III.3.4.2 Définitions et normes
Utilisant le logiciel Praat dans cette recherche, nous ne
mentionnons ici que les définitions et seuils de normalité
correspondant à ce logiciel. Dans Praat, il y a cinq mesures
différentes du jitter, chacune pouvant apporter un degré de
précision différent:
-jitter (local): il correspond au jitter ratio de la
littérature. C'est la moyenne de toutes les différences entre les
durées de deux périodes consécutives, divisée par
la durée moyenne d'une période du signal. En d'autres termes
c'est la « moyenne de la différence entre deux cycles vibratoires
du larynx consécutifs rapportée à la période
moyenne du signal »88. Le résultat est donc un rapport,
exprimé ici en pourcentage. Selon le manuel de Praat, le seuil
normal/pathologique de ce critère est fixé à 1,04%.
-jitter (local, absolute) ou jitta: il correspond au jitter
absolu dans la littérature. C'est la moyenne des différences (en
valeur absolue) entre les durées de deux périodes
consécutives du signal. Le seuil normal/pathologique est de 83,2.
-jitter (rap): il correspond au RAP ou au FPQ dans la
littérature. Comme le jitter ratio, le RAP mesure les perturbations
à court terme de la fréquence fondamentale. Ici, on compare la
durée de chaque période Ti non pas à celle de la
période suivante (Ti+1), mais à la moyenne de 3 périodes
successives Ti-1, Ti et Ti+1, ce qui a théoriquement pour effet
d'atténuer les variations volontaires de la fréquence vocale,
comme le trémolo par exemple. Dans les faits, le jitter ratio et le RAP
sont des mesures à peu près équivalentes. Le RAP est
également exprimé en pourcentage. Le seuil normal/pathologique
est fixé à 0,68%.
-jitter (ppq5): c'est la moyenne de la différence (en
valeur absolue) entre la durée d'une période et la durée
moyenne des 4 périodes les plus proches, divisée par la
durée moyenne d'une période du signal. Exprimé en
pourcentage, le seuil
88 Giovanni, p 119, Op. cit. p36.
normal/pathologique du ppq5 est de 0,840%.
-jitter (ddp): Il est égal à trois fois le RAP.
III.3.4.3 Quelques remarques
Il est intéressant de noter que les perturbations de F0
sont majorées à l'attaque et en final du son. Lieberman et Horii
préconisent donc d'analyser le jitter à partir de la partie
médiane de la voyelle89.
D'autre part, il semblerait qu'il y ait une influence de F0
sur le jitter. Quand F0 augmente, le jitter tendrait à diminuer.
L'intensité jouerait également un rôle sur les valeurs du
jitter90 (mais cette étude n'a pas été
publiée). La voyelle choisie pour les calculs des différents
jitter influe également sur les résultats. Cependant, les
études réalisées sur cette question sont toutes en langue
anglaise et nombre d'entre elles se contredisent. Baken et Orlifoff
préconisent donc d'utiliser toujours la même voyelle au sein d'une
même recherche91. Enfin, ils évoquent la
possibilité que le jitter soit plus élevé chez les femmes
que chez les hommes, ce qui nous semble contradictoire avec le fait que le
jitter diminue quand la fréquence fondamentale augmente.
Le rôle de la co-articulation concernant la valeur du
jitter existe uniquement lorsque ce dernier est calculé à partir
d'un échantillon de parole spontanée92. Cependant,
certaines études tendent à montrer que seul le jitter
calculé sur toute la durée d'une voyelle tenue est
significativement différent du jitter estimé à partir d'un
échantillon de parole. Le jitter, estimé à partir d'un
court extrait de voyelle, semblerait quant à lui comparable au jitter en
parole spontanée93.
Dans cette perspective, Karnell estime qu'environ 190 cycles
vibratoires sont nécessaires pour qu'une étude objective de la
voix soit valide94. D'autre part, Baken et Orlikoff suggèrent
qu'une analyse sur 110 cycles serait suffisante en clinique.
89 Lieberman (1961) et Horii (1979) in Baken R. J., Orlikoff R.
F., p206, Op. cit. p47.
90 Jacob (1968) in ibid., p206.
91 Baken R. J., Orlikoff R. F., p206, Op. cit. p47.
92 Nittrouer et al. 1990 in ibid., p192.
93 Leddy and Bless 1989 in ibid., p193.
94 Karnell (1991) in ibid., p194.
|