INTRODUCTION GENERALE
Contexte de l'étude
Les accords de partenariat économique (APE)
constituent le point d'aboutissement d'un long processus qui puise son origine
dans l'accord de Cotonou signé le 23 juin 2000 entre l'Union
Européenne (UE) et le groupe des Etats d'Afrique de Caraïbe et du
Pacifique (ACP).1(*)
Pour rappel, l'accord de Cotonou succède aux
conventions de Lomé qui avaient débuté en 1975. Ces
dernières avaient été conclues après les deux
autres conventions de Yaoundé signées respectivement en 1963 et
1969 dans le cadre de la coopération au développement.
A l'origine, ces accords de coopération avaient
été conclus dans l'objectif de réduire la pauvreté
dans les pays ACP et de favoriser en même temps leur développement
économique par la promotion du développement de leurs produits
primaires, de la diversification de leur production agricole d'exportation et
de l'augmentation de leurs flux commerciaux.
Pour atteindre ces objectifs, des régimes de
préférences commerciales non réciproques ont
été accordés aux pays ACP. Selon ces régimes, les
produits primaires des pays ACP vont avoir un libre accès sur les
marchés européens tandis que les importations en provenance de
l'UE vont subir des droits de douanes à leur entrée sur les
territoires des pays ACP.
Après 25 années de relation de
coopération (1975-2000), les résultats escomptés en terme
de développement des pays ACP inscrits dans les objectifs de ces accords
de coopération n'ont pas été atteints, et pire encore les
pays ACP restent de plus en plus marginalisés dans les échanges
commerciaux ; en effet, la part de leurs produits primaires dans les
importations de l'UE s'est considérablement dégradée
passant respectivement de 8% à 3% entre 1975 à
20012(*). De plus, le nombre des produits
agricoles d'exportation des pays ACP ne cesse aussi d'être réduit
malgré les préférences non réciproques qui leurs
ont été accordées. Par ailleurs ces
préférences, selon l'accord de Cotonou, ne sont pas compatibles
avec les règles de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC).
L'OMC est en effet le seul organisme international qui
s'occupe des règles régissant le commerce entre les pays. Les
principes de base de l'OMC qui inspirent le commerce au niveau mondial
sont :
· La libéralisation du commerce : cela a
pour but de supprimer progressivement et par voie de négociation les
obstacles au commerce ;
· La non discrimination dans les échanges : Selon
ce principe, aucun pays ne devrait établir de discrimination entre les
partenaires commerciaux qui
devraient tous de manière générale
obtenir le « statut de la nation la plus favorisée
(NPF) », ni entre ses propres produits, services et ressortissants,
d'une part, les produits, services et ressortissants étrangers, d'autre
part (qui doivent bénéficier du « traitement
national »).
· Prévisibilités : les
sociétés, investisseurs et gouvernements étrangers
devraient avoir l'assurance que les obstacles au commerce (y compris les droits
de douane, les obstacles non tarifaires et d'autres mesures) ne seraient pas
appliqués de façon arbitraire ;
· La promotion de la concurrence : il s'agit de
décourager les pratiques « déloyales »
comme l'octroi des subventions à l'exportation et les ventes des
produits à des prix de « Dumping »
c'est-à-dire des prix inférieurs au coût de production en
vue d'avoir les parts du marché.
Dans ce contexte, les clauses de l'OMC disposent en ce qui
concerne les relations de partenariat que désormais deux Etats
signataires d'un accord de partenariat doivent nécessairement
libéraliser leurs échanges. C'est donc précisément
dans cet esprit que le volet commercial de l'accord de Cotonou cherche à
remplacer le système des préférences non réciproque
accordé aux pays ACP par un système des préférences
réciproques compatibles aux règles de l'OMC ayant pour objectif
la libéralisation des échanges entre les pays ACP et l'UE.
Justification et intérêt du
thème
Notre sujet d'étude ainsi libellé n'est pas
dépourvu d'intérêt qui trouve fondamentalement sa
justification et sa raison d'être dans les principes fondamentaux des
nouveaux accords de partenariats entre les pays ACP et l'Union
Européenne. En effet, la principale préoccupation qui justifie le
choix de notre thème d'étude porte essentiellement sur deux
aspects fondamentaux des accords de partenariat économique (APE).
· Le premier aspect porte plus particulièrement
sur la thèse de la libéralisation des échanges commerciaux
entre l'UE et les pays ACP caractérisée par l'insertion de la
réciprocité dans les relations commerciales entre les pays ACP et
l'Union Européenne.
· Le second aspect concerne plus
précisément le démantèlement des droits de douane
des pays ACP qui a été inscrit dans les APE et
caractérisé par l'établissement des zones de libre
échange (ZLE) entre ACP et l'UE.
Ces deux aspects que nous venons ici d'évoquer
peuvent engendrer d'une part une concurrence directe entre l'UE et les pays ACP
et d'autre part, ils peuvent aussi occasionner des énormes pertes
fiscales dans ces pays ; ceci, notamment du fait que la plupart des
recettes fiscales des pays ACP est constituée des recettes
douanières et les importations des produits de l'UE représentent
selon la Banque Mondiale plus de 40% des importations totales de l'Afrique
Subsaharienne3(*).
L'intérêt principal du choix du secteur
agricole comme champ de notre étude résulte notamment du fait que
presque dans tous les pays ACP en général, l'agriculture demeure
encore l'activité économique la plus importante à
promouvoir pour assurer le développement économique. En effet,
les exportations de la plupart des produits des pays ACP restent encore
concentrées sur les produits agricoles. Ainsi, dans des pareilles
situations, la libéralisation des échanges va certainement
susciter une concurrence entre les produits agricoles des agriculteurs
européens à ceux des agriculteurs des pays ACP.
Problématique
A première vue, la libéralisation
inscrite dans les nouveaux accords de partenariat ACP-UE (les APE) provoquera
certainement une rude concurrence entre les agriculteurs européens qui
sont mieux équipés et bien subventionnés contre les
agriculteurs des pays ACP mal outillés et sans subventions. Cette
concurrence, ramenée dans le contexte centrafricain, constitue donc une
préoccupation majeure en ce qui concerne ses impacts sur l'agriculture
qui est le principal moteur de l'économie centrafricaine : elle
représente en effet 55% du PIB et occupe 85% de la population
active4(*). Cette
préoccupation nous amène ainsi a posé cette question
fondamentale à savoir :
Quels peuvent être les impacts des Accords de
Partenariat Economique sur le système agricole centrafricain ?
De cette question fondamentale, nous cherchons aussi
à savoir si l'agriculture centrafricaine peut réellement
affronter le nouvel environnement concurrentiel qui sera suscité par les
APE; ou encore, quels risques ou opportunités les APE
représentent-ils pour l'agriculture centrafricaine.
Répondre à toutes ces interrogations
nous conduit donc à fixer l'objectif général de notre
étude qui va donc nous guider tout au long cette analyse en vue
d'atteindre la cible de notre travail c'est-à-dire ce à quoi
doivent aboutir les résultats de notre recherche. Cet objectif
général sera ensuite suivi de trois autres objectifs
spécifiques qui vont donc nous permettre de mieux cerner et orienter
notre analyse.
Objectif général
L'objectif principal de ce présent travail est
d'analyser plus précisément les impacts des Accords de
Partenariat Economique sur le système agricole centrafricain. Pour
faire cette analyse, nous avons structuré notre travail en trois autres
objectifs spécifiques qui nous amènent à :
· Faire un diagnostic général du
système agricole centrafricain ; puis à
· Evaluer les impacts des APE sur ce système
agricole ; et enfin à
· Proposer des mesures d'adaptation à ce
système pour le rendre compétitif.
A ces objectifs spécifiques, nous avons aussi
formulé des hypothèses de travail qui doivent nous permettre de
bien orienter le sens de nos recherches et de nos analyses.
Hypothèse du travail
Comme nous l'avions déjà
mentionné ci haut, la libéralisation des échanges a pour
corollaire la concurrence directe entre les produits agricoles de l'UE et ceux
des pays ACP. Il convient donc de noter dans le contexte centrafricain
que :
- L'agriculture centrafricaine, compte tenu de ses
spécificités, ne serait pas compétitive à toute
concurrence extérieure des produits agricoles lorsqu'elle aura
libéralisé ses échanges avec l'Union
Européenne ;
- L'insertion des APE dans les échanges centrafricains
pourrait aussi générer des impacts à la fois positifs et
négatifs sur son système agricole.
Méthodologie de travail
Pour réaliser ce travail scientifique, nous
avons utilisé plusieurs approches dont les principales sont :
· Recherches documentaires dans les bibliothèques
de la place : Université de Bangui ; Médiathèque
de l'alliance française ; centre de documentation de La CEMAC et de
la BEAC, Centre Catholique Universitaire.
· Recherche dans les ministères tels que :
Ministère du plan de l'économie et de la coopération
internationale ; ministère du commerce et de la promotion du
secteur privé ; Ministère de l'Agriculture et du
Développement Rural.
· Entretiens avec le responsable de la francophonie
au niveau du Ministère des affaires étrangères, entretien
avec le représentant de l'Union Européenne en RCA, entretiens
avec plusieurs enseignants de l'Université de Bangui.
Canevas du travail
Pour atteindre l'objectif que nous avons fixé au
terme de notre étude, nous avons donc structuré notre travail en
trois chapitres :
- Le premier nous présente l'approche théorique
des Accords de Partenariat Economique : il analyse les aspects historiques
qui fondent les APE et nous donne ainsi un aperçu général
sur ces nouveaux accords ;
- Le deuxième chapitre fait le diagnostic du
système agricole centrafricain en analysant respectivement le
degré de la compétitivité du système de production,
du système de culture ainsi que des produits agricoles d'exportation.
- Le dernier chapitre évalue les impacts des APE sur
le système agricole centrafricain et propose à ce système
plusieurs mesures d'adaptation en vue d'être compétitif dans un
système concurrentiel.
* 1 Pour la suite de notre
analyse, nous utiliserons ACP et UE pour désigner respectivement Afrique
Caraïbe Pacifique et Union Européenne.
* 2 Marchés tropicaux
et méditerranés mai 2007. Page 3.
* 3 Cours d'économie
sous régionale du Dr D. Malo : fiche de lecture licence et
maîtrise 2007.
* 4 Monkan et al.
Ministère du plan avril 2005. Projet # 083 pages 56.
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