1.2 États des lieux du patrimoine culturel des deux
sites
Il faut tout de suite noter que les deux sites présentent
un patrimoine immense et notre travail se propose de les réhabiliter et
les valoriser.
1.2.1 Le patrimoine culturel du port de Loango
Le patrimoine matériel
L'ancien port d'embarquement des esclaves de Loango est l'un
des plus importants sites du golfe de Guinée par lequel des millions
d'esclaves ont été embarqués dans des bateaux et
transportés directement pour les Amériques sans escales
intermédiaires. Ce site qui a englouti des millions d'âmes perdues
dans les horizons dévoreurs de l'Océan Atlantique, possède
toujours tous les témoins de ce commerce inhumain qui a conduit à
l'un des plus grands génocides de l'humanité ; on peut citer
entre autres : le grand marché, les trois manguiers, l'arbre pour le
rituel de l'oubli et celui pour le retour ainsi que le
débarcadère en témoignent. En outre, ce site de par sa
charge historique, est également le lieu où se pratiquent encore
plusieurs rites d'intronisation et de funérailles de rois du royaume de
Loango. Ainsi, l'ancien port d'embarquement devenu un véritable
sanctuaire de par sa charge historique est un maillon clé pour la
compréhension de l'histoire de l'esclavage. Il possède encore des
vestiges qui traduisent le passage de ces millions d'esclaves parmi lesquels
:
- La stèle qui symbolise le lieu de départ des
caravanes est en même temps le grand marché de toutes les
transactions. De nos jours cette stèle est devenue un sanctuaire devant
lequel les populations locales viennent prier et se recueillir pour se
remémorer des disparus, emportés par le commerce triangulaire.
- Le cimetière de Loango où, jadis, furent
enterrés les rois et leurs dignitaires, est un monument
national, de nombreuses personnalités aussi bien
congolaises qu'expatriées y reposent pour leur dernier sommeil.
Aujourd'hui, les tombes de Félix Tchikaya, premier député
noir à l'Assemblée Nationale Française, et de son fils
Tchikaya U'tamsi l'un des plus grands écrivains congolais s'y
trouvent.
- Les trois manguiers qui servaient de comptoirs avant le rituel
autour de l'arbre de l'oubli. Les
esclaves enchaînés faisaient sept (7) tours de
l'arbre de l'oubli pour les femmes ou les jeunes filles, neuf (9) tours pour
les hommes. Et l'arbre de retour qui symbolisait un éventuel retour de
l'esprit du défunt au pays une fois mort.
- Le débarcadère qui était une
vasière reste représenté par une portion de terre. En
effet, la baie
de Loango, peu profonde, ne permettait pas aux bateaux
d'accoster. Ils attendaient à 30 Km de la rive. La liaison entre les
bateaux et la rive était assurée par des pirogues.
Le patrimoine immatériel
L'importance culturelle de ce site est également
perceptible à travers les complaintes toujours fredonnées par les
habitants restés sur le lieu du sinistre, rappelant la nostalgie des
parents qui restent à attendre les êtres chers arrachés
à leur affection et qu'ils ne reverront plus jamais. Il en est de
même pour certaines pratiques et cérémonies d'initiation
telles que :
- Le Kikumbi ou rite prénuptial observé chez les
Vili de Pointe-Noire en souvenir de cette
mythique misogynie royale. Chez les Kongo/lari, le rituel est
en voie de disparition, vaincu sans doute par la chimie de la modernité.
Les Vili seuls continuent à le décréter aux environs de
Pointe-Noire.
- Le Lélikage qui est une danse de séduction
réservée aux jeunes garçons et filles. Pendant les
vacances, les jeunes se retrouvaient au village ou dans les quartiers assez
reculés de la ville pour danser le Lélikage en pleine nature,
uniquement éclairés par la lune ; les chants et les percussions
entraînaient tout le monde dans ne transe frénétique ne
s'arrêtant qu'au petit matin
- La pratique du Nkondi représentée par des
statuettes chargées de significations magico religieuses ; elles sont le
pont entre le monde des vivants et celui des ancêtres.
Intermédiaires obligés entre les humains et les divinités
surnaturelles, entre la communauté et l'esprit des ancêtres. Ces
statuettes prennent le nom de "Nkondi", et doivent leur pouvoir à la
charge contenue dans le reliquaire à miroir par le Nganga
(féticheur).
- Le Tchinkhani, danse en l'honneur des jumeaux,
effectuée devant les autels sacrés de chaque tribu. Cette danse
sert de lien entre la nature et les jumeaux, qui sont considérés
comme un don ; elle doit empêcher l'esprit des jumeaux de quitter le
monde des humains. L'union de la femme et de l'homme est racontée sans
tabous à travers le chant et la danse6.
Le site de l'ancien port d'embarquement des esclaves à
Loango fait l'objet d'une protection par l'Etat et le ministère de la
culture y a installé un gestionnaire du site.
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