II. Vivre de sa passion
Chercher à se professionnaliser dans la techno peut se
produire lorsque les individus ne trouvent pas ou plus de plaisir à
travailler. De plus, un investissement coûteux dans ce loisir peut
générer des problèmes dans les autres temps de la vie. Par
conséquent se professionnaliser dans sa passion apparaît comme la
solution aux deux problèmes. La musique est à envisager comme
deux objets ayant des finalités différentes. Elle peut d'une part
devenir un objet d'esthétisme et d'autre part rester un objet de
sociabilité.
Tout d'abord, les organisateurs de soirées peuvent se
professionnaliser dans l'esthétique de la musique. Anne Petiau cite
à ce sujet la venue de cette musique dans "les institutions existantes"
: concerts, festivals, circuits de distributions91. On peut donc
à nouveau distinguer la professionnalisation dans la création
artistique de la musique et la professionnalisation entourant cette
création. Le statut d'intermittent du spectacle est une voie de
professionnalisation. Les professionnels obtiennent alors le statut d'artistes
de la musique électronique. De plus, d'autres emplois sont
créés dans la médiation de la musique du label de
production à la vente directe. La fête continue de jouer un
rôle dans cette professionnalisation liée à la musique
esthétique. Le cas de Julien l'illustre fort bien : "Ça,
c'est des restes de quand j'étais en association, avant quand on
organisait des soirées tous les week-end. De temps en temps j'en
organise, ça fait un peu de pub pour mes labels et tout, ça fait
parler". La soirée techno devient donc l'accessoire de la
profession
91 Petiau A., op. cit.
bien que le professionnel puisse l'organiser avec un ami et y
prendre du plaisir.
Ensuite, les organisateurs peuvent se professionnaliser dans
la musique dans son aspect collectif. Là encore, le statut
d'intermittent peut offrir un cadre dans ce métier pour ceux qui le
choisissent. Je n'en ai pas rencontré. En renvanche, j'ai pu rencontrer
des salariés d'associations organisatrices de fêtes techno qui
bénéficient de l'intervention de l'Etat-Providence. Vivre de sa
passion ne la transforme-t-elle pas en travail ? Les conditions de travail sont
à prendre en considération pour connaître une telle
évolution. Il semblerait que non car tout deux ne se sont pas plaints de
leur conditions de travail et en particulier Tristan dont les tâches
peuvent être effectuées de manière plus souple. Leur emploi
n'est pas règlé par le temps comme un temps de travail, il s'agit
de tâches à accomplir. Quant à Julien sa profession s'est
construite dans un rapport pemanent à sa vie sociale92. Rien
n'empêche d'ailleurs l'organisateur professionnel de travailler et
d'avoir en dehors de ce temps une pratique de loisir entre amis où il
organise des soirées techno.
Durant l'entretien, Julien a exprimé le plaisir
vécu à vivre de sa passion, de produire ses oeuvres et celles de
personnes qu'il apprécie. Il a aussi exprimé les
difficultés que son métier occasionnent et du dénigrement
de certains amateurs de musique lui reprochant justement le fait qu'il puisse
vivre de sa passion.
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