Dans le modèle de croissance à la Solow ,
l'Etat ne peut jouer aucun rôle particulier dans le processus de
croissance, puis que ce dernier relève de facteurs exogènes. Les
tenants de la croissance endogène vont montrer au contraire qu'une
intervention de l'Etat peut stimuler la croissance en incitant les agents
à investir d'avantage dans le progrès technique. L'Etat peut
être ainsi conduit à inciter les innovateurs à
accroître leurs efforts, en renforçant la législation sur
les brevets ou en encourageant la coopération entre firmes. Il s'agit
ici de favoriser non moins d'Etat mais mieux d'Etat. Pour inciter en outre
à investir en capital humain, l'Etat peut favoriser l'accès
à l'éducation, notamment par la mise en place d'un système
de bourses. On assiste à une réhabilitation des dépenses
publiques, non pas dans une perspective de régulation conjoncturelle,
mais dans une perspective structurelle de croissance à long terme. En
rendant le coût de l'information moins élevé, ces
interventions de l'Etat favorisent par là même la mise en place
des conditions de la concurrence pure et parfaite.
Ainsi, pour Barro (1990), parmi les facteurs qui augmentent le
rendement privé, on trouve les infrastructures publiques, mais
également les dépenses de santé, d'éducation et de
recherche. Ce qui différencie les modèles étudiés
ici des modèles traditionnels est le fait que ces facteurs soient
(considérés comme) des biens publics. Il ne serait pas rentable
pour les acteurs privés de produire en quantité optimale ou de
les accumuler individuellement. Cependant leur rendement social justifie leur
production publique (production faisant suite à l'intervention de
l'Etat). Leur logique d'accumulation est différente de celle qui
naîtrait de la décision d'agents privés.
Beaucoup d'études ont été
réalisées dans le but de montrer la portée de chacun des
modèles de la croissance endogène. Ces dernières ont
abouti à des résultats assez concluants mais quelques fois
controversés. Ces études estiment pour la plupart qu'en dehors de
la prise en compte des externalités, l'Etat exerce une influence directe
sur l'efficacité du secteur privé : les investissements publics
concourent à l'augmentation et à l'amélioration de la
productivité privée. On comprend alors tout le sens de
l'interrogation des défenseurs de cette thèse :
sans routes, quelle serait la productivité d'une entreprise de transport
?
Dans cette optique, SCHULTZ et DENISON2 avaient
montré dans les années 1960 que l'accroissement de
l'éducation contribuait à la croissance économique
Américaine de 15 à 20% environ. Mais l'élévation du
niveau de qualification a un impact plus immédiat dans les pays sous
développés que dans les pays développés compte tenu
de la situation de départ.
De meme, d'autres travaux sur séries temporelles, en
particulier ceux d'ASCHAUER (1989) sur données américaines de
1950 à 1985 , sont parvenus à confirmer l'existence d'une
corrélation positive entre dépenses publiques et croissance.
L'interprétation proposée par cet auteur consiste à
confirmer l'existence d'une externalité des dépenses publiques
induisant des rendements d'échelle croissants dans la fonction de
production des agents privés. Pour lui, une hausse de 1% du capital
public américain induirait une hausse supplémentaire de 0,4% de
la productivité privée.
De manière générale, les
évidences empiriques de la nature de la relation entre les
dépenses publiques et la croissance économique sont
controversées. BARRO (1990) a trouvé par exemple que les
dépenses publiques de consommation en pourcentage du PIB
(calculées en déduisant les dépenses de défense et
d'éducation) étaient corrélées négativement
à la croissance. Au contraire, DEVARAJAN, SWAROOP et ZOU (1996), ont mis
en évidence une relation positive entre les dépenses de
consommation publique (mesurée par les dépenses courantes en
pourcentage des dépenses totales) et la croissance économique.
CASELLI, ESQUIVEL et LEFORT (1996) ont aussi relevé l'existence d'un
effet positif des dépenses publiques en pourcentage du PIB (nettes des
dépenses militaires et d'éducation) sur la croissance. EASTERLY,
LOAYZA et MONTIEL (1997)3 n'ont trouvé aucun effet
significatif de la part des dépenses publiques de consommation dans le
PIB sur la croissance en Amérique Latine. Pour le cas du Bénin,
alors que GBAGUIDI T.(2001) et DAHOUI P.(2000) trouvent que le niveau des
dépenses publiques n'influence pas la production, HOUNSOUNON D. et ADIDO
K. (2005) relèvent un impact significatif et positif des services
publics sur la croissance économique. Pour leur part, OJO et OSHIKOYA
(1995) ont montré, dans le cas des pays subsahariens, qu'une hausse des
dépenses publiques réduit la croissance du PIB par tete. Dans le
cas des pays de l'UEMOA, Ténou (1999)4 aboutit
2Cité par YVES ABESSOLO, ((
déterminants de la croissance économique en Afrique Subsaharienne
: une analyse empirique ». Document N°09, 2001
3cité par DE LA CROIX, D. et DELAVALLADE, C.
(2006). << Growth, Public Investment and Corruption with Failing
Institutions ». CORE Discussion Paper.
4cité par KAKO KOSSIVI N.(2003) ((
Dépenses publiques et Croissance des économies de l'UEMOA
»
également au même résultat.
Deux remarques importantes peuvent être faites à
partir de l'analyse des résultats de l'ensemble de ces études
empiriques. La première a trait à la diversité et à
l'hétérogénéité des résultats obtenus
et la seconde tient au fait que très peu de ces études
considèrent la manière plus ou moins efficace que les
dépenses publiques sont employées.
Selon, Kako Kossivi Nubukpo(2003), le manque de robustesse
des évidences empiriques relatives à la relation entre
dépenses publiques et croissance, peut être lié en partie
à la nature non-linéaire de la relation entre ces variables .
Mais il peut être aussi et surtout dû à la non prise en
compte de l'efficacité des services publics dans les analyses.