Chapitre III
Considérations générales sur la
pêche traditionnelle en Haïti
3-1- La pêche traditionnelle en Haïti :
Aspect historique et culturel
En Haïti, autrefois et aujourd'hui encore, les hommes ont
pêché de manière traditionnelle. La pêche
traditionnelle, par ses aspects historique et culturel, n'est pas tout à
fait différente de celle des autres pays de la caraïbe. Car, les
périodes de son avènement sont presque identiques. D'autant
plus qu'on utilise quasiment les mêmes matériels dans la
pêche traditionnelle avec une variation peu remarquée et qui est
relative à la culture des différents peuples. De même en
Haïti, les conditions de pratiquer la pêche traditionnelle sont
identiques partout dans les différentes régions du pays. Sur
toutes les côtes, on dispose les mêmes types de matériels
et référents culturels avec quelques nuances.
Dans ce chapitre la pêche traditionnelle sera
abordée du point de vue historique et culturel.
3.1.1- Aspect historique de la pêche
traditionnelle en Haïti
L'histoire de la pêche en Haïti remonte à
l'époque précolombienne. Certes, aucune étude
complète sur la culture originaire d'hispagniola à
l'arrivée des Européens n'est disponible, cependant quelques
descriptions faites par Christophe Colomb, Las Casas, Oviedo et Navarette
Martur permettent de voir qu'il y avait une culture de la pêche sur
l'île.
Les Taïnos ou les Arawaks étaient pour la plupart
des pécheurs. Ils vivaient et pratiquaient la pêche, la chasse et
l'agriculture prés de la mer et des fleuves. Ils se servaient de canots
de bois fouillés et des pirogues.
Les vestiges archéologiques montrent que les indiens
utilisaient des pesons de filets de pêche. Ils sont faits de pierres
plates métamorphiques généralement de formes
élitiques trouvées sur les plages. Leurs dimensions varient de 3
à 15 centimètres de long. Une entaille est faite sur le bord de
chaque côte au milieu de la pierre. Les petites pierres étaient
employées pour les petits filets circulaires, tandis que les plus
grosses étaient employées pour lester les filets mesurant des
centaines de mettre de long ou plus.
Jusqu'à aujourd'hui les pécheurs haïtiens
se servent de grosses pierres, qu'ils attachent souvent deux par deux, pour
lester leurs longs filets. Les pierres se révèlent
adéquates pour retenir au fond sablonneux entre les récifs.
Les colonisateurs Espagnols qui arrivaient sur l'île
vers le XVe et XVIe siècle, et venaient peu après
l'arrivée de Colomb ont condamné les Indiens à des travaux
surhumains qui les conduisaient à la mort ; et vers 1590, les
Indiens devaient être remplacés par les des africains dans de
réels travaux forcés.
Les Français s'établissaient dans la partie
occidentale Hispaniola vers 1625 et les espagnols se confinaient dans la partie
orientale (aujourd'hui République Dominicaine) de l'île.
Des pirates français et anglais venus des plus petites
îles situées plus à l'est, s'établirent dans
l'île de la Tortue et dans presque toutes les villes
côtières du pays. Les occupants français ou flibustiers qui
en se fixant sur la terre ferme deviennent des boucaniers et des habitants. Ce
sont ces derniers qui sont devenus des pécheurs dans la colonie de Saint
Domingue. Avec leur connaissance de la mer, dès leur arrivée sur
l'île ils commencent à pêcher dans la mesure des canots ou
des pirogues creusées dans les troncs d'arbres, une pratique
héritée des indiens de l'île.
Les Français intensifiaient la traite des noirs,
initiée par les Espagnols. Entre temps, les flibustiers et boucaniers
qui sont aussi pour la plupart des pêcheurs vivaient en bon termes :
les flibustiers donnaient des fusils et des objets pillés aux bateaux,
en échange de poissons, viandes fumées et de peau. Cette forme
d'échange est connue sous le nom de matelotage.
Aujourd'hui les pêcheurs haïtiens se servent des
pesons de filets de pêche du temps des Taïnos ou des Arawaks, pour
retenir leurs sennes au fond de la mer et la pêche reste encore
traditionnelle. Il est vrai, à la fin du XXème
siècle que la pêche traditionnelle connaisse une certaine
transformation avec l'introduction de pirogues à moteurs sur plusieurs
côtes du pays et certaines organisations et des coopératives de
pêche dans quelques zones du département de l'Ouest et dans la
Grand'Anse.
Maintenant, l'existence de la pêche traditionnelle est
incertaine. Cet avenir sombre résulte de l'abandon de cette
activité au profit des usines de la sous-traitance .De plus, les
exigences de la modernité réclament l'abandon des traditions
irrationnelles.
3.1.2- Aspect culturel de la pêche traditionnelle en
Haïti
La Pêche Traditionnelle en Haïti est une vieille
pratique, puisque nous avons déjà indiqué que les indiens
qui étaient les premiers habitants de cette île la pratiquaient.
Les Africains, surtout les arabes, les Congos, les monoïques, les
Bambaras, les nègres du Mozambique, les Ibos, les nègres
Dahomey, d'Urba étaient des hommes transplantés d'Afrique
à Saint Domingue comme esclaves avaient leurs traditions et cultures se
rapportant á la pratique de la pêche.
La transmission de la connaissance de la pêche
traditionnelle se fait de manière orale. Les initiés à la
pratique de la pêche deviennent pêcheurs après avoir appris
à pêcher, comme on apprend tout autre métier. Le pays par
son histoire s'est trouvé à la jonction de trois courants
culturels : le courant Amérindien, le courant Européen et le
courant négro-Africain. Dans la communauté des pêcheurs
l'influence négro-africaine fut prépondérante et continue
de marquer profondément la réalité de la pêche dans
le quotidien. En d'autres termes, la transmission du savoir de la pêche
se repose sur l'observation de la pratique des anciens. En
général, les pêcheurs ne pêchent pas
précisément par goût pour la pêche ; ils font un
métier qui leur parait plus abordable en raison de la
réalité de la zone où ils habitent.
En Haïti il n'y a pas de tradition qui veut
qu'un enfant soit pêcheur par héritage familial. Mais il arrive
souvent que dans la famille que l'on compte au moins un pêcheur.
Cependant, la tradition reste et demeure : l'homme ira à la
pêche et la femme s'occupera toujours de la vente des poissons.
La vie courante des pêcheurs est étroitement
liée à la religion et aux croyances traditionnelles. Le vodou
continue à servir de base religieuse et culturelle dans la relation des
pêcheurs à la mer. Ils accomplissent des rites consacrés
aux maîtres des eaux à des dieux du Vodou en pratiquant la
pêche.
Les pratiques de la pêche traditionnelle de la
pêche haïtienne et les rites qui les accompagnent remontent á
l'époque indienne .La colonisation, notamment l'arrivée des
africains y introduit les croyances et les rites Africaines. Au XIXe et au XXe
siècle, les pratiques connaissent une certaine modernisation ou d'une
part et d'autre part on observe une tendance á l'abandon de cette
activité. Que dire de la pêche traditionnelle dans la commune de
Gressier.
La pêche traditionnelle a toujours été
depuis longtemps l'une des activités économiques les plus
importantes de la commune de Gressier .Elle a sa forme d'organisation et ses
caractéristiques propres.
Elle s'accompagne d'un ensemble de pratiques vodouesques et de
croyances afro-haïtiennes. Ce chapitre faisant le point sur la pêche
traditionnelle à Gressier et comprend cinq parties :
a) Caractéristiques et typologie de
la pêche traditionnelle à Gressier
b) Description des différents matériels
utilisés dans la pêche traditionnelle à Gressier
c) Pratiques vodouesques et croyances Afro-haitiennes dans la
pêche traditionnelle à Gressier
d ) Les croyances Afro-haitiennes dans la pêche
traditionnelle a Gressier
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