WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Les Comités de Défense de la Révolution(CDR) dans la politique du Conseil National de la Révolution(CNR)de 1983 à  1987: une approche historique à  partir de la ville de Ouagadougou

( Télécharger le fichier original )
par Kakiswendépoulmdé Marcel Marie Anselme LALSAGA
Université de Ouagadougou - Maîtrise 2007
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

VII.4.2. La dissolution des CDR et l'avenement des CR

Le renversement du CNR et surtout l'assassinat de son président suscitèrent un véritable émoi dans le pays. Les jours qui suivirent le coup d'Etat furent profondément marqués par une léthargie au sein des CDR. Ceux-ci étaient bien conscients du climat de méfiance et de discorde qui régnait au niveau du CNR, mais ils ne s'attendaient pas à cette solution militaire dans laquelle avait péri leur président. On ne peut pas nier, malgré les erreurs commises sous son pouvoir, la réelle popularité dont Thomas SANKARA jouissait vis-à-vis des militants CDR. Doué d'un charisme exceptionnel qu'on lui reconnaissait volontiers, Thomas SANKARA avait pu établir lors de ses discours une communion et une sympathie réelles avec les CDR et d'une manière globale avec la population. Richard BENEGAS parle à ce sujet de magie performative du

544 Discours de l'An IV de la RDP in CARREFOUR AFRICA1N N°1000 du 21 août 1987, page 10.

180 discours qui lui permettait de mettre en délectation son auditoire.545 Pierre ENGLEBERT renchérit : « Lors des meetings, c'est une véritable communion qui s'établit entre lui et la foule qui lui répond en chceur a divers moments de son discours : 0' les caméléons équilibristes ? A bas ! Les renards terrorisés ? A bas ! Le fantochisme ? A bas ! L'd-platventrisme ? A-bas ! ».546

Ainsi, pour les admirateurs du président assassiné, c'est le désenchantement total. Ils sont surpris par ces événements qu'ils ressentent comme une trahison et qu'ils sont contraints bon gré mal gré de subir. Partout, on assiste à un véritable tâtonnement avec des regards pleins d'interrogations sur l'avenir réel de la révolution. Malgré les appels incessants de soutien de la part du nouveau pouvoir, la ville de Ouagadougou offrait un visage sinistré, loin de celle dont le sursaut populaire avait favorisé le déclenchement de la révolution. On ne « comprend pas qu'on ait pu tuer celui qui incarnait la "Révolution Démocratique et Populaire". S'il avait commis des fautes, pensent beaucoup, même parmi ses adversaires les plus résolus, il fallait l'arrêter et le juger. Au hasard des promenades dans les rues de la capitale, au détour d'une conversation, a quelques graffiti, a certains regards, a mille petits détails impalpables, on a pu se rendre compte comment la mort du PF (Président du Faso) avait été traumatisante ».547

Médusés, des militants s'embusquèrent pendant des mois. Convaincus que le Front Populaire s'écartait de leur action du temps du CNR, nombreux furent pris par des sentiments de délaissement et de trahison. On assista de ce fait à des départs à l'étranger de certains CDR. Dans les quartiers de Ouagadougou comme dans les milieux ruraux, ce fut le retour progressif au printemps des pouvoirs coutumiers. Ceux-ci applaudirent le 15 octobre et clamèrent la restauration de l'ordre des ancêtres. Les TPC disparaissaient ainsi avec la réinstallation des tribunaux coutumiers.

Les nouveaux tenants du pouvoir annoncèrent sans tarder l'ouverture prochaine de grands débats pour faire le bilan critique des quatre années de la révolution. Bongnessan Arsène YE succéda à Pierre OUEDRAOGO à la tête des CDR. Le Front Populaire forma son premier gouvernement le 31 octobre 1987 et publia, dès le 03 novembre, un canevas de discussion pour des assises nationales pour un bilan critique des quatre années de la révolution. Lors de son premier conseil de ministres le 11 novembre, le nouveau gouvernement procéda au relâchement de certaines mesures.

545 Richard BENEGAS, 1993, Insoumissions populaires et révolution au Burkina Faso, Bordeaux, CEAN, page 18.

546 Pierre ENGLEBERT, 1986, La révolution burkinabè, Paris, L'Harmattan, page 172.

547 René OTAYEK, « Quand le tambour change de rythme, il est indispensable que les danseurs changent de pas » in POLITIQUE AFRICAINE N°28 - décembre 1987 - La politique de santé, Paris, Karthala, page 117.

181

Entre autres, l'abandon de la pratique obligatoire du sport, l'abrogation de la mesure qui préconisait le port obligatoire du faso dan fani dans les lieux de travail...

Le 08 janvier 1988, ce fut l'ouverture des assises nationales pour le bilan des quatre années de la révolution à l'issue desquelles les structures populaires avaient connue une réorganisation. Le SGN-CDR changea de nom pour devenir la Coordination Nationale des Structures Populaires (CNSP). De même, les CDR furent dissous le 17 mars 1988 et firent place aux Comités Révolutionnaires (CR). Ces derniers furent dispensés de leurs fonctions militaires d'où le retrait des armes dont le CNR avait doté les CDR. La nouvelle organisation s'exprima par l'institution de sept types de Comités Révolutionnaires : les paysans, les jeunes, les femmes, les anciens, les ouvriers, les militaires et les employés (service). En plus de l'UNAB, l'UFB, et l'UNPB déjà existantes, on jeta en mai 1988 les bases de l'Union Nationale de la Jeunesse du Burkina (UNJB). Selon les dispositions de la CNSP qui les chapeautait toutes, elles avaient pour vocation de renforcer les bases des CR afin d'apporter un soutien effectif au processus dit de rectification.

Les 8 et 9 avril 1988 eurent lieu les premières élections des CR de base à Ouagadougou. Malgré les appels répétés à la population, la mobilisation était restée précaire. Par exemple, à l'école de Droit de l'Université de Ouagadougou, sur 650 militant CDR, seulement 47 avaient participé aux élections.548 Après les élections, la morosité déjà perceptible aux lendemains du 15 octobre 1987 ne dégrossit pas. Les permanences, jadis grouillant de monde, ressemblaient désormais à des habitations hantées abandonnées sous le regard des passants. Les différents chantiers créés au niveau des secteurs par les CDR sont dépourvus de travailleurs. C'est la démobilisation et il faut payer des gens pour qu'ils exécutent ce qui était fait gratuitement du temps des CDR... Les pratiques frauduleuses refirent surface et de manière de plus en plus visibles. Les prix des loyers plafonnés sous le CNR passaient de 4 000 F à 12 000F... Telle était globalement la situation qui se dessinait après le 15 octobre 1987 et après la dissolution des CDR en mars 1988.

L'année 1988 ne faisant pas partie de notre fourchette chronologique, nous nous sommes contenté de peindre brièvement cette conjoncture qui objectivement au lieu de raffermir la révolution, comme le prétendaient les rectificateurs, a constitué une sorte de restauration émoussant l'élan révolutionnaire d'une population orpheline de ses véritables catalyseurs d'hier. C'est le spectacle d'une révolution malade, somnolente, condamnée à une mort prochaine certaine. Ce que l'histoire n'a pas démenti.

A la fin de ce chapitre, nous pouvons affirmer que le CNR a été victime de ses propres contradictions. La logique de l'unilatéralisme politique développée pour monopoliser le pouvoir et s'auto légitimer a effectivement permis au CNR de s'immuniser contre les à-coups des forces politiques, qui jadis faisaient et défaisaient les régimes politiques. Mais, la disparité idéologique, la tentation à l'hégémonisme de ses composants et l'instrumentalisation des CDR ont fertilisé le terrain de la confrontation en son sein et l'ont inexorablement acculé à sa chute. Le fruit pourrit toujours de l'intérieur.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984