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Droit de la migration et droit du travail

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par Guite DIOP
UCAD - Master2 2009
  

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B. Le rôle des institutions Africaines dans la défense des normes universelles

L'Afrique avait, dès le début des années 50, un code du travail pour l'ensemble des ex-colonies de l'Afrique Occidentale Française50(*). La vague des indépendances en 1960 a fait évoluer ce code commun vers des législations sociales autonomes au gré des politiques suivies par les Etats indépendants. L'un des premiers organismes multilatéraux fut l'Organisation Commune Africaine Mauricienne et Malgache (OCAM), aujourd'hui disparue, qui préconisait une liberté de circulation et de résidence des ressortissants de chaque Etat membre. L'esprit a été repris par tous les traités signés par d'autres institutions régionales notamment dans le cadre de l'UA51(*) et sous régionales telles que la Communauté économique africaine (CEA), la Communauté économique de l'Afrique de l'Ouest (CEAO), la Communauté économique des Etats de l'Afrique centrale (CEEAC) ou l'Union Economique et douanière des Etats de l'Afrique Centrale (UEDEAC et la de l'Union Economique et monétaire ouest-africaine (UEMOA)...qui garantissent à travers des accords une liberté de circulation52(*) et de travail ainsi que le libre exercice d'activités syndicales. La conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement de cette dernière, tenue le 10 janvier 1994 réaffirmait l'appel dans son article 91 consacré à la liberté de circulation des personnes, des services et des capitaux en faveur de l'abolition de toute forme de discrimination fondée sur la nationalité en matière d'emploi, sauf ceux qui relèvent de la Fonction publique. Deux éléments innovants sont à noter :--l'affirmation de la continuité du droit à résider dans un Etat membre même après cessation de l'activité professionnelle;--la pérennisation pour les travailleurs migrants et à leurs ayants droit « des prestations susceptibles de leur être assurés au titre des périodes d'emploi successives sur le territoire de tous les Etats membres ».

La coercition de certaines politiques publiques en matière de réglementation de la migration de travail53(*), mais aussi à l'attitude des syndicats nationaux qui ne prennent pas en compte les doléances migratoires ne donne pas de possibilité d'être syndiqués ou de défendre même leurs doléances au sein d'organisations syndicales. Le manque d'interface entre travailleurs migrants, employeurs et pouvoirs publics rend particulièrement vulnérable la population en question. Cette carence syndicale a conduit l'Organisation régionale africaine de la Confédération internationale des syndicats libres (ORAf-CISL) à convoquer une conférence autour de l'élaboration d'un plan d'action syndical « pour promouvoir et défendre les droits des travailleurs migrants » et de discuter de la « situation et des conditions »54(*) de ces derniers. Celles-ci sont liées, d'après les conclusions et recommandations, à la désorganisation des marchés du travail, due à la mondialisation qui rend vulnérables les travailleurs migrants tout en affaiblissant en même temps les actions institutionnelles. C'est pourquoi une meilleure réglementation de la migration de travail peut contribuer, selon ces institutions, à mieux contrôler les flux. Ce qui est loin d'être le cas en Afrique, eu égard à la prééminence du secteur informel. Par contre, dans le domaine formel, les contrats dûment signés avec des employeurs ne sont pas toujours respectés et peuvent faire l'objet de plusieurs manipulations au détriment des travailleurs migrants, généralement peu syndiqués. Dans nombre de cas, leurs passeports sont confisqués par leurs employeurs afin de contrôler leur mobilité. Dépourvus d'un système institutionnel de sécurité sociale, ils ont à leur charge leurs soins médicaux et se livrent à l'automédication par le biais des pharmacies de rue avec les conséquences désastreuses que l'on sait sur leur santé. En outre, ils sont perçus dans le pays d'accueil comme des concurrents ou des « profiteurs de travail », ils sont accusés de baisser la tarification du travail en acceptant des bas salaires que n'auraient pas admis les autochtones.

Par ailleurs, les décisions à l'encontre de ces populations ne s'appuient pas sur des avis contradictoires de syndicats ou d'organisations de droits humains. Cela constitue un obstacle majeur à leur intégration citoyenne et les met aux prises à toutes sortes d'abus. Ce qui est en cause, c'est à la fois la volonté politique des Etats, les résistances du droit national par rapport aux traités et conventions régionaux voire internationaux, mais aussi et surtout le peu de coopération des sociétés civiles africaines en faveur de l'émancipation économique et juridique des travailleurs migrants. En effet, les séparations familiales et les incidences pathologiques sur les coutumes sexuelles livrent les travailleurs migrants ainsi que leurs familles à la proie de maladies telles que le VIH/SIDA. Il devient impérieux d'intégrer les travailleurs migrants dans la communauté du droit national en ouvrant le débat sur le phénomène migratoire comme le sont les autres questions publiques. Or l'intensification du trafic de main d'oeuvre55(*) a atteint des proportions telles que plusieurs organisations internationales et régionales dont la CEDEAO, l'UEMOA, l'UNICEF, le BIT ont décidé de mettre l'accent sur la nécessité de renforcer à la fois les politiques publiques, les structures et les lois nationales56(*), ceci afin d'exhorter les Etats à ratifier la convention 182 de l'OIT relative aux pires formes de travail des enfants, ainsi que la « Convention contre le crime transnational organisé et ses protocoles contre la traite et le trafic » et introduire ces dispositions dans les législations nationales. Cela passe aussi, comme l'a recommandé le Séminaire International en question, par l'amélioration de « l'assistance aux victimes de la traite et du trafic par la mise en place de centres d'accueil, en facilitant le retour et la réintégration, et en fournissant l'assistance matérielle, légale, médicale ou autres, nécessaires »57(*). Ce qui pose le plus problème pour les Etats pourvoyeurs de main-d'oeuvre, c'est le retour de ces victimes. Un Etat comme le Mali dispose près de deux millions de ressortissants en Côte d'Ivoire. Leur rapatriement, même partiel, lui poserait, dans le contexte actuel, d'immenses conséquences sociales, économiques, politiques voire juridiques même si, ces derniers sont déterminants dans la protection des travailleurs migrants.

SECTION II : les instruments juridiques de protection des droits des migrants

Il existe plusieurs normes internationales liant les Etats dans le domaine de la protection des droits des migrants et des travailleurs migrants en particulier. D'abord nous examinerons ici l'état de la réglementation onusienne (p I), puis le régime juridique de protection du droit de l'OIT (p II),

PARAGRAPHE I : l'état de la réglementation onusienne

Il s'agira ici de voir le texte de référence à savoir : la convention des nations unies de 1990 (A), puis Les autres textes onusiens de protection (B)

* 50DEGNI-SEGUI (RENE), Les droits de l'homme en Afrique noire francophone Théories et réalités, Abidjan, Imprimob, 1997 p

* 51 CHOLEWINSKI, (V. R). Migrant workers in international human rights law, Oxford, 1997. Le texte de la Charte peut se trouver sur le site web de l'Union Africaine : http:// www.africaunion.org/home/bienvenue.htm, p. 324-325

* 52 LAURENT, (M. BOSSARD) 1ère Réunion d'experts autour d'un projet d'approche commune des pays membres de la CEDEAO sur les migrations « PROJET D'APPROCHE COMMUNE DES PAYS MEMBRES DE LA CEDEAO SUR LES MIGRATIONS » 11-12 avril 2007 Dakar (Sénégal)

* 53Ces politiques non seulement violentes sont accompagnées d'expropriation ou de destruction de biens, d'expulsions massives ou individuelles à caractère expéditif. Ces mesures peuvent aller jusqu'à la destruction des quartiers résidentiels des travailleurs migrants c'est le cas d'Akodesewa à Lomé, peuplé naguère par des ressortissants nigérians. Des expulsions massives eurent lieu également, en 1996, dans 'autres pays comme le Bénin visant particulièrement les Ghanéens, Togolais et Nigérians (700 étrangers). La même année, l'Angola expulsait 1300 travailleurs Maliens et Sénégalais

* 54 Cf. Conclusions et Recommandations de la Conférence régionale de l'ORAF-CISL sur les travailleurs migrants en Afrique Nairobi, 15-17 mars 2004.

* 55 Le business sur les migrants les plus vulnérables 10 à 20 dollars pour Enfant (mines commerce ambulant, Mendicité...) et 12 à 50 pour les Femmes (prostitution...) au TOGO, soit 200 à 300 Enfants sont impliques en Afrique de l'ouest.. Selon Josselin ALODJI du Forum pour la Défense des droits des Enfants du TOGO. Source : Démocratie Africaine sur www.convergencefm.fr

* 56 Lors du Séminaire International sur la politique des migrations en Afrique de l'Ouest, tenu à Dakar le 18 et 21 décembre 2004

* 57 Organisation Internationale pour les Migrations IOIM). The International Migration Policy Programme (IMP). Séminaire International sur la politique des migrations en Afrique de l'Ouest. Rapport et Conclusions. Dakar, Sénégal du 18 au 21 décembre 2001.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard