IV.Des "entrepreneurs du spectacles amateurs"
En prenant l'exemple du rock ou du rap, on peut
considérer que la structuration des musiques populaires s'effectue dans
la sphère privée. S'agissant de la techno, de nombreux acteurs
ont choisi d'excercer leur activité professionelle dans les
métiers de cette esthétique, aussi il convient de
s'intéresser au traitement spécifique des organisateurs de
soirées techno accordé par une règlementation
spéciale au regard de la règlementation générale
sur le spectacle vivant.
IV. 1 La professionnalisation du spectacle vivant
Les professions regroupées sous le nom d' "entrepreneur
de spectacles" sont des activités règlementées,
c'est-à-dire que les autorisations d'exercer ces professions sont
soumises à la loi et le règlement, en l'occurence l'Ordonnance du
13 octobre 1945 modifiée par la Loi du 18 mars 1999. Pour exercer leur
activité, ces professionnels doivent être titulaires d'une des
trois licences correspondant à une typologie distinguant la production,
l'organisation de tournée et la diffusion de spectacles vivants. Cette
récente modification a également précisé le statut
de l' "organisateur
94 Elias N. et Dunning E., op. cit. p.86
occasionnel". Conformément à l'article 10 de
l'ordonnance modifiée qui définit ce régime
dérogatoire, "peuvent exercer occasionnellement l'activité
d'entrepreneur de spectacles, sans être titulaires d'une licence dans la
limite de six représentations par année civile, toute personne
physique ou morale qui n'a pas pour activité principale ou pour objet
l'exploitation de lieux de spectacles, la production ou la diffusion de
spectacles". Ainsi, une personne physique ou une association dont l'objet
principal serait d'organiser des spectacles, de même que l'organisateur,
dont ce n'est pas objet principal, mais qui produirait, organiserait la
tournée ou diffuserait plus de six spectacles vivants par an,
dépasserait le cadre de cette définition. Il devrait donc
être titulaire d'au moins une licence d'entrepreneur. De ce fait, peut-on
considérer que l'organisation de spectacles puisse être un loisir
si, comme je viens de le préciser, il s'agit de professions
règlementées ? Peut-on créer une structure juridique pour
son loisir dont l'objet principal est d'organiser des spectacles vivants ?
Peut-on exercer ces activités en amateur ? Si la profession était
différente, on ne se poserait même pas la question : imaginons un
boulanger amateur vendant du pain et faisant donc concurrence à la
boulangerie. L'esprit de la réforme relative à la
réglementation des professions d'entrepreneur de spectacles était
de mettre en accord les principes de respect du droit de cette activité
commerciale avec l'évolution des pratiques de terrain notamment la
multiplication des structures associatives type "loi 1901". "Depuis cette
modification, le secteur associatif a maintenant les mêmes droits que les
sociétés commerciales, mais également les mêmes
obligations"95 (Audubert P., 2007).
"Les rassemblements festifs à caractère
musicaux" sont réglementés par une législation
particulière comme je l'ai décrit plus haut. Dans ce cadre, il
est encore permis d'exercer une activité de loisir ayant trait au
spectacle vivant. L'espace de développement des activités amateur
se réduit à mesure que celui des activités
professionnelles croît. De ce point de vue, s'associer avec d'autres
acteurs dans une organisation de soirées techno apparait comme un moyen
de pratiquer cette activité en amateur. Les objets définis dans
les statuts des associations organisatrices de soirées techno sont
souvent large même si concrètement ces dernières ne font
qu'organiser des soirées. Nous sommes dès lors face à un
conflit d'intérêts entre le respect des activités amateur
d'une part et la liberté d'entreprendre d'autre part. En effet, le
public choisit sa sortie entre deux flyers, l'un présentant une
soirée techno organisée légalement dans un mas et l'autre,
une soirée organisée par la SMAC de la ville, dont les
organisateurs sont des entrepreneurs de spectacles. La seconde soirée
subiera une forme de concurrence déloyale occasionnée par la
concordance des calendriers et par le fait que l'activité d'organisation
de "rassemblements festifs à caractère musicaux" n'est pas une
activité commerciale. Pourtant le public se rendra bien dans l'une ou
l'autre avec l'intention de faire la fête
95 Audubert P., Profession Entrepreneur de
Spectacles, éd. Irma, Paris, 2007, p. 26.
en écoutant de la musique.
|