L'impact du partenariat Chine-Afrique sur la réalisation des droits économiques et sociaux au Tchad( Télécharger le fichier original )par Aime MBAINDIGUIM GUEMDJE Université Catholique d'Afrique Centrale, institut catholique de Yaounde - Master 2 2008 |
Paragraphe II : Les fonctions latentes du partenariat sino-tchadien :les ambitions inavouées de la ChineLes fonctions latentes du partenariat sino-tchadien, en tant que pesanteurs majeures, sont ce que l'on peut nommer ici les ambitions inavouées de la Chine. Il s'agit, d'une part, de savoir si l'offensive africaine de la Chine ne nourrit pas les ambitions de contrôler et d'exploiter les matières premières du Tchad (A), et de l'autre, d'organiser un nouveau pillage des ressources énergétiques de ce pays (B). A- Le contrôle et l'exploitation des matières premièresLe nouveau partenariat stratégique entre la Chine et le Tchad entend se fonder sur le principe d'une coopération mutuellement avantageuse pour les deux parties, mais compte tenu de l'appétit grandissant de l'Empire du Milieu pour les matières premières (coton fibre, bois, etc.) et le besoin constant d'aide économique sans conditionnalités politiques des dirigeants politiques de l'Afrique, « la Chine inquiète ». Lors de son voyage en Afrique, notamment au Gabon, à l'issue du Sommet de Forum sur la coopération sino-africaine de Beijing de novembre 2006, le Président Hu JINTAO, promit à ses partenaires africains « une coopération économique qui se préoccupe davantage des infrastructures, de l'agriculture et du développement des ressources humaines ». Ce discours du président chinois aux accents philanthropiques, voire tiers-mondiste, est perçu par la plupart des observateurs avertis comme un voeu pieux, car en réalité, la Chine, nous dit Marc AICARDI, « se comporte désormais comme n'importe quelle autre puissance soucieuse de ses intérêts bien compris. Elle cible sa coopération sur des pays à fort potentiel, qu'il s'agisse de matières, de pouvoir d'achat et d'influence diplomatique »73(*). En effet, nous font remarquer L. WOETS et B. L. LIPAWING, « on retrouve dans ce partenariat sino-africain un modèle traditionnel qui voit l'Afrique exporter de l'énergie et des matières premières (minerais, pierres précieuses, bois, coton fibre, produits de la pêche, etc.) et, d'importer des produits de consommation, des machines-outils et des produits textiles. (...) Si l'on sait les résultats pays par pays, on voit pourtant que si un pays n'exporte pas de pétrole vers la Chine, les échanges sont alors très déséquilibrés (...) La Chine apparaît donc en Afrique comme essentiellement prédatrice selon le modèle hier mis en oeuvre par les puissances coloniales »74(*). Cette stratégie chinoise consistant à n'avoir ainsi que pour partenaires des pays africains producteurs de matières comme le Tchad doit suffire à provoquer des inquiétudes sur le devenir du pays dans la mesure où, comme le dit Julien NESSI, « Pékin vient d'abord chercher l'énergie et les matières premières nécessaires pour satisfaire son dynamisme économique »75(*). Le message que délivre la République populaire de Chine au continent africain en général et à l'Etat tchadien en particulier est aussi porté par sa capacité à emprunter à l'ennemi capitaliste ses méthodes et une partie de son discours le plus efficace. « Son nationalisme prolétarien a été remplacé par une triple stratégie, qui tourne autour d'une recherche de matières premières, d'élargissement de ses marchés, mais aussi d'endiguement des prétentions diplomatiques de Taiwan. Le tout s'inscrit dans le souci de Pékin de promouvoir une vision multipolaire du monde »76(*). En quête de matières premières pour alimenter sa croissance fulgurante et de nouveaux débouchés pour ses produits, Pékin déploie les grands moyens pour renforcer son implantation sur le continent africain, et ainsi, y exercer un certain contrôle. Ainsi, si le Tchad constitue une nouvelle cible de Pékin dans le cadre l'accord global de partenariat Chine-Afrique pour une quête effrénée de matières premières, notamment du coton, il n'en demeure pas moins que l'exploitation de l'or noir dans ce pays serait la raison inavouée de cette offensive chinoise. Car, les besoins de la Chine en matière de ressources énergétiques, tel de l'or noir, sont aussi immenses. * 73 M. AICARDI de Saint-Paul, « La Chine et l'Afrique, entre engagement et intérêt », in Géopolitique africaine, N° 14, Paris, Printemps, 2004, p. 14. * 74 L. WOETS et L. LIPAWING, « La stratégie africaine de la Chine », Marianne, La vérité sur le modèle chinois et sur le modèle anglais, Paris, du 23 au 29 juillet 2005, p. 44. * 75 J. NESSI, « L'Afrique, nouveau terrain de chasse de la Chine », op. cit. * 76 Cf. « Faut-il avoir peur de la Chine ? », in Jeune Afrique N° 2392, du 12 au 18 novembre 2006, p. 52. |
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