II - Le caractère public de l'information
54 - Le caractère public de l'information peut
être appréhendé soit dans une perspective
matérielle, soit dans une perspective organique. Dans la première
hypothèse, c'est le critère du service public que l'on va
retenir. Partant, on considérera que l'information publique est
l'information produite ou détenue dans l'exercice d'un service
public. Dans la seconde hypothèse, la perspective organique renvoie
quant à elle à l'origine publique de l'information. Ainsi
entendue, l'information publique est l'information produite/détenue
par l'administration.
55 - Par ailleurs, les auteurs ont tergiversé sur le
vocable à employer pour désigner l'action définissant la
relation entre l'administration et l'information. D'une part, le terme «
production » a le mérite de renvoyer à l'activité du
service public, mais restreint le champ de l'information publique en excluant
les informations « détenues » mais non produites par
l'administration. D'autre part, la « détention » suppose
l'existence d'un support incorporant l'information, ce qui ne rend pas compte
de manière satisfaisante de l'autonomie de l'information
vis-à-vis de son support. Néanmoins, on pourrait objecter que,
par métonymie, la « détention de l'information »
signifie la « détention du support sur lequel figure l'information
», étant entendu que le support -papier ou électronique-
n'est pas un élément pertinent dans la perspective de la
réutilisation.
56 - La directive ISP du 17 novembre 2003 a opté pour
l'approche organique, puisqu'elle « concerne la réutilisation
des informations du secteur public ». Dans son article premier
relatif à ses objet et champ d'application, la directive précise
cette approche organique en visant les « documents46
existants détenus par des organismes du secteur public des États
membres ». De manière tautologique, le considérant (11)
énonce qu'un « document détenu par un organisme du
secteur public est un document dont cet organisme est habilité à
autoriser la réutilisation ». Dans le cadre de la directive
ISP, l'article 2. 1) précise qu'il faut entendre par organismes du
secteur public « l'État, les collectivités
territoriales, les organismes de droit public et les associations
formées par une ou plusieurs de ces collectivités ou un ou
plusieurs de ces organismes de droit public ».
57 - L'ordonnance de transposition du 6 juin 2005 a repris
l'approche organique, l'article 10 énonçant que peuvent
être « utilisées47 les informations figurant
dans des documents produits ou
46 Rappelons que le terme « document »
est ici employé comme un terme générique et peut donc
être remplacé par « information » pour plus de
clarté.
47 Il semblerait que l'absence du préfixe
« ré » soit une maladresse du législateur. Le chapitre
II de la loi de 1978 dans lequel figure l'article 10 susvisé est en
effet intitulé « De la réutilisation des informations
publiques » et le terme « réutilisation » y est
employé à de multiples reprises pour définir l'action se
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reçus par les administrations mentionnées
à l'article 1er ». Or l'article premier de la loi du 17
juillet 1978 énumère les administrations concernées par la
liberté d'accès aux documents administratifs : «
l'État, les collectivités territoriales ainsi que (...) les
autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé
chargées de la gestion d'un service public ».
58 - L'on peut s'interroger sur la signification du vocable
« document » employé dans l'article 10 susvisé. Il
semble s'agir du support de l'information, ce qui le distingue du «
document » au sens de la directive qui, rappelons-le, vise « tout
contenu quel que soit son support ». Pour autant, s'agit-il d'un
« document administratif » au sens de l'article premier de la loi de
1978 ? Rien n'est moins sûr au vu de la liste - non exhaustive - que ce
dernier dresse : « les dossiers, rapports, études, comptes
rendus, procès-verbaux, statistiques, directives, instructions,
circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances,
avis, précisions et décisions ». Pour certains
auteurs48, cette confusion entre l'information et son support
provient de l'ancrage du régime de réutilisation des informations
publiques dans la loi de 1978, dont l'objet initial est l'accès aux
documents administratifs. En outre, l'on notera que l'expression «
produits ou reçus » pour désigner quels sont les documents
éligibles au régime de réutilisation pourrait
également être employée s'agissant des informations qu'ils
contiennent. En somme, la confusion entre les documents et les
informations est une véritable plaie pour la bonne
compréhension de la loi en ce qu'elle rend la délimitation de son
champ d'application très difficile.
59 - Malgré les incertitudes qui planent sur la
définition des informations publiques, le choix du législateur
d'opter pour une approche organique et une énumération des
informations exclues permet de délimiter le champ d'application du
régime de réutilisation des informations publiques. Il convient
d'étudier à présent les modalités de ce
régime de réutilisation.
rapportant à l'information. Celle-ci ayant
déjà été utilisée par l'autorité
administrative qui l'a produite, elle ne peut donner lieu qu'à une
nouvelle utilisation.
48 J.-M. Bruguière, Données publiques
: la confusion des genres de l'ordonnance du 6 juin 2005, La Semaine Juridique
Entreprise et Affaires n° 46, 17 novembre 2005, 1625
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