II-III-1-2-3 L'élevage
La plupart des personnes interrogées soutiennent que
l'élevage est une activité qui contribue beaucoup à la
dégradation de la végétation. En effet, pendant la saison
sèche, la raréfaction du fourrage pousse les éleveurs
à couper les branches terminales des arbres pour le donner en
alimentation au bétail. Avec la sécheresse, la bonne
régénération des branches coupées est souvent
compromise. De ce fait, la plupart des arbres sèchent sur pied et
finissent par mourir ou être abattus. Ceci est beaucoup plus
fréquent dans les zones de pâturage intensif (la partie ouest du
village de Lalane, dans le Gol...). C'est pourquoi, Desthieux (2000) affirme
que : « l'élevage a une responsabilité importante dans le
processus de déboisement »
II-II-2 L'évolution du paysage de la
communauté rurale
Les écrits portant sur la zone décrivent une
forte couverture végétale surtout avant l'arrivée des
Européens. A l'origine, la Communauté Rurale était
caractérisée par trois zones abritant des paysages
différents (Enda Graf, Sahel, 1992). Mais ces paysages ont
été fortement transformés. En effet, le Gol était
une vraie forêt impénétrable avec de grands arbres et des
lianes. Les animaux sauvages y vivaient en grand nombre. La vallée aussi
abritait une forêt dense avec des terres en permanence humides. Les
marigots étaient presque permanents et les zones basses n'étaient
pas aussi cultivées ni habitées qu'aujourd'hui. Le Dior servait
d'habitation, de zone de culture, mais aussi de pâturage. Il abritait une
savane fortement boisée dans les parties où l'on ne cultivait pas
(Enda Graf, Sahel, 1999)
De même, le témoignage de la plupart des
personnes interrogées concorde avec cette description.
Dans toutes les zones enquêtées, les populations
ont noté une dégradation très avancée des
espèces végétales. Près de 90% de la population
enquêtée soutient que jusque dans les années 1970, la zone
disposait d'une végétation riche et variée. Elles
témoignent en outre qu'avant cette période, la zone
présentait une végétation très dense avec beaucoup
d'espèces. Les arbres appelés "thiossanes" qui sont très
souvent de grande taille et ayant beaucoup de vertus, surtout curatives, y
étaient très présents.
L'exemple du village de Diayane est révélateur.
Ce village est composé de deux hameaux séparés par un
terrain vide qui fait environ 100 m. Les populations affirment qu'à
l'origine, pour aller d'un hameau à un autre, il fallait se frayer un
chemin à travers de grandes broussailles et des lianes.
Il en est de même pour le village de Tawa Fall
localisé au Sud de la Communauté Rurale. Il est
séparé de celui de Keur Daouda par le tronçon de bas-fond
qui part du sud de la CR et qui rejoint celui de Fandène dans le centre.
Les populations soutiennent qu'avant l'accentuation de la dégradation,
les deux villages ne pouvaient pas s'apercevoir. Mais maintenant ceci est
possible.
La zone présentait des potentialités naturelles
qui la prédisposaient à une végétation très
dense.
En effet, l'existence de mares quasi permanentes surtout dans
la zone centre et des vallées où l'écoulement était
continu, permettaient le développement d'une savane boisée avec
beaucoup d'espèces. Cette eau stagnante permettait de maintenir le
niveau des nappes favorisant ainsi un grand développement des arbres.
Certains ménages interrogés ont soutenu avoir même
pratiqué de la riziculture au niveau de la vallée. Or, cette
culture demande une grande disponibilité en eau. Ceci nous donne une
idée de l'humidité qui caractérisait la zone.
Ceci concorde avec les écrits de Desthieux (2000) qui
affirme que « Le paysage de la zone a beaucoup évolué au
cours du temps. Avant que les Français ne colonisent la région,
le territoire était recouvert d'une forêt très dense
particulièrement dans le Gol et la vallée était en
permanence humide ».
Par ailleurs, la zone centre de la Communauté Rurale
est un prolongement du plateau de Thiès. Selon Desthieux (2000), il y a
50 ans, « le plateau de Thiès et les collines étaient
couverts par une savane arborée assez dense et constituaient les
forêts classées de Pout et de Thiès ».
A l'heure actuelle, les ressources végétales
sont affectées par une dégradation avancée. La plupart des
personnes enquêtées appréhendent cette dégradation
à travers la disparition de la plus grande partie du couvert
végétal. C'est ainsi que la population a constaté des
arbres qui ont complètement disparu de la zone. Il s'agissait de grands
arbres dont l'importance n'est plus à démonter (fonctions
alimentaires, médicinales,...). Pour la plupart, ils n'ont pas pu
s'adapter aux conditions climatiques qui prévalent actuellement.
Ainsi, le témoignage des populations locales a permis
de noter que beaucoup d'espèces qui étaient alors très
présentes dans la zone ont vu leur nombre diminuer
considérablement. On peur en citer : le Diospyros mespiliformis
(Alome), le Spondias monbin (Sob), Ostrioderris stuhlmanii
(Bèr), l'Acacia albida (Kad), Ceiba pentandra
(benténier), le Parinari macrophyla (Nèw),
l'Alphania senegalensis (xéwar), le Gordila pinnata
(Dimbe), le Ficus glumosa (Gang). Il faut noter aussi que, hormis
l'Acacia albida, l'Adansonia digitata et le Tamarindus
indica dont la présence est plus importante, toutes les autres
espèces citées cidessus ne dépassent pas cinq individus
dans la communauté rurale.
De plus, il y a un autre groupe d'espèces qui sont
complètement rayées de la carte. Il s'agit : du Ximelia
américana (Ngologne), du Sterculia setigera (Mbèp),
du Gardenia ternifolia (Dibuton bu gôr), du
Anogeissus leiocarpus (Gédiane), du Gardenia
erubescens (Dibuton bu djigène), du Securidaca
longipedunculata (Fûf), de l'Acacia radiana (Seung), du
Terminalia avicennoides (Reub-Reub), de l'Annona senegalensis
(Dugor), du Heeria insignis (Woswosor), du Detarium microcarpum
(Dank) et du Prosopis africana (Ir).
Cette dégradation est beaucoup plus sensible dans le
Gol. Comme il a été signalé cidessus, cette zone
était partie intégrante de la forêt classée de
Thiès. Mais actuellement, à cause de nombreux facteurs, elle est
dénudée et ne représente plus qu'un « désert
classé » (Desthieux, 2000).
|