II. La législation Européenne : un moyen
efficace pour protéger les données et la vie privée des
utilisateurs sur les réseaux sociaux ?
A) Les autorités chargées de la
protection des données personnelles
1. Spécificité européenne par rapport
aux Etats-Unis
La majorité des grands réseaux sociaux
ont leur siège aux États-Unis. Dans le cas d'un utilisateur
Français par exemple, la collecte des données est alors
effectuée en France, mais ces données sont immédiatement
transférées aux États-Unis pour le traitement tel que
défini dans la loi 95/46/CE. Or, les Etats-Unis ne disposent pour
l'instant pas d'une législation protégeant les données
personnelles des utilisateurs. En effet, contrairement aux Européens,
les américains n'envisagent pas la vie privée comme un droit
aussi fondamental que la liberté d'expression. Ainsi, aux Etats-Unis,
les données numériques appartiennent à ceux qui les
traitent. Dès lors qu'elles ont été publiées,
l'intéressé n'a plus la main sur ses propres données.
Comment, en l'absence de droit international en la matière, l'Union
européenne peut-elle alors faire respecter le droit de ses citoyens,
lorsque leurs données sont traitées par des entreprises
Américaines ?
Le transfert de données personnelles vers des
pays tiers est déjà comme nous l'avons vu soumis à
"l'exigence de caractère adéquat". Avec son projet de
réforme, l'Europe déclare "Il importe que, lorsque ces
données sont transférées de l'Union vers des pays tiers ou
à des organisations internationales, le niveau de protection des
personnes physiques garanti dans l'Union par le présent règlement
ne soit pas amoindri."56. Si le traitement des données dans
le pays tiers venait à ne pas respecter la législation
Européenne, la Commission se réserve le droit "d'interdire
temporairement ou définitivement un traitement", et "de suspendre les
flux de données adressés à un destinataire situé
dans un pays tiers ou à une organisation
internationale"57.
Afin que les droits des utilisateurs soient pleinement
garantis, il importe donc qu'une certaine coopération internationale
soit mise en place. Début Février 2012, l'administration
Obama
56 projet de réglement du 25 janvier 2012,
p.78
57 ibidem, Section 2 "fonctions et pouvoirs", Article 53
"pouvoirs", §g, p.87
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dévoilait un "schéma directeur pour un
projet de loi sur les droits des données personnelles afin de
protéger les consommateurs en ligne"58, s'inspirant de la
législation européenne. Ce "bill of right des données
personnelles" permettrait aux internautes d'exercer un contrôle et un
droit de regard sur les données personnelles collectées par les
entreprises. Ils auraient également un droit à la transparence,
à la sécurisation, l'accès, la rectification, et la
suppression de ces données. Point important, qui est l'un des principaux
défis que rencontre la législation européenne, cette loi
introduirait une réciprocité dans le traitement des
données : le point "responsabilité" prévoie que les
internautes aient le droit de disposer des données personnelles les
concernant traitées par les entreprises, afin de s'assurer qu'elles
respectent la loi59. Dans le cas européen, des mesures sont
mises en place pour que les internautes puissent s'assurer que les entreprises
respectent leurs droits, mais il est difficile, du fait de l'éloignement
de ces entreprises, de s'assurer qu'elles respectent effectivement les
règles. Certes, Facebook s'engage, contraint par l'article 8 de la
Charte des Droits Fondamentaux60, à communiquer aux
utilisateurs leurs données, mais dans les faits, cette obligation n'est
pas respectée, comme le souligne la Commission dans l'Approche Globale :
"l'exemple des sites de socialisation est particulièrement
éclairant à cet égard, car pour y exercer un
contrôle effectif sur les données les concernant, les
intéressés se heurtent à des défis de taille. La
Commission a ainsi reçu plusieurs plaintes de personnes qui n'avaient pu
récupérer des données à caractère personnel
auprès de prestataires de services en ligne, telles que leurs photos, et
qui ont donc été empêchées d'exercer leur droit
d'accès, de rectification et de suppression".
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