L'engagement unilateral( Télécharger le fichier original )par Ramsès VOUGAT Université de Ngaoundéré (Cameroun) - Master II 2010 |
1- Le très faible pouvoir explicatif de l'engagement unilatéral32.La thèse de l'engagement unilatéral n'est pas sortie toute armée du cerveau des juristes. Elle a été instituée pour servir d'explication à de nombreuses institutions crées, développés ou altérées par la pratique. On lui reproche toutefois, et c'est la plus grave des objections, d'avoir un pouvoir explicatif très faible à éclaircir les institutions existantes. « Les codes récents ont fondé sur l'engagement unilatéral la théorie de l'offre et de la promesse de récompense; notre jurisprudence est parvenue à de résultats tout aussi satisfaisants dans l'ignorance du système de Siegel. Des institutions telles que la stipulation pour autrui, les titresnégociables, les fondations ont pris naissance avant que l'engagement unilatéral ait été soupçonné, et leurs effets s'expliquent sans qu'il soit indispensable de recourir à la thèse nouvelle »61(*). En fait, ce qui est reproché à la théorie nouvelle est le fait qu'elle est submergée par des explications concurrentessolidement édifiées qui parfois, et c'est généralement le cas, préexistent à leur découverte et d'un autre coté elle ne peut tout expliquer. Cet argument ne manque pas de pertinence car, pour prendre quelques exemples, on a aussi pu voir dans l'offre de récompense une manifestation de la gestion d'affaire, même si cette dernière semble être considérée par certains auteurs comme un engagement unilatéral. Il en est de même de l'offre de contracter dans laquelle on a pu voir tantôt un fait non générateur d'obligationstantôt un fait juridique générateurs d'obligations, tantôt un acte juridique qui ne saurait avoir un effet obligatoire, rarement un engagement unilatéral, etc. 33.S'il est acquis que l'engagement unilatéral n'est pas le seul maître sur ses terres, il n'en demeure pas moinsvrai que ce n'est pas une spécificité propre à l'engagement unilatéral car d'autres techniques telles que le contrat, la responsabilité délictuelle et bien d'autres sont concurrencées sans pour autant que l'on remette en doute leur existence. L'on se rappelle encore de la vieille querelle sur la nature juridique des dommages-intérêtsque le juge octroie à la victime d'une inexécution contractuelle. Ce n'est pas pour autant que les responsabilités contractuelle et délictuelle manquent d'intérêt62(*). 34.Par ailleurs, l'existence de mécanismes concurrents d'explications n'a jamais été un obstacle à l'éclosion d'un d'entre eux qui se veut convainquant quant on sait que parfois certaines nuances apparaissent au fil des développements chez un même auteur : Mme IZORCHE nous en donne un exemple tiré de l'ouvrage de MM.MARTY et RAYNAUD. Selon ces éminents auteurs, les mécanismes de l'offre peuvent s'expliquer autrement que par l'engagement unilatéral, mais que les autres explications proposées soulèvent des objections63(*). Le recours à l'engagement unilatéral a donc l'avantage réel d'éviter l' « artifice de l'avant- contrat », le « forçage » de la responsabilité, bref de « rassembler sous une bannière unique des solutions auxquelles la thèse opposée fait subir une véritable diaspora » !64(*) Ce qui enlève toute pertinence à l'idée de son inutilité par là de son manque d'autonomie. * 61 H., L., J. MAZEAUD et F. CHABAS, op. cit., n° 362, p.333. * 62Sur la controverse entre responsabilités contractuelle et délictuelle V° Ph. REMY, « La `'responsabilité contractuelle'' : histoire d'un faux concept », RTD civ. 1997. 323;E.SAVAUX, « La fin de la responsabilité contractuelle ? », RTD civ. 1999.1; etc. * 63 V° G. MARTY et P. RAYNAUD, op cit., n° 356, p.369, n° 113, p.108 et s. * 64 Ph. JESTAZ,p.14, note 51. |
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