2.2 Une évaluation plus adaptée
L'évaluation classique en mathématique consiste
la plupart du temps à évaluer un résultat et dans certains
cas quelques étapes du raisonnement qui conduisent à ce
résultat. Mais en aucun cas il est possible d'évaluer toutes les
phases de raisonnement des élèves, les différentes
réflexions, remarques, stratégies qui les ont conduits à
utiliser ce raisonnement et à trouver ce résultat. Le soucis que
pose cette évaluation pour des élèves, et encore plus pour
des élèves en difficulté, est que s'ils ne trouvent pas le
bon résultat, ou même un raisonnement permettant de trouver ce
résultat, l'évaluation ne pourra pas être positive. Cette
évaluation ne rend pas compte des efforts des élèves, du
temps qu'ils passent à essayer de résoudre un problème.
Ainsi, cette évaluation ne fait pas de différence entre un
élève qui aura passé du temps à raisonner pour
résoudre un problème, mais sans succès, et un
élève qui n'aura même pas fait l'effort de chercher. C'est
d'ailleurs la raison pour laquelle autant d'élèves se
découragent et ne cherchent même plus à faire d'efforts de
recherche, puisque la plupart du temps ces derniers ne sont pas
récompensés. En zone difficile et face à des
élèves en difficulté, ce constat est encore plus probant.
Beaucoup trop d'élèves sont découragés à
cause de cette évaluation, ils travaillent mais n'obtiennent pas de bons
résultats alors ils finissent par arrêter de travailler. Ceci
entraîne également que ces élèves qui ne font plus
l'effort de raisonner perdent petit à petit des capacités
mathématiques. En mathématiques, l'esprit a besoin d'être
stimulé régulièrement, sinon certains réflexes
disparaissent et le raisonnement devient de moins en moins aisé.
C'est pourquoi l'évaluation grâce à la
narration de recherche est, à mon sens, indispensable en zone difficile.
C'est en effet une évaluation qui permet d'apprécier le travail
de recherche des élèves, sans se focaliser uniquement sur le
résultat. Ainsi, même des élèves présentant
de grandes difficultés peuvent obtenir de bonnes notes. Un nouveau
contrat s'instaure dans la classe entre les élèves, ainsi
qu'entre les élèves et l'enseignant, avec un autre statut de
l'erreur (Groupe ZEP IREM, [11]). À la différence de ce dont les
élèves ont l'habitude, le principe de l'erreur ne réside
plus simplement dans une mauvaise réponse ou un faux résultat,
l'erreur devient le fait de ne pas chercher de solutions ou de ne pas
argumenter ses recherches. C'est une nouvelle vision de la pratique des
mathématiques ainsi que de son évaluation. Les narrations
cherchent ainsi à casser cette « performance scolaire » chez
les élèves et plus spécialement ceux de zone difficile, de
vouloir trouver à toute vitesse la solution d'un problème, sans
chercher à savoir si le raisonnement utilisé a du sens, pour la
présenter à l'enseignant qui pourra la valider (Groupe ZEP IREM,
[11]). La narration de recherche est un
outil qui permet également de réactiver, ou de
consolider, l'esprit mathématique des élèves et ceci ne
pourra être que bénéfique pour la suite de l'année
scolaire et de leurs études. Ils vont en effet s'habituer à
réaliser un raisonnement mathématique faisant appel à leur
sens critique et à leurs capacités de réflexion. Ils
pourront grâce à cela être plus performants lors de la
réalisation d'exercices ou d'évaluations plus classiques. Les
narrations de recherches présentent également un
intérêt non négligeable pour le professeur. En prenant en
compte l'élève dans sa singularité, cette pratique
amène l'enseignant à modifier le regard qu'il porte sur
l'évaluation, elle permet ainsi de créer une
différenciation pédagogique nécessaire en zone difficile
(Groupe ZEP IREM, [11]). En effet, ce qui sera évalué lors d'une
narration de recherche ne sera pas le résultat, mais la recherche de
l'élève. Cette recherche peut être très
différente suivant les élèves et oblige donc le professeur
à considérer chaque élève individuellement lors de
la correction des copies. La différentiation pédagogique
intervient dans le sens où les bons élèves travaillent
autant que les moins bon, et les moins bons ne sont pas pénalisés
pour autant. Cela permet également de mettre en avant des
difficultés particulières propres à chaque
élève. L'enseignant peut alors évaluer les
difficultés de chacun, plus précisément qu'avec une
évaluation classique. En effet, le raisonnement de chaque
élève étant détaillé, il est plus
aisé de cibler d'où proviennent exactement les
difficultés.
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