2-2-2 L'avancée du front urbain
La pression sur les terres est aussi liée à la
position de la commune de Thiès qui est presque auréolée
par la communauté rurale de Fandène. De ce fait, la croissance
urbaine se fait au détriment de cette dernière. De même,
les citadins de plus en plus viennent acheter de
grands espaces au niveau de la zone soit pour en faire des
habitations, soit pour développer des activités
économiques surtout dans la filière avicole. Ainsi, pour ne pas
perdre leurs terres, les populations préfèrent les vendre
à ces citadins ou procéder à leur lotissement. Ceci est
très fréquent dans les zones périurbaines surtout au sud
où on note dans beaucoup de champs la présence de bornes
indiquant qu'ils ont été déjà lotis. D'où la
diminution notable des terres disponibles pour les activités agricoles
accentuant la pression sur celles disponibles.
Ainsi, la croissance démographique et l'avancée
du front urbain constituent des facteurs essentiels de dégradation des
sols. En effet, elles provoquent une étroitesse des terres qui pousse
les populations à exercer une plus grande pression sur celles-ci. La
lecture des tableaux ci-dessous (n°7 et n°8) concernant la pratique
de la jachère dans la communauté rurale nous permet de mieux
comprendre ce fait.
Dans la zone centre, 75% des ménages
enquêtés pratiquent la jachère. Ainsi les terres qui
montrent des signes de fatigue sont généralement reposées.
Leur relatif éloignement par rapport à la ville de Thiès
peut en être l'explication. Mais, il faut aussi prendre en compte le fait
que ces populations soient les premiers habitants de la communauté
rurale. De ce fait, elles disposent naturellement de plus de terres que les
autres. Par contre, dans la zone sud, 3 des 4 villages enquêtés
sont périurbains et le taux de ménages pratiquant la
jachère est faible. Il s'agit de Touba Peycouck (13,3%), de Tawa Fall
(16,7%) et de Keur Mor Ndiaye (14,3%). Cette pression sur les terres est
liée à l'avancée du front urbain.
La zone nord-est présente une particularité. Sur
tous les ménages enquêtés, aucun ne pratique la
jachère (tableau n°14). Pour le village de Lalane, c'est dans une
moindre mesure sa proximité avec la commune. Mais pour les autres (Same
Ndiaye, Keur Mamarame, Keur Mory Mbaye), ils en sont relativement
éloignés. La cause est moins la proximité avec le centre
urbain qu'un rapprochement de ces villages les uns par rapport aux autres. De
ce fait, chacun dispose de peu de terres et n'a que de minces
possibilités d'extension. Ainsi, avec la l'explosion
démographique, la pression s'accentue sur les sols.
Tableau 6 pratique de la jachère dans la zone centre
Villages
|
Ménages enquêtés
|
Pratique de la jachère
|
Fréquences
|
Diayane
|
8
|
6
|
75%
|
Kousoune
|
8
|
7
|
87,5%
|
Ndiamndiorokhe
|
6
|
4
|
66,7%
|
Mbayène
|
6
|
3
|
50%
|
Totaux
|
28
|
20
|
71,4%
|
Source : Les enquêtes de Bâ Y. 2010
Tableau 7 Pratique de la jachère dans la zone Sud
Villages
|
Ménages enquêtés
|
Pratique de la jachère
|
Fréquences
|
Touba Peycouck
|
15
|
2
|
13,3%
|
Keur M. Ndiaye
|
7
|
1
|
14,3%
|
Keur D. Ngoye Diakhaté
|
10
|
9
|
90%
|
Tawa Fall
|
6
|
1
|
16,7%
|
Totaux
|
51
|
16
|
34,2%
|
Source : Les enquêtes de Bâ Y. 2010
Le système d'exploitation et la pression sur les sols sont
deux facteurs essentiels puisqu'ils ont comme corollaire :
> L'appauvrissement du sol en matière organique
Cette matière organique est un élément
indispensable au bon fonctionnement des terres et de leur fertilité
vis-à-vis des activités agricoles. Selon Ruellan (1994), «
La matière organique est également source d'une bonne
agrégation, fine, poreuse, stable et d'une bonne porosité
indispensable à la circulation des eaux et des gaz, à la
pénétration des racines et à l'activité biologique
; en outre, elle est source de réservoir de nombre
d'éléments nutritifs (azote, phosphore, potassium,
calcium...)».
Or, les méthodes de culture, surtout le sarclage qui
fait qu'après les récoltes, les champs restent trop longtemps
dénudés (durant toute la saison sèche) et la pression
exercée sur les sols due au manque de terres font que cette
matière organique n'a plus le temps de se renouveler correctement. Ainsi
elle diminue et peut conduire à un tassement superficiel.
> Le tassement superficiel :
Il est en étroite relation avec cette diminution du
taux de matière organique consécutif à la disparition de
la couverture végétale. Ainsi, « Après le
défrichement des terres que l'on met en culture : la suppression de la
végétation naturelle provoque des baisses d'activités
biologiques ; il s'en suit que les tubulures et les cavités
créées et recréées en permanence par les racines,
par les vers de terre, par les fourmis...et autres termites se font moins
souvent ; de même les taux de matière organique, qui facilitent la
formation des agrégats, des mottes, diminuent fortement : les structures
donc les porosités s'effondrent. (Ruellan, 1994)».
Or, le sol possède une porosité naturelle qui
est le résultat de ses constituants (argiles, limons, sables), de ses
agrégations et de ses activités biologiques. Cette
porosité est essentiellement responsable des fonctions nutritives des
sols. Avec le phénomène de tassement, la porosité se perd
ou diminue. Cependant, d'après Ruellan (1994), «La
porosité
exprime la richesse biologique et organique du sol ; elle
exprime l'accessibilité des éléments nutritifs
présents dans le sol. Le tassement rend inutilisable par les plantes une
bonne partie des éléments nutritifs du sol, y compris ceux
apportés par l'homme sous forme d'engrais minéraux
».
Cela exercera une grande influence sur la fertilité des
sols qui aura tendance à baisser, puisque même les amendements
apportés de manière artificielle ne pourront pas être
utilisés par les plantes. Ainsi, dans la communauté rurale de
Fandène, la plupart des personnes interrogées reconnaissent avoir
constaté une baisse des rendements due à la compaction des sols.
En effet, ce tassement est responsable de la mauvaise germination des graines.
Même ceux qui ont pu germer ont une croissance ralentie du fait de cette
compaction du sol.
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