PARAGRAPHE 2
INSTRUMENTS DE POLITIQUE ENVIRONNEMENTALE
Les questions environnementales sont devenues une
préoccupation majeure affichée par de multiples acteurs, dans
leurs comportements sociaux, politiques et, de plus en plus,
économiques. Nul ne doute qu'au delà des effets de mode et de
l'hétérogénéité des sensibilités
exprimées.
32 Economie et environnement, économie et
environnement, formation continue, arnaud diemer mcf iufm d'auvergne, janvier
2004 p8
![](Exploitation-miniere-en-Mauritanie-et-protection-de-l-environnement-cas-de-la-SNIM56.png)
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Ce mouvement ne traduise l'idée que les ressources
environnementales ne sont pas toujours correctement exploitées et que
leur gestion efficace nécessite des politiques publiques
appropriées. L'objet de cet article est d'exposer brièvement les
principaux concepts théoriques de l'économie de l'environnement
ainsi qu'une grille d'analyse des instruments des politiques de
l'environnement.
Cette grille se veut fondée sur divers critères
d'efficacité qui permettent de minimiser les coûts de ces
politiques: efficacité micro-économique, incitation aux
progrès techniques, minimisation de l'incertitude,
réversibilité, coût de gestion administrative,
facilités d'intégration dans une stratégie internationale.
L'interprétation économique des problèmes d'environnement
recouvre une grande variété de concepts. On peut la
résumer en disant que l'environnement est une ressource ou un bien que
les mécanismes de marché conduisent à ne pas exploiter ou
allouer de façon efficace.
Les biens ou les ressources de l'environnement (eau, air,
espaces naturels, etc.) sont rarement l'objet d'une allocation en fonction de
la valeur collective que représente cette exploitation. Par ailleurs,
les dysfonctionnements des autres marchés, notamment une prise en compte
insuffisante des conséquences environnementales de leurs
activités (transports, énergie, urbanisme, agriculture, etc.)
retentissent sur la qualité de l'environnement.
Le fonctionnement spontané des secteurs de
l'économie utilisant les ressources environnementales n'assure pas, en
général, une allocation optimale. Le système de prix (ces
prix sont souvent nuls pour les biens environnementaux) conduit à une
mauvaise répartition des ressources: on observe alors une
surexploitation au détriment de certains de nos contemporains ou des
générations futures33.
La définition d'une politique de l'environnement
nécessite le choix d'instruments adaptés. A cet égard, les
nombreux moyens disponibles doivent Imposer des contraintes quantitatives
à l'utilisation des biens d'environnement est une mesure historiquement
très utilisée dans les politiques de l'environnement. Celles-ci
portent généralement sur des normes de limitation
d'activité et des émissions individuelles, parfois sur une
organisation des systèmes de production ou de traitement (dispositifs de
dépollution, utilisation de certains facteurs de production, obligation
de recyclage ou d'incinération, etc.).
33 Les instruments économiques des
politiques d'environnement annales des mines avril 2005 Emmanuel massé
administrateur INSEE, chef de bureau au ministère de l'écologie
et du développement durable
Xavier delache ingénieur en chef du grief,
antérieurement sous-directeur au ministère de l'écologie
et du développement durable p36
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Plusieurs logiques peuvent légitimer la mise en place
d'une réglementation environnementale contraignante. D'une part, dans
une approche de «-risque zéro», l'existence d'un seuil quant
à l'impact d'émissions polluantes sur la santé humaine
peut permettre une politique de gestion des risques scientifiquement
établie et juridiquement précautionneuse. Le coût potentiel
pour la collectivité des mesures de prévention pour atteindre un
tel niveau de protection doit néanmoins conduire à utiliser cette
approche parcimonieusement.
D'autre part, la réglementation apparaît comme un
substitut aux autres instruments politiques de gestion de l'environnement dans
le cas où la réponse des agents aux incitations
économiques détaillées plus loin est faible ou lente. Les
réglementations environnementales présentent l'avantage d'avoir
des effets relativement prévisibles sur la qualité de
l'environnement.
Elles nécessitent, pour être effectives, que des
contrôles soient possibles, ce qui les rend plus difficilement
applicables dans le cas d'émissions polluantes diffuses ou de pollutions
issues d'un trop grand nombre d'agents. Il doit être clair que toute
réglementation génère des coûts d'adaptation pour
les agents, qui constituent en quelque sorte le «-prix sous-jacent»
des normes. Le manque de transparence de leurs coûts facilite très
certainement l'acceptabilité des mesures réglementaires
a- Les instruments économiques
Les instruments économiques sont des instruments de
politique environnementale visant, par une action sur les mécanismes de
marché, à inciter les agents économiques à adopter
un comportement plus approprié d'un point de vue environnemental et
ainsi à limiter les nuisances environnementales. Dans cette perspective,
le rôle de signal du prix est déterminant.
1- Taxes et redevances
C'est A.C Pigou (1920) qui a le premier proposé de
mettre en place une taxe pour internaliser les externalités
négatives. L'économie du bien être, telle que la
conçoit Pigou, est une interrogation sur les liens existant entre la
recherche de l'intérêt individuel et la recherche de
l'intérêt collectif. Du fait de l'interdépendance non
compensées entre les agents, Pigou voit que l'utilité collective
ne peut être appréciée en faisant la somme des
utilités individuelles.
Plus précisément selon Pigou, la présence
d'effets externes négatifs pose le problème de la
désadéquation entre les coûts privés et le
coût collectif (coût social) des activités
économiques. En reprenant l'exemple de la firme A qui utilise l'eau
d'une rivière pour y rejeter ses effluents, on voit que celle-ci se
conduit comme si elle utilisait un facteur de production sans le payer. Son
coût de production (qui est un coût privé), est dès
lors inférieur à ce qu'il devrait être et diffère du
coût social de son activité, du coût qu'elle inflige
à l'ensemble de la collectivité.
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Une telle situation est contraire à la théorie
économique pour laquelle le coût social de l'activité doit
être couvert par l'ensemble des dépenses qu'elle engage. Au
delà du problème du non optimalité des arbitrages des
agents économiques qu'ils posent,
Pigou souligne que l'existence des effets externes pose aussi
un problème de justice sociale puisque certains agents ne sont pas
rémunérés en fonction de leur contribution exacte à
la richesse collective. La solution préconisée par Pigou consiste
à répondre à ces deux problèmes avec l'aide d'une
intervention de l'Etat34.
2- Les Normes
Mettre en place une norme consiste a fixer le niveau de
pollution maximal que l'agent peut émettre, on dit également un
quota. En général une norme est uniforme, c'est-`a-dire qu'elle
est la même pour tous les agents, mais elle peut également
être différenciée, et donc différente suivant
l'agent. Pour forcer la production d'externalité il est également
possible de mettre un quota de production obligatoire, mais c'est rare.
Lorsque les émissions de polluants ne peuvent pas
être facilement mesure, les normes peuvent être fixées sur
les intrants, ou encore sur la technologie `a utiliser. La norme doit
être établie a un niveau tel que la somme des productions
d'externalité est égale au niveau optimal, c'est un instrument en
quantité. De nombreuses normes uniformes existent, on peut citer les
pots catalytiques, les normes sur les rejets industriels ou encore les normes
sur les rejets agricoles de nitrates.
3- Les redevances de pollution
Sont des paiements qui sont effectués en cas de rejet
direct dans l'environnement. Elles sont souvent utilisées dans la lutte
contre la pollution de l'eau (Allemagne, Australie, France, Italie, Pays-Bas).
On y a également recours pour la gestion des déchets solides
(Australie, Belgique, Danemark, États-Unis, Pays-Bas) et pour lutter
contre les bruits produits par les aéronefs (Allemagne, France, Japon,
Pays-Bas, Suisse).
L'application de mesures anti-pollution dans ces domaines est
d'autant plus facile que les lieux de rejet sont fixes et identifiables et que
les redevances ne sont le plus souvent appliquées qu'aux sources de
déchets importantes.
34 Economie et environnement, formation continue,
arnaud diemer mcf iufm d'auvergne, janvier 2004 p16
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Les redevances de pollution servent essentiellement à
financer des systèmes individuels ou collectifs de lutte contre la
pollution. Aux Pays-Bas, le niveau des redevances de déversement dans
l'eau est si élevé qu'il incite fortement les pollueurs à
prendre eux-mêmes des mesures d'épuration35.
4- Les systèmes de consigne
Consistent à imposer une taxe sur un produit
potentiellement polluant. La taxe est remboursée quand la pollution est
évitée par le retour du produit après son utilisation (ex
: les systèmes de consigne des bouteilles en verre).
5- Les marchés de droits à polluer ou les
systèmes de permis négociables
Le marché des droits à émettre du SO2 par
les grandes centrales thermiques aux Etats Unis dans le cadre du Clean Air
Act). Le principe est extrêmement simple : un pollueur ne peut
émettre que la quantité de pollution qui correspond à
celle des permis d'émissions dont il dispose. C'est un instrument
économique car ces permis sont cessibles sur un marché. De ce
fait, le pollueur a le choix entre dépolluer ou acheter des permis
supplémentaires36.
b- Les instruments de planification
La planification est une technique fréquemment
utilisée en matière environnementale. Les plans de gestion de
l'environnement prennent des formes très variées, ce qui se
traduit par une grande variété de dénominations :
programmes, plans, ou encore schémas de structure ou de
développement. Il apparaît qu'une planification
éclairée requiert la participation d'un grand nombre d'acteurs,
tant du côté des gouvernants et de l'administration que du
côté des gouvernés, acteurs économiques, sociaux,
environnementaux et, de façon plus large, ce qu'on dénomme
aujourd'hui la société civile. A condition d'être
soigneusement organisée, une telle participation est indispensable et
bénéfique. Elle évite les dérives d'une
planification autoritaire et, en définitive, inefficace37.
35 jon Nicolaisen, Andrew Dean et Peter Hoeller
Economie et environnement: problèmes et orientations possibles Revue
économique de l'OCDE, no 16, printemps 1991
p24
36 Matthieu Glachant Centre D'économie
Industrielle Ecole Nationale Supérieure Des Mines De Paris, Les
Instruments De La Politique Environnementale, Polycopié Du Cours De
Microéconomie De L'environnement Ii, Dea Economie De L'environnement Et
Des Ressources Naturelles Janvier 2004 P6
37 Xavier THUNIS Les leviers de la
politique environnementale et leurs perceptions, Annick
CASTIAUX, Sophie
PONDEVILLE et p 6
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c- Les instruments volontaires
Les instruments volontaires couvrent les initiatives prises
par les acteurs pour améliorer leurs performances environnementales sans
qu'une réglementation les y oblige. Ces instruments, moins contraignants
que les instruments réglementaires et économiques, sont souvent
adoptés en plus des réglementations existantes mais parfois aussi
en lieu et place de projets de réglementations futures.
Les approches volontaires peuvent avoir pour objet soit de
déterminer un ou plusieurs objectifs environnementaux, soit de les
mettre en oeuvre. Dans la première hypothèse, l'objectif
environnemental est fixé par les parties prenantes à l'approche
volontaire. Dans la seconde hypothèse, l'objectif environnemental est
défini par les pouvoirs publics (cadre réglementaire) et
l'approche volontaire consiste à choisir le moyen d'atteindre cet
objectif.
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