Ce domaine est menacé par les feux de brousse qui
parfois tournent au tragique lorsqu'ils atteignent l'habitat. En effet, les
paysans pratiquent encore la culture sur brûlis qui détruit
sérieusement le site dans son authenticité. D'autre part, il faut
souligner le déboisement des forêts sacrées par les
populations locales ; mais il faut tout de suite préciser que ces
pratiques tendent à disparaître avec l'entrée en vigueur du
code forestier interdisant l'abattage des arbres et la culture sur brOlis. En
effet, pour ce qui est des feux de brousse et les incendies de forêts,
l'article 138 du code forestier dispose que : « quiconque aura, par
imprudence, négligence, inattention ou inobservation des
règlements pris en application de la présente loi, causé
un incendie dans le domaine forestier permanent, sera puni d'une amende de
20.000 à 200.000 FCFA, d'un emprisonnement d'un an maximum ou
d'une de ces deux peines seulement »33.
L'article 140 du même code stipule que « quiconque aura
déboisé ou entrepris de déboiser, par quelque moyen que ce
soit, une parcelle de forêt en violation des dispositions de l'article 31
ci dessus ou des règlements pris en application de la présente
loi, sera puni d'une amende de 100.000 à 500.000 FCFA et/ou d'un
emprisonnement d'un à six mois34 ».
L'essentiel des activités va donc consister à
sensibiliser la population locale sur les méfaits de la pratique de
culture sur brûlis et du déboisement qui, non seulement
détruisent l'environnement, mais aussi appauvrissent le sol. Il
conviendra d'organiser des séances d'informations de façon
régulière afin de développer la conscience
environnementale de la population locale sur la gestion des feux et de
renforcer l'application de la loi n°16-2000 du 20 novembre 2000 portant
code forestier. Toutefois, il faut souligner que les résultats de
l'entrée en vigueur de cette loi se font déjà
ressentir.
Aussi, il nous a été donné de constater
que l'habitat traditionnel qui caractérisait la culture
Téké a disparu. Des recherches visant à comprendre le mode
d'occupation et d'organisation de l'habitat traditionnel vont être
initiées dans le but de le réintroduire. Les restaurations seront
donc réalisées avec des techniques traditionnelles de
construction sur la case royale et les autres édifices encore existants,
présentant un intérêt architectural ; notre intervention va
porter sur :
- La restitution des façades de l'époque et leur
maintien dans l'état où elles se trouvent afin de
rétablir l'unité du bátiment orignal ;
ce qui va nécessiter la consolidation des sous bassements et des
charpentes existantes.
- La consolidation des structures qui va consister en un
renforcement des éléments défaillants sans rien
détruire, dans le respect de l'intégrité du système
structural original. Il conviendra pour cette opération d'utiliser des
matériaux et des techniques traditionnelles.
- La prise et la mise en application des mesures de
conservation sur l'ensemble du site tant au niveau local qu'au niveau national
(arrêtés municipaux et préfectoraux).
- La reconstruction des parties manquantes sur les
édifices sélectionnés en respectant au mieux possible les
matériaux d'origine.
Cependant, il faut noter que les études techniques
préliminaires seront menées par un cabinet d'experts
spécialisé en architecture traditionnelle pour garder
l'authenticité du bâti et ne pas dénaturer les vieilles
constructions. Il faudra donc s'appuyer sur une documentation historique pour
procéder aux restaurations. Dans ce sens, avec la collaboration du
Gouvernement, des populations locales et du pouvoir royal, il conviendra
d'étudier la mise en place de pratiques culturales alternatives qui
permettront de mieux protéger les forêts et l'habitat traditionnel
du domaine royal. De plus, la mise en application effective de la loi 16-2000
du 20 Novembre 2000 portant Code forestier en République du Congo va
permettre de réduire fortement l'abattage des arbres dans le domaine
royal.
En tout état de cause, qu'il s'agisse du domaine royal
de M'bé ou de l'ancien port d'embarquement des esclaves de Loango, il
convient de mettre en place une véritable politique de conservation
préventive car les biens restaurés doivent être entretenus
de manière professionnelle par la suite afin qu'ils puissent
résister à la dégradation naturelle et humaine.
33 Article 138 de la loi n°16-2000 du 20 novembre 2000
portant code forestier en République du Congo
34 Article 140 de la loi n°16-2000 du 20 novembre 2000
portant code forestier en République du Congo
Pour ce qui est du patrimoine immatériel sur les deux
sites, Il nous appartiendra donc d'en assurer la collecte, la conservation, la
diffusion et la valorisation afin de le transmettre aux
générations futures. Ce travail se fera par la mise sous support
(cassettes, écrits, CD, films...), la constitution des archives et les
enquêtes ethnologiques pour recueillir cette tradition orale et
populaire, la pérenniser et la perpétuer. Pour cela, nous allons
procéder par :
- L'utilisation des supports d'informations modernes : disques
compacts, bandes magnétiques ;
- Des techniques de restauration des supports d'informations
modernes détériorés ou endommagés.
Ce travail va être mené en collaboration avec
des structures dynamiques de sauvegarde et de promotion du patrimoine
immatériel qui est une composante essentielle de la culture et donc de
l'identité locale. Dans ce sens, nous allons nous inspirer de
l'expérience des structures comme le Centre des Arts et du Récit
de Grenoble (CARG), le Centre de Littérature Orale de Vendôme
(CLIO) en France ; la Maison des Contes de Namur (MCN) en Belgique, l'Institut
du Patrimoine Culturel et le Musée de la mémoire vivante au
Québec. Il s'agira donc de nouer des partenariats avec ces
structures.
Les Téké disposent d'une grande connaissance de
la nature et de l'univers. C'est le cas de la médecine traditionnelle
(traitement des diverses maladies, la chirurgie traditionnelle, l'immunisation
du corps, etc.), la fabrication du sel, la fabrication des médicaments
traditionnels à partir des ressources forestières, etc. Il
convient donc d'assurer une transmission du savoir et du savoir-faire
Téké notamment l'artisanat traditionnel et la
tradithérapie dans le domaine royal de M'bé. Dans ce sens, il
convient de former les jeunes à la fabrication du raphia et de la
peinture ainsi qu'à la production des fixateurs pour la teinture
à base des ressources naturelles.