque : les recompositions locales des formes de l'action politique, CERAL, 31 mai 2001, page 103-117.

* 269 Voir l'article de Mrad (H.).La gouvernance ou la quête d'un nouvel ordre politique, Mélanges en hommage à Dali Jazi, Centre de Publications Universitaires, 2010, p.p. 599-611

* 270Bourgault (J.). Le rôle et les défis contemporains des sous-ministres du gouvernement du canada, Centre Canadien de Gestion, janvier 2003, http :// www . csps - efpc . gc . ca / pbp / pub / pdfs / p 113_ f . pdf

* 271 Ben Achour (Y.). Pouvoir gouvernemental et pouvoir administratif, Université de Droit et des Sciences Politiques et Economiques, 1977-1978, page 107.

* 272 JORT numéro 97 du 20 et 23 décembre 2011, pp. 3111-3115.

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