Paragraphe 2. Bureaucratie professionnelle versus
coopération professionnelle
La bureaucratie professionnelle voit chacun se confiner dans
son espace et ses missions plutôt que de traiter des problèmes
réels auxquels est confortée l'organisation. Une telle
façon de procéder ne favorise pas l'amélioration de la
performance. Maroy (1992) a essayé de comprendre les procédures,
la hiérarchie, les rôles définis du chef
d'établissement pour rationaliser l'activité d'enseignement.
Selon l'auteur, l'école fonctionne comme une structure organisationnelle
à base professionnelle, qui est plus proche d'un mode d'organisation
à faible interdépendance. Ce type d'organisation se justifie par
le fait que les enseignants ont la responsabilité d'une classe. Et en
conséquence, le travail qu'ils accomplissent avec les
élèves relève de leur propre responsabilité. Il se
crée donc des relations difficiles entre les enseignants et le chef
d'établissement. Si le directeur tâche de contrôler le
travail de l'enseignant par des règlements intérieurs, il va se
heurter à deux problèmes. D'une part, à cause de
l'asymétrie informationnelle, il lui sera très difficile de
vérifier le respect des règlements et vérifier le contenu
du travail de l'enseignant et d'autre part, l'enseignant pourrait
interpréter le contrôle de son enseignement comme une atteinte
à son professionnalisme. Minzberg (1982) explique que cette forme
d'organisation qui se base sur la standardisation des qualifications comporte
une structure se rapportant à un mécanisme faible. L'auteur a
identifié des problèmes de coordination inhérents à
l'organisationnelle professionnelle et qui peuvent réduire la
performance. 1) il s'agit d'une bureaucratie professionnelle qui se
révèle inefficace face à des professionnels peu
motivés et qui accusent des déficits de compétence; 2)
L'innovation exige une coopération entre les acteurs suivant une logique
inductive, alors que la bureaucratie professionnelle repose sur
l'individualisme de ses membres utilisant la logique déductive. La
bureaucratie professionnelle accuse de très faible capacité
d'innovation. Les innovations y génèrent des conflits. Elles sont
souvent mal accueillies et difficiles à gérer par ce type
d'organisation.
Selon Gather et Thurler (2000), l'établissement
performant adopte un mode d'organisation du travail basé sur un
modèle «adhocratique ». Il s'agit de l'utilisation des
initiatives des uns et des autres pour identifier et résoudre les
problèmes; produire et développer des savoirs, de créer
des structures et des pratiques, et cela, même en l'absence de
contraintes hiérarchiques. Par contre, la coopération
professionnelle a été identifiée comme un
élément incitatif à la participation des parties prenantes
dans les activités de développement de l'école.
Dans un établissement où les acteurs
partagent leurs conceptions dans la définition des objectifs et
l'utilisation des moyens, ils développent des pratiques de groupe et
élaborent ensemble les stratégies, ce qui renforce la
capacité de l'établissement d'innover.
Dans le cadre d'une coopération professionnelle,
l'établissement scolaire développe une culture de changement, une
pratique réflexive qui a imprégné le chef
d'établissement et la majorité des enseignants. En ce sens, le
directeur n'a pas besoin d'attendre des injonctions venant des échelons
hiérarchiques supérieurs pour s'adapter. Cela constitue un atout
pour améliorer la performance de l'établissement. La
coopération professionnelle offre une meilleure possibilité de
transformer les enseignants et les autres parties prenantes en de
véritables acteurs du développement organisationnel. La synergie
des actions peut être hypothétique dans la mesure où
l'établissement ne parvient pas à adopter une démarche
fondée sur des objectifs clairs, des méthodes de prise de
décision, des dispositifs de concertation et un calendrier de travail
bien défini (Gather et Thurler, 2000).
Par contre, les modifications des relations sociales et du
pouvoir au sein de l'établissement ne s'opèrent pas simplement
grâce à l'intervention charismatique ou autoritaire d'un chef
d'établissement. Il s'agit de préférence d'un processus
collectif de remise en question et d'élaboration de nouveaux
mécanismes de fonctionnement, y compris la délégation ou
le partage du pouvoir entre les parties prenantes pour insuffler le changement
du comportement organisationnel. Le processus de changement dépend de la
capacité des acteurs de partager des idées et des enjeux,
à priori dissociés, dans une démarche commune permettant
d'établir un lien intelligible entre les activités de routine et
des projets novateurs. Pour y parvenir, le directeur et les enseignants doivent
analyser les problèmes rencontrés et trouver ensemble les
solutions possibles pour les dépasser (Gather et Thurler, 2000). Afin de
permettre une vue d'ensemble des théories du management et leurs
implications, nous proposons le tableau 2 qui fait la synthèse des
différentes théories.
Tableau 2. Résumé des théories
management expliquant la performance scolaire
Théories
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Facteurs déterminants
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Pers. impliquées
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Choix public
Compétition entre les écoles, elles deviennent
plus performantes. Les parents choisissent leur établissement scolaire
pour envoyer leurs enfants.
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- Problème principal-agent
- Carte scolaire, localisation des écoles
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Parents, Etat, Directeur, maîtres
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Autonomie des établissements
transfert d'autorités du pouvoir central aux agents de
terrain qui coordonnent les activités scolaires, ce qui entraine une
meilleure performance.
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-Problème principal-agent
-Allocation des ressources
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Etat, Directeur
-Maitres
-Parents
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Leadership
Le leadership démocratique de Lewin (1938) et
participatif de Likert (1961) axés sur la participation des acteurs dans
le système de gestion garantissant le niveau de performance le plus
élevé.
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- Mécanismes de prise de
décision adoptés par le
directeur
- Implication des parties
prenantes
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Directeur, Maîtres
parents, élèves
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Organisation apprenante
Système de gestion axé sur l'innovation,
privilégiant l'approche inductive, apprentissage collectif.
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-Capacités d'innovation
-Implication des parties
prenantes
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- Directeur, maîtres,
parents, communauté.
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leadership partagé
Changement de paradigme avec le mode de gestion tayloriste et
fordiste axé sur le commandement. C'est le partage du pouvoir entre le
chef d'établissement et les enseignants qui peut porter ces derniers
à lui obéir.
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- Implication des maîtres,
-Volonté du pouvoir central
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Directeur, maîtres,
gouvernement.
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Source : Construit par l'auteur
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