Paragraphe 4. Leadership partagé et modèle de
gestion managérial
La théorie du leadership partagé nait en milieu
scolaire dans un contexte de remise en cause de l'orthodoxie conventionnelle
du dirigeant unique et individualiste basée sur un système de
gestion professionnel et bureaucratique. Les autorités éducatives
du Royaume Uni par exemple, ont pris la décision d'impliquer davantage
le personnel enseignant dans le dispositif de gestion pour les inciter à
donner l'effort maximum à l'amélioration de la performance
(Hatcher, 2005). L'auteur définit leadership partagé comme
« le fait d'endosser des responsabilités de management:
diriger une équipe, coordonner un groupe d'enseignants ».
En ce sens, le gouvernement britannique a développé un programme
destiné à former des leaders dans des enseignements
spécialisés. Ces enseignements concernent le développement
"d'aptitudes génériques, par exemple, comment motiver les gens et
organiser le travail du personnel. Ils touchent aux aptitudes
spécifiques du rôle du leader. Ce type de leadership peut
être identifié par la façon d'exploiter les données
sur la performance, d'entraîner, de former des équipes et de
développer des normes cohérentes de comportement. En d'autres
termes, ce leadership recouvre toutes les tâches d'encadrement, au sein
d'une politique stratégique.
Le leadership partagé représente un moyen de
parvenir à une intégration à la fois cognitive et
culturelle des enseignants. Intégration cognitive dans le sens où
la méthode de travail dans les écoles est devenue bien plus
complexe et interdépendante. Au niveau culturel, il est plus facile
d'obtenir la soumission des enseignants par leur implication et d'autres formes
de participation dans le dispositif de gestion. Cette théorie renforce
le divorce d'avec le paradigme fordiste et tayloriste d'un management de
contrôle et de commandement au sein des organisations (Warhurst et
Thompson, 1998).
Le développement de la théorie du leadership
partagé en milieu scolaire mise sur le rendement de l'enseignant pour
améliorer la performance. Ainsi, le système managérial
orthodoxe et le leadership partagé semblent poser deux principes
antinomiques. Selon Hopkins (2001), le leadership partagé exige une
participation active à tous les niveaux de la hiérarchie
administrative. Pour Hopkins et Jackson (2003), de même qu'on ne peut
pas imposer le leadership, la combinaison des relations managériales et
des relations de leadership se révèle problématique. Ils
plaident en faveur d'une séparation du management et du leadership en
deux structures parallèles. Il s'agit de donner l'opportunité aux
enseignants d'exercer leur leadership, en créant un réseau
parallèle non hiérarchisé d'apprentissage collectif,
séparé de la structure hiérarchique du pouvoir. Gronn
(2000) a plutôt opté pour une détention de
l'autorité et du leadership par le chef de l'établissement qui
peut influencer les enseignants et les rallier à ses idées. C'est
ce mode de gestion qui pourrait permettre d'améliorer la performance
scolaire. Hatcher (2005) pour sa part a identifié deux
caractéristiques principales découlant du leadership
partagé.
Premièrement lorsqu'il existe un « leadership
partagé » qui est établi de façon officielle,
c'est le principal qui doit valider et autoriser les actions posées par
ses collaborateurs. Autrement dit, les décisions demeurent
révocables par le directeur de l'école. Gronn (2000) propose un
mode opérationnel où le pouvoir et le leadership peuvent agir
indépendamment. Au niveau de l'école, le directeur occupe la
position dominante dans la structure hiérarchique qui lui confère
une situation d'influence privilégiée. Le leadership de type
« Bottom up » est difficilement transposable de la
sphère stratégique à la dimension opérationnelle
lorsque le directeur de l'école demeure l'autorité qui sanctionne
les actes.
Deuxièmement, le partage du leadership, tel qu'il
existe effectivement, établit une différence entre les
décisions stratégiques et les décisions
opérationnelles. Le partage du leadership a tendance à être
limité à la prise de décisions opérationnelles de
niveau inférieur. La prise de décision stratégique
concernant la politique de l'école n'est pas partagée. Il peut y
avoir consultation, mais elle demeure la prérogative du directeur,
même si le débat a été mené en faveur d'un
leadership partagé à tous les niveaux. Warhust et Thompson (1998)
avancent que cette double structure des organisations, dans laquelle existent
des formes horizontales de coordination du travail et subordonnées aux
hiérarchies verticales dominantes, ne constitue pas la meilleure forme
organisationnelle pour améliorer la performance scolaire.
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